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Textes courts ou longs, pensées, aphorismes…

Les textes que vous trouvez ci-après sont quelques vieilleries dénichées au fond de certains de mes tiroirs, morceaux de papier griffonnés sur le coin d’une table et ayant inexplicablement réussis à se soustraire à de régulières et souvent rageuses mises à la poubelle. Des mots qui remontent aux temps où l’archivage par blog interposé n’existait pas. Aujourd’hui la vie desdits morceaux de papier griffonnés est plus simple car parfaitement binaire : ils finissent à la poubelle, ou bien, après que leurs contenus en ont été prélevés et déposés sur un blog et dans une rubrique ad hoc, ils finissent à la poubelle aussi. Aussi vous retrouvez ma production « au jour le jour » la plus récente dans cette rubrique …

Quant aux vieilleries, donc :

  • De la province (quand un parisien confond la province avec les vacances)

 


 

Ecrire vrai

Ne pas faire de style. Surtout ne pas faire de style. Et ne pas tenter de ressembler à. Ni à  faire comme ou à la manière de. Ne pas écrire comme il se fait d’écrire aujourd’hui. Se souvenir qu’il n’y a pas de bonnes ou de mauvaises manières. Il ne s’agit que de soi.

Donc ne pas penser au lecteur. Pas trop.

Ecrire et puis entendre sa voix. La chercher. S’écouter et ne pas se censurer… Non, ne pas s’écouter justement, seulement lâcher les mots et les projeter là, en dehors de soi. Ne se soucier de rien. De rien d’autre que d’écrire vrai.

Comprendre ce que cela signifie, écrire vrai.

Ne pas faire des ronds de jambes. Ne pas faire des phrases comme on enfilerait des mots pour faire un joli collier à sa jolie maman. Ecrire vraiment.

Ecrire. Tout simplement, écrire. Et cesser d’écrire comme si quelqu’un lisait par-dessus mon épaule.

 

27 mars 2006

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Ecrire et être

Bientôt sept ans que j’ai tourné la page. Tourné le dos à tout. Non, pas tout à fait tout. Juste un bon boulot et qui payait bien. Une certaine idée qu’on peut se faire de la réussite, cette illusion que je n’avais pas d’une utilité sociale. Tourner le dos à cela, c’était la partie la plus facile, une évidence en même temps qu’une nécessité. Mais d’abord une évidence.

Je n’ai renoncé à rien. Il n’y avait pas pour moi d’autre chemin. Créer et être. Etre enfin. Vivre. Ne plus passer le temps à faire semblant, semblant de croire qu’on pourra tromper la mort – c’est elle qui nous baise à la fin, de toutes les façons. Ne plus laisser passer le temps, donc, et vivre. Faire face. Ecrire…

Besoin d’écrire ou envie seulement ? Qu’importe, besoin d’exister vraiment. Ecrire était le seul moyen. Je n’ai renoncé à rien et je me suis mis à écrire.

Sept ans, et j’ai écrit quoi ? Quelques centaines pages. De la poudre aux yeux, un écran de fumée. J’ai écrit et je n’ai rien dit. Des mots, et puis des mots, et puis des mots. Rien. Du vent. Je suis absent, pas là, caché bien à l’abri de toutes les phrases creuses que je fais pour m’y dissimuler, ne surtout pas paraître. Et de ce point de vue, c’est une réussite : je ne m’y reconnais pas. Des creux et du vide autour. Je n’y suis pas, ne suis pas plus avancé que quand je perdais honnêtement ma vie. Je n’ai pas fait face et j’ai continué de biaiser. Encore et encore. Et encore.

J’avais dit : « je veux raconter des histoires », c’était un leurre. Ce que je veux avant tout, c’est parler de moi, c’est être à l’intérieur de mes mots. Etre révélé par les mots qui me viennent et être révélé d’abord à moi-même.

Pouvoir mettre mes tripes sur la table et y mettre le feu, être capable de cela. Me lâcher et décoller un peu. Ouvrir les yeux. Plonger à pleines mains dans mes entrailles noires, touiller et toucher un peu ce qui me ronge et me rend aveugle à moi-même. Faire face et ouvrir les yeux. Ecrire pour tenter d’y voir juste un peu plus clair et comprendre pourquoi on continue malgré tout, cette errance aveugle parmi ce rien qui est partout, en nous et autour, ce rien que l’on respire et qui nous étouffe.

La vie, cet abîme autour de nous et qui nous aspire…

La vérité est que j’ai le vertige et que je refuse de voir. Je ne cherche en réalité qu’à ignorer que je tombe. Trop dangereux, se lâcher. Mourir cramponné à l’illusion qu’on ne tombe pas. Faire des mots qui n’en sont pas. Des mots, des mots, rien que des mots encore et toujours. Pourtant, écrire…

Ecrire afin que chaque phrase soit une part de moi que je déshabille. Ecrire jusqu’à être nu. Nu et puis libre. On verrait bien alors si je pèse plus lourd que du vent. Ce simple amas de poussières et qui y retourne.

