Ségolène Royal perd... et chante victoire
Congrès du Parti Socialiste : épilogue
Crédit dessin : © Rimbus, dans un billet daté du 21 juin 2007, très précurseur...
La défaite en chantant, c'est décidément une habitude chez Ségolène Royal.
Elle nous avait fait le coup, déjà, à l'issue des présidentielles, en parlant de non-victoire plutôt que de défaite et en ne cessant jusqu'à aujourd'hui encore de se targuer de 17 millions de voix (et en réalité un peu moins) dont chacun sait hormis elle qu'une partie non négligeable s'était portée sur son nom, par dépit, abnégation et sens des responsabilités, pour tenter - mais sans beaucoup y croire - de faire barrage à Nicolas Sarkozy.
Et au premier tour déjà : l'effet du 21 avril 2002 additionné à la crainte du sarkozysme avaient permis à Ségolène Royal de bénéficier d'un retour de vigueur du vote utile. Elle fit un score légèrement inférieur à 26%, parvenant à réunir sous son nom quelques 9 millions et demi de voix, dont une part importante là aussi s'était ainsi exprimé avec un manque d'enthousiasme certain.
Qu'importaient ces quelques réalités qui auraient conduit n'importe quel responsable politique à faire preuve d'un peu d'humilité, Ségolène Royal choisit d'affecter de voir en un résultat plus que mitigé l'annonce de lendemains qui allaient nécessairement chanter : « Ce qui s'est levé ne s'arrêtera pas ! » Certes, mais il fallait tout de même une sacré dose de bonne volonté pour distinguer en cette catastrophique élection de Nicolas Sarkozy un quelque chose qui se serait levé - du moins à gauche...
Deux ans après, Ségolène Royal est encore défaite et triomphe encore, se targuant cette fois d'avoir convaincu « la moitié des militants socialistes, et peut-être même un peu plus » Passons sur ce "et peut-être même un peu plus" qui ne vise qu'à distiller dans les esprits qu'on lui aurait volé la victoire, et faisons un bilan un poil objectif de son résultat :
D'abord, notons que tout de même 40% des militants ne se sont pas rendus aux urnes, ont préféré s'abstenir que de choisir entre Martine Aubry et Ségolène Royal. Ce qui pour le moins relativise de beaucoup cette moitié des militants dont elle voudrait s'approprier le soutien.
Remarquons ensuite qu'au premier tour, et avec une abstention sensiblement identique (40%), elle avait recueilli 42,5% des suffrages. Un score certes honorable, mais il est pour le moins présomptueux de s'imaginer que parmi ceux là, les militants qui avaient en premier choix choisi la motion de Bertrand Delanoë soient devenus de fervents soutiens de Ségolène Royal.
Ainsi, en réalité, c'est uniquement parmi les 29% de militants qui se sont prononcés en faveur de la motion E signée par Ségolène Royal qu'il faut rechercher le poids de cette dernière dans le Parti Socialiste - sachant que parmi ces 35 000 socialistes, certains n'ont consenti en réalité à n'exprimer un tel choix qu'une fois que la candidate avait consenti de remiser sa candidature "au frigidaire".
Disons donc, à la louche, qu'un quart des militants socialistes - parmi ceux qui se sont suffisamment senti concerné par ce congrès pour aller voter - soutiennent Ségolène Royal, son ambition présidentielle et sa ligne politique. C'est conséquent, mais c'est tout de même notoirement insuffisant pour crier victoire.
Il faut tout de même se souvenir que la fois précédente, la dernière fois où les militants socialistes avaient été invités à exprimer leurs préférences, Ségolène Royal avait obtenu dès le premier tour le suffrage de plus de 100 000 militants socialiste, pour un score dépassant les 60 % et alors qu'elle avait eu à affronter deux poids lourds du Parti Socialiste - Dominique Strauss-Khan et Laurent Fabius.
Passer de plus de 100 000 à moins de 35 000, divisant donc son audience par trois, et trouver le moyen de chanter victoire, voilà bien une prouesse à mettre au crédit de Ségolène Royal. Un certain Attila avait semble-t-il la même aptitude - du moins si l'on en croit l'Histoire telle qu'elle nous est contée par les protagonistes de Kaamelott (merci Maghnia) :
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Martine Aubry par K.O. technique
Martine Aubry par K.O. technique
C'est donc par 102 voix d'avance que Martine Aubry devient première secrétaire du Parti Socialiste, après validation des résultats du scrutin par le Conseil National qui s'est prononcé à 159 voix (67,5%) pour et 76 (32,5%) contre.
67.451 voix pour Aubry et 67.349 pour Royal. Soit un score de 50,04% contre 49,96% !
102 voix d'écart. Soit moins de 0,1% des suffrages !
Le bon sens politique aurait voulu qu'on les donne à égalité. D'ailleurs, le bon sens politique aurait voulu en réalité qu'elles commencent, Martine et Ségolène, par accepter de se parler - ce qu'elles n'ont pas fait depuis quatre jours que le scrutin est clos. Mais elles ont préféré jouer le "match" à quitte ou double et s'engager dans une interminable et irresponsable partie de poker menteur.
Martine Aubry et Ségolène Royal sont les premières responsables de l'épilogue de ce "combat" qu'elles ont voulu "à mort", où il leur fallait une vainqueur et une vaincue, parce qu'à la radicalité du Tout Sauf Royal de l'une s'opposait sans concession possible le non moins radical Ségolène Sinon Rien de l'autre. Camp contre camp, elles ne pouvaient ni d'ailleurs n'auraient voulu voir ce que tout le monde voyait comme une évidence : le vote des militants les avait placées à égalité et c'était une situation qui imposait d'être prise en compte avec sérieux et sens des responsabilités. Elles ont préféré dans leur affrontement aller jusqu'au K.O.
Dans un camp, on a choisi de se satisfaire d'une poignée de voix d'avance... et faire l'autruche quant au reste.
Dans un autre, on a choisi de jeter l'opprobre sur l'ensemble du Parti Socialiste : sur la régularité du scrutin (comme si la triche était généralisée, comme si cela portait sur des milliers de voix, comme si même cela changeait quelque chose à un résultat d'égalité de fait), sur la commission de récolement, sur le Conseil National (qui vient pourtant d'être élu par les militants eux-mêmes).
Et dans les deux camps, on n'a à aucun moment souhaité évoquer le fait majeur que constituait ce résultat de quasi égalité et de ses conséquences. A commencer par la nécessité de se parler et d'envisager ensemble la question de l'intérêt supérieur du parti et de son unité. Envisager des solutions à une situation largement bloquée, dangereuse pour la nécessaire cohésion des militants. Cela pouvait éventuellement passer par l'organisation d'un nouveau vote, voire d'un nouveau congrès, ou pas. Il ne suffisait en tout cas que d'en discuter et de négocier les modalités d'une solution de sortie de crise.
Vincent Peillon avait déclaré ce matin-même qu'il fallait préférer une solution politique à une solution arithmétique ou juridique. Il avait raison. Tout était là : faire de la politique. Encore fallait-il que les deux camps acceptent de se parler, encore fallait-il que les deux candidates se montrent à la hauteur de leur commune prétention à diriger un parti politique, c'est-à-dire d'abord à assurer sa cohésion, à surmonter les clivages qui le traversent, à transcender les questions de personnes et leurs éventuelles inimitiés, et à faire travailler chacun avec chacune, ensemble.
Ce ne fut donc le cas ni pour l'une ni pour l'autre : autruche contre bluff et intox, c'est la stratégie de l'autruche qui l'emporte et c'est Ségolène Royal qui se retrouve à terre - et ce sentiment d'humiliation et d'injustice qui accompagne de tels dénouements, lorsque pour sortir d'un conflit on a préféré la brutalité sans retenue et la mise à mort de l'autre à la solution négociée où un compromis raisonnable est recherché.
Il est évident que cela laissera des traces, profondes dans le camp des vainqueurs, béantes et douloureuses dans celui des vaincus. Et les derniers voudront leur revanche sur les premiers. Mais ils sont tous responsables de leurs propres blessures, car c'est à eux-mêmes, largement, qu'ils se les sont infligées, et c'est pour les uns comme pour les autres à leur propre leader, à son irresponsabilité, qu'ils devraient surtout s'en prendre.
Martine Aubry aura désormais le beau rôle, puisque de fait elle à la main pour rassembler ce qui peut encore l'être et relever un Parti Socialiste qui de toutes les façons ne pourra guère se trouver plus mal.
Plus difficile sera celui de Ségolène Royal, dont on devine déjà la stratégie - on commence à bien la connaître. Elle-même se posera en rassembleuse pleine de bonne volonté, plus unitaire que jamais, drapée dans cette posture de victime magnanime qui lui est tant chère et qui lui a tant servie, tandis que ses fidèles lieutenants se chargeront de faire le sale boulot, non pas tant pour reconquérir une victoire qu'ils prétendront volée - ils savent qu'elle leur a définitivement échappée - que pour entretenir le ressentiment des troupes, ancrer en eux le sentiment d'injustice et aiguiser leur soif de revanche. 2012 et le Graal de la présidentielle demeurent pour Ségolène Royal et ses partisans l'objectif majeur, celui qu'il faudra à n'importe quel prix atteindre. Une bataille qu'il s'agit dès à présent de préparer.
Et c'est bien ainsi qu'il faut comprendre, d'un côté ce très louable et humble appel à l'unité des socialistes que Ségolène Royal à ce soir lancé, comme on dresse un paravent... devant un Manuel Valls, toujours en première ligne, jouant à merveille sa partition de marionnette, et qui clame partout qu'on lui a volé sa cassette et que l'affaire sera bel et bien portée devant les tribunaux. Derrière le paravent, une talentueuse marionnettiste drapée de blanc.
Les jours prochains donneront une bonne indication quant à la capacité de Martine Aubry à faire face à une situation largement explosive, à prendre enfin toute la mesure de sa non-victoire et procéder au nécessaire rassemblement de tous les socialistes, par-delà donc tous les ressentiments qu'on se chargera dans l'ombre d'aviver sans relâche.
Je suis un garçon têtu, aussi je le dis encore : il faudrait à Martine pouvoir se rallier les bonnes volontés à la fois de Benoit Hamon - ce qui devrait être envisageable - et de Vincent Peillon - ce qui désormais risque d'être bien plus compliqué. Mais pour peu qu'elle veuille bien mettre dans la balance certaines garanties politiques de poids...
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Tuer n'est pas négocier
Ce matin, le camp Royal a continué son occupation médiatique. On a entendu Manuel Valls parler d'hypocrisie, Julien Dray remettre en cause l'impartialité du Conseil National, François Rebsamen poser un ultimatum à la commission de récolement, Jean-Pierre Mignard menacer de porter l'affaire en justice, et même Vincent Peillon, très silencieux jusque là, y est allé de son "malfaisants.
Mais ce dernier a également ouvert un peu le jeu en évoquant une "solution politique" qui se substituerait à la "solution arithmétique". On est tenté de dire : Enfin ! Enfin quelque chose de constructif. Enfin le retour du politique. Enfin une base à la discussion.
Pour lui, cette solution politique serait de désigner une "direction collégiale" en attendant la nomination d'un Premier Secrétaire, désigné par un nouveau vote dans des conditions qui assureront la légitimité de celle qui sera élue. Ajoutant que cela implique de "se donner un peu de temps"... et c'est bien là que réside toute la différence avec ce que l'on entendait jusque là depuis le camp royaliste et pour lequel il ne s'agissait que de revoter "rapidement", "la semaine prochaine", "jeudi prochain"....
Un re-vote n'aurait en effet une chance d'aboutir à un résultat différent, c'est à dire cette fois-ci incontestable, que si l'on prend le temps de réformer en profondeur et très sérieusement les conditions des opérations de vote, conditions qui sont à l'origine des doutes quant à la sincérité du vote de la semaine dernière. C'est là sans doute le travail de plusieurs mois.
D'où la nécessité de nommer en attendant une direction collégiale - par exemple mais il y a d'autres solutions, des variantes possibles autour du même thème, un secrétariat national bicéphale ou tricéphale... l'essentiel étant dans le caractère transitoire de la solution qu'il s'agit donc pour les deux camps de négocier. Et tout est dans cette exigence d'une solution négociée. Car lorsque l'on a dit solution transitoire en attendant un re-vote qui puisse se dérouler dans des conditions de parfaite transparence, on n'a encore rien dit et un certain nombre de questions demeurent à résoudre qui exigent des réponses négociées.
Peut-on se contenter de figer le Parti Socialiste au milieu du processus de congrès et simplement se contenter dans six mois d'un vote entre Royal et Aubry ? Sachant qu'en droit un scrutin est composé des deux tours qui le composent, ne faut-il pas au minimum repasser par les deux tours de scrutin ? Et du coup, ne s'agit-il pas en réalité d'en revenir à la phase de dépot des candidatures ? Et du coup encore, si l'on veut qu'il y ait un sens politique à tout cela, que ce ne soit pas juste un affrontement de personnalités, ne s'agit-il pas en réalité d'en passer par l'organisation d'un congrès exceptionnel ?
Et puis quel délai se laisse-t-on ? Combien de temps est nécessaire pour s'assurer d'une refonte sérieuse des opérations de vote et la mise en place de nouvelles procédures ? Un mois ou plutôt six mois ? Et que se passe-t-il alors politiquement pendant ces six mois ? Le PS peut-il se contenter de ne s'occuper que de lui-même pendant tout ce temps ? Sachant que les élections européennes surviennent en juin prochain, comment cela s'articule-t-il : un re-vote juste avant ou bien après cette échéance politique importante ?
Et l'oposition à Sarkozy ? Et le mouvement social ? Et le projet politique qu'il s'agit encore de refonder ? Qui s'occupe de tout ça durant ce délai et dans quel cadre ? On remet à plus tard ?
Et tout cela sans même évoquer les questions de personnes - car même une direction collégiale est composée de personnes qu'il s'agira aussi de désigner...
On voit bien qu'il s'agit de négocier, et donc d'abord de parvenir à se parler, ce que très visiblement ni Martine Aubry ni Ségolène Royal n'ont encore consenti à faire. Et les deux camps qui savent bien qu'il s'agira in fine de négocier en sont de fait toujours à croiser le fer afin de créer le rapport de force qui leur sera nécessaire à la négociation à venir. Le camp Aubry en se déclarant vainqueur et en refusant de reconnaître un résultat d'égalité, le camp Royal en faisant peser la suspicion d'une triche généralisée sur le camp adverse, en menaçant d'aller en justice, en appelant ses partisans à manifester pendant le Conseil National, en remettant en cause sa légitimité, en occupant avec force propos déplacés tout l'espace médiatique...
Le camp Royal, sans doute parce qu'il est dans une position plus inconfortable, va plus loin - et sans doute trop loin - dans cette volonté de créer un rapport de force propice à la négociation et, ce faisant, contribue largement à radicaliser les positions. Et même si je suis bien persuadé que dans une situation inverse, le camp Aubry en ferait au moins autant, il se trouve que dans ce cas précis c'est bien le camp Royal qui en flirtant avec le point de non-retour prend le risque qu'au final de négociations il ne puisse y avoir.
Mais la responsabilité de ce qui découlerait d'une impossibilité à négocier incomberait d'abord et à part égale à Martine Aubry et Ségolène Royal qui viennent déjà de laisser passer trois jours entiers durant lesquels elles ne se sont pas mise autour de la table, laissant champ libre à l'escalade verbale entre leurs lieutenants respectifs. L'une et l'autre prétendent, paraît-il, concourir pour la présidence de la République, mais l'une comme l'autre apportent ces jours-ci la preuve qu'elles sont incapables de transcender leur propre personne, leur propre intérêt, dans le but de privilégier l'intérêt général.
Pour l'une comme pour l'autre, il faudrait bien alors savoir s'en souvenir : se souvenir que face à une petite crise interne au Parti Socialiste, elles n'auraient pas même été en mesure de présenter autre chose que les visages de deux petites filles orgueilleuses, renfrognées chacune dans un coin de la cour d'école et occupées seulement à se tirer la langue par-dessus la tête de leurs petits camarades respectifs.
Où l'on parle de : Tuer n'est pas négocier
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Ségolène Royal à la manoeuvre : opération intox
Donc il suffirait de dire : "Allez, on revote et cette fois-ci, soyez tous bien sages : pas de triche hein !" ?
