C’est un polar. Un bon polar, parce qu’il est en vérité bien plus que cela.
Cela se passe en 1968. Une année où les Beatles étaient légèrement au-delà de leur apogée. C’est-à-dire que l’album Blanc allait sortir et que la fin était proche. Une année où les jeunes écoutaient de la musique pop, voire même du rock, et aspiraient à gagner leur liberté – et pas seulement sexuelle. Une année où un monde basculait dans un autre, année frontière où la nouvelle génération mettait cul par-dessus tête l’ancienne, quand cette dernière se demandait, ne comprenait pas ce qu’elle avait fait pour mériter ça. Ça : des garçons aux cheveux longs, des filles en jupes courtes, la remise en cause de valeurs ancestrales – les femmes ne devenaient pas inspecteur de police ; les noirs vivaient chez eux, en Afrique…
Une année marquée, également, par la guerre au Biafra et son cortège de massacres et de famines. Soubresauts sanglants en suite à une décolonisation façon « démerdez-vous maintenant ». Et le Royaume-Uni – mais pas seulement le Royaume-Uni – de détourner les yeux d’un blocus meurtrier mis en place par les forces fédérales Nigérianes. Et la tragédie humanitaire qui s’en suivit. Trois millions de victimes. Dont un million d’enfants. Et le lent éveil des consciences dans un monde qui soudain devenait plus petit.
C’est sur cette double toile de fond que se développe l’enquête policière. Cathal Breen a la trentaine et se sent déjà vieux. Son père est mort quelques semaines plus tôt, un immigré irlandais dont il ne savait finalement pas grand chose. Quand le cadavre dénudée d’une jeune femme est retrouvée dans une ruelle sombre de Londres, à proximité d’Abbey Road, le détective Breen se voit adjoindre, pour mener son enquête, une jeune femme fraîchement entrée dans la police. Elle s’appelle Helen Tozer, une jeune femme délurée qui prend la pilule et est elle-même fan des Beatles.
Incapable de conduire suite à une chute douloureuse, Cathal Breen est contraint de laisser le volant à Helen Tozer. Elle fonce, il se cramponne. Et c’est ainsi également que progresse leur enquête, sur fond de sexisme, de racisme, d’homophobie et de musique pop. Elle fonce, il est un peu dépassé, mais il se cramponne.
Voilà. Un polar entre mélancolie et fougue, dépression et fracas, cynisme et révolte, quand le monde s’apprêtait à basculer dans les années 70. Un polar tout en finesse et qui ne cède à aucune facilité. L’humour en plus. A l’anglaise, quoi.
William Shaw en est l’auteur anglais.
Les Escales Noires en sont l’éditeur français.
Et Paul Benita en est l’excellent traducteur.
A mettre entre les mains de toute personne née au XXème siècle – à partir de 14 ans, donc…