Il faudrait n’écrire d’abord que pour soi. Ne pas chercher à plaire. Effacer des mots ce sourire qui ne cherche qu’à séduire, cet éternel sourire de l’être qui a faim d’être aimé et n’est jamais rassasié de ça.

Seulement cela, écrire.

 

29 mars 2006

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Ecrire à hauteur de soi

J’ai commencé par une nouvelle, comme tous les écrivaillons, ou beaucoup d’entre eux. Comme on fait quand on pense en avoir fini avec les petits poèmes adolescents et leurs relents néo-pubères.

Une nouvelle, parce que ça semble plus simple, et aussi parce qu’on s’imagine qu’il sera moins douloureux de mettre dix pages au panier plutôt que trois cents. L’impression que cela fera moins mal. Ce n’est pas vrai, on y met autant d’orgueil et il suffit d’une demi-page pour comprendre comme il est difficile de se confronter à ses propres insuffisances, ses propres incapacités, savoir qu’on n’a rien produit qui puisse prétendre à davantage qu’à ce grand catalogue des médiocrités dont on tire de médiocres livres. Toutes ces merdes auxquelles on passe un ruban et qui s’exposent sans pudeur sur les présentoirs prétentieux des librairies de France.

Ce n’est pas pour cela qu’on écrit. On voudrait bien que cela ne fut pas pour ce résultat trivial, trop éloigné des ambitions supérieures de l’artiste qu’on prétend être ou devenir – mais je ne crois pas qu’on puisse devenir artiste, pas en tout cas comme on devient boulanger, à force de travail et d’abnégation ; il y a autre chose, mais quoi ?

Certes, le ruban est utile. C’est tout de même qu’il faut bien vendre un peu, être lu. A quoi bon écrire sinon. Exposer son cul, seul dans l’obscurité d’une pièce aveugle, ce n’est pas pour cela qu’on écrit. Pourtant, le tintement de la monnaie dans l’escarcelle, trace tangible et certainement pas vulgaire laissée là par un lecteur qu’on ne voit ni n’entend, ce n’est pas non plus ce après quoi l’on soupire.

*

Exposer son cul. Ce besoin qu’on a de s’exprimer. Dire et être entendu. Ecrire et être lu. Etre sincère et séduire. Vendre mais sans faire du commerce. Ne pas chercher à plaire, mais plaire quand même.

On ne montre pas son cul pour que celui qui le regarde le trouve beau et se mette à bander. Il faut néanmoins qu’il soit présentable, visible et regardé pour qu’on puisse justifier de le montrer. Etre lu pour justifier que l’on écrive. Et donner un peu de plaisir aussi, pour justifier que l’on existe.

C’est donc un miroir que l’on espère. Toute la différence entre le strip-tease et l’exhibition : le plaisir de l’autre, dans un cas comme une finalité, dans l’autre comme un simple hommage. Un écrivain est un exhibitionniste, pas une strip-teaseuse. Il ne s’agit pas pour lui de plaire, il ne s’agit pas d’abord de cela, ni surtout des artifices dont il faudrait user pour y parvenir, s’assurer que l’on va pouvoir vendre beaucoup.

*

Au début, c’était facile. Les idées venaient à moi sans qu’il me fut besoin de les appeler. Je n’avais qu’à poser les mots, les ordonner et hop ! une nouvelle. Et puis une autre. Et bientôt six qui firent un recueil. Un peu trop longues ? Pas grave, il n’y a qu’à dire que ce sont des récits. Un recueil de récits, voilà.

De la merde ? En réalité, même pas. Pas si mauvais pour un début. De sympathiques petites histoires. Pas beaucoup d’humour certes, mais un peu quand même. Pas vraiment écrites avec les tripes mais bon, quelques moments d’émotion à l’occasion. Qui leur tireront bien une larme ou deux. Des mots, des phrases, un livre donc.

La potentialité d’un livre comme il y en existe des milliers et en moi, rien. Sensation de rien. De la poudre aux yeux, des paillettes, du vent. Je n’y étais pas. Je n’avais rien donné qui m’appartienne, un peu de bile tout au plus. Même pas mal. J’étais encore debout, coincé dans mon douillet petit cocon qui deviendrait aussi mon cercueil. J’avais tombé la cravate, et puis quoi ? Et aujourd’hui encore, quoi ? Toujours ce putain de noeud autour de mon cou trop large, ce noeud bien serré et qui m’empêche de gueuler comme un porc. Allez, un petit effort mon garçon, laisse-toi donc égorger. Qu’on voie enfin tes tripes.

Sept ans et j’ai tout gardé à l’intérieur. Sage petit bonhomme.

*

Bon, tout de même, envoyons ça aux éditeurs. En reçoivent des paquets de cette bouillie sans odeur ni saveur. En publient même puisque ça se vend pour peu que l’emballage… Pourquoi d’ailleurs feraient-ils la fine bouche ? Sont pas là pour faire des entrechats, après tout.