Mais oui, il suffisait de le dire ! On avait simplement oublié, c'est balot. N'est-ce pas ?
Donc voilà, on re-vote mais on dit avant "Hey les gars, cette fois pas le droit de tricher, hein !" Et hop ça change tout, les tricheurs ne trichent plus - la première fois, ils ne le savaient pas qu'on avait pas le droit - et cette fois, donc, le résultat du re-vote est irréprochable.
C'est tellement simple la démocratie, il suffit de bien énoncer les règles du jeu. On se demande bien comment on n'y avait pas pensé avant...
Dites, Ségolène Royal et sa petite équipe ne seraient pas plutôt en train de nous mijoter une petite entourloupette là ?...
Allez, je vous explique la grosse manoeuvre :
Etape 1 - S'apercevoir très tôt dans la soirée de vendredi que le résultat sera très serré, de l'ordre de la centaine de voix sans doute et en tout cas en-dessous du 1%. Lancer immédiatement la première salve d'intox : laisser filtrer dès la clôture du vote que Ségolène Royal est largement en tête, avancer tout haut des 52 et des 53% en sa faveur. Puis faire confirmer le tout par François Rebsamen - numéro deux du parti, tout de même.
Les autres, du coup, avec leur « bah non, pour nous c'est du 50/50 et sans doute Aubry devant », ils ont vraiment pas l'air malin. Personne ne prend garde à ce qu'ils disent, sont pas crédibles. Et les médias, qui ne sont pas nés de la dernière pluie, d'annoncer la victoire de Ségolène Royal avec 52 ou 53% des suffrages.
C'est que 52 ou 53% des suffrages, ça ne se remonte pas. C'est tout de même plus de 5000 voix d'écart !
Alors forcément, quand on apprend que c'est du 50/50... Il ne suffit plus que de laisser fleurir le doute. L'y aider même un peu en laissant entendre que,, par exemple, dans le Nord aubryiste, il y a des sections qui ont participé à 95% - qu'importe si les sections en question comptent moins de 50 adhérents, qu'importe si ailleurs en France, sur des terres royalistes, on trouve facilement des sections qui sont dans le même cas -, puis de comptabiliser des "erreurs" (avec guillemets apparents) en faveur de Martine Aubry - qu'importe si ce ne sont éventuellement que des erreurs, qu'importe s'il y a des erreurs qui vont dans l'autre sens, qu'importe surtout que ça ne concerne chaque fois qu'une dizaine de voix.
Oui qu'importe, les 5000 voix dont on a parlé au début, et que rien de tangible ne vient étayer, font tout de même effet dans les esprits : le soupçon d'une fraude massive est non seulement distillé, mais on a également très fortement laissé entendre qu'il serait à sens unique. CQFD : les bons / les méchants, la victime/ les bourreaux... Un grand classique de la ségolénie qui a également permis, déjà depuis longtemps, de faire oublier que Ségolène Royal a longuement fréquenté les allées du pouvoir mitterrandien, a été cinq fois ministre et est de toute les majorités internes du Parti Socialiste depuis une bonne vingtaine d'années.
Etape 2 - Envoyer ses lieutenants au charbon - Ségolène est oecuménique, elle ne peut tout de même pas faire le sale boulot . A charge pour eux (on nommera Manuel Valls et Julien Dray) d'en faire des tonnes sur tous les plateaux de radio et de télévision, à charge pour eux d'user de tous les moyens pour bien donner à entendre que les autres sont rien que des vilains tricheurs.
Qu'importe donc que la réalité soit toute autre, que chaque camp possède ses petits barons locaux tripatouilleurs d'urnes. Et qu'importe aussi que dans chaque camp, disons-le tout de même, il ne s'agisse que d'un comportement ultra minoritaire - qui ne saurait par exemple réduire à néant plusieurs milliers de bulletins. Qu'importe même que l'ensemble des procès verbaux dans chaque section et dans chaque fédération aient été signés par des scrutateurs de chaque camp. Qu'importe enfin que le Parti Socialiste soit tout de même le parti de France où la démocratie se porte encore le mieux - et ce n'est en tout cas pas de la droite que pourrait venir un contre-exemple de cette réalité là.
Et c'est ainsi - je le signale en passant - que fleurissent aujourd'hui sur les blogs ségolénistes des vignettes "Martine change les résultats", accréditant l'idée fausse que seul un camp serait en cause dans les dysfonctionnements de la démocratie au PS, accréditant par là même l'idée toute aussi fausse que sans de tels dysfonctionnement Ségolène l'aurait emporté largement.
Qu'importe donc puisqu'il s'agit de bien donner à penser que Ségolène Royal serait une fois encore la victime d'un Parti pourri jusqu'à la moelle, tous ses opposants n'étant qu'une cohorte d'ogres qui n'ont d'autres ambitions que de dévorer une innocente dont la blancheur par contraste étincelle plus mille étoiles dans le ciel. Faire oublier aussi qu'en tout état de cause, aucune erreur ou fraude n'est d'ampleur suffisante pour qu'on s'écarte de la situation d'égalité dans laquelle les militants ont placé non seulement Martine Aubry mais aussi, voyez comme c'est étrange, Ségolène Royal. Faire oublier qu'en tout état de cause elle ne l'a pas emporter - et on se souviendra là que pour elle les présidentielles ne s'étaient déjà pas soldé par une défaite, mais bien par ce qu'elle appela « une non- victoire »...
Etape 3 - Nier donc la réalité démocratique de ce match nul [sic...] et demander un re-vote au prétexte d'irrégularités qui ne remettent pourtant pas en cause la situation d'égalité..
Et là c'est Ségolène Royal qui s'en charge. Réclamer plus de démocratie c'est son job. Et puis, sachant bien qu'elle sera derrière, se permettre de se montrer magnanime : « Mais oui ! re-vote même si c'est moi qui obtiens dix voix d'avance voyez comme je suis la très très gentille de toute cette histoire ».
Si alors revote il y avait - mais il n'y aura pas -, il s'agirait d'oublier définitivement la politique, le débat d'idées, la question de la ligne politique et de celles des alliances, pour demander aux militants une opération mains-propres et donc un plebiscite en faveur de la très innocente victime de l'insupportable acharnement des méchants méchants qui veulent rien qu'à éliminer la très très gentille Ségolène Royal et par tous les moyens même les plus vils.
De cette manière, l'espoir serait dans le fait qu'un tel re-vote ne produirait pas une nouvelle égalité, laquelle serait en ce cas tout aussi contestable que la première fois, puisqu'il y aurait de part et d'autres de nouvelles irrégularités - c'est que, voyez-vous, les tricheurs ne sont malheureusement pas toujours très obéissants. Il s'agit en réalité, vous l'aurez compris, de ce fameux Rien Sauf Royal qu'une égalité ne saurait satisfaire.
Et s'il n'y avait pas re-vote, il suffirait alors de passer les prochains mois, voire les prochaines années, à prétendre que Ségolène la tant gentille démocrate avait en réalité gagné - rassurez-vous, les mythiques 5000 voix d'avance saurait à force devenir réalité - et que les autres sont en vérité illégitimes - en sus bien sûr d'être toujours très très méchants méchants.
Et pourtant, quelque soient les irrégularités - lesquelles se répartissent sur chaque camp et ne sauraient concerner plus d'un demi pourcent des suffrages exprimés -, le résultat du vote des militants est limpide : E-GA-LI-TE E-GA-LI-TE E-GA-LI-TE ! Et l'erreur magistrale du camp Martine Aubry aura été de n'avoir pas su le reconnaître - tant de ce côté là le Tout Sauf Royal est tout aussi puissamment à l'oeuvre - Monumentale erreur tactique que de vouloir s'accrocher à ces 42 voix d'écart qui n'ont aucun sens, qui n'a fait que renforcer le camp Royal dans sa propre stratégie.
Ségolène Royal comme Martine Aubry, l'une et l'autre ont la responsabilité de faire avec ce résultat. Il ne s'agit ni de revendiquer pour l'une la victoire, ni pour l'autre de réclamer un nouveau vote, mais d'assumer une situation imposée par l'expression démocratique de la volonté partagée des militants. J'ai pour ma par ma petite idée de comment cela pourrait se faire, mais c'est d'abord à elles d'en décider : elles se mettent autour d'une table, discutent, éventuellement en viennent aux mains, se rassoient, se recoiffent, discutent encore, négocient le temps qu'il faut et trouvent une solution !
Et pour ceux qui n'auraient pas tout à fait perdu le goût de la politique par les idées, je signale cette excellente analyse de Gérard Filoche de la mutation qui est à l'oeuvre au Parti Socialiste et dont le noeud gordien s'est noué à l'occasion du congrès de Reims et qu'il s'agira bien de trancher.
Où l'on parle de : Opération intox
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Ségolène Sinon Rien contre Tout Sauf Royal : ils sont devenus fous
« Manuel Valls, lieutenant de Ségolène Royal, a annoncé dimanche sur Canal + qu'une plainte serait déposée pour "faux en écriture" contre un décompte de voix de militants socialistes à Lille, bastion de Martine Aubry, arrivée en tête du second tour du vote PS vendredi. » - AFP
« Le premier secrétaire de la fédération PS du Nord, Gilles Pargneaux, proche de Martine Aubry, a annoncé qu'il porterait plainte pour diffamation contre Manuel Valls, après son annonce d'une plainte pour faux en écriture à propos d'un décompte de voix d'une section PS à Lille. » - AFP
Voilà où nous en sommes ! Deux extraits d'une même dépêche AFP qui illustrent tout le délire qui s'empare actuellement de quelques dirigeants socialistes - et je fais là bien attention à ne pas dire les dirigeants socialistes, tant il me semble crucial de ne pas sombrer dans un tous pourris qui serait tout aussi délirant...
Il y a d'abord le fait que Martine Aubry serait arrivée en tête, ce qui à ce stade n'est qu'une hypothèse, hypothèse non avérée et qui le restera tant que le Conseil National du Parti Socialiste n'aura pas statué sur les résultats définitifs, lesquels devraient être annoncés par François Hollande dans les 36 prochaines heures.
Tout a commencé là, dans cette bataille d'intoxication de l'opinion où l'on a d'abord vu les partisans de Ségolène Royal annoncer très prématurément, à peine le scrutin était-il clos, la victoire de leur championne, avançant un résultat de 52% contre 48% (et sur 135 000 voix exprimées, cela représenterait plus de 5000 voix d'avance !). Aussitôt, les partisans de Martine Aubry ont contesté ces chiffres, affirmant que les résultats restaient pour eux très serrés, très proche du 50/50.
Force est de constater que ces derniers avaient raison et que, toutes irrégularités prises en compte, l'écart entre les deux candidates, qu'il soit dans un sens ou dans l'autre, est d'avantage de l'ordre de quelques centaines, voire même de quelques dizaines de voix, que des quelques milliers de voix dont les ségolénistes s'étaient targués. Cette réalité d'un 50/50 était alors une raison supplémentaire pour que Martine Aubry ne s'en aille pas à son tour revendiquer une victoire qui ne lui est pour l'heure en rien acquise.
Il se serait agi plutôt, pour les uns comme pour les autres, pour le moins de se taire et d'attendre les résultats, que d'aller se répandre dans les médias, aussi bien en personne que par lieutenants interposés, afin de poursuivre la grande opération d'intox au travers de laquelle il s'agit surtout de faire peser toutes les suspicions sur l'autre camp. Et s'ils ne savaient pas se taire, du moins pouvaient-ils simplement reconnaître que le seul résultat tangible du scrutin est qu'il place les deux candidates à égalité.
Et ce constat pouvait même - mais ce serait là sans doute un peu trop demander - amener les uns et les autres à se remettre en question. Car pour l'une comme pour l'autre, 50% des voix exprimées - un peu plus pour l'une et un peu moins pour l'autre, qu'importe en réalité - avec 40% d'abstention est d'abord le constat d'un rejet majoritaire de l'une et de l'autre. Sans aucun doute le constat que ni l'une ni l'autre n'est à même d'incarner l'unité des socialistes et cette volonté sur laquelle tout le monde s'accorde d'un renouvellement des responsables.
Je reste d'ailleurs pour ma part persuadé que si Ségolène Royal avait daigné s'effacer en faveur de Vincent Peillon à la suite du vote sur les motions, la synthèse aurait été trouvé et aujourd'hui Vincent Peillon serait le premier secrétaire d'un PS largement rassemblé. Ne le faisant pas, il fallait d'évidence comprendre que pour Ségolène Royal il s'agissait de mettre en place ce credo qui est toute sa motivation : Rien Sauf Elle-même.
Martine Aubry eut alors la même opportunité, s'effacer au profit de Benoit Hamon. Là encore une synthèse majoritaire devenait possible et là encore, assez probablement, Benoit Hamon aurait été porté par les militants à la tête du Parti Socialiste. Mais pour Martine Aubry, visiblement, il s'agissait avant toute autre considération de tuer politiquement Ségolène Royal.
Quoi qu'il en soit, au final, la stratégie de l'une et de l'autre aura échoué : les militants socialistes - et ce n'est pas tellement surprenant - ne sont pas davantage guidés par un Ségolène Sinon Rien que par un Tout Sauf Royal.
Mais cela ne pouvait satisfaire aucun des deux camps. Le jeu de massacre ne s'arrête donc pas et plutôt que de convenir à minima d'un constat d'égalité, chacune préfère l'emporter sur l'autre, à n'importe quel prix et en portant tous les coups jusqu'aux plus irresponsables. On compte une dizaine de voix oubliée ici, quelques autres rajoutées par là - comme si cela pouvait changer quelque chose à la réalité - ; on crie à la fraude - comme si les uns étaient parfaitement blancs et les autres d'une noirceur totale - ; on demande de re-voter - comme si prolonger encore ce cirque était une bonne idée, comme si le résultat pouvait n'être pas une nouvelle égalité - ; on en appelle aux militants, on leur demande de manifester devant le siège du Parti Socialiste - comme s'ils ne venaient pas de s'exprimer, comme si les uns valaient mieux que les autres, comme s'il fallait en sus déclencher une bataille de rue entre les uns et les autres - ; ... et voilà donc maintenant qu'on menace de porter tout cela en justice - comme si on avait le temps d'attendre une décision de justice, comme si une telle décision allait permettre de rassembler les socialistes, comme si on ignorait que l'immense majorité des militants n'attend que cela, qu'on se rassemble et qu'on se mette au boulot : rénover le parti, élaborer un projet, s'opposer à Sarkozy.
STOP ! ... et puis donc faire baisser la température, comme nous y invite Nicolas J.
Martine Aubry, Ségolène Royal, le résultat du vote des militants est que vous êtes à égalité. La conséquence est que ni l'une ni l'autre ne saurait être tout à fait légitime. L'exigence qui en découle est que dans l'intérêt supérieur du Parti Socialiste, c'est-à-dire de ce combat qui nous est commun, est que vous vous mettiez l'une et l'autre au travail. Et si vous faites le constat que cela vous serait impossible de travailler en toute intelligence - ce qui est en effet plus que probable - que l'une et l'autre se désistent en faveur d'un doublon qui saura faire le boulot.
Compte tenu du déroulement de ce congrès, il me semblerait à moi raisonnable que Ségolène Royal consente cette fois à s'effacer derrière Vincent Peillon et que Martine Aubry en face de même au profit de Benoit Hamon. Benoit Hamon, Vincent Peillon : voilà un tandem qui donnerait au Parti Socialiste une autre image de lui-même, et qui lui ressemblerait sans doute davantage. Un bon début pour une rénovation, non ?
Mais en effet, on se moque bien de ce qui me semble. On se moque cependant beaucoup moins que ni l'une ni l'autre n'assume un résultat et ne prenne ses responsabilités...
(je l'ai déjà dit, mais si l'on pouvait au moins commencer par faire taire Manuel Valls et Julien Dray...)
Crédit dessin : © SaT sur La République des Fourmis - Reproduction interdite sans autorisation de l'auteur
Où l'on parle de : Ils sont devenus fous
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Pétition pour un PS uni
Le vote du 21 novembre, plutôt qu'un nouveau prétexte à des affrontements sans fin, est un message positif et clair des militants à leurs élus : nous voulons l'unité, et rien d'autre. Nous vous demandons par conséquent de cesser à partir d'aujourd'hui tous les actes d'hostilité, et de vous réunir sans délai pour constituer un exécutif parfaitement équilibré. Nous voulons la dissolution de ces clans déguisés en "motions", qui sont tout autant capables de dire la même chose avec des nuances infimes, que de changer de position du jour au lendemain pour de simples raisons tactiques. Nous voulons que le PS se mette, là, maintenant, au travail pour définir son programme et sa méthode de gouvernement. Nous voulons être consulté(e)s régulièrement sur les principaux éléments de ce programme. Et nous n'attendrons pas une semaine, pas un jour de plus. Elu(e)s du PS : tout le monde vous regarde, c'est vraiment votre dernière chance."
