Sep 292011
 

Depuis longtemps, je pense que François Hollande est le meilleur des candidats pour la gauche. Depuis longtemps – et avant même la disparition de DSK du paysage politique -, je pense que François Hollande sortira vainqueur de la primaire. Mais cela ne suffisait pas, cela ne me suffisait pas, il était important qu’il puisse être le meilleur Président de la République, c’est-à-dire de mon point de vue, c’est-à-dire concernant la politique à mener, à gauche. 

Le débat de ce soir aura enfin largement éclairé ma lanterne.

Je passe rapidement par-dessus Manuel Valls et Jean-Michel Baylet, le premier parce qu’il n’est vraiment pas ma came, le second parce que sa candidature n’est que de témoignage – et reconnaissons qu’en la matière, il réalise une belle prestation.

Ségolène Royal. J’ai passé ces quatre dernières années à exposer pourquoi je considère qu’il faut absolument à la gauche éviter de remettre ce couvert-là. Je n’y suis pour rien, ou si peu, mais il est désormais évident que la grande majorité des électeurs de gauche partage cet avis. Tant mieux, et aussi n’était-il pas vraiment utile que Mme Royal creuse un peu plus profondément encore sa tombe politique en déclarant ce soir, à propos de la régularisation des sans-papiers, qu’elle rejetait l’idée de « critères généreux », elle qui faisait scander à ses partisans « Fraternité. Fra-ter-ni-té »…

Restaient en course Martine Aubry, Arnaud Montebourg et François Hollande. Les deux premiers, pour des raisons différentes, me semblaient potentiellement pouvoir mieux répondre que le dernier à mon envie d’une gauche ambitieuse et résolue. Les deux mêmes suscitaient également en moi de réelles réticences dont j’aurais bien voulu me départir. Ce soir au contraire, ils sont l’un et l’autre parvenus à me démontrer que mes réticences étaient fondées et que leur positionnement à gauche relevait en réalité davantage de la posture, et que François Hollande de ce point de vue n’avait en définitive rien à leur envier.

J’ai été particulièrement déçu d’entendre Martine Aubry embrayer derrière Ségolène Royal pour plaider en faveur d’une interdiction des licenciements boursiers. Elle sait pourtant aussi bien que moi que ce n’est pour Ségolène Royal qu’un leurre, un artifice de communication pour gauchistes, que ce qu’elle propose là n’a rien à voir en réalité avec ce que propose l’extrême-gauche, c’est-à-dire l’interdiction de licencier pour toute entreprise qui fait des profits. Pour Ségolène Royal, et donc pour Martine Aubry, il ne s’agit que d’inscrire dans la loi ce qui fait déjà jurisprudence. Uniquement cela. Elles disent interdiction des licenciements boursiers mais ce n’est rien d’autre que le détournement d’un slogan. Elles disent interdiction des licenciements boursiers mais ce n’est en vérité qu’une mesurette, de ces mesurettes à même de créer des attentes qui n’auront d’autres choix que de se muer aussitôt en désillusions. Typiquement ce que la gauche ne peut plus se permettre.

A l’inverse, sur ce même sujet François Hollande fait une proposition autrement plus ambitieuse et efficace lorsqu’il plaide pour un renchérissement du coût pour les entreprises de ce type de licenciements. Martine Aubry a beau clamer que tout ne se règle pas avec l’argent, le fait est qu’à moins de nationaliser toutes les entreprises privées – et il ne me semble pas qu’elle le propose… – les propriétaires et/ou actionnaires desdites entreprises ont pour objectif principal – à plus ou moins long terme – de maximiser leurs profits.  Il ne s’agit pas pour la gauche d’interdire les profits mais d’une part de les imposer, d’autre part de les contraindre, enfin de les orienter. En matière de licenciements, il ne suffit en effet que de renchérir leur coût suffisamment pour que le choix rationnel des dirigeants les conduisent à ne pas licencier.

Là se trouve la clé d’une politique de gauche adaptée au XXIème siècle, manier les contraintes, réguler l’économie, affirmer la priorité du politique sur l’économie, de l’humain sur le profit… C’est précisément ce qui s’appelle l’écologie politique, corpus idéologique pour lequel je plaide depuis bien longtemps. Et ainsi, non seulement Martine Aubry m’est apparue comme s’enfermant pour les besoins de sa campagne dans une vieille gauche qui manie mieux les slogans que les solutions, mais François Hollande a confirmé qu’au-delà de cette stature de présidentiable rassurant qu’il a pris soin de se bâtir, il avait une idée bien précise de ce que doit être une gauche qui ne décevra pas, à la fois ambitieuse et réaliste, innovante et efficace.

Quant à Arnaud Montebourg, auquel je reconnaissais depuis peu un certain allant rafraîchissant sur le terrain économique et social, et plus seulement institutionnel, sa mise en parallèle du cas Guérini au sein du Parti Socialiste avec les turpitudes gravissimes de Sarkozy et de ses boys dans les affaires Bettencourt, Karachi et autres, qui pourrissent de manière systémique jusqu’au coeur de la République Française, m’a confirmé dans la piètre opinion que j’avais d’un bonhomme dont le parcours politique mouvant ne me semblait déjà pas nécessairement frappé au coin de la conviction politique la plus limpide… Monsieur Montebourg, il est des amalgames faciles et douteux dont il est préférable de se garder !

Bref, le 9 octobre, je voterai pour que François Hollande devienne le candidat de la gauche qui délogera Nicolas Sarkozy de l’Elysée en mai prochain. Et j’expose mes raisons :

  1. François Hollande est un homme de gauche à la fois intègre, résolu et responsable – or la gauche, une fois au pouvoir, aura une obligation de résultats, ce qui signifie faire beaucoup sans faire n’importe quoi, parce que toute nouvelle désillusion serait susceptible de conduire au pire.
  2. François Hollande a l’étoffe d’un bon candidat, il passe bien dans les médias et est excellent en meeting, sa force de conviction et son humour seront précieux au cours d’une campagne – or Sarkozy est redoutable dans ce domaine.
  3. François Hollande apparaît aujourd’hui comme la meilleure chance de la gauche pour parvenir à arracher le pouvoir des mains de Sarkozy et de l’UMP – ce n’est pas essentiel tant l’élection est encore loin et les sondages peu prédictifs, mais ce n’est pas non plus une information totalement négligeable.
J’ajoute que François Hollande ayant toutes les chances de sortir vainqueur de cette primaire, il serait souhaitable que cela se fasse dès le premier tour, tant l’entre deux tours pourraient s’avérer source d’un affrontement trop violent pour qu’il n’en reste pas quelques séquelles tout à fait dommageables pour la campagne à venir, et tant aussi il serait désastreux que le second tour se solde à quelques centaines de voix près qui ne pourraient alors qu’alimenter des soupçons de fraude et venir ternir une primaire dont il nous faut au contraire espérer que, réussie, elle créera un effet d’entrainement pour l’ensemble de la gauche et son candidat. Evitons de tendre le bâton pour nous faire battre – la droite ne manquerait pas de s’en servir.

 

Je te rappelle donc à cette occasion que – pour peu que la défaite de Sarkozy t’importe un peu – toi aussi tu peux voter (*).  

 

(*) Primaire : mode d’emploi