Pas d’angoisse en tout cas. Un refus ne signifiait pas que c’était mauvais, simplement que ce n’était pas génial. Ça, merci, je le savais. Me déplairait pas moi, pourtant, de pondre un truc génial. Même trois lignes. Faudrait que ça me fasse mal comme de s’arracher lentement une oreille. J’y suis prêt. On ne crée pas à partir de rien. Il faut donner de soi. L’art…

Mais je ne vais pas me mettre à disserter sur l’art. Tout le monde s’en fout. Moi en tout cas je m’en fous. Je ne sais pas ce que c’est, l’Art. Ne veux surtout pas le savoir. Je ne suis pas à la recherche d’une expression ni d’une reconnaissance artistique. Je ne cherche qu’à dire et raconter, créer pour cesser de vivre et enfin exister, créer à partir de moi pour être et cesser de mourir connement comme un lapin au milieu de la route qui crève en regardant les camions lui passer dessus et les compte : un deux trois me casse les noix, quatre cinq six chaire à saucisse…

Enlever la peau, fouiller dans les chairs à mains nues et mettre le tout sur la table. Pousser les mauvais morceaux en avant, ceux qui sentent le plus fort. Parce qu’il s’agit que ça pue pour que ça vaille un peu la peine. Il s’agit de sortir sa merde et en faire de la dentelle. C’est ça l’inspiration, se nourrir de sa propre matière fécale. Et écrire, finalement, ce n’est que vomir avec un peu d’élégance.

N’en suis pas là. Ne sais pas comment m’y prendre, pour entrouvrir les vannes. Laisser couler un petit filet. Et j’observe avec grand intérêt ce qui sort des autres, mes contemporains. Pas grand-chose le plus souvent. Aucun souffle de vie, ou de mort. Aucun souffle du tout. Quelques malheureuses petites pages et imprimées en gros caractères pour que ce soit plus facile à lire, des phrases creusent et qui se la racontent. Des petites histoires de cul avec des gros mots. Pas de vulgarité surtout, juste un petit peu de soufre pour que ça hume moderne. C’est le parfum contenu du scandale qu’on y trouve, rien d’autre. Le must en ce moment : des femmes qui parlent de leurs culs en faisant des phrases courtes, un langage cru, pas plus de cent cinquante pages. Un bon produit marketing.

Pourquoi pas, d’ailleurs. Mais parmi ceux-là, combien d’écrivains ? Ils disent un peu, ils expriment un peu, ils racontent un peu, mais ils n’écrivent pas. Les mots sont posés sur le papier, en ordre, proprement, savamment même pour certains et tiens, ce serait presque joli, mais on n’y voit pas leur âme, ou la nôtre qui s’y reflèterait, ou une âme, n’importe laquelle. Leurs livres ne sont pas écrits et n’en sont pas, seulement un peu de papier et puis de l’encre.

L’écriture, c’est ce petit truc en plus qui d’un livre fait un livre vrai, la différence qu’il y a entre faire l’amour gentiment à sa femme et une bonne grosse baise avec une inconnue – ou quand on réalise que sa femme est aussi cette inconnue. Ecrire c’est tremper sa plume jusqu’aux entrailles et continuer à bouger le cul même quand vient la douleur. Cent fois, mettre l’autre cul par-dessus tête, et puis le laisser pour mort. C’est cela que fait un livre vrai à son lecteur : il le baise, le fait jouir et puis le fait mourir. Un bon petit bouquin, c’est de la branlette, c’est agréable, ça ne fait de mal à personne, merci et au revoir. Après vous êtes le même qu’avant, juste un petit peu plus proche de la mort. Mais on ne s’est pas ennuyé et c’est toujours ça de pris sur le non-être. Oui, sans doute, et puis quoi ? Et puis quoi quand une oeuvre vraie vous bouleverse et vous permet d’accéder à un peu d’éternité ?

*

Apprendre l’humilité et seulement écrire avec ce qu’on a. Ne pas renoncer, avoir beaucoup d’ambition, mais savoir mesurer chichement ses prétentions. Viser un peu au-dessus du commun et tenter d’ignorer qu’on ne s’élèvera pas si haut que ceux dont on aime les livres et qui sont les seuls vrais écrivains.

*

Oui, parvenir à hauteur de soi, ce serait déjà beaucoup.

 

10 avril 2006

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Monologue Vaginal

Ce n’est pas grand-chose pourtant. Un vagin.

Presque rien, un vide sidéral entre les parois humides d’une grotte sombre. Une excavation improbable et creusée dans les chairs. Des plis et des replis… et des replis encore. Des chairs dentelées, bistrées, qui abritent, renferment et libèrent la fragrance obsédante et chaude des sucs – perles qui suintent lentement dans l’intérieur secret de ce puits profond de chair, de sueur et de sang.

Un peu plus que rien en vérité. Loin toutefois de l’idée magnifiée qu’on s’en fait, cette idole qu’on adore et qu’on craint.

*

Un trou noir. Un puits gravitationnel infiniment profond creusé dans l’espace-temps du corps de la femme. Un trou noir qui délimite un en deça et un au-delà du vagin, qui trace la frontière entre deux univers qui s’ignorent.