C'est le texte d'une pétition lancée ce matin par des militants socialistes lyonnais et qui correspond assez précisément à mon état d'esprit actuel.
Je vous invite à la signer et à relayer largement cet indispensable appel à l'unité et à la raison.
Où l'on parle de : Pétition pour un PS uni
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Victoire étriquée de Martine Aubry
Il est deux heures trente du matin et après une soirée où très longtemps les ségolénistes annoncèrent une victoire relativement confortable, où la tendance s'inversa peu après minuit lorsque les partisans de Martine Aubry annoncèrent l'emporter de quelques deux milles voix, où désormais un proche de François Hollande prédit un score qui se jouerait à la centaine de voix près, sans parler des accusations d'intox et de magouilles venues tantôt d'ici tantôt de là et qui ne cessent maintenant de s'amplifier, je décide de m'arrêter sur cette dernière information selon laquelle Ségolène Royal négocierait un partage des responsabilités à la tête du Parti Socialiste, avec Vincent Peillon en premier secrétaire délégué de Martine Aubry.
D'abord parce que ça laisse entendre que Ségolène Royal consentirait à reconnaître sa défaite, même si c'est encore officieusement puisqu'il s'agit de négocier. Ce qui me permet à moi d'annoncer ici la victoire de Martine Aubry.
Mais surtout parce que je vois là une très heureuse initiative et une manière tout à fait séduisante de trouver une sortie par le haut d'une situation qui devient de minute en minute de plus en plus explosive... et qui ne pourrait produire à terme qu'un seul vainqueur en la personne de Nicolas Sarkozy.
Je me suis en effet mis à imaginer un attelage Aubry Peillon Hamon à la tête du Parti Socialiste et je suis désormais tout à fait convaincu - mais cela n'étonnera personne parmi mes lecteurs fidèles - que ce serait là aboutir à la meilleure issue qu'on puisse désormais trouver à ce congrès qui n'en finit plus de sombrer dans le désastre.
On frôle à cette heure l'explosion et in extremis surgirait une solution qui permettrait aux socialistes de se rassembler pour se mettre tous ensemble, dans le cadre d'une équipe largement renouvelée, à la rénovation du fonctionnement interne du Parti Socialiste et à la refondation de son projet politique : les militants n'attendent en réalité que cela !
Rue Solférino, les négociations se poursuivent et sont âpres. Je veux moi aller me coucher avec l'espoir de n'avoir pas été le seul à penser que c'est là une splendide idée, en ce qu'elle ouvrirait enfin sur un espoir qui nous est commun.
EDIT samedi midi : C'est donc 42 voix d'avance pour Martine Aubry. Et c'est donc pour l'heure contestations et anathèmes qui pleuvent, plutôt qu'appels à la raison et à la responsabilité.
Pourtant, la première réalité est que 42 voix d'écart c'est un résultat d'égalité.
L'autre réalité est que si "quelques sections du Nord" présentent une participation avoisinant les 95% et ont voté de façon écrasante pour Martine Aubry, on en trouvera autant partout en France qui avec des mêmes taux de participation ont voté de manière tout aussi écrasante pour Ségolène Royal. Et ce n'est pas même ici comme là une preuve de tricherie, simplement la réalité d'un Parti Politique où la personnalité d'un secrétaire de section oriente massivement le vote des adhérents - et réciproquement d'ailleurs ! C'est aussi que la bonne camaraderie induit tout naturellement les convergences politiques.
C'est donc bien de cette situation d'égalité qu'il faut partir si l'on veut trouver une sortie au bourbier qu'elle a créé. Pour moi, il demeure évident que l'attelage Aubry-Peillon-Hamon dont je parlais déjà cette nuit est pour le moins une excellente base de travail.
(et si l'on pouvait faire taire Manuel Valls, ça aiderait aussi beaucoup, sans doute...)
EDIT samedi soir : Je vous signale le très interressant billet du blog Le petit livre rose : où l'auteur se livre à de petits calculs tout à fait intéressants, qui montrent sans contestation possible que plus on fait abstraction du vote des fédérations suspectes - parce que s'écartant de trop du résultat national - plus la victoire de Martine Aubry apparait comme incontestable (fichier excel à l'appui).
Ou, dit autrement, les votes les plus “massifs”, et donc les plus suspects, avantagent nettement Ségolène Royal... contrairement à ce que l'équipe de cette dernière cherche très ostensiblement à nous vendre afin de réclamer un nouveau vote.
Un nouveau scrutin ? Mais ils sont dingues !!! Ça changerait quoi ? Eventuellement à inverser un peu le résultat et à faire changer de camp la contestation ?
42 voix ou bien 150, ou même 1000 : la réalité demeure la même, c'est en gros du 50/50 et la seule réponse à cette situation est de construire une direction équilibrée et renouvelée, d'accord pour travailler à la rénovation du parti socialiste, d'accord pour travailler à l'élaboration de son projet, et en toute intelligence avec le Conseil National et le Bureau National, tous deux représentatifs du poids des différentes motions.
C'est simple : qu'ils le fassent maintenant !
(et si l'on pouvait faire taire Julien Dray aussi...)
Où l'on parle de : Victoire étriquée de Martine Aubry
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Martine Aubry ou Ségolène Royal : entre ancrage à gauche et rénovation du PS
Le second tour de l'élection du premier secrétaire du Parti Socialiste opposera donc Martine Aubry et Ségolène Royal, deux femmes - et c'est la seule bonne nouvelle de ce premier tour de scrutin - qui se disputeront dès ce soir les suffrages des militants.
Et pour les partisans de Benoit Hamon, il s’agira de choisir entre l’exigence de l’ancrage politique à gauche et la nécessité de la rénovation interne du Parti Socialiste.
Résultats
Au terme de ce premier tour de scrutin (chiffres AFP 1h du matin), Ségolène Royal a obtenu 57.424 voix, soit 42,45%, devant Martine Aubry (46.979 voix, soit 34,73%) et Benoît Hamon (30.880, soit 22,83%).
La participation a été de 59,9% des adhérents socialistes, soit 137.741 voix, un chiffre d'autant plus faible qu'il concerne un parti politique. Cette participation a néanmoins été légèrement supérieure à celle du vote sur les motions le 6 novembre (56,6%) d'un peu plus de 3 points.
Près de 2.500 bulletins blancs ou nuls ont été répertoriés, c'est à dire près de 2% des suffrages exprimés - chiffre cette fois plutôt important.
Benoît Hamon, arrivé en troisième position, a immédiatement appelé les militants socialistes ayant voté pour lui à se reporter "massivement" vendredi sur la candidature de Martine Aubry : «Pour avoir un parti ancré à gauche, attaché au rassemblement de la gauche, moi, j'ai fait le choix de demander aux 30.000 militants, dont les voix ne m'appartiennent pas, de se reporter massivement vers le vote en faveur de Martine Aubry», a-t-il déclaré, ajoutant qu'il s'agissait d'«un choix de culture et d'un choix politique éminent» (la totalité de sa déclaration en video à la fin de l'article).
Prospectives
10 000 voix séparent les deux candidates, quand Benoit Hamon en a recueillies 30 000. La bascule de la victoire devrait donc se faire au deux tiers : si l'appel de Benoit Hamon en faveur de Martine Aubry est suivi par les deux tiers des militants qui ont voté pour lui, c'est cette dernière qui deviendra première secrétaire.
A noter que que si on compare ces résultats avec celui du vote sur les motions, les 25% de Bertrand Delanoë se sont répartis de la manière suivante et à la louche : 10 points sur Ségolène Royal, 10 autres sur Martine Aubry et les 5 derniers sur Benoit Hamon. C'est un échec pour Bertrand Delanoë qui avait appelé ses partisans à voter pour Martine Aubry et certainement une indication quant au choix opéré par la tendance François Hollande, sans doute très majoritairement en faveur de Ségolène Royal.
On peut néanmoins faire l'hypothèse que les partisans de Benoit Hamon seront plus susceptibles, non pas de suivre les consignes de ce dernier, mais de partager un avis qui les conduira à faire le même arbitrage en faveur de Martine Aubry.
Le second tour pourrait néanmoins bien se jouer à quelques centaine de voix près...
Analyse
Ceux qui me lisent régulièrement savent déjà que je suis déçu de l'élimination de Benoit Hamon, comme ils savent que mon engagement en sa faveur était le fruit d'un constat somme toute assez simple : Benoit Hamon incarnait à la fois l'ancrage à gauche, la volonté de rénover le vieux Parti Socialiste et l'exigence d'un changement de génération.
Pour le changement de génération, l'occasion est manquée. Et même si Ségolène Royal met en avant une équipe largement rajeunie, il demeure qu'elle comme Martine Aubry appartiennent à cette génération qui apparaît particulièrement incapable d'en finir avec une vieille, stérile et destructrice querelle qui repose avant tout sur des inimitiés personnelles. Laquelle querelle se poursuivra donc et ce quelque soit le résultat de ce soir, et d'autant plus violemment que le résultat sera serré. Et je dirais même plus, de manière plus destructrice encore si c'est Ségolène Royal qui l'emporte, tant celle-ci aurait alors à cohabiter avec des instances dirigeantes qui lui seront majoritairement hostiles, puisqu'elles seront ici d'une répartition à la proportionnelle du vote sur les motions. Tant pis donc, ainsi en ont décidé les militants.
Il est tant vrai que Martine Aubry a le soutien de tout ce que le Parti Socialiste compte encore d'éléphants, que la nécessaire rénovation du parti semblerait en des mains plus sûres si celle-ci était confiée à Ségolène Royal tant cette dernière s'est engagé derrière cette volonté d'ouvrir portes et fenêtres aux citoyens comme au mouvement social, et de démocratiser les pratiques, participativement bien entendu.
A ceci près, cependant, que l'on sait que la première volonté de Ségolène Royal est de présidentialiser un parti afin d'en faire sa machine de guerre électorale personnelle en prévision de cette candidature en 2012 qui lui tient plus que toute autre chose à coeur. Je n'oublie pas en effet que nous aurions pu éviter de nous retrouver dans la situation actuelle où l'unité du Parti Socialiste est gravement en péril, pour peu qu'elle ait consenti à laisser sa candidature au frigidaire et de s'effacer devant un Vincent Peillon derrière lequel un large rassemblement semblait pouvoir s'opérer au soir du vote sur les motions, tant il semblait en mesure d'incarner mieux qu'elle le désir qui s'était alors déjà exprimer en faveur de la rénovation du parti, du changement de génération et d'un ancrage à gauche.
Il reste que la politique est d'abord affaire de ligne politique. Or en ce domaine, je l'ai déjà écrit, Ségolène Royal est prisonnière de sa stratégie d'alliance in fine avec les libéraux du centre droit, stratégie qui n'aura de cesse de la contraindre à veiller à être modemo-compatible - car comment sinon espérer rallier cet électorat, sans même parler contrat de gouvernement avec l'appareil - et on sait qu'il s'agit également de cela.
En ce domaine - la ligne politique - Martine Aubry offre incomparablement plus de garanties non seulement de l'ancrage à gauche du Parti Socialiste, mais également du projet politique qu'il s'agira pour lui de débattre et de définir dans les mois à venir, chantier qui se devra d'ailleurs de débuter dès la semaine prochaine - en sus du travail d'opposition au sarkozysme qui n'a été ces dernières semaines que trop délaissé.
C'est pourquoi il ne devrait surprendre personne que Benoit Hamon ait sans hésitation appelé à voter pour Martine Aubry, comme il ne devra surprendre personne qu'une large majorité de ceux qui ont voté pour lui hier soir apporte en effet ses suffrages à la Maire de Lille. Ce sera en tout cas, avec un enthousiasme plus que modéré mais sans la moindre hésitation non plus, le choix que je ferai - et sans rien renier dès demain de ma volonté exigeante d'une profonde rénovation du Parti Socialiste.
Oui, décidément, une bien belle occasion de manquée...
... mais la politique à également cela de grand que jamais rien n'y est acquis, où même la défaite n'est jamais qu'une étape !
Où l'on parle de : Entre ancrage à gauche et rénovation du PS
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Benoit Hamon : une gauche radicale, un socialisme crédible
Benoit Hamon a mis en ligne sur son site une dernière vidéo de campagne pour appeler les militants socialistes à voter en faveur de sa candidature :
Du pur jus gauchiste ! diront certains. Et ils auront raison, dans une certaine mesure. Les images sont fortes qui parlent de la crise économique et du mouvement social, qui évoquent la crise financière, la montée du chômage, la dégringolade du pouvoir d'achat, de ce « monde qui s'effondre », des images qui illustrent l'exaspération sociale et la colère dans nos banlieues, les mobilisations sociales et les défaites du Parti Socialiste, ses absences aussi, et une bande son qui appelle au combat politique « duquel peut naître une espérance »... et le tout en moins de deux minutes.
On n'a plus l'habitude d'un Parti Socialiste qui parle ainsi, presque crûment. Et c'est une partie du problème. L'autre partie provenant du fait que, sauf à être un parti politique purement contestataire, un parti de posture, tenir un tel discours exige d'être en mesure d'apporter des réponses à la hauteur du constat, ce que nous le savions bien - ou du moins avons-nous fini par l'apprendre - la sociale-démocratie n'était pas en mesure de promettre.
C'est tout l'intérêt de ce qui s'est passé à la gauche du Parti Socialiste, cette mutation qu'il a opéré vers un projet qui ne se contente plus d'osciller entre marxisme et keynesianisme. Il ne s'agit plus pour la gauche du Parti Socialiste de tirer le curseur vers la gauche de cet axe très XXème siècle et qui dans une large mesure est obsolète. Une mutation profonde du projet a été engagé qui, ajoutant une troisième dimension à la réflexion politique, a permis de s'élever au-dessus des deux premières, de les transcender en quelque sorte.
Benoit Hamon ne la nomme pas encore ainsi, mais qu'importe : le fait est que cette dimension nouvelle de l'analyse politique se nomme écologie politique, une doctrine qui part du constat que la faillite libérale provient du fait que le marché seul est incapable de tenir compte du coût des externalités négatives - pour vulgariser, disons qu'il s'agit des dommages collatéraux subits par le corps social et son environnement - et aboutit à la conclusion que la puissance publique doit intervenir avec force afin de réglementer le marché en lui imposant d'internaliser ces coûts, de les supporter en totalité. Il ne s'agit pas tant de dire pollueur payeur que de rendre le coût de la pollution si important que les investissements s'orienteront vers des solutions non polluantes. Il ne s'agit pas tant de pénaliser les licenciements, mais d'en faire supporter aux entreprises tout le coût social - qui ne se limite pas à l'indemnisation chômage - de telle manière que la ressource humaine ne soit plus la première variable d'ajustement... Et caetera.
Et cela change tout. Parce que le Parti Socialiste est alors à nouveau fondé pour, devient plus légitime à s'opposer à la droite, souligner la faillite libérale, dénoncer les dégâts sociaux de la crise, parler d'urgence social et d'urgence écologique, s'impliquer dans le mouvement social, pour la bonne et simple raison qu'il offre une alternative politique aussi radicale que crédible.
C'est ainsi que Benoit Hamon reçoit le soutien d'éminents économistes - dont Liêm Hoang-Ngoc n'est pas des moindres - qui ont cette semaine lancé un appel en sa faveur et viennent crédibiliser une démarche que beaucoup à gauche désespérait de voir émerger :
Appel d’économistes en faveur de Benoît Hamon
L’économie subit sa plus grave crise depuis 1929. Les pistes que notre pays empruntera pour en sortir dépendront avant tout des choix politiques qui seront réalisés. C’est pourquoi, en tant qu’économistes, quelles que soient nos appartenances politiques, nous ne sommes pas indifférents à l’issue des débats internes qui se mènent au sein du principal parti d’opposition. Nous sommes conscients que ce dernier jouera un rôle décisif dans la constitution dans une alternance capable de déboucher sur une alternative réelle. Pour ce faire, le Parti Socialiste devra tirer un bilan sans concession des politiques menées depuis plus de deux décennies.
