Avr 052007
 

Sarkozy, une ambition qui passe par le Front National

 

sarkozy simone veilDe toute évidence, Sarkozy a compris que trop nombreux sont aujourd’hui les français déterminés à se dresser sur sa route vers l’Elysée, car conscients du danger qu’il représente. Non seulement ses intentions politiques sont à la fois économiquement inefficaces et porteuses de destruction de ce qui reste à la France de lien social, mais sa fragilité psychologique, son égo surdimensionné et sa soif de revanche contre tous et contre chacun en font un petit Napoléon colérique incapable de maîtriser ses nerfs, indigne de représenter la France sur la scène internationale et qui risque fort de déraper à la première difficulté – que celle-ci vienne de l’intérieur, par exemple d’une jeunesse française qui ne se laissera pas longtemps maltraiter, ou de l’extérieur, et on sait les tensions et les menaces qui fragilisent les équilibres d’un ordre mondial de plus en plus précaire.

Mais Nicolas Sarkozy veut être Président. Depuis longtemps déjà il a résolu que rien ne l’arrêterait. Et l’homme a fait la preuve à mainte reprise de sa détermination à user de tous les moyens pour atteindre son graal. On comprend aujourd’hui que le Front National est ce moyen, qu’il lui faudra en passer par là. Nicolas Sarkozy sait aujourd’hui qu’il ne pourra se passer des 15 à 20% d’électeurs qui voteront Le Pen au premier tour. Ceux-là, au moins, il ne leur fait pas peur. Il y avait cependant quelques étapes à surmonter pour pouvoir espérer bénéficier de leurs éventuelles faveurs, c’est-à-dire d’un report satisfaisant de leurs voix. Ne pas leur faire peur était une chose, leur faire envie en était une autre.

Cela a donc commencé par un long travail de positionnement depuis son ministère de l’Intérieur. Ne revenons pas sur cette période, inutile de faire ici la liste de tous les gages donnés par le Ministre Sarkozy à cet électorat, depuis ses « dérapages » verbaux jusqu’aux lois répressives (ou projets de lois avortés comme autant d’effets d’annonce) censées lutter contre la délinquance et l’immigration (lutte dont on sait également combien elle a été inefficace)…

Il s’est agit ensuite de permettre la candidature de Le Pen en lui offrant sur un plateau les signatures qui menaçaient de lui manquer. Nicolas Sarkozy avait soudain réalisé que si le candidat frontiste avait été dans l’impossibilité de se présenter, il aurait été tenu comme premier responsable par un électorat qui risquait alors de lui en faire payer le prix, menace que Le Pen lui-même avait explicitement brandie. La présence de Le Pen était nécessaire afin qu’il capte cet électorat, du moins au premier tour…

Ne restait ensuite qu’à préparer le second. Il est évident que l’annonce d’un grand ministère de l’Immigration et de l’Identité Nationale fut la pierre angulaire de cette stratégie. On sait comme ces deux thématiques sont chères à l’extrême droite, comme on sait que cette idée amalgamante selon laquelle l’immigration serait une menace pour l’identité nationale est au coeur du succès électoral de Le Pen. Amalgame que ne contourne pas Sarkozy, bien au contraire, lorsqu’il déclare que «la politique de l’immigration, c’est l’identité de la France dans trente ans» (dans le Journal du Dimanche). Voilà donc qui était dit et qui ne pouvait que plaire aux électeurs de Jean-Marie le Pen, comme leur a sans aucun doute plu la posture sécuritaire du candidat Sarkozy face aux violences perpétrées Gare du Nord, taxant de laxistes toutes évocations de mesures de prévention qui permettraient d’éviter qu’on en arrive à de telles manifestations d’exaspération (qu’il ne s’agit en aucun cas d’excuser, qu’il s’agit bien évidemment de condamner, mais qui pour le moins peuvent interroger quant à l’échec d’une politique qui s’est principalement résumée en une posture des plus provocantes).

Mais voilà, cela ne suffira pas et Nicolas Sarkozy le sait bien. Il ne lui suffira pas de s’adresser à l’électorat du Front National par-dessus la tête de son président et candidat. Le Pen est un politicien redoutable qui ne se satisfera pas de quelques discours qui empruntent à ses thématiques pour laisser ses électeurs voler en masse au secours de l’élection de Sarkozy. Il en voudra bien davantage et l’on commence à comprendre que Sarkozy sera disposé à négocier tout ce qu’il sera nécessaire de négocier. Il est à ce titre intéressant de constater combien Le Pen prend soin déjà de distinguer Sarkozy d’un Chirac, déclarant qu’après des rapports bloqué par le second, une ère nouvelle pouvait s’ouvrir avec le premier, rendant envisageable une alliance entre la droite et l’extrême-droite. D’autres signes viendront dans les prochains jours et si au soir du premier tour il venait à l’idée de Le Pen d’appeler allusivement à voter Sarkozy, on saurait enfin à quoi ce dernier aura finalement sacrifié.

 

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