Déc 152009
 

Maison de poupée, BraunschweigA force, on pourrait en venir à penser que dans l’oeuvre d’Enrik Ibsen, les femmes sont démesurément maltraitées. D’aucuns s’engouffreraient là pour conclure au machisme de l’auteur. Ils auraient grand tort.

C’est l’être humain en général, ou plutôt l’être social, qu’Ibsen se plait à dépeindre sans la moindre indulgence, souvent avec férocité. Et chacune de ses pièces se révèle être un très sombre tableau de la société – peinture largement intemporelle, en dépit des apparences – où les personnages féminins, finalement, s’en tirent avec certains honneurs. Et si même parfois c’est au prix de la mort comme dans Rosmersholm, Hedda Gabler ou même Le Canard sauvage, au terme du drame ibsénien est souvent une libération pour le héros féminin.

Et il en sera en réalité de même pour Nora qui pour échapper à sa maison où elle n’existe qu’en tant que poupée devra tuer en elle l’épouse et la mère, abandonner son mari et ses enfants, quitter le domicile conjugal et partir à la rencontre de la femme qu’elle n’est pas et qu’il s’agit de devenir. Ce ne sont jamais contre les femmes qu’Ibsen exerce sa critique, mais contre cet ersatz de femme en laquelle la société et la morale s’efforcent de les conserver prisonnières.

La Maison de Poupée est sans aucun doute la plus féministe des pièces d’Ibsen en cela que Nora parvient à trouver une issue qui n’est pas tout à fait tragique, une libération qui n’est pas en même temps une irrémédiable défaite.

A l’occasion de ma critique de Rosmersholm, j’ai dit déjà tout le bien que je peux penser de la sobriété d’une mise en scène. Braunschweig s’y est tenu là encore et on assiste en effet à du tout bon théâtre et qui, malgré un démarrage tout de même un peu poussif, parvient à nous emporter tout à fait et nous ravir.

Cependant, j’ai moi découvert La Maison de poupée, il y a quelques années, dans une mise en scène du très trash Thomas Ostermeier. Un spectacle rien moins que sobre et proprement époustouflant, au point que celui présenté aujourd’hui par Stephane Braunschweig ne pouvait à mes yeux que durement souffrir de la comparaison.

Source : Une maison de poupée, par Braunschweig