Au cours de cette période, la financiarisation de l’économie, la déréglementation bancaire, le libre-échange incontrôlé, l’ouverture à la concurrence dans les secteurs de service public, les soi-disant réformes structurelles du marché du travail et les politiques macroéconomiques conduites ont creusé les inégalités et se sont avérées incapables d’assurer le plein-emploi. Ces politiques ont, au contraire, abouti à une détérioration constante de la situation du plus grand nombre. Elles ont, de reniements en reniements, conforté les discours sécuritaires et identitaires. Il convient donc, dès maintenant, de penser la politique nécessaire pour assurer la transition vers un nouveau modèle de croissance et de développement.
Les réflexions économiques des candidats à la direction du Parti Socialiste laissent présager de la politique qui sera menée. A cet égard, les chantiers que propose de creuser Benoît Hamon ouvrent des voies nouvelles et pertinentes dans le contexte actuel. Parmi ceux-ci, l’entrée de l’Etat dans le capital des banques recapitalisées est nécessaire pour contrôler, consolider et étendre la sphère du pôle public financier pour reconstruire les conditions de stabilité et d’efficacité du mécanisme du crédit. Ceci doit aussi se faire dans le cadre d’un redéploiement de la politique industrielle qui assume pleinement les responsabilités de l’État comme organisateur, comme initiateur, mais aussi le cas échéant comme producteur.
Les services publics doivent être le modèle de référence de la gestion des biens collectifs. Le système fiscal doit être rendu plus redistributif pour éviter que l’effort de financement de l’action publique ne pèse avant tout sur les classes moyennes et modestes qui subissent la crise du pouvoir d’achat. Ceci implique un contrôle sur les mouvements financiers afin de pénaliser les pratiques d’évasion et de concurrence fiscale qui sont les moyens que les plus riches se donnent pour se soustraire à la loi commune et violer ainsi les principes de la décision démocratique.
La puissance publique doit organiser, avec les partenaires sociaux, l’indexation des salaires sur l’inflation et les gains de productivité. L’extension de l’assiette des cotisations sociales doit être privilégiée, comme alternative au recul de l’âge de la retraite pour préserver le système par répartition. La progressivité et la modulation de l’impôt sur les sociétés doit permettre de taxer la rente et de favoriser les entreprises qui investissent et qui créent des emplois. On ne saurait tolérer plus avant les pratiques de dumping fiscal, social et écologique que l’on constate hors mais aussi dans l’UE et qui aboutissent, par le biais du libre-échange, à défaire de l’extérieur ce qui a été construit à l’intérieur. Des protections sont donc nécessaires et seront à mettre en place, notamment par l’activation du principe de préférence communautaire, pour mettre fin à la déflation salariale et garantir les normes sociales et écologiques contre le libre-échange.
Un véritable New Deal doit être élaboré pour sortir l’Europe de la récession. Pour cela, l’Europe doit pouvoir lever l’emprunt. Le pacte de stabilité doit être définitivement abandonné. Les statuts de la BCE doivent être refondés pour permettre une politique monétaire faisant du plein emploi et de la stabilité du système financiers des objectifs à part égal avec la stabilité des prix. L’action de la BCE doit être intégrée dans une logique de politique économique globale, à l’inverse du dogme d’indépendance qui n’est ni fondé en théorie, ni désormais applicable en pratique.
La candidature de Benoît Hamon a d’ores et déjà permis de réhabiliter de nombreux débats interdits de politique économique. Il est temps de les aborder de front, car la poursuite d’une stratégie consistant à amender à la marge le modèle de croissance néo-libéral se trouverait décalée vis-à-vis des défis qu’il faut relever en ce moment-charnière pour élaborer un programme de sortie de crise.
Premiers signataires : Bruno Amable (Université de Paris 1) Angel Asensio (Université de Paris 13) Liêm Hoang-Ngoc (Université de Paris 1) Dany Lang (Université de Paris 13) Jean-Marie Monnier (Université de Paris 1) Stefano Palombarini (Université de Paris 8) Bernard Paulré (Université de Paris 1) Muriel Pucci (Université de Paris I) Nathalie Rey (Université de Paris 13) Jacques Sapir (EHESS) Richard Sobel (Université de Lille 1) Damien Sauze (Université de Bourgogne) Nadine Thévenot (Université de Paris 1) Bruno Tinel (Université de Paris 1) Stéphane Tizio (Université de Bourgogne) Julie Valentin (Université de Paris 1) Franck Van de Velde (Université de Lille 1)
Où l'on parle de : Une gauche radicale, un socialisme crédible
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Un second tour Hamon Royal
Dans mon Twitter, on me dit que la rue Solférino estime que Ségolène Royal arriverait en tête avec plus de 35% des suffrages - mais moins de 40% - et que Martine Aubry et Benoit Hamon seraient au coude à coude avec un peu plus de 30% des votes des militants - mais moins de 35%.
Tout le monde sait ce qu'il faut penser des chiffres qui circulent sous le manteau, et qui émergent comme miraculeusement ici ou là. Il reste que ce sont là des chiffres qui me paraissent censés, qui forment une hypothèse crédible.
Et je me dis alors que l'élimination de Martine Aubry au soir du premier tour laisserait la place à un second tour entre Ségolène Royal et Benoit Hamon qui aurait l'immense avantage de permettre finalement aux militants de conclure utilement cette interminable phase de congrès en tranchant de manière très nette entre deux orientations stratégiques, deux conceptions de la rénovation, deux conceptions du combat politique, deux conceptions du socialisme :
Deux orientations stratégiques : Pour Benoit Hamon, le Parti Socialiste doit refuser toute idée d'alliance partisane avec le Modem, afin d'ancrer sans ambiguïté le Parti Socialiste dans la gauche et lancer dans les meilleurs conditions la bataille des idées qu'il s'agit de gagner afin que, sortant vainqueur des prochaines présidentielles, le candidat de la gauche soit en mesure de mener une politique de transformation sociale aussi crédible qu'ambitieuse et résolue.
Pour Ségolène Royal, il s'agit de prendre comme une donnée le rapport de force droite gauche, aujourd'hui largement défavorable à la gauche, et d'en conclure à l'inéluctabilité d'un accord de second tour avec le Modem. De fait, avec cette perspective, il s'agira dans les trois ans à venir de réfléchir à un projet socialiste qui soit en mesure de ne pas trop rebuter les libéraux de centre-droit avec lesquels il faudra donc s'allier.
Deux conceptions de la rénovation : Pour Benoit Hamon, il s'agit de construire un nouveau Parti Socialiste qui ressemble d'avantage à la France, dans lequel et à tous les échelons de responsabilités, puissent être présentes toutes les générations, toutes les catégories socio-professionnels, toutes les origines. Il s'agit également de mettre en accord les règles internes avec la conception socialiste de la démocratie, laquelle conduit les socialistes à plaider pour l'instauration d'une VIème République où le parlementarisme se substitue au présidentialisme.
Pour Ségolène Royal, il s'agit d'abord d'instaurer au Parti Socialiste un fonctionnement aligné sur le présidentialisme de la Vème République, avec un présidentiable - elle-même - à sa tête, un chef doté d'un fusible - en la personne de Vincent Peillon - nommé au poste de premier secrétaire délégué à la gestion du quotidien qui amortira les chocs d'éventuels revers électoraux à venir, préservant ainsi la candidature du chef - entendez, Ségolène Royal elle-même.
Et c'est ainsi qu'alors qu'au lendemain du vote des militants sur les motions, alors que la motion E avec Ségolène au frigo était arrivée en tête et que se dessinait un rassemblement des socialistes autour d'une ligne politique ancrée à gauche, une volonté de rénovation et la candidature de Vincent Peillon au poste de premier secrétaire, Ségolène Royal a choisi de sortir de son frigidaire sa propre candidature, sachant pourtant que s'était là le moyen le plus sûr de rallumer toutes les vieilles querelles et le feu de la division des socialistes.
Et c'est ainsi que le changement de génération demeure de ce côté là cantonné en deuxième ligne.
Deux conceptions du combat politique : Faisons bref ici. D'un côté l'engagement collectif, le débat de fond, la bataille des idées, la réflexion à un projet alternatif, l'opposition à la droite, la mobilisation aux côtés du mouvement social. De l'autre, un peu de tout cela aussi - ne caricaturons pas - mais aussi la pipolisation, les paillettes, la culture du chef - ne disons pas "le culte du chef" -, la caporalisation des militants, le pragmatisme jusqu'aux renoncements, la démagogie jusqu'aux frontières du populisme, l'ambition personnelle jusqu'à la mise en péril de l'intérêt collectif, etc...
Deux conceptions du socialisme : Pour Benoit Hamon - et c'est le point de départ de la motion qu'il a soumise aux militants - le premier constat est celui de l'échec du compromis social-démocrate : échecs électoraux qui s'expliquent par la mise en oeuvre d'une politique qui partout a échoué à se poser en alternative de poids au libéralisme, à lui opposer une résistance sérieuse, à réaliser la transformation sociale que l'on attend de la gauche. Il s'agit donc de dépasser ce modèle et de proposer une politique plus de rupture que d'accompagnement, où la puissance publique cesse de reculer et intervient fortement pour réguler et réglementer les marchés, les contraignant à supporter les coûts sociaux et environnementaux des investissements productifs. Il s'agit d'ancrer le PS à gauche.
Pour Ségolène Royal, qui a opportunément déclaré que le modèle social-démocrate était « périmé », il suffit de lire la motion E, et plus simplement encore de connaître le positionnement politique à l'intérieur du PS de ses signataires, tels que les très sociaux-démocrates que sont les barons Collomb et Guérini ou le très social-libéral Manuel Valls, pour comprendre que la sociale-démocratie demeure encore et toujours au coeur de sa pensée politique, comme elle était déjà au coeur de son pacte présidentiel dont elle n'a jamais renié que les mesures les plus sociales, justement. Et même si elle s'en éloignait, la nécessité de ne pas effaroucher les libéraux du centre-droit l'y ramènerait très vite.
Oui, décidément, un second tour entre Benoit Hamon et Ségolène Royal serait l'opportunité pour les militants de sortir par le haut de ce congrès en tranchant de manière nette entre deux orientations politiques et deux conceptions du changement.
Et aux militants qui s'interrogerait sur une stratégie de vote au premier tour qui préserve leurs chances de l'emporter au second, je profite de l'occasion pour leur rappeler que dans un scrutin majoritaire à deux tours entre seulement trois candidats, la notion de vote utile n'a aucune pertinence - dit autrement, dans cette configuration, le seul vote utile consiste à voter directement pour son candidat préféré. N'hésitez plus, saisissez cette opportunité, osez l'audace et votez pour Benoit Hamon.
Où l'on parle de : Un second tour Hamon Royal
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Ségolène Royal et le Modem : l'Aveu !
L'aveu de l'alliance avec le Modem :
Ce matin sur France-Inter, une auditrice a posé une question limpide à Ségolène Royal : « Madame Royal est-elle capable de nous dire clairement qu'elle est POUR un appel au ralliement des militants du Modem et CONTRE un rapprochement des deux formations politiques. »
La réponse aurait pu être tout aussi limpide : OUI je peux répondre clairement et, surtout, OUI je suis POUR un appel aux militants et CONTRE une alliance entre les deux partis politiques - ou du moins tant que l'un est de droite et l'autre de gauche. Force est de constater que la réponse est NON :
Non, Ségolène Royal - qui par ailleurs n'a de cesse de prôner la clarté - n'est pas capable de répondre clairement à cette question simple. Et oui, donc, il serait envisageable, si Ségolène Royal venait à prendre la tête du Parti Socialiste, que le Parti Socialiste et le Modem s'engagent mutuellement dans un contrat de gouvernement. Et donc oui encore, le Parti Socialiste pourrait de facto se retrouver à gouverner avec les libéraux et se placer ainsi dans l'incapacité, une fois de plus, une fois de trop !, de mener une politique de transformation sociale ambitieuse à la hauteur des urgences sociales et écologiques du XXIème siècle, une politique résolument ancrée à gauche en rupture avec un libéralisme d'autant plus destructeur qu'il est aujourd'hui moribond. Bref, ce serait le grand retour du renoncement social-démocrate façon fin de XXème siècle et son cortège de désillusions. Un bien étrange moyen de prôner le changement et l'ancrage à gauche voulu par les militants socialistes.
L'autre aveu : Georges Frêche
Pas tout à fait accessoirement, Ségolène Royal a également été interrogé ce matin sur ses intentions quant à la réintégration de Georges Frêche dans le Parti Socialiste.
Le moins qu'on puisse dire est qu'elle a manié davantage l'esquive que la clarté, arguant qu'il s'agirait là d'une décision collective à prendre après qu'elle aurait été élue. Pressé par le journaliste de se faire plus précise quant à sa propre opinion, la candidate s'est cantonné à faire l'éloge d'un homme qui a par ailleurs lui-même confié publiquement avoir négocié son soutien à la motion Royal contre sa réintégration au sein du Parti Socialiste.
Rappelons que Georges Frêche, président du conseil régional de Languedoc-Roussillon, président de la communauté d'agglomération de Montpellier et conseiller municipal de Montpellier, a été exclu du Parti Socialiste, il y a un peu moins de deux ans, suite à ses déclarations à propos de l'équipe de France de football : « Dans cette équipe il y a neuf Blacks sur onze. La normalité serait qu'il y en ait trois ou quatre. Ce serait le reflet de la société. Mais là, s'il y en a autant, c'est parce que les Blancs sont nuls. J'ai honte pour ce pays. Bientôt, il y aura onze Blacks. Quand je vois certaines équipes de foot, ça me fait de la peine. »
Il ne s'agit pas de juger ici du caractère plus ou moins odieux d'une telle déclaration, mais de constater que pour le moins elle est une outrance faite au socialisme, des propos incompatibles avec l'idée-même qu'on peut se faire à gauche de l'universalité de l'homme, qui ne distingue pas les êtres humains selon leur couleur de peau, ou autres caractères ethniques, pour faire des généralités chargées de sous-entendus quant aux aptitudes des uns ou des autres.
Le moins qu'on puisse dire est que venant d'une femme qui en fait beaucoup sur le thème de la France métissée, une telle indulgence est plus que suspecte. Il apparaît sans aucune ambiguïté que des discussions ont eu lieu, que des petits arrangements ont été pris et que des promesses ont été faites en échange de certains soutiens dont on sait qu'ils ont du poids. Pour une candidate qui clame partout le renouvellement des pratiques politiques, ce point est particulièrement éclairant. Ségolène Royal se gargarise régulièrement de vouloir mettre en accord les discours et les actes, mais de tout évidence ce n'est là que du discours...
Une chose est certaine, c'est qu'en cas d'élection de Madame Royal au poste de premier secrétaire du Parti Socialiste, les militants du Languedoc-Roussillon vont devoir attendre un peu avant qu'une équipe rajeunie et des pratiques nouvelles parviennent jusque chez eux. De même que dans les Bouches-du-Rhône, où le très jeune et très moderne Jean-Noël Guérini semble avoir une conception toute personnelle de la démocratie interne.
Où l'on parle de : Ségolène Royal : l'Aveu !
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A propos de l'ancrage à gauche
Ce matin sur France Inter, en revenant sur les raisons de la défaite de Ségolène Royal aux dernières présidentielles, Benoit Hamon a parfaitement résumé l'essentiel de ce qui justifie, même d'un point de vue stratégique, la nécessité pour le Parti Socialiste de renouer enfin avec l'ancrage à gauche de sa ligne politique.
Par la même occasion, vous avez dans cette séquence de moins de 1'30", le condensé de ce qui doit conduire un militant socialiste à choisir Benoit Hamon jeudi et vendredi prochain :
Où l'on parle de : A propos de l'ancrage à gauche
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Se rassembler à gauche avec Benoit Hamon
Une certitude que nous pouvons avoir est que si le prochain premier secrétaire du Parti Socialiste est Ségolène Royal ou Martine Aubry, la guerre des socialistes se poursuivra. Dans un cas comme dans l'autre, les perdants chercheront à obtenir leur revanche sur les gagnants en les faisant trébucher et ces derniers imputeront leurs difficultés et éventuellement leurs échecs aux divisions dont les premiers seront tenus pour responsables. Dans un cas comme dans l'autre, il nous faut en être bien conscient, nous n'en aurons pas fini avec la division. Tout au plus, cette guerre qui était ouverte ces derniers mois se transformera en une guerre de positions, une guerre de tranchées et menée largement dans l'ombre, par les uns comme par les autres.