A l’extérieur, le monde des petits oiseaux, des fleurs et des violons, l’univers des sentiments onctueux et des paroles d’amour murmurées – et le reste aussi : les amitiés viriles, le sport, les concerts de rock, la télévision, la politique, les guerres et les dîners en ville, Dieu et la philosophie, toutes ces choses passionnantes qu’on appelle la vie, quand on veut ignorer la mort. Un univers confortable où chaque pensée trouve une place où se vautrer mollement et s’épanouir. Un monde où l’on peut se croire éternel.

Mais le vagin, son intérieur, on y pénètre une fois pour n’en plus jamais sortir. Il se produit à ce point que l’on n’ose franchir qu’avec frayeur, une puissante et totale accrétion de l’esprit où toute pensée se retrouve irrémédiablement aspirée dans une autre dimension, un univers vaginocentré d’où l’on ne revient pas. Improbable et définitif retour vers l’origine de soi. Sauf qu’il ne s’agit pas d’être, cette fois, mais d’avoir, de posséder afin de comprendre les raisons profondes de soi. Aller au fond des choses, comme on dit.

On n’y arrive pas. Il n’y a pas de fond et on s’enfonce. On s’enfonce et c’est exténuant. Et on s’enfonce toujours plus profondément, précédé toujours par le même espoir dément de trouver… quoi ? On ne sait pas même ce qu’on cherche. Bien plus à coup sûr que l’éphémère et morne apaisement que procure l’orgasme.

*

S’aventurer dans un vagin, s’y aventurer véritablement, corps et âme, c’est tenter la seule expérience eschatologique qui soit. Car c’est bien le divin qu’on cherche au fond des vagins, plus que ce misérable frisson qu’on y trouve, victoire triste quand on comprend l’espace d’un instant qu’il n’y a pas de réponse, que notre quête est vaine et que Dieu est mort – probablement étouffé entre les cuisses d’une femme, cette femme qu’un jour d’ennui, Lui aussi aura voulu prendre, et prendre son vagin.

L’éclair de lucidité ne persiste pas et l’on oublie qu’il n’est pas d’espoir possible. On y retourne. Toujours on y retourne, au fond des vagins, et insidieusement le désir se transforme en besoin, se confond avec lui. Il ne reste plus là de désir véritable, que le besoin de trouver et de comprendre ce que l’on cherche, le besoin d’exister vraiment, c’est-à-dire toujours. Alors on s’enfonce encore davantage, frénétiquement, désespérément, rageusement, et toujours plus loin au fond de ce trou noir et vide, ce misérable puits d’antimatière creusé au coeur d’une oasis située dans le vaste désert de la misère existentielle des hommes. Et quand enfin on croit toucher au but, ce n’était qu’un mirage évidemment, l’image trompeuse d’une terre d’abondance donnée comme en pâture à l’espoir des désespérés. Il n’y a rien au fond de ce puits sans fond, rien d’autre que la vaste mystification des vagins.

*

L’instinct, il n’existe rien d’autre. C’est l’instinct qui nous pousse et dont on ne peut jamais s’affranchir tout à fait. On pourra glorifier le désir et chanter l’amour, il nous faut bien nous reproduire et nous sommes programmés pour mettre nos bites dans leurs cons et nous reproduire. La conscience n’y fait rien et la poésie non plus : il faut qu’on les bourre comme il leur faut être bourrées. L’espèce n’a d’autre but sensé que sa propre perpétuation et, à la fin donc, il n’est de vagin comblé que gravide.

Il n’est qu’à observer leur humeur quand vient la période des menstrues. Un sang noir coule entre leurs cuisses et les rend aigres, humeur mauvaise qui n’est rien d’autre en vérité que l’instinct qui parle, vomissant une bile amère. Dépit de l’opportunité qui a passé, amertume de l’ovule qui n’a pas réalisé son lot, elles en ont mal dans le ventre. Dégoulinantes d’acrimonie, elles vous traiteraient d’incapables pour ne les avoir pas fécondées.

Mais cela non plus ne dure pas et le sang coule aussi pour faire table rase. La nature n’abdique pas. Une nouvelle occasion se présente bientôt qu’il leur faut saisir. A tout prix. C’est une question de survie, la survie de l’espèce, et les hormones se remettent à l’ouvrage. Un prurit grandit entre leurs cuisses qu’il leur faut soulager et elles se souviennent de nous, leurs hommes incapables. Ça les démange, elles mouillent leurs lèvres, font la lippe, ondulent des hanches et venez par ici mes mignons, qu’elles font, mais ce n’est qu’à notre semence qu’elles en veulent. A quoi d’autre ? Pour l’obtenir, elles savent user de leurs corps, de nos yeux sur leur corps, à la perfection, pour nous attirer à elles et en elles.

