Mar 092012
 

La mort des blogsLa mort des blogs. C’est le sujet du jour. C’est tous les trois mois le sujet du jour. Depuis 10 ans.

Poser cette question – les blogs sont-ils moribonds ? – c’est n’avoir rien compris à ce qu’est un blog, à ce qui motive un blogueur, ce qui est sa motivation première.

Je vais faire court, parce que c’est un sujet qui ne m’intéresse pas tant que ça. En gros, contrairement à un journaliste, quand il écrit le blogueur ne pense pas « j’ai quelque chose à leur dire », mais plutôt « j’ai quelque chose à dire ».  Ça n’a l’air de rien, mais la différence est énorme – et explique à elle seule pourquoi, sauf à fermer internet, les blogs ne peuvent pas mourir.

Réfléchissez.

En revanche, force est de constater que ces derniers jours les blogs politiques de gauche – mais il n’existe pas, ou si peu, de blogs politiques de droite (probablement parce qu’ils n’ont rien à dire, les gens de droite) – que les blogs politiques de gauche sont, ces derniers jours, proches du coma. Etrange comme à l’approche de l’échéance, celle-là même que nous attendons tant depuis cinq longues et interminables années, que nous avons soigneusement préparée, un certain mutisme semble gagner la blogosphère politique – de gauche, donc.

Un mutisme tout relatif, c’est entendu, mais tout de même, il semble bien que le nombre de billets quotidien est en chute.

C’est que Sarkozy s’évertue à faire tout le travail.

Il est tellement mauvais, sa campagne est tellement nulle, le creux de ses « propositions » est à ce point abyssal, sa stratégie du mensonge permanent est tellement transparente… Que pourrions-nous ajouter ? A quoi bon s’efforcer de mettre en évidence ce qui l’est déjà ?

Sarkozy ne fait pas de la politique, il fait de la réclame. Cela a toujours été le cas, mais voilà, il n’existe plus désormais personne pour s’y laisser prendre. On sait qu’il n’a rien d’autre à vendre que lui-même, qu’il n’a d’autre ambition pour la France que lui-même, qu’il n’est à la conquête du pouvoir que pour lui-même, et que toute parole qu’il prononce n’a d’autre objet que d’enfumer les électeurs. Mais les électeurs ont été si bien échaudés en 2007 et depuis qu’ils ont désormais acquis de voir à travers les écrans de fumée sarkozistes comme en plein jour.

Il dit : « Si je ne suis pas réélu, je me retire définitivement de la vie politique ». Il le pense peut-être. Ou pas. Peu importe, il ne fait cette déclaration que parce qu’il s’imagine qu’elle est à même de le servir, parce qu’elle humaniserait son image, l’éloignerait du professionnel de la politique qu’il a toujours été et est encore, évidemment. Parce qu’elle donnerait à entendre que sa candidature est un sacrifice qu’il consent pour son pays et ne serait pas uniquement motivé par une ambition personnelle qui le dévore. Ce qu’elle est, de toute évidence.

Il dit… Beaucoup de choses et ce n’est jamais que pour nous raconter une histoire de laquelle émergerait le candidat que les Français auraient envie d’élire et qui serait lui-même. Mais les Français savent désormais que ce n’est pas lui. Ils ne croient plus ni à l’histoire ni à celui qui la raconte. Ils savent, preuves à l’appui, que le conteur est un menteur.

Tirer sur Sarkozy, déconstruire le sarkozysme ?

Mais la maison Sarkozy est déjà par terre, en miettes… Et à la vue de tous, au milieu des décombres, un petit garçon s’agite en tout sens, essaie vainement d’ajuster ensemble les morceaux de sa maison écroulée, s’énerve de n’y point parvenir, traverse la rue sans regarder et s’en va décocher rageusement des coups de pied dans la solide maison d’en face. Qui ne bronche pas.

Nous pourrions alors vanter les mérites de la maison Hollande. Nous le faisons d’ailleurs, avec conviction. Mais là encore, où trouver la motivation de dire, tant les évidences parlent plus fort que nous ne le pourrions ?

Imaginez deux maisons situées de part et d’autre de la grand route. Deux maisons d’hôtes. L’une est un taudis sans toiture, les murs sont effondrés et, dans la cuisine délabrée, les ordures s’amoncellent ; l’autre est aussi solide qu’accueillante, les boiseries sont en bon état, les peintures sont neuves, un fumet agréable s’en échappe et le menu est même affiché sur la porte – les prix aussi. Faut-il vraiment en rajouter, pointer plus encore l’insalubrité de l’une, vanter plus encore les mérites de l’autre ?

Ces derniers jours, les commentateurs politiques se plaisent à gloser sur le manque d’intérêt des Français pour la campagne électorale, autant qu’ils se plaisent à taire l’explication d’un tel désintérêt. Imaginerait-on cependant les foules parvenir à se passionner pour un match de football qui opposerait le FC Barcelone à l’Olympique de Neuilly sur Seine (mais si mais si, ça existe) ?

Vous pensez que j’exagère un peu ? Certes, il serait difficile tout de même de comparer François Hollande à Lionel Messi (putain, ce garçon est encore plus fabuleux que Zidane !), mais voyez un peu qui joue dans l’équipe de Nicolas Sarkozy : Nadine Morano et Claude Guéant, c’était déjà pas terrible. Claude Allègre, ça faisait quand même un peu sourire. On passa aux larmes avec Mickaël Vendetta et Gérard Depardieu. On se tape désormais le cul par terre avec le ralliement de Igor et Grichka Bogdanov

Alors voilà, si les blogs politiques de gauche sont morts, c’est peut-être surtout de rire.