En finir avec une querelle interminable, née de la guerre de succession post-mitterrandienne, c'est tout l'intérêt du saut générationnel en faveur duquel je plaide depuis plusieurs semaines sur ce blog - et en réalité depuis le lendemain des élections présidentielles et législatives de 2007. J'avais estimé pour ma part que la plus grande chance de parvenir à ce changement de génération résidait en Vincent Peillon. Malheureusement, celui-ci n'a pas souhaité assumer toutes ses responsabilités, cédant à la volonté intransigeante d'une Ségolène Royal incapable de s'effacer - de même qu'après avoir été tentée, Martine Aubry n'a pas non plus consenti à s'effacer derrière Benoit Hamon. Lequel pourtant, et contrairement à Vincent Peillon, a décidé d'assumer ses responsabilités, en particulier donc celle d'offrir aux militants cette alternative d'une sortie du cycle infernal de la division.
Mais peut-être devriez-vous prendre simplement dix petites minutes pour décider s'il ne serait pas préférable que le Parti Socialiste tienne désormais ce discours et ressemble désormais à ça :
Notons en passant que Benoit Hamon a trouvé un accord politique de bel augure avec la motion Utopia (F), exposé ici en 2 minutes par Franck Pupunat :
Où l'on parle de : Se rassembler à gauche avec Benoit Hamon
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Réponse à Juan de Sarkofrance
Pragmatisme et renoncements du socialisme
L'indispensable Juan de Sarkofrance a publié sur leftblogs.info un billet intitulé « Je n’ai pas été déçu par le Congrès Socialiste », dans lequel il dresse un bref tableau de ses impressions de congrès et où, du constat selon lequel les socialistes seraient en réalité d'accord sur le fond politique, il conclut au fait que le bon choix serait celui de porter Ségolène Royal à la tête du Parti Socialiste.
J'ai d'abord commencé un petit commentaire au-dessous de son billet, qui a rapidement cessé d'être petit pour bientôt n'avoir plus le format concis d'un commentaire. Pis, au même moment, j'ai découvert un autre billet - « Parti Socialiste : le malentendu de l’unité » -, plus récent encore, dans lequel il revient sur la question du Modem et expose une vision très pragmatique du combat politique.
Bref, plus moyen d'en rester au commentaire. Autant faire un billet où ce que j'ai à dire apparaîtra sans doute un peu plus construit.
Juan écrit : « un parti doit avoir des statuts cohérents avec le régime politique dans lequel il concourt », et constate que le Parti Socialiste « conserve encore quelques restes d’un fonctionnement digne de la 4ème république ». Le constat est juste : il est vrai que demeure une pointe de IVème République dans le PS et que le présidentialisme est plus en phase avec la Vème... Mais il faut alors se souvenir de ce temps pas si lointain où les socialistes en appelaient à l'instauration du VIème République, où le parlementarisme se substituerait au présidentialisme. Faut-il renoncer à cette ambition ? Faut-il surtout oublier pourquoi cette ambition, ce qui la justifiait et la justifie encore ?
Le monde ne nous ressemblant pas, il faudrait renoncer à changer le monde et se contenter de lui ressembler - afin simplement d'être en phase ? C'est là bien tout le problème du Partie Socialiste depuis plus de deux décennies, c'est-à-dire depuis les premiers renoncements de l'ère mitterrandienne, et en passant par le tragique « l'Etat ne peut pas tout » de Lionel Jospin qui scella le sort des deux dernières présidentielles. Le socialisme ne sachant plus comment changer la vie dans un monde devenu trop complexe et trop grand, il ne pouvait que s'adapter, corriger un peu, ici ou là. Reconnaissant que le monde était plus fort que lui, il avait renoncé à son ambition... pour l'Homme. Il avait de fait renoncé au socialisme.
Alors, plutôt que de renoncer et de nous adapter, pour être en phase, posons-nous chaque fois la question de ce qui fonde notre engagement, notre ambition. nous voulions en finir avec le présidentialisme de la Vème République : pourquoi ? Parce que la gauche n'a que faire de la culture du chef. Parce que nous en connaissons les dérives - et nous les voyons aujourd'hui à l'oeuvre. Parce que nous croyons en l'intelligence collective et en la force positive de la démocratie. Parce que la démocratie est l'outil premier du socialisme - et il faudrait d'ailleurs s'interroger aussi sur la cohérence entre présidentialisation et démocratie participative...
Non, je ne crois pas que le pragmatisme soit nécessairement le passage obligé de toute victoire - ou en tout cas tant que l'on espère encore en des victoires utiles. Je crois que lorsque le pragmatisme devient renoncement ou cynisme, souvent les deux à la fois, on a déjà perdu le combat que l'on mène, parce que l'on a oublié pourquoi, et surtout pour qui, on avait engagé ce combat.
Non, il ne s'agit pas de crier « A Gauche » plus fort que les autres. Et puis surtout, non, les précaires ne se foutent pas « qu'on gouverne exactement pareillement » de ce que nous avons toujours fait... et qui ne les a que très marginalement rendu moins précaires.
Il ne s'agit pas de crier « A Gauche », mais il s'agit de réinventer la gauche, de ne pas en rester à une sociale-démocratie qui ne cesse et partout d'échouer, qui met des pansements - et c'est mieux que rien, mieux que ne fera jamais la droite - mais qui ne guérit pas, qui ne possède pas les moyens de guérir.
Non, la sociale-démocratie ne saurait répondre ni à l'urgence sociale ni à l'urgence écologique - ni même aux horreurs économiques qui se succèdent à travers le monde et dévastent les hommes. Elle ne saurait y répondre, à ces deux urgences, ne serait-ce que parce qu'elle n'a pas intégré dans son architecture que ce sont là les deux faces de la même pièce.
C'est pourquoi il y a pour les socialistes, cette semaine, un véritable choix politique à faire. Un choix entre ceux qui prônent bon an mal an la poursuite du projet social-démocrate, et ceux qui ont commencé à ouvrir de nouvelles pistes à gauche - et Benoit Hamon a fait en ce domaine la preuve que le projet socialiste nouveau est en passe de trouver une cohérence dans cette «radicalité crédible» qu'a évoquée une Ségolène Royal, dont il faut bien reconnaître qu'elle a parfois le sens de la formule juste - mais les mots ne suffisent pas... les mots ne peuvent suffire quand on les prononce tous.
Or il y a une réalité qui permet d'évaluer Ségolène Royal quant çà ce choix politique essentiel qu'il faut faire, l'évaluer par delà les mots qu'elle prononce ici ou là, par delà cette stratégie qu'elle avait d'abord mise en oeuvre lors des présidentielles et qui consiste à aller systématiquement chasser sur le terrain de l'adversaire. Cette réalité est toute entière contenue dans le texte qu'elle a signé et avec lequel elle se présente devant les militants, toute entière inscrite dans cette motion E qui de toute évidence est dans l'exacte continuité sociale-démocrate, une voie prônée d'ailleurs sans ambiguïté par ses co-signataires, Jean-Noël Guérini, Gérard Collom et Manuel Valls entre autres.
C'est pourquoi, si l'on se concentre sur le cœur du problème socialiste, c'est-à-dire sur ce qui concerne très concrètement les précaires auxquels les socialistes doivent de se réinventer et de cesser d'être dans les renoncements timorés - même mâtinés d'une compassion très émouvante et très fraternelle -, il n'y a en effet pas à hésiter et, pour ma part, je suis socialiste et je voterai Benoit Hamon sans la moindre hésitation.
Où l'on parle de : Réponse à Juan de Sarkofrance
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Congrès de Reims : ma synthèse
Un congrès désespérant. Deux candidates désespérantes. Et Benoit Hamon pour ce qui reste d’espérance en un Parti Socialiste rénové et ancré à gauche. Les socialistes sauront-ils se souvenir enfin qu’être de gauche c’est d’abord oser aller de l’avant, oser renverser l’ordre établi ?…
Lamentable !
Le visage qu'a présenté le Parti Socialiste aux français, et même à ses militants, est lamentable. Je ne vais pas jouer au petit jeu des responsabilités, simplement dire que le résultat est désastreux... et ne pas épiloguer. Ne pas épiloguer, aller de l'avant, continuer quand même, se tourner déjà vers les lendemains, et feindre de ne pas être trop pessimiste, ni trop amer.
Non, tout de même. D'abord me souvenir une dernière fois qu'il y a une semaine encore, après que les militants avaient voté sur les motions, on parlait d'ancrage à gauche, de rénovation du parti, de changement de génération... et de Vincent Peillon. Et puis Ségolène Royal a voulu être que la candidate ce soit elle. Personne d'autre qu'elle et son ambition. Et alors Martine Aubry n'a pas voulu que ce soit Ségolène Royal. Benoit Hamon non plus. Il y eut aussi Bertrand Delanoë qui ne voulait ni de Ségolène Royal ni de Benoit Hamon. Et Martine Aubry qui ne voulait pas de Bertrand Delanoë. Et Benoit Hamon qui estimait être le meilleur candidat pour la gauche. Et Ségolène Royal qui continuait à ne voir qu'elle-même et son destin présidentiel. Ce qui inquiète tous les autres. Et puis rien.
Me souvenir aussi qu'hier soir, pourtant, tout semblait s'être clarifié, sur le fond. Un clivage politique s'était révélé entre les partisans de la motion E et les autres, sur la question cruciale, essentielle, de l'ancrage à gauche. On semblait avoir enfin compris que la question des alliances n'était pas un prétexte, mais bien une problématique indissociable de celle de la ligne politique. La motion E apparaissait enfin pour ce qu'elle était, c'est-à-dire minoritaire. Il y avait la place pour une majorité, pour bâtir une synthèse majoritaire autour d'une ligne politique cohérente et à gauche. Un Parti Socialiste qui choisirait la gauche, c'était une perspective alléchante. Mais l'inertie de l'appareil et le conflit des egos eurent raison d'une espérance qui fût tué dans l'oeuf. Opportunité rare, occasion manquée et on pourrait bien avoir longtemps pour s'en mordre les doigts.
Tant pis. Prendre acte, donc. Recommencer à partir de là. Comprendre la situation. Ne pas oublier que si les français n'ont certainement pas besoin de ce parti socialiste là, ils ont besoin de l'alternative socialiste, besoin de gauche. La responsabilité des militants socialistes demeure immense, dès la semaine prochaine et dès ce vote sur le premier secrétaire qui sera donc déterminant pour l'avenir.
Trois candidats, deux lignes politiques. D'un côté Ségolène Royal, de l'autre Martne Aubry et Benoit Hamon.
Ségolène Royal : Sa ligne politique est celle inscrite dans la motion E, issue de l'alliance avec Gérard Collomb, Jean-Noël Guérini et Manuel Valls, barons de la vieille social-démocratie tendance libérale et Modem-compatible.
Mais il ne s'agit pas seulement de cela. Et même si la ligne politique demeure essentielle dans ce choix, la crise financière est passée par là qui semble avoir ouverts bien des yeux sur la nécessité d'un réancrage à gauche. On notera à ce sujet que Ségolène Royal dans son discours, ce dimanche matin à Reims, a parlé de radicalité crédible à gauche. Radicalité, un terme dont elle se servait jusqu'à présent pour renvoyer Benoit Hamon à de supposés archaïsmes. Mais on le sait, la stratégie électorale de Ségolène Royal est toujours la même qui consiste à s'en aller surenchérir sur le terrain de l'adversaire - qu'il s'agisse de Nicolas Sarkozy lors des dernières présidentielles ou de Benoit Hamon cette fois-ci - au point qu'on en finit toujours pas se demander où se trouvent ses convictions à elle, sinon dans l'ambition qu'elle a chevillée au corps de l'emporter coûte que coûte.
Il ne s'agit donc pas seulement de cela, disais-je. Ségolène Royal incarne également une autre manière de faire de la politique. C'est indéniable. Pourtant, de la même manière qu'il faut répondre à la droite qu'il ne s'agit pas que de réformer mais de réformer dans la bonne direction, il faut avoir à l'esprit que faire de la politique autrement n'est pas un objectif en soi : ce qui importe est dans la manière. Ségolène Royal joue de la proximité sentimentale, sait plus que tout autre faire vibrer la corde sensible, elle parle d'amour et de fraternité, d'offenses et de pardon des offenses, et recherche la popularité par la mise en scène d'elle-même.
Cela provoque enthousiasmes, mais aussi rejets, l'un et l'autre étant finalement plus politique qu'irrationnel, tant cette manière de moderniser la gauche peut être perçu comme ayant en réalité plus à voir avec la modernité qu'avec la gauche. Parce que la gauche s'occupe d'avantage de solidarité que de compassion, d'avantage de la mobilisation du collectif que de la personnalisation à outrance, d'avantage de faire appel à l'intelligence qu'à l'émotion. Parce qu'être de gauche c'est aussi, en politique, une manière de faire.
Et là est bien le plus grand danger de Ségolène Royal, ce divorce d'avec le peuple de gauche dont une partie non négligeable la rejette, refuse de se reconnaître dans cette pseudo-modernité qui est en réalité un renoncement. Et l'on revient là très directement au fond de la question des alliances et à la problématique Modem. Pour Ségolène Royal, la gauche n'est pas majoritaire et ne le sera jamais seule : pour l'emporter, elle aura besoin de s'allier avec le centre-droit, rassembler tous les républicains. C'est un renoncement, le plus grand des renoncements : c'est partir battu dans la bataille des idées qu'il s'agit pourtant plus que jamais de mener avec force, c'est renoncer a priori d'être jamais en mesure de mener une politique de gauche, réellement alternative, que, tout républicains qu'ils soient, les libéraux du Modem récuseront toujours.
Enfin, on l'a désormais bien compris, placer demain Ségolène Royal à la tête du Parti Socialiste sera de facto en avoir fait la candidate pour 2012. De facto, le PS serait d'abord et avant tout devenu sa machine à la faire candidate. Or il faudrait être fou ou bien sourd pour ne pas entendre de partout ce peuple de gauche qui avertit : nous ne voterons pas une seconde fois pour Ségolène Royal dès le premier tour. Le rejet est réel dont il nous faut impérativement tenir compte, sauf à d'ores et déjà envisager la défaite en 2012, défaite promise pour une gauche qui, autiste, n'aurait changé ni de projet ni même de candidate.
Martine Aubry ou Benoit Hamon : Sur le fond, le congrès a entériné l'adhésion à la ligne politique de Benoit Hamon, une ligne marquée à gauche, sans ambiguïté sur son positionnement, cohérente, moderne et ambitieuse sur ses propositions. Il ne s'agit maintenant, et plus que jamais, que d'oser franchir le dernier pas, gravir la dernière marche, réaliser ce que n'ont su réaliser les congressistes.
Avant ce week-end, l'image du Parti Socialiste dans l'opinion n'était pas enviable. Elle est désormais tout à fait désastreuse et les militants doivent adresser aux français un message d'autant plus fort qu'il nous faut revenir de loin. Répétons-le donc, il s'agit aujourd'hui d'ancrage résolument à gauche, de rénovation du Parti Socialiste et de changement de génération. Il s'agit à présent de ne plus tergiverser et faire enfin ce saut générationnel qui plus que jamais nous est devenu nécessaire. La politique est aussi affaire de symboles et, quoi qu'on en veuille et en le disant sans offense, dans ce "duel" à la gauche du parti, Martine Aubry symbolise le passé et Benoit Hamon l'avenir. C'est là, précisément, qu'il nous faut trancher et, j'ose le dire ainsi, et pas tout à fait naïvement, trancher avec audace et courage, mais aussi créativité, trancher ici et maintenant pour changer à gauche, trancher radicalement et choisir sans complexe d'avoir un monde d'avance.
Cela fait désormais trop longtemps que les socialistes à ne plus oser ont fini par s'immobiliser : camarades, décomplexons-nous, soyons audacieux, osons Hamon !