Nymphes ou viragos, vestales ou ribaudes, elles connaissent les secrets pour nous amener à leur vagin et obtenir nos gamètes. Le sourire se fait onctueux, le regard s’alanguit, et leur visage tout entier se maquille de douceur et de tendresse. Elles savent combien leur apparente vulnérabilité nous rassure. Le charme, la sensualité et la fragilité, afin qu’on ne se méfie pas, et leurs lèvres purpurines… mais pas seulement, c’est de tout elle que le désir transpire, qu’il est suscité, espéré, commandé, jusque dans l’irrésistible perfection de leurs nuques, la profondeur cotonneuse et troublante de leurs ventres, et puis…

Et puis, touche assassine, la parfaite illusion du vagin. Secret, mystérieux, forcément idéalisé, vulve en avant comme un masque, et la toison comme un masque devant le masque. On ne saurait résister à cela, au galbe délicat du mont de Vénus, à l’abricot velouté qui s’y abrite, chair tendre et délicate, sapide, et la saignée qui s’ouvre en son milieu, et le capuchon délicat qui émerge à peine, qui point, timide, comme n’osant révéler son diamant. On écarte légèrement, on soulève avec précaution, on le découvre. Petit bouton craintif et intumescent, lisse, attendrissant du haut de sa frêle érection. Fascinant petit bouton de chair.

On ne se méfie pas. Tant de beauté, tant de pudeur aussi, et d’innocence, croit-on, quand les hommes sont armés jusqu’aux dents, bardés de leur orgueil dément, muscles saillants et membre turgescent – si fier celui-là de son pouvoir perforant. Pourquoi se méfierait-on ? C’est sexe fort contre sexe faible, du plein contre du vide. L’issue du coït est certaine. C’est ce qu’il semble en effet, tant qu’on n’y est pas.

On ne se méfie pas. On pose la pulpe d’un doigt au bord d’une merveille qui nous espère. On y va doucement, conquérant, sûr de son fait. On est surpris, toutefois, de ne sentir aucune résistance. Au contraire, un frisson survient et il glisse plus avant, le doigt, comme aspiré. On est fier alors de l’effet qu’on fait. On se dit : « La gourmande ! », et sans qu’on n’y ait pris garde, ils sont deux maintenant, deux doigts engloutis par les chairs. On sait s’y prendre, se dit-on, fièrement encore. On devine sans mal qu’un troisième appendice – puis un quatrième, pourquoi pas ? – sera tout aussi galamment accueilli. Réclamé même, si l’on tarde trop. On obtempère bien sûr, on obtempère toujours. Il faut rester dans le rythme, comprendre la cadence. Et il est trop tard quand le doute s’installe.

Il y a plus de vide qu’on pensait, plus qu’on ne pourra jamais en combler. Ce vagin se révèle bouche affamée et insatiable. Encore, encore et encore, fait-il. Ce n’est jamais assez. On n’aura pas assez de nous-même pour le nourrir. Les sucs abondent, deviennent spumeux et, du fond de ce vagin-là, il semble maintenant que ce sont tous les vagins du monde qui crient famine, toutes les femmes et tous leurs vagins.

Elle semblait s’offrir tout à l’heure, elle exige désormais. Qu’on la satisfasse ! Mais il n’y a plus en nous que le doute qui grandit.

On ne comblera rien. on sait qu’on ne comblera rien. On fait ce qu’on peut, on se débat, on fait le mâle encore un peu. Il s’agit de sauvegarder de sa virilité. Alors on bouge, on se démène, on essaye d’être partout à la fois. Et puis on lâche le peu qu’on a à donner, et qu’elles nous arrachent avec mépris.

Le sexe faible ? Une imposture. Leurs sexes sont des sirènes aux manières cauteleuses dont les charmes ne sont que cruautés dissimulées. Sournoises gorgones jamais rassasiées et qui changent nos bites en pierre et les usent et les érodent, et les vident de leurs substances vitales pour s’en nourrir et nous faire mourir. Le vagin, avouons-le, un peu plus que rien, un peu plus même qu’un trou.

un texte extrait des rush de Lulli, un roman à découvrir sur ce site.

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Madame et son taureau

Madame, il fut un temps où vous aviez vingt ans et saviez prendre le taureau par les cornes et les hommes par la queue. Aujourd’hui, je connais bien des taureaux que vous prenez par la queue et du coup c’est votre mari qui porte des cornes. La quarantaine vous va bien.

 

15 novembre 2005

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Lubri-cité

Entendu ce matin, dans un café à Ménilmontant :
– Nous vivons une époque vachement lubrique.
– Ha oui ? Tu m’en diras tant.
– Oui. Tu vois, même les téléphones mobiles.
– Hein ?… Sans fil, tu veux dire.
– Quoi ?
– Même les téléphones s’enfilent.
– Bah ouais, c’est pareil. Un portable, quoi.

Délicieux. Ne pas sourire. Ne rien ajouter.
Et aimer son prochain. Simplement ça.

 

22 novembre 2005

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Attention, seins méchants !

Elle avait une poitrine opulente, deux merveilles de soie. Alors j’ai plongé, supposant avec grand tort que la profondeur de ses mamelles pouvait présager d’un grand coeur. Mais voilà, chez elle, contrairement à l’idée reçue, abondance mammaire et générosité ne faisaient pas bon ménage, et j’ai réalisé trop tard qu’un coeur n’avait aucune chance de s’être épanoui là, comprimé qu’il était par une poitrine qui occupait en vérité bien davantage que cet espace imposant en avant d’elle. Elle vous aurait étouffé avec plutôt que de vous autoriser un accès vers son intérieur palpitant. J’y ai survécu et je peux aujourd’hui témoigner qu’il est des rencontres qui forgent vos goûts plus sûrement que l’image fantasmée d’une mère et le souvenir inconscient des moments délicieux où, le visage enfoui dans le moelleux du sein maternel, un téton à portée de succion et un rot en attente, on touchait en cet endroit au paradis. D’aucuns soupireront toute une vie après ce bien-être infantile, je suis quant à moi définitivement revenu de cet amour régressif qu’on a pour les gros seins.

