Avr 262012
 

Début Janvier, j’écrivais ceci :

Jean-Luc Mélenchon aurait donc enfin compris de quelle utilité pouvait être sa candidature. Lutter contre la tentation lepéniste d’une classe populaire en souffrance et désabusée, dont le ras-le-bol – qu’il est nécessaire d’entendre – risque fort, à l’occasion de cette élection présidentielle, de s’égarer au Front National. Leur dire qu’en votant pour Jean-Marine Lepen c’est d’abord contre eux-mêmes qu’ils voteraient. Que c’est uniquement de la gauche qu’ils peuvent attendre une amélioration de leurs conditions de vie. Et que si leur ras-le-bol est si grand que voter pour le candidat socialiste ne leur semble pas dans un premier temps à la mesure de la colère qu’ils souhaitent légitimement exprimer dans les urnes, qu’au moins ils ne se trompent pas de Front, qu’ils votent pour le Front de Gauche dont la moindre des qualités n’est pas d’être de gauche – quant le Front National est lui indubitablement de droite, et à ce titre Marine Lepen est quant à elle sans le moindre doute ce qu’il y a de plus proche de ce Nicolas Sarkozy qui leur a fait tant de mal, ces deux-là possédant définitivement le même génome politique – en tout cas pour ce qui concerne leur conception de la justice sociale. Pour l’un comme pour l’autre il ne s’agit de rien d’autre que de stigmatiser les plus faibles et les opposer les uns aux autres de manière à garantir aux puissants qu’ils conservent puissance et richesse…

Alors je veux gager que cette très efficace petite vidéo conçue par le Front de Gauche augure d’une campagne du Front de Gauche qui s’affranchirait de la facilité qu’il y aurait à tirer contre son propre camp et où un Jean-Luc Mélenchon irait bel et bien, et avec les dents, chercher les voix parmi ce vivier considérable que sont ces hommes et femmes qui n’en pouvant plus se laisseraient facilement tenter par un vote bleu Marine où ils se passeraient en réalité eux-mêmes la corde au cou. »

Inutile de le nier, ce fut un échec. Marine Le Pen a recueilli près de 18% des suffrages le 22 avril dernier, soit plus de six millions d’électeurs dont, je persiste à le dire, beaucoup se sont laissés abuser et tromper, parce que la souffrance sociale est souvent mauvaise conseillère et invite à entrevoir des solutions là où il n’y a que flatterie, simplismes et stigmatisation. 

Ce fut un échec. Il est donc nécessaire de remettre le couvert. Expliquer encore, convaincre. Rappeler que Sarkozy est pis encore, d’une certaine manière, puisqu’au moins Marine Le Pen n’a jamais été en position de faire, que – et nous le comprenons de plus en plus à mesure que se déroule cette campagne de second tour – réélu, Nicolas Sarkozy serait devenu cette fois parfaitement incontrôlable, sans limite, plus dangereux que jamais.

Rappeler donc tous les discours de Sarkozy sur la sécurité, la fraude sociale, l’immigration, puisque cela fait dix ans maintenant qu’il prend des airs sévères et utilise des mots forts, stigmatisants, donnant des coups de menton à tort et à travers. Rappeler ensuite les résultats de sa politique, le ramener à son bilan. Car que dit-il aujourd’hui qu’il n’a pas déjà dit ? Que propose-t-il qu’il n’a pas déjà proposé ? Combien de lois se sont ajoutées à combien d’autres ? Et enfin pour quels résultats ?

C’est que Sarkozy, comme le Front National et Marine Le Pen, prennent grand soin d’avancer masqués. Parce que l’un comme l’autre ne pourraient espérer obtenir le pouvoir s’ils disaient ce qu’ils ont réellement l’intention d’en faire, en particulier en matière de politique économique et social. Il leur faut tromper le peuple, ce même peuple dont ils se réclament mais dont ils n’ont que faire. Et les discours brutaux et simplistes sur l’immigration et l’insécurité ne jouent là que le rôle de poudre aux yeux, manière d’aveugler des électeurs dont ils n’ont pas intérêt à ce qu’ils se mettent à voter en fonction de leurs propres intérêts, dont ils n’ont pas intérêt à ce qu’ils se préoccupent trop au moment de voter des questions de chômage et de pouvoir d’achat, de la questions de la justice sociale, de la question des services publics.

Sarkozy a besoin que le peuple vote avec ses angoisses et ses colères plutôt qu’avec sa raison et sa sagesse. Il sait qu’il n’a d’autre moyen de le soumettre qu’en le divisant, en opposant les uns aux autres, en répandant la peur de l’Autre, quand tous ont en commun le même intérêt, a minima le même intérêt. Qu’il dégage.