Je vais parler de Barack Obama et je m'en excuse tant cela devient convenu. Et loin de moi est l'idée de comparer Benoit Hamon à Barack Obama - je ne suis pas certain d'ailleurs que cela serait lui rendre service. Juste dire ceci cependant : c'est parce que depuis trop longtemps nous, socialistes français, sommes incapables d'oser des Benoit Hamon que nous avons perdu l'espoir de voir émerger de nos rangs des Barack Obama. On peut même aller plus loin : c'est parce que nous avons perdu le goût d'oser que des Vincent Peillon n'osent plus eux-mêmes prendre leurs responsabilités pour sortir de leurs abris tutélaires. Et c'est bien parce que nous sommes socialistes que nous avons le devoir collectif de réapprendre à contester les leaderships, tous les leaderships, plutôt que de toujours très sagement nous y soumettre.
Osons nous réinventer ! Osons le mouvement ! Osons nous bousculer nous-même pour nous remettre en mouvement !
Lire aussi le texte de conclusion de Benoit Hamon : Un projet, une stratégie, une conception de la politique.
Où l'on parle de : Ma Synthèse
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Ségolène Royal candidate... à occuper le terrain
Cette fois, c'est officiel. Manuel Valls, le plus libéraux et le plus sarko-compatible des socialistes, spécialement mandaté par Ségolène Royal, a annoncé que la candidate défaite à la dernière présidentielle sera candidate au poste de premier secrétaire.
Et Vincent Peillon serait alors secrétaire délégué adjoint, chargé de la gestion au quotidien du Parti Socialiste.
Ou comment, une nouvelle fois, afficher son mépris pour le Parti Socialiste en considérant comme indigne d'elle, Madame Royal au-dessus de la meute, d'assumer en totalité la charge et les devoirs qui échoient à un premier secrétaire.
N'en déplaise à Madame Royal, le poste de Premier Secrétaire du Parti Socialiste n'est pas simplement un poste honorifique qui permettrait au titulaire d'afficher dans les médias son nombril et son ambition. Il ne s'agit pas de se placer pour la prochaine présidentielle, il ne s'agit pas de prendre le Parti Socialiste, il ne s'agit pas d'en être le chef, mais bien d'en assumer la bonne gestion.
Il s'agit au quotidien de l'élaboration collective du projet socialiste.
Il s'agit au quotidien de préparer les prochaines échéances électorales.
Notamment.
Il ne s'agit pas de reculer devant l'obstacle et ne pas prendre toutes ces responsabilités, en déléguant à un autre les basses besognes.
Il ne s'agit pas, et encore moins, de se préparer un fusible au cas où les prochaines élections venaient à mal se passer pour le Parti Socialiste, un fusible nommé Vincent Peillon, donc, qui permettrait à Ségolène Royal de n'avoir pas à assumer toute la responsabilité d'un éventuel échec, si par hasard il venait l'idée aux électeurs de se détourner d'un Parti Socialiste à leurs yeux coupable d'avoir une fois encore renoué avec toujours les mêmes errances.
Cette idée de déléguer le quotidien est décidément le signe d'un profond mépris pour un parti et pour ses militants.
Non, Madame Royal, il n'est décidément pas possible de n'être candidate qu'à moitié, simplement pour occuper le terrain et de peur qu'un autre en occupant le poste vous barre la route à la seule candidature qui au fond vous intéresse et qui concerne les élections présidentielles de 2012.
Non, Madame Royal, le poste de premier secrétaire ne saurait n'être qu'un tremplin pour vos ambitions présidentielles.
Aussi, Madame Royal, pour moi, ce sera non !
Lire aussi : Ségolène sort du frigo : tout ça pour ça !
Lire encore : Ségolène Royal, incarnation du socialisme ?
Où l'on parle de : Ségolène Royal candidate... à occuper le terrain
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L'incarnation du socialisme
Vincent Peillon l'a déclaré ce matin sur France Inter : Ségolène Royal, répondant à l'amicale pression de ses amis de la motion E, sera candidate au poste de premier secrétaire du Parti Socialiste.
A moins que ce ne soit là encore un "coup" à double détente, les choses commencent cette fois à s'éclaircir et, par la seule volonté de l'ex-candidate aux élections présidentielles qui a « envie » de l'être encore en 2012, le congrès de Reims se déroulera essentiellement autour de la question de la personne de Ségolène Royal.
En conclusion de son interview, ce matin, Vincent Peillon a confié que selon lui « Ségolène Royal, aujourd'hui, incarne ce dont le socialisme a besoin. » Et c'est en effet la question qui sera de fait posée à l'ensemble des socialistes, d'abord aux délégués du congrès, ce week-end à Reims - élus rappelons-le, à la proportionnelle du vote des militants sur les motions -, puis à tous les militants la semaine prochaine, à l'occasion de l'élection au suffrage universel direct de leur premier secrétaire : Selon vous, Ségolène Royal incarne-t-elle, oui ou non, votre conception d'un socialisme moderne ?
De toute évidence, et même si on peut le regretter, cet débat est aujourd'hui encore celui qui divise le plus les socialistes, clivage béant entre ceux qui répondent que c'est une évidence et ceux qui répondent que c'est une absurdité. Il est très certainement utile, finalement, que très démocratiquement, très sereinement, les socialistes aient à trancher dans le vif de cette épineuse question. Vincent Peillon a d'ailleurs lui-même appelé à cette clarification essentielle en déclarant que « la question du pouvoir ne doit pas être éludé. »
Je suis d'ailleurs pour ma part persuadé que derrière cette question très légitime, il y a un véritable débat de fond sur l'orientation politique, un débat qu'il aurait été hautement préférable de formuler explicitement. Si cela n'a pas été possible, c'est aussi en partie que Ségolène Royal n'a eu de cesse que de l'esquiver, préférant toujours se mettre en scène que d'exposer ses idées, préférant toujours louvoyer vers sa victoire que de prêter le flanc à cette bonne querelle qu'elle avait en son temps appelée de ses voeux. C'est aussi que la manière que l'on a de faire de la politique est toujours intimement liée à l'orientation politique qu'on souhaite suivre, à la conception que l'on a du socialisme et de la gauche.
Ainsi, puisque donc c'est désormais de cela qu'il s'agit - Ségolène ou pas Ségolène -, que c'est ainsi que la question nous sera posée : Camarades socialistes, n'éludons pas la question du pouvoir et tranchons dans le vif la question de l'incarnation du socialisme, en conscience, utilement et sereinement.
Edit : Puisque nous en venons à parler d'incarnation du socialisme du XXIème siècle, je vous invite à regarder cette excellente prestation de Benoit Hamon sur BFM, ce matin :
Où l'on parle de : L'incarnation du socialisme
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Ségolène Royal et l'envie du désir d'avenir de soi
Ségolène Royal a répondu à l'invitation de Laurence Ferrari qui souhaitait lui demander si elle allait réchauffer sa candidature au poste de premier secrétaire du Parti Socialiste. Elle s'est donc rendue hier soir au journal de 20h de TF1 et a répondu... ni oui ni non, j'ai envie mais. C'était bien la peine d'y aller !
Cela fait tout de même plus d'un an qu'on a tous compris qu'elle souhaitait prendre le parti socialiste. On a, je crois, tous bien compris d'ailleurs qu'il s'agissait surtout de s'assurer qu'elle serait de nouveau la candidate aux présidentielles de 2012 et que le Parti Socialiste est pour elle cette assurance et que si elle a donc envie de le prendre c'est pour en faire SA machine à devenir LA candidate.
Ainsi, celle qui a vilipendé avec force les synthèses molles à la François Hollande, qui avant l'été proclamait avec énergie qu'elle préférait « une bonne querelle à une mauvaise synthèse », se trouverait aujourd'hui tout à fait disposée à rassembler l'ensemble des socialistes autour de sa candidature... et un document de synthèse d'une page qui en effet ne fera de mal à personne.... et surtout laissera cette fois encore le Parti Socialiste sans ligne politique claire.
Rappelons tout de même la configuration qui se dessinait depuis le vote des militants jusqu'à encore lundi dernier : la motion E était arrivée en tête, la motion C avait fait un score plus qu'honorable, on concluait à la volonté des militants d'un changement de génération et d'un ancrage à gauche, ... et une certaine envie de la candidature de Vincent Peillon se profilait. Ségolène Royal était dans son frigidaire, Bertrand Delanoë, François Hollande et Martine Aubry étaient hors-jeu, personne n'évoquait le Tout Sauf Ségolène - et pour cause - et tous les espoirs semblaient permis d'un congrès enfin utile.
Et puis Ségolène Royal a eu envie. Ou plutôt, elle n'a pas eu envie de s'effacer, de privilégier l'intérêt du collectif sur son dessein présidentielle, ambition qui menaçait d'être contrariée par cette configuration qui incluait son effacement dans une exigence de rénovation. Elle a donc réactivé sa candidature, et par la même occasion a remis dans le jeu François Hollande dont elle a besoin en soutien, remis dans le jeu également Martine Aubry qui n'existe qu'en tant que figure de proue du TSS, et a remis à l'ordre du jour cette idée du rassemblement de tous autour de rien, cette synthèse ultra-molle et source de tous les maux du Parti Socialiste depuis une dizaine d'années.
Et bien, pour répondre à Juan des coulisses de Sarkofrance qui nous pose la question, Non ! moi je n'ai pas envie...
Pas envie de faire de ce congrès, l'otage d'un ego et d'une ambition qui n'a rien de collective.
Pas envie d'un congrès pour elle donc pour rien, qui renouerait avec les errements du passé.
Pas envie d'une synthèse molle au service d'un seul.
Pas envie de donner cette image du Parti Socialiste.
Pas envie ni de Ségolène ni du Tout Sauf Ségolène - et l'un ne va évidemment pas sans l'autre.
Pas envie que les centaines de pages de contributions, les dizaines de pages de motions, le travail des militants et leurs débats, finissent par se résumer dans un document consensuel d'une page en haut duquel ne s'inscrirait qu'un nom, la couronne de son ego triomphant et la perspective d'une nouvelle défaite de la gauche en 2012.
Pas envie de ça du tout !
Où l'on parle de : L'envie du désir d'avenir de soi
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Quand le Modem crèvera
Ainsi certaines gens, faisant les empressés,
S'introduisent dans les affaires:
Ils font partout les nécessaires,
Et, partout importuns, devraient être chassés.
C'est d'abord à la fable du Coche de de la Mouche que je pense, chaque fois qu'un suppôt du Modem tente de se raccrocher aux débats et, de préférence, aux errements du Parti Socialiste pour tenter d'exister un peu.
Mais en vérité c'est celle de la Grenouille qui veut se faire aussi grosse que le Boeuf qui convient encore le mieux :
Une grenouille vit un Boeuf.
Qui lui sembla de belle taille.
Elle, qui n'était pas grosse en tout comme un oeuf,
Envieuse, s'étend, et s'enfle, et se travaille,
Pour égaler l'animal en grosseur,
Disant : "Regardez bien, ma soeur ;
Est-ce assez ? Dites-moi ; n'y suis-je point encore ?
Nenni. - M'y voici donc ? - Point du tout. M'y voilà ?
- Vous n'en approchez point." La chétive pécore
S'enfla si bien qu'elle creva.
Le monde est plein de gens qui ne sont plus sages :
Tout bourgeois veut bâtir comme les grands seigneurs,
Tout petit prince a des ambassadeurs,
Tout marquis veut avoir des pages.
Et à mes camarades de gauche je veux dire qu'il s'agit tout de même avant tout d'avoir un peu plus d'ambition et de faire en sorte, avant de se demander à quel moment et dans quelles conditions se rapprocher du Modem ou de ses électeurs, que la gauche gagne la bataille des idées et, par la force de conviction d'un projet ambitieux et cohérent, soit en mesure d'emporter enfin à elle seule l'adhésion de plus de 50% des français. Il s'agit d'abord de croire en nous-mêmes !
C'est en tout cas pour moi tout le sens de la volonté de refondation à gauche dont tout le monde parlait au lendemain des présidentielles et des législatives et que d'aucuns ont peut-être un peu oubliée en route.
Je ne crois pas que la gauche puisse jamais gagner en partant battue d'avance. Ces discussions autour de la stratégie à adopter vis à vis du Modem n'ont pour moi aucun sens. Pour l'heure le Modem n'existe pas, ou du moins - ne soyons pas trop méchants - il n'existe pas à gauche.
Bref, il s'agissait surtout ici de rappeler que le Modem n'est que cette petite mouche qui bourdonne désagréablement aux confins de notre champ politique et qu'il ne s'agit pour l'heure que de l'écarter d'un tendre revers de la main. Une petite grenouille à laquelle il n'est pas rendre service que de l'encourager à s'enfler ainsi d'importance : on nous accuserait à la fin de l'avoir crevée nous-mêmes.
Où l'on parle de : Quand le Modem crèvera
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Ségolène sort du frigo : tout ça pour ça !
Ségolène Royal a fait savoir qu'elle serait elle-même candidate pour prendre la succession de François Hollande au poste de premier secrétaire du Parti Socialiste.
Disons-le sans tergiverser : cette candidature est parfaitement légitime... comme seront légitimes les délégués du congrès pour dire en fin de semaine ce qu'ils en pensent, comme surtout seront légitimes ensuite les militants pour donner ou non les clefs de leur parti à Ségolène Royal. Personne ne devra se sentir contraint par on ne sait quel impératif d'unité des socialistes alors même que Ségolène Royal en réchauffant sa candidature a parfaitement conscience de prendre le risque de réanimer toutes les querelles.
Il aurait été tellement simple d'avancer dans une relative sérénité jusqu'au bout du processus démocratique qui s'était engagé la semaine dernière. Il aurait été tellement simple pour Ségolène Royal de choisir de s'effacer au profit de l'intérêt collectif du parti, continuant ainsi de tenir compte de la réalité du rejet qui se cristallise autour de son nom ; tellement simple de préférer mettre en avant le nom d'un Julien Dray ou d'un Vincent Peillon plutôt que le sien, forcément le sien.
Mais non, c'était politiquement trop risqué pour elle. Dans l'ombre, la dame du Poitou aurait été en danger de voir s'éteindre peu à peu les projecteurs autour d'elle, et disparaître alors ses espoirs d'une nouvelle candidature aux élections présidentielles.
Elle a choisi donc d'y aller, choisi de se confronter très directement au rejet qu'elle suscite, et ainsi de mesurer très précisément son ampleur, ignorant sciemment le risque de divisions inhérent à ce choix, risque que le Parti Socialiste continue encore et toujours de s'abîmer dans cette éternelle guerre des egos et de leurs ambitions dont elle vient de réanimer une flamme qui n'en demandait pas tant.
Soit, et ce n'est après tout pas nécessairement une mauvaise idée que les militants se voient ainsi donner l'occasion de trancher dans le vif. Qu'ils sachent bien d'ailleurs qu'ils n'auront pas d'autres occasions d'exprimer leur sentiment vis à vis d'une nouvelle candidature de Ségolène Royal en 2012. Qu'ils ne s'y trompent pas : une fois le Parti Socialiste aux mains de Ségolène Royal, il deviendra sa chose, une machine dont la première mission sera de la faire candidate. On aura cette fois bien compris qu'elle ne vise pas d'autre objectif et, pour ceux qui en doutaient encore, l'intelligence tactique de cette femme est redoutable : placée à la tête du Parti Socialiste, elle parviendra à ses fins.
C'est pourquoi, avec sa candidature au poste de premier secrétaire, le congrès du Parti Socialiste se transforme de facto en référendum pour ou contre la candidature de Ségolène Royal en 2012. Dit autrement, en sortant du frigidaire, Ségolène Royal a elle-même et sciemment activé le TSS.
Mais faisons là une petite parenthèse à destination de tous mes camarades ségolénistes qui vont me tomber dessus en évoquant ma haine de Ségolène Royal, et répondons par anticipation. La politique n'est pas pour moi affaire de sentiments et je n'éprouve ni affection ni haine particulière à l'encontre de Madame Royal. Il y a simplement que j'ai un désaccord profond avec sa manière de faire de la politique qui à mon goût ménage une trop grande place à la démagogie et aux coups médiatiques. Il y a que ma conception de qu'est la gauche est très éloignée de sa conception à elle. Il y a que je suis persuadé que le rejet qui s'attache à elle est à la mesure de l'enthousiasme qu'elle parvient à susciter. Il y a que je suis convaincu que sa candidature éventuelle en 2012 est l'assurance d'une nouvelle défaite pour la gauche, c'est-à-dire d'une nouvelle victoire pour la droite - et en tout cas le risque est bien trop grand pour que je consente sans m'y opposer à tenter l'aventure. Il y a donc que, si Ségolène Royal a en effet toute légitimité pour pousser de l'avant sa candidature pour 2012, je suis tout autant légitime - comme tout autre militant socialiste ou citoyen de ce pays - à vouloir qu'on fasse en sorte de contrarier ses ambitions... et il s'agit en réalité bien moins d'elle, de sa personne, que de favoriser l'émergence d'une nouvelle espérance à gauche à laquelle, j'en suis convaincu, elle fait obstacle.