 

29 novembre 2005

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Lard du roman

Un roman, c’est une sorte de vieux sandwich : du réel plus ou moins avarié enfermé entre deux tranches de fiction. Pas toujours facile a digérer.

 

2 décembre 2005

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Histoire vraie ?

Qu’importe après tout qu’une histoire soit vraie, qu’elle ait été vécue dans le monde réel, pourvu qu’elle existe et que quelqu’un la raconte, et pourvu qu’une seule personne puisse l’entendre et s’y reconnaître, ou simplement s’y sentir bien.

 

2 décembre 2005

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Ode au petit Nicolas

(couplet)
quand la France chie du mépris et de l’exclusion
quand elle vomit sa peur dans les ghettos
c’est Sarkosy qui tire la chasse
c’est Sarkosy qui tire la chasse d’eau
quand la République pisse au karcher sur la Nation
quand elle dégueule sa haine du bicot
c’est Sarkosy qui tire la chasse
c’est Sarkosy qui tire la chasse d’eau

(refrain)
c’est pas la peine d’avoir Le Pen
y a Sarko qui fait tout le boulot
c’est pas la peine d’avoir le gros Jean-Marie
grimpé sur son dos y a le p’tit Sarkosy

 

4 décembre 2005

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De la Province

Souvent on parle de « la qualité de vie » qu’on trouve en province. Et il est bien vrai, je le constate avec étonnement chaque fois qu’il m’arrive de sortir de Paris et d’aller passer quelques temps en Province (Où ça ? Vous savez, la province : cet Ailleurs indéfini et qui n’est pas Paris…), soudain voilà qu’on n’est pas pressé et que pour chaque chose que l’on fait il devient possible de prendre son temps. On va acheter une baguette et on peut s’autoriser vingt minutes avec la boulangère, puisqu’on n’a pas grand chose à faire après, sinon s’en jeter un ou deux au comptoir. On est à ce point peu pressé en réalité qu’au fil des heures et des jours qui passent, et qui passent au bout du compte avec une lenteur extrême, on cherche le moyen d’en perdre un peu tout de même, du temps, afin qu’il finisse par véritablement donner le sentiment de passer. Et bien souvent, au bout du compte, faut avouer, on s’emmerde.

Mais bien heureusement, la Province est un endroit qui n’existe pas, un ailleurs qui n’est jamais ici mais toujours là-bas ; et la « provincialité » est un art de vivre peu que l’on cultive aussi bien à Paris que partout.

Ouf !

 

12 décembre 2005

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Discrimination positive

Mieux vaut Tahar que Djamel.

 

17 décembre 2005

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Léon et Léa

1

Cela faisait longtemps que Léon venait dans le jardin d’enfants. Il y venait tous les jours. C’était un très vieux monsieur, il avait au moins cent ans. Il avait de gros sourcils tout blancs, comme ses cheveux – mais il n’en avait plus beaucoup. Son visage et ses mains étaient toutes froissées et il marchait très doucement en s’appuyant sur une canne.

2

Léon aimait beaucoup venir dans le jardin d’enfants. Il regardait les enfants jouer, faire des châteaux de sable dans le bac à sable, glisser sur le toboggan jaune et vert, se balancer sur les balançoires et taper dans des ballons de toutes les couleurs. Les enfants criaient et riaient beaucoup, et Léon souriait. Et quant un enfant tombait et pleurait, Léon avait un peu mal pour lui.

3

Alors ce n’était pas tellement grave qu’aucun enfant, jamais, ne vienne lui parler ou lui dire bonjour. Léon était tout seul, assis sur son banc, mais il n’était pas triste. Il savait bien qu’un très vieux monsieur, ça fait toujours un petit peu peur aux enfants. Et peut-être même que certains d’entre eux pensaient qu’il était un ogre ou un monstre. Il ne leur en voulait pas. Ce n’était pas bien grave.

4

Un jour, Léon vit entrer dans le jardin une petite fille qu’il n’avait jamais vu auparavant. Elle avait une robe jaune avec de grosses fleurs vertes, et des chaussures violettes. Ses yeux étaient tout rond et tout noir, et ses cheveux, noir aussi, étaient attachés avec un chouchou rose au dessus de sa tête. Comme elle mangeait un pain au chocolat, on aurait dit qu’elle avait mis du rouge à lèvre marron.

