Jan 082011
 

Denis Podalydès dans Richard IIÇa faisait bien longtemps que je n’avais assisté à du théâtre aussi mauvais.

Une grosse poutre pour seul décor, avec le mannequin d’une jeune fille pâle posé dans un coin, parce que le texte de la pièce évoque  à un moment l’image d’une Angleterre semblable… au visage d’une jeune fille pâle. Détail qui permet de mesurer toute la subtilité de la mise en scène proposée par Jean-Baptiste Sastre.

J’exagère. Il y a une table aussi. Massive et plutôt jolie. Et le  roi Richard II dispose d’un endroit où poser sa couronne. C’est pratique. Et aussi, dans l’avant-dernier acte, la reine dit (je cite de mémoire) : « Allons nous abriter à l’ombre de ses arbres » et hop… la voilà qui s’assoit sous la table. Subtile, je vous dis.

On a le sentiment d’une mise en scène conçu par un étudiant de première année pas particulièrement doué d’une école de mise en scène pas forcément de premier plan. Non seulement c’est très classique – ce qui n’est pas un mal en soit – mais en sus très grossier, ou très mal dégrossi. Une mise en scène sans imagination et particulièrement statique – car il ne suffit pas que les comédiens changent simultanément de place à chaque fin de scène pour créer du mouvement.

Les comédiens… Comment ne pas trop paraître méchant ? Là encore, pour jouer la colère ou la douleur, il ne suffit pas de psalmodier une partie de son texte puis, soudain, sur les derniers mots, de hurler sa colère ou sa douleur. Non seulement c’est fatiguant pour des spectateurs déjà maltraités, mais en sus tout ou partie du texte leur devient alors inaudible. Ce qui est excessivement frustrant quand il s’agit de Shakespeare.

L’affectation non plus n’est pas recommandée. Mais n’accablons pas les comédiens, ils sont soumis à la mise en scène, font probablement du mieux qu’ils peuvent avec ce qu’on les a invité à faire. Ainsi Cécile Braud en Duchesse d’York est-elle catastrophique, miraculeusement proche du risible, navrante. Ainsi Denis Podalydès en Richard II est-il lui simplement inégal, sans saveur durant toute la première moitié de la pièce, plus convaincant ensuite, donnant à l’occasion le meilleur de lui-même, un peu de théâtre vaguement resplendissant dans cet océan d’ennui.

Finalement, la principale tragédie à laquelle on assiste est ce spectacle qui vire malgré lui à la bouffonnerie, qui refuse néanmoins jusqu’au bout de tout à fait s’y abandonner. Ce qui tout bien pesé aurait été un moindre mal. Au moins l’on aurait ri de bon cœur. L’on se serait amusé avec les comédiens plutôt qu’à leur dépens.

Ainsi, d’ennui en rires nerveux et sarcastiques, voilà donc ce qu’aura été ce voyage.
Trop long voyage au pays de nulle part.
Vous avez déjà acheté vos places ?
Échangez-les donc contre des billets pour le prochain concert de Carla Bruni.

(source : La tragédie du roi Richard II)