Revenons donc au congrès. Comment Ségolène Royal compte prendre le Parti Socialiste ? En faisant très précisément ce qu'elle et ses partisans n'ont cessé de dénoncer, c'est-à-dire en aplanissant tous les sujets susceptibles de fâcher untel ou unetelle, en construisant une synthèse la plus consensuelle et donc la plus molle possible, en faisant très proprement du François Hollande pur jus. Le moins qu'on puisse dire est qu'en terme de rénovation ça commence très mal, surtout venu de la part de gens qui n'avaient cessé de plaider pour un congrès de clarification durant lequel il ne fallait surtout pas craindre de débattre du fond et de faire apparaître les clivages. Au lieu de quoi, on nous sort donc un texte d'une page aussi creux qu'il est oecuménique et sans saveur, qui accrédite l'idée que le Parti Socialiste n'a en réalité rien à proposer.
C'est qu'il s'agit maintenant de l'emporter à tout prix, et au prix même de tous les reniements, au prix même de la plus effarante vacuité. Que sont donc devenues les propositions concrètes ? Où se trouve donc l'architecture de ce projet socialiste qu'il va nous falloir bâtir au lendemain du congrès ? Où sont mêmes les idées ? « Si la gauche veut des idées » lançait avec une certaine morgue Ségolène Royal il y a quelques mois. Mais que sont-elles devenues, toutes ces idées ? Qu'en a-ton fait ? Tout ça pour ça ?! Que reste-t-il donc des débats qui ont eu lieu ces six derniers mois, depuis la rédaction des contributions jusqu'au dépôt des motions ? Quoi ! juste et encore cette synthèse molle et sans saveur, qui n'ouvre sur rien mais neutralise tout le monde ? Encore cette chose que nous ne connaissons que trop bien et qui chaque fois débouche sur la défaite ?
Non ! J'ose espérer que les responsables des autres motions ne souscriront pas à cette conclusion dramatique d'un congrès qui devait être celui de la clarification et du renouveau. J'ose espérer que les délégués au Congrès sauront dire non à une telle motion de synthèse. Et si tel n'était pas le cas, si une nouvelle fois l'appareil prouvait sa délirante inertie, j'ose donc espérer que les militants socialistes choisiront de rejeter la candidature de celle qui portera la responsabilité entière d'un tel gâchis : il faudra bien cette fois se résoudre à user du traitement de choc des urnes sur un parti socialiste à l'électroencéphalogramme tragiquement plat et qu'on persiste à vouloir laisser dans le coma afin de servir des ambitions exclusivement personnelles.
Que les militants en aient bien conscience : ils auront la légitimité, et sans doute le devoir, de ne pas accepter, de ne pas se soumettre et de dire non : Non, pas cette fois !
Où l'on parle de : Ségolène sort du frigo : tout ça pour ça !
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Dray ou Peillon : la motion Royal au pied du mur de la rénovation
En ayant la responsabilité de proposer un candidat pour le poste de premier secrétaire - dans l'hypothèse où la synthèse majoritaire se ferait autour d'elle - la motion E se retrouve au pied du mur de la rénovation.
Julien Dray ou Vincent Peillon ? L'alternative est largement connue et au choix qui sera fait l'on pourra juger de la volonté des partisans de Ségolène Royal d'aller au bout du discours qui a été tenu tout au long la campagne interne, et la main sur le coeur, quant à la rénovation du Parti Socialiste et la nécessité d'en finir avec des méthodes moribondes.
Il ne s'agit pas tant d'entrer dans une querelle de personnes que de constater que chacun de ces deux candidats potentiels symbolise une orientation. Si Vincent Peillon est de toute évidence le candidat qui a la faveur des militants, celui autour duquel il leur serait possible de se rassembler, celui qui incarne le mieux la rénovation - et cette réalité est encore plus criante si l'on se limite aux partisans de la motion E - , Julien Dray quant à lui n'a pas renoncé à jouer sa carte personnelle qui pour ce faire se positionne comme le candidat de l'appareil, le plus petit dénominateur commun, celui qui fera le moins d'ombre ici ou là et que les barons pensent pouvoir facilement manoeuvrer, derrière lequel ils pourront continuer à oeuvrer pour sauvegarder leurs petits intérêts particuliers.
Julien Dray ou Vincent Peillon, dans une large mesure, c'est le PS d'hier qui affronte une dernière fois le PS de demain, le passé qui s'oppose à l'avenir, l'immobilisme face au mouvement ; c'est le choix de la neutralisation ou celui de la rénovation, celui du verrouillage encore ou celui de l'ouverture enfin... Et à choisir le premier, la motion E serait immanquablement dans le reniement. Un choix désastreux et un très mauvais augure pour l'entreprise de rénovation du Parti Socialiste qui sera censé débuter au lendemain du congrès, dans moins d'une semaine maintenant.
Or, il est aisé de comprendre que, pour Ségolène Royal elle-même, la tentation Dray sera très forte... tant Vincent Peillon représentera rapidement pour elle une menace - une menace qui se fait déjà d'autant plus fortement sentir que puissante, justement, est la demande des militants d'un Vincent Peillon. Il semble que ce dernier est disposé à prendre ses responsabilités, mais Ségolène Royal aura-t-elle la volonté de s'effacer au point de placer sur le trône un proche qui deviendrait bientôt un rival et mettrait en péril ses ambitions très personnelles ? Elle se souviendra sans doute que Chirac avait lui-même enfanté Balladur et que peu s'en était fallu que cela ne finisse par lui coûter son propre rêve présidentiel.
Nota Bene : j'ai dit Julien Dray, mais cela serait vrai tout autant s'il s'agissait de François Rebsamen, autre prétendant de la motion E au poste de premier secrétaire... et actuel numéro 2 du Parti Socialiste.
Où l'on parle de : La motion Royal au pied du mur de la rénovation
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Tout Sauf Ségolène et Condorcet
Êtes-vous prêts pour un petit cours de formalisation mathématique du processus démocratique ?
Vous devriez, si vous souhaitez comprendre pourquoi le fait que la motion de Ségolène Royal soit arrivée en tête n'est pas pour cette dernière une garantie de victoire et que son éventuelle mise en minorité ne serait pas nécessairement un scandale, un vol du vote des militants et qui le dénaturerait, comme on l'entend déjà dire ici ou là ; comprendre que la mise en place d'un front Tout Sauf Ségolène pourrait n'être rien de plus qu'une réponse très conforme au souhait démocratique des militants socialistes.
Le candidat de Condorcet
Commençons par le début. La théorie des élections part du principe qu'un candidat qui, opposé à n'importe quel autre dans un duel électoral, l'emporterait, c'est-à-dire recevrait une majorité absolue des suffrages, doit impérativement être élu. Condorcet ayant été le premier à formaliser cette exigence, un tel candidat est appelé le candidat de Condorcet. Il est facile de comprendre que dans le cas contraire, si un autre que celui-là était élu, il y aurait un vice démocratique, puisqu'une majorité d'électeurs aurait préféré élire le candidat de Condorcet plutôt que celui qui a été élu à sa place et donc indûment.
Le souci est qu'en pratique il est impossible d'organiser autant de duels électoraux qu'il y a de paires de candidats possibles - il faudrait organiser six tours de scrutin pour une élection à quatre candidats, vingt-quatre tours pour cinq, etc...
On pourrait alors imaginer de demander aux électeurs d'ordonner tous les candidats afin de déterminer lequel d'entre eux est le candidat de Condorcet. Mais voilà, la théorie montre que dans une telle situation, les électeurs ont intérêt à tricher sur leurs réelles préférences afin de favoriser leur candidat favori, celui qu'il place en tête de leur préférence, faussant de facto le résultat du vote.
Autre souci : le candidat de Condorcet n'existe pas toujours. Mais on est déjà là hors du propos que je souhaite tenir. L'essentiel est de comprendre qu'un bon mode de scrutin est au minimum un mode de scrutin qui conduit à élire le candidat de Condorcet de préférence à tous les autres.
En quoi cela concerne Ségolène Royal ?
C'est ici qu'il devient nécessaire de formaliser les choses. Supposons que nous ayons 4 candidats (ou motions) et appelons-les respectivement A, C, D et E (lettres choisies pas tout à fait arbitrairement...). Et faisons la notation suivante : X>Y signifie que l'électeur préfère élire X que Y. Supposons que nous avons 100 électeurs (c'est plus facile pour calculer les pourcentages) et plaçons nous dans le scénario suivant où nous décrivons comment les électeurs ordonnent les candidats suivant leurs préférences :
A>C>D>E : 10 électeurs - A>D>C>E : 5 électeurs - A>C>E>D : 5 électeurs - A>E>C>D : 10 électeurs ;
C>D>A>E : 10 électeurs - C>E>D>A : 5 électeurs - C>E>A>D : 5 électeurs ;
D>C>A>E : 10 électeurs - D>C>E>A : 5 électeurs - D>A>C>E : 5 électeurs - D>E>C>A : 5 électeurs ;
E>A>C>D : 10 électeurs - E>C>D>A : 10 électeurs - E>D>C>A : 5 électeurs - E>C>A>D : 5 électeurs ;
Si nous demandons maintenant à nos 100 électeurs d'exprimer leurs préférences entre les 4 candidats, nous obtenons les résultats suivants qui devraient vous rappeler quelque chose : candidat E : 30% - candidat A : 25% - candidat D : 25% - candidat C : 20%
Faut-il en conclure que le candidat E est le candidat qui doit être élu de préférence à n'importe quel autre ? Il est assez simple de se rendre compte que non en constatant que si nous demandons aux électeurs leurs préférences entre E et A, ceux-ci les placeront à égalité (50-50), et de même si on leur fait la même demande à propos de E et D, mais qu'en revanche ils sont 60% à préférer C à E...
D'ailleurs, dans cet exemple qui n'a rien d'aberrant, le candidat C est également préféré à A par 60% des électeurs et à D par 65% d'entre eux : C est ici le candidat de Condorcet et, malgré ses 20% obtenu au premier tour de scrutin et qui le place derrière tous les autres, il est le candidat qui devra être élu si l'on ne veut pas se retrouver dans une situation non-démocratique, c'est-à-dire dans laquelle une majorité d'électeurs préférerait un autre résultat.
TSS et démocratie
Dans l'exemple ci-dessus, si 30% place le candidat E en tête de leurs préférences, il en est également 40% pour le placer en dernier, 40% qui préfèrent tout autre candidat à celui-ci, 40% d'électeurs favorables donc à un Tout Sauf E.
Il importe peu que ceux qui placent E en tête de leurs préférences le fassent par amour ou par proximité politique, comme il importe peu que ceux qui le placent en queue des leurs le fassent par haine ou par éloignement politique. Le fait est qu'ils forment les uns comme les autres le corps électoral et que la démocratie impose qu'on respecte leurs souhaits.
Autant dire qu'à ce stade, parler de la victoire de Ségolène Royal est plus que prématuré, démontre en vérité une incompréhension totale de ce qu'est la démocratie, de ce qu'est un processus électoral qui permet de s'assurer d'une décision autant que faire se peut démocratique. Un mode de scrutin est un ensemble de règles supposé favoriser la décision démocratique, un processus connu au préalable de tous et dont le respect doit être une exigence pour chacun.
Et si l'on estime que les règles sont mauvaises, qu'à l'usage on constate qu'elles fonctionnent mal, qu'elles ne remplissent pas leur rôle et ne garantissent pas suffisamment la démocratie, on les change - mais ensuite seulement, pour le prochain coup, en s'abstenant de crier au scandale durant un processus qui est en cours et dont on connaissait au préalable parfaitement des règles que l'on a d'ailleurs acceptées.
Les règles qui président à un congrès du PS ne disent en aucune manière que la motion arrivée en tête du vote des militants devient de facto centrale et partie prenante de la nouvelle majorité. Ces règles disent qu'à l'issue du vote, des synthèses partielles ou totale sont possibles entre les motions et sont soumises à l'approbation des délégués au congrès, eux-mêmes élus à la proportionnelle des votes des militants sur les motions. La synthèse qui reçoit l'approbation d'une majorité de délégués devient la ligne politique du parti. Ensuite, un secrétaire national est élu au suffrage direct des militants, avec un second tour si aucun candidat n'obtient la majorité absolue à l'issue du premier. Il ne s'agit en aucun cas de faire dire aux règles ce qu'on préfère leur entendre dire.
Le fait est que dans mon exemple ci-dessus, qui pour n'être qu'un exemple est une hypothèse non moins crédible qu'une autre, la volonté des électeurs exige que le candidat E soit battu.
Où l'on parle de : Tout Sauf Ségolène et Condorcet
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Parti Socialiste : Hamon, Peillon et changement de génération - analyses des résultats du vote sur les motions et perspectives
D'abord les résultats : avec une abstention d'un militant socialiste sur deux, Ségolène Royal arrive en tête avec 29% des suffrages, Bertrand Delanoë et Martine Aubry plafonnent à près de 25%, et Benoit Hamon atteint à peu de chose les 20%.
A ce stade, et parce qu'aucune motion n'a atteint la barre des 50% lui permettant d'être majoritaire seule, il est impossible de déclarer qui que ce soit vainqueur. En revanche, il est dors et déjà possible de parler des perdants. En premier lieu, il s'agit de la participation : le moins qu'on puisse dire est que ce scrutin n'a pas mobilisé les militants socialistes et c'est une défaite pour le Parti Socialiste dans son ensemble, du moins pour celui qu'il est encore aujourd'hui et c'est en soit une exigence de changement que cela nous impose collectivement.
Le deuxième perdant est Bertrand Delanoë qui n'a pas su insuffler une dynamique à sa campagne et dont le score est au strict minimum de ce qu'il pouvait attendre. Avec lui, tant le maire de Paris est apparu comme son représentant, c'est la direction sortante qui est sanctionnée. Et Martine Aubry elle non plus n'a pas décollé et peut à ce titre être relégué dans le camp des perdants.
Sortent donc renforcés de ce premier tour, Ségolène Royal qui contrairement aux deux autres poids lourds a réussi à s'arracher à l'étiage des 25% - sans pour autant atteindre la barre des 30% et se retrouvant très en deçà des primaires de 2006 où elle avait obtenu près de 65% des suffrages des mêmes militants - et surtout Benoit Hamon qui fait une percée remarquable en flirtant avec le cap des 20%, d'autant plus remarquable que lui seul ne bénéficiait pas du soutien ni de l'appareil ni d'une ou plusieurs grosses fédérations.
Mais plus notablement encore, c'est en réalité l'ancrage à gauche du Parti Socialiste qui sort gagnant de ce premier tour de scrutin. D'abord parce que le score de la motion Hamon est un succès, mais aussi parce que la campagne interne s'est largement déroulée autour des thèmes défendus par sa motion, Ségolène Royal et Martine Aubry rivalisant pour conquérir ce terrain-là d'une gauche qui se rapproche d'elle-même et s'éloigne de ses renoncements. C'est une bonne nouvelle.
Et maintenant ?
La première chose qu'il faut souligner est que non seulement aucune motion n'est majoritaire à elle seule, mais aucune combinaison de seulement deux motions ne peut l'être non plus, ou du moins de manière stable et incontestable.
La deuxième chose est qu'une synthèse qui se ferait entre les motions de Ségolène Royal, Bertrand Delanoë et Martine Aubry constituerait le pire des scénari en ce qu'il correspondrait à reconduire à la direction du PS les vieilles alliances : cela réduirait à néant la volonté de changement, et de changement à gauche, qui s'est clairement exprimé à l'occasion de ce premier tour de scrutin. Ainsi, chacune de ces trois motions, si elle veut sortir du congrès dans la majorité, a besoin de Benoit Hamon - ce qui place ce dernier en position centrale dans le grand jeu des alliances qui débute à présent (et qui n'est pas sale, pour peu qu'il se fasse autant que faire se peut au grand jour).