5

Pour finir son goûter, elle est venue s’asseoir sur le banc, à côté de Léon. Elle avait un très beau sourire, mais le vieux monsieur n’osait pas lui parler. Il ne voulait surtout pas lui faire peur. Et c’est alors que quelque chose d’extraordinaire se produisit. La petite fille se tourna vers Léon et, comme si elle le connaissait depuis toujours, lui dit :
– Bonjour, tu veux un peu de mon pain au chocolat ? Tu vas voir, il est délicieux.
Et, avant qu’il ne lui réponde, elle coupa une moitié de la moitié de pain au chocolat qui lui restait et lui tendit :
– Tiens. Comment tu t’appelles ? Moi je m’appelle Léa. Moi, je ne connais personne ici.
Léon répondit que merci beaucoup et qu’il s’appelait Léon. Que lui non plus ne connaissait personne, enfin pas vraiment… Il n’en revenait pas, Léon.

6

Léa et Léon devinrent tout de suite très amis. Chaque jour, ils se retrouvaient au jardin où, assis sur leur banc, ils discutaient pendant une heure entière, jusqu’à ce que Léa doive rentrer chez elle. Elle lui posait mille questions et il répondait à toutes car il savait toutes les réponses, Léon… qui n’en revenait toujours pas.

7

Un jour, Léa demanda à son ami Léon :
– Pourquoi as-tu toutes ces cicatrices sur le visage ? Tu as fait la guerre ?
– Ce ne sont pas des cicatrices, répondit Léon en souriant. Ce sont des rides. J’en ai beaucoup parce que je suis très vieux.
– Comment tu les as attrapés ? demanda la petite fille qui voulait toujours tout savoir.
Alors, le vieux monsieur répondit :
– Chacune de ses rides est la trace d’un souvenir, ce sont toutes les choses qui me sont arrivées dans la vie et qui se sont écrites sur mon visage. Regarde bien : il y a des rides qui sont comme un sourire, c’est pour les bons souvenirs. Et celles qui ont l’air de faire la grimace, c’est pour les mauvais.
Là, c’était Léa qui n’en revenait pas.

8

Le lendemain, la fillette proposa à Léon d’aller faire du toboggan.
– Voyons Léa ! s’exclama Léon. Je suis bien trop vieux pour faire une chose pareille.
Mais la petite fille ne voulut rien entendre. Elle traîna le vieux monsieur jusqu’au pied du toboggan. Léon était rouge de confusion. Il avait l’impression que tout le monde le regardait.
– Allez monte, ordonna la petite fille en lui souriant. Je passe devant toi. Tu n’as pas peur quand même ?
– Non, non…
Mais la voix de Léon était soudain devenue toute petite.

9

Léon monta tout en haut du toboggan – et je peux vous dire que cela mis très longtemps. Léa l’attendait. Et quand enfin il arriva, elle s’installa sur ses genoux et compta :
– A la une… A la deux… A la trois !!!
Léon poussa avec ses bras, avec ses jambes, de toutes ses forces, et ils dévalèrent sur la pente plus vite qu’aucun enfant ne l’avait jamais fait. Ils riaient tous les deux aux éclats. Et puis ils recommencèrent aussitôt.

10

Ce qui se passa ensuite est tout à fait incroyable. Pourtant vous pouvez me croire, j’étais là et j’ai tout vu. Soudain, toutes les rides du vieux monsieur – et il en avait au moins un million, Léon – se rangèrent dans le même sens : on avait l’impression que tout son visage était une bouche qui souriait.
Et moi, quand je suis rentré chez moi, je me suis regardé dans la glace et j’ai vu, juste au coin de ma bouche, une toute petite ride qui me souriait. Je n’ai pas pu la regarder très longtemps, parce qu’à ce moment Maman m’a appelée : « Léa, viens manger, s’il te plaît : le dîner est prêt ».

fin

 

23 janvier 2006

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Souvenir d’enfance

Je me souviens de ce médecin, un pédiatre, une femme, que ma mère m’emmenait voir, enfant, quand j’étais malade. Je détestais aller la voir. Elle était vieille et moche. Elle avait les mains froides. Elle sentait mauvais. Surtout, il y avait chaque fois ce moment où elle baissait mon slip et prenait mes couilles entre ses mains pour les soupeser. Pourquoi diable doit-on soupeser les couilles d’un enfant quand il a un rhume – ou même une angine ou une otite ? C’est ce que je me demandais chaque fois. Elle me palpait un testicule et puis l’autre en hochant la tête avec gravité. Ensuite elle me rassurait d’un sourire : tout allait bien. Mais je n’en avais pas douté, moi. C’est à la gorge que j’avais mal. Cette intrusion froide dans mon intimité, ça avait quelque chose d’humiliant, une sorte de négation de ma virilité. Plusieurs fois je me suis retenu de lui pisser dessus.

Depuis, quand une femme prend mes couilles dans ses mains, ça me donne la sensation d’être malade. Elle pourrait aussi bien me demander d’ouvrir la bouche, de tirer la langue et de faire aaaaaah. Merci Docteur, au revoir Docteur. Les autres hommes aiment ça, paraît-il. Chacun vit ses propres expériences et fait avec ses propres souvenirs d’enfance. Moi, ce que j’aime bien, c’est quand au jeu du docteur c’est moi qui joue le rôle du médecin.