La troisième chose qu'il faut noter est que Ségolène Royal n'est parvenue à enclencher une dynamique, relative mais réelle, que dès lors qu'elle a placé sa candidature au poste de premier secrétaire au frigidaire. Elle serait bien inspirée de l'y conserver afin de respecter les militants nombreux pour lesquels cette réfrigération a permis qu'ils s'expriment en faveur de la motion dont elle était signataire, et qui donc lui ont donné de s'extraire de l'étiage des 25%.
La quatrième chose, enfin, est que le résultat de Ségolène Royal et de sa motion, pour positif qu'il apparaisse, ne lui procure pas - et très loin de là - un avantage décisif, tant elle apparaît encore isolée. C'est que si des 30% de militants qui ont voté pour sa motion on peut estimer que 25% sont disposés à la voir redevenir la candidate des socialistes aux présidentielles de 2012, on peut de la même manière gager qu'une très forte proportion des 70% qui ont choisi de voter ailleurs est pour l'heure fermement opposée à cette hypothèse. Ce serait une grave erreur de sa part de vouloir ignorer plus longtemps la réalité d'un rejet aussi réel pourtant que l'enthousiasme qu'elle suscite par ailleurs.
De tout cela, outre la volonté des militants d'ancrer le Parti Socialiste à gauche, il semble impératif de conclure à une volonté tout aussi forte d'un renouvellement de génération à la tête du Parti Socialiste : non seulement Bertrand Delanoë et Martine Aubry, et avec eux François Hollande, Laurent Fabius et même Dominique Strauss-Kahn, n'ont pas été suivi par les militants, mais c'est une motion E avec une Ségolène Royal réfrigérée et une motion C dont le premier signataire Benoit Hamon appartient à la nouvelle génération qui sont parvenus à séduire les militants.
Ainsi, on peut formuler trois hypothèses pour une synthèse :
Le scénario de la continuité : Les trois motions de tête s'entendent et forment une majorité et c'est la redite de 2002 et 2007 qui se profilera, où un PS coupé de sa gauche, et donc de sa base électorale, ne parviendra pas à proposer un projet alternatif suffisamment ambitieux et rénové pour emporter l'adhésion des français : on prend les mêmes, on recommence et c'est Nicolas Sarkozy qui l'emporte à la fin.
Le scénario TSS : Ségolène Royal se focalise sur sa pseudo-victoire et cherche à réchauffer sa candidature à la tête du PS, réactivant par la même occasion la crispation autour de ses ambitions présidentielles, et ce sont alors les motions Delanoë, Aubry et Hamon qui font front commun et constituent une majorité par défaut : une occasion manquée !
Le scénario du changement : Ségolène Royale maintient son retrait, laisse Vincent Peillon venir au premier plan et construire autour de lui et de Benoit Hamon une synthèse impliquant ancrage à gauche et changement de génération, option qui sera en mesure de rassembler largement au-delà de leurs deux motions : un congrès de rénovation réussi, un Parti Socialiste tourné vers l'avenir, un signe fort d'espoir adressé aux français.
La capacité de Ségolène Royal à s'effacer, la capacité de Vincent Peillon à prendre ses responsabilités, la capacité de Benoit Hamon a ne pas céder sur l'essentiel, voilà les clefs du congrès.
Réponse, fin de semaine prochaine...
Où l'on parle de : Génération Hamon Peillon
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Socialistes, osez le changement

Enfin !
Ce soir, les militants socialistes sont appelés à voter pour l'une des six motions qui sont proposées à leur sagacité politique. Et demain matin, nous sauront s'ils se sont mobilisés et s'ils ont osé le changement à gauche?
Socialistes, Mobilisez-vous ! Cette élection est cruciale, en ce qu'elle constitue le premier pas dans une marche en avant qui, en 2012, aura conduit la gauche à la victoire, enfin la victoire, ou bien à une nouvelle défaite cuisante. Un premier pas ce soir qui détermine une direction pour demain.
C'est que le résultat des votes des militants ce soir sera déterminant quant à la tonalité que prendra le congrès qui se tiendra à Reims les 14, 15 et 16 novembre prochains et à l'issue duquel le PS se sera doté d'une ligne politique, synthèse partielle ou totale entre les différentes motions (puisqu'aucune ne semble seule être en mesure dépasser la barre des 50%). Ensuite, et seulement ensuite, il s'agira d'élire un premier secrétaire - et en réalité une équipe de direction, un secrétariat national, lequel sera alors en charge d'organiser la refondation politique du PS, de conduire les socialistes dans la rédaction d'un projet nouveau et ambitieux, à même de séduire les français en leur offrant l'espoir d'une alternative crédible au libéralisme destructeur de la sarkofrance, et de préparer les élections à venir - européennes, régionales et présidentielles.
Socialistes, Osez le changement de projet ! Il ne s'agit pas de jouer avec les mots, mais de regarder la réalité : c'est la même inspiration sociale-démocrate qui a présidé à l'élaboration des projets de Jospin en 2002 et de Ségolène Royal en 2007 et dont les français n'ont pas voulu. Et c'est encore la même inspiration sociale-démocrate que l'on retrouve dans les motions de Martine Aubry, Bertrand Delanoë et Ségolène Royal. Faut-il réellement persister dans l'erreur ?
Il ne s'agit pas de dire, par exemple et parce que c'est ce mois-ci dans l'air du temps, que le modèle social-démocrate est périmé, tout en rédigeant et signant une motion sociale-démocrate avec les plus sociaux-démocrates des sociaux-démocrates du PS - ce que sont les Collomb, Guérini et Valls, au point même qu'ils se réclament plus volontiers d'un social-libéralisme éventuellement sarko-compatible. Il s'agit de constater que la sociale-démocratie ne suffit pas, n'a jamais suffit à endiguer le rouleau-compresseur du libéralisme, et d'en tirer les conséquences en en proposant son dépassement.
C'est que la sociale-démocratie est en réalité le mal d'un socialisme complexé, qui devant la pensée dominante libérale choisit de reculer plutôt que de chercher à se réinventer, à adapter sa pensée et ses propositions aux exigences d'un monde qui a considérablement changé. La sociale-démocratie était la réponse en-dedans à l'absence criante d'un socialisme moderne, elle était à gauche l'alternative à un socialisme archaïque. La sociale-démocratie était le pis-aller crédible de la gauche. Elle ne suffisait pas, ne pouvait suffire et elle a donc échoué : avec ou sans elle, la vague libérale a continué de déferler sur les économies - et de plus en plus souvent sans elle parce qu'elle a fini par d'abord échouer électoralement, parce que les électeurs avaient compris qu'elle ne suffirait pas.
Socialistes, Osez la gauche ! Pendant longtemps, donc, il s'agissait d'hésiter entre une gauche complexée, sociale-libérale, et une gauche archaïque, inapte. On pouvait soit fermer les yeux sur les archaïsmes et voter avec son coeur, mais en vain, ou bien choisir la raison et voter la mort dans l'âme, sans illusion. Nous ne sommes plus dans cette situation. Aujourd'hui, le socialisme est en position de pouvoir se réinventer, de redevenir une idée d'avenir, de proposer une alternative réellement ambitieuse et cohérente, en phase à la fois avec son époque et avec son idéal.
Il ne s'agit pas de dire que la motion C de Benoit Hamon est la réponse, tout ne s'y trouve pas et loin s'en faut, mais ce texte est le seul à ouvrir sur cette possibilité d'une gauche enfin réinventée ; des pistes y sont ouvertes, des propositions y sont faites et qui s'articulent avec cohérence ; un souffle et une ambition la traverse qui permettraient aux socialistes d'avancer dans la bonne direction et d'espérer aboutir à un projet enfin apte à répondre aux crises sociales et environnementales que nous traversons et qui sont les fruits des crises économiques et financières auxquelles ont conduit un libéralisme moribond.
Du poids qu'aura obtenu la motion C, et exclusivement du poids de celle-ci - tout le monde s'en rend bien compte -, dépend la tonalité future des travaux de reconstruction du PS et de son projet. Qu'elle obtienne un score faible et il ne s'agira que de replâtrer encore une fois, un peu ici et un peu là, le projet social-démocrate, et alors la gauche pourra s'attendre à subir un nouveau revers dont les français les plus en difficultés seront les premières victimes. Qu'à l'inverse les socialistes osent bousculer l'ordre établi et accordent massivement leurs suffrages au changement, à la volonté d'un changement radical - non, ce n'est pas un gros mot - qui s'exprime dans la motion C, et alors l'espoir à gauche d'une alternative utile pourra enfin renaître. Et nous savons tous, tant le monde va mal, que c'est pour nous et pour tous une exigence.
Socialistes, Osez le changement de génération ! Une des forces de la démocratie américaine réside dans ce qui est aussi un de leurs grand défaut, le culte du vainqueur et la déchéance des vaincus. C'est parce qu'il est là-bas quasi impossible à celui qui a perdu une élection de se représenter à nouveau, qu'un Clinton ou un Obama ont eu la possibilité d'émerger. Ils n'ont pas besoin d'oser le renouvellement du personnel politique, ils y sont contraints.
Dans une certaine mesure, nous avons en France le problème inverse : une prime considérable est accordé aux anciens, auxquels nous rivons nos regards, au point que de nouveaux talents ont toutes les peines à émerger et que notre personnel politique semble aujourd'hui largement figé; et nous avons ce sentiment d'avoir depuis des décennies sous les yeux toujours les mêmes têtes, ce sentiment d'une vie politique verrouillée, sclérosée - sentiments peu propices à susciter l'enthousiasme ou même, a minima, l'envie.
L'image du PS est aujourd'hui dans l'opinion française tout à fait déplorable. Les français attendent d'abord de nous - si même ils attendent encore quelque chose - du changement, la preuve que nous avons finalement pris conscience de nos errements passés - et il ne serait que temps ! Car il serait à ce titre désastreux qu'à l'issue de ce congrès l'on retrouve les mêmes aux commandes du Parti Socialiste. A l'inverse, il faut imaginer la force symbolique - et nous en avons besoin - qu'aurait dans l'opinion une situation où les vieilles motions des barons socialistes - les Hollande, Collomb, Fabius, Royal, Delanoë, Aubry... - seraient concurrencées sinon devancées par la motion portée par Benoit Hamon, une situation qui permettrait, au travers d'une synthèse heureuse, l'émergence d'une nouvelle génération de dirigeants, une situation propre à l'éclosion de nouveaux talents et donc à la résurgence d'une nouvelle espérance à gauche.
Il ne s'agit pas seulement que de Benoit Hamon ou de sa jeune équipe. J'ai déjà dit, par exemple, que l'avènement d'un Vincent Peillon au poste de premier secrétaire serait à même de participer au changement que les français attendent de nous, et qu'exige de nous les crises économiques et financières, sociales et environnementales, qui secouent durement la planète et ses habitants. Mais il se trouve que, pas tout à fait paradoxalement, la possibilité Peillon, toujours par exemple, ne saurait passer que par un score important de la motion C - et a contrario, pour cet exemple mais il en est d'autres, un score important de la motion E ne pourrait que laisser Vincent Peillon dans l'ombre de Ségolène Royal et entre les mains des barons de la sociale-démocratie avec qui elle a choisi de faire alliance.
Ce dont il s'agit, ce soir, c'est de créer une situation nouvelle, un rapport de forces différent qui permette que se cristallise une synthèse qui respire le changement et le renouveau. Et de toute évidence, cela passe par la motion C. Socialistes, oser est désormais une exigence et en même temps une possibilité, une chance que nous avons le devoir de saisir. Et c'est ce soir !
Où l'on parle de : Socialistes, osez le changement
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Aubry, Royal, Delanoë : Un monde de retard
C'est tous les jours qu'ils s'affrontent, chaque jour un coup bas et une nouvelle polémique. Aujourd'hui, ce sont les ségolénistes et autres soutiens de la motion Collomb(Royal) qui font buzzer une vidéo, montage affligeant où l'on assiste à la prestation de Sylviane Agacinski chez Laurent Ruquier à propos de tout le mal qu'elle pense de Ségolène Royal, avec commentaires ségolénistes en surimpression pour bien forcer le trait - et notamment baliser le chemin qui de Mme Agacinski traversera Lionel Jospin pour atteindre Bertrand Delanoë.
Je ne vais pas entrer dans le débat, juste souligner que se complaire ainsi à la rebaptiser en Sylviane Jospin, ainsi que ne s'appelle pas Mme Agacinski , est réduire une femme à son mari et constitue déjà d'un machisme sévère, le même dont Mme Royal avait été en son temps la victime lorsqu'on usait contre elle des déclarations de celui qui était alors son compagnon. Procédé indigne hier, procédé indigne aujourd'hui.
Je préfère très simplement noter que le niveau du débat entre les motions soeurs de la social-démocratie à la papa descend là encore d'un cran. On n'aurait pas cru cela possible. C'est pourtant ce qui arrive chaque fois : quand le débat ne peut se tenir au niveau des idées parce qu'on professe au fond les mêmes, il descend au niveau d'un affrontement brutal, et souvent médiocre, entre des individualités qui en sus des idées partagent la même ambition personnelle autour de laquelle elles s'affrontent depuis bientôt une décennie, et davantage pour certains. Chaque fois, on ressort donc les grosses ficelles et renaissent les vieilles rancoeurs stériles.
Or, sur le fond, ils ont ensemble attendu que la crise éclate pour faire enfin mine de comprendre que c'est le système tout entier qui est en fin de vie. C'est au point que certains voudraient aujourd'hui reporter le congrès afin d'avoir le loisir de réécrire leurs motions et les adapter à l'actualité. C'est dire si eux-mêmes ont compris que la social-démocratie façon XXème et dont leurs motions se faisaient hier encore l'écho, n'était pas à la hauteur des enjeux de la crise systémique que nous vivons et dont pourtant les dégâts sociaux et écologiques ne datent pas de ce mois de septembre. C'est dire en réalité si ils ont un monde de retard !
Ils ont perdu en 2002 avec Lionel Jospin dont le programme n'était pas socialiste.
Ils ont perdu en 2007 avec Ségolène Royal qui s'est présenté devant les français avec le même programme sans souffle.
Virons-les en 2008, lors de ce congrès de la dernière chance, pour gagner en 2012 sur un projet socialiste refondé et ambitieux.
Rénovons enfin le PS, finissons-en avec les querelles de personnes, votons et faisons voter pour la seule motion qui présente une ligne politique résolument tournée vers le XXIème siècle dans un dépassement d'une social-démocratie aussi timide que désuète, une ligne politique traversée par la régulation écologique et sociale du marché. Votons massivement pour la motion C : « Un monde d'avance - une gauche décomplexée ».
Edit du 15 octobre : Je tiens ce matin à remercier les ségolénistes qui s'en prennent à Aubry qui déclare que Paris est une ville bourgeoise afin de mieux s'en prendre à Delanoë. Tout cela valide un peu plus encore, si besoin était, ce que j'écrivais il y a quelques jours, ci-dessus, quant au niveau exécrable du débat lorsqu'on peine à se démarquer sur le fond.
Vivement que ce congrès se termine ! Et espérons que les militants sauront majoritairement tirer les conséquences d'une campagne où preuve aura été une nouvelle fois apportée que la guerre des chefs ne saurait terminer : la sociale-démocratie a besoin d'être dépassée, le Parti Socialiste a besoin que ceux qui en sont les derniers représentants laissent la place... et que rénovation enfin se fasse.
Où l'on parle de : Un monde de retard
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De la relativité d'un krach boursier
Il est tellement vrai qu'un bon petit graphique vaut parfois mieux qu'un long discours que je vous propose, et je m'adresse en particulier aux jeunes traders qui auraient dans l'idée d'ouvrir la fenêtre, de vous pencher [sic !] un court instant sur...
l'évolution du CAC40 sur 15 ans
En revanche, si vous avez devant vous une petite heure et l'envie de comprendre pourquoi le système économico-financier qui nous gouverne est en crise, d'apprendre en particulier que l'essentiel de la masse monétaire en circulation est une dette qui n'a d'autre vocation que de s'accroitre, et que donc la fin dudit système est inéluctable, et qu'il nous faudrait même l'anticiper, je vous suggère de consulter l'article intitulé l'argent et les banques pour les nuls et de prendre le temps de regarder la video qui y est présentée...
Et puis, ou bien si vous n'avez que quinze minutes, et parce que davantage encore dans des périodes de crise comme celle que nous vivons actuellement - et