 

17 février 2006

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L’Etudiant

J’ai été étudiant jusqu’à mes trente ans.

A la fin, je savais si bien faire l’étudiant qu’on me payait pour le faire.

Et c’était bien.

*

Maintenant, j’apprends à écrire. Et c’est bien aussi.

 

21 février 2006

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Vivre au galop

La vie est un cheval à bascule. On l’enfourche, on tire son épée, on lance sa monture au triple galop et on file à travers le temps. A la fin, quand on comprend qu’on a fait du surplace, on se dit qu’on s’est bien amusé quand même.

Et puis il y a les pisse-froid, qui jouent les importants, trop sérieux pour s’amuser ainsi, comme des enfants. Juchés sur le cheval à bascule de la vie, ils regardent les autres avec hauteur et mépris. Ils bougent les hanches avec mesure et retenue, sans joie. Et quand ils comprennent qu’ils n’ont guère abouti plus loin, il est trop tard et c’est en pleurant qu’ils touchent le sol.

 

28 février 2006

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Tautologie originelle

La quête de paradis artificiels.

Tout est là qui s’exprime avec pudeur, dans ce non-dit qui est dit deux fois.

L’irréductible espérance des hommes.

*

On parle aussi de périssologie.

 

22 mars 2006

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Les jouets de Dieu

Dieu est un enfant capricieux.
Et nous sommes ses jouets. De petits soldats de plomb disposés sur le sol de sa chambre.
Pan ! T’es mort.

Deviendra-t-il adulte un jour ?
Il nous faut l’espérer comme la promesse d’un paradis terrestre.

Mais nous aurons d’abord à traverser avec lui les tourments de ce purgatoire qu’est l’adolescence.
Une période sombre et de nouveaux jeux solitaires dont nous avons beaucoup à craindre.

 

18 avril 2006

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Coup de froid

On est seul…

L’amour est un mirage, sublime et grandiose, une illusion puissante, qui parvient à donner à croire qu’il est possible d’être deux, délicieusement possible de dire nous.

Pour échapper à sa désespérante solitude, l’homme passe sa vie à chercher et poursuivre l’amour. C’est un autre qu’il cherche… Et une chimère qu’il poursuit.

L’amour est une simple saison qui passe en laquelle deux âmes solitaires se frôlent. La mort, un coeur figé par un gel d’hiver et qui a cessé de marteler son cri sourd.

On est seul, toujours. Et on a froid.

La quête de l’amour n’est que prétexte à la nécessité qu’il y a à faire la route à deux, se réchauffer un peu l’un l’autre et penser un peu moins à soi. Croire.

Oui, croire… Et l’amour n’est finalement qu’un Dieu universel, et le couple la religion officielle.

 

3 mai 2006

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Auto suggestion

S’ébattre plutôt que se débattre.

L’écrire une fois, et puis garder en soi le sens des mots.

Être plutôt que dire.

Être et puis trouver le plaisir.

S’ébattre.

Être.

 

4 mai 2006

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Du processus artistique

Alimenter son esprit comme on alimente son corps.

Se Nourrir
Digérer
Froncer les sourcils
Et puis expulser la merde

Ensuite, prétendre que c’est de l’art.

 

Ou bien avoir du talent : façonner l’étron, le rendre appétissant, en nourrir ses semblables…

 

5 mai 2006

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La nique à la nécrose

Ce matin, une vieille dame est passée devant moi, lentement, vacillante, le dos courbé, se traînant avec difficulté appuyée sur une béquille en métal. Elle était souriante et ridée, fragile. Elle ne semblait pas exaspérée par sa laborieuse progression. Un coup de vent l’aurait emportée, disloquée, éparpillée sur le trottoir. Elle a traversé la rue. Le temps que le feu passe au vert lui fut tout juste suffisant. Elle a pris appui contre un arbre pour reprendre son souffle. Puis elle a fouillé dans son sac en toile, en a extirpée une petite clé et a libéré de son antivol une trottinette à moteur électrique. Juchée sur son engin, elle a filé sur l’asphalte, souriante et ridée.

 

23 mai 2006

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Avis de grand froid

Elle s’éloigne de moi

Sa froideur me pénètre

Me glace

Et s’étend sur le monde

Et s’étend sur le monde

Et s’étend sur le monde

 

31 mai 2006

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Don de soi

Un sourire est la seule chose que l’on donne et qu’on ne peut reprendre, la seule chose qu’il est possible de donner vraiment.

 

13 juin 2006

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Qui s’enfuit déjà

Le présent est un mourant qui n’en finit pas de mourir, de crever et de partir en lambeaux dont le souvenir est une nécrose

Nécrose de ce qui a été et qui a cessé d’être, qui ne sera plus.

 

13 juin 2006

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Culte de l’enfance

On dit le petit Gregory ou la petite Anne-Sophie, le petit Michel ou la petite Jennifer. On ne dit jamais le gros Léon, la grande Sylvie ou la vieille Simone.

 

13 juin 2006

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La tête dans la vase

Ecrire…

Je me sens parfois comme ce petit poisson qui tourne en eau de boudin dans son bocal de verre.

 

13 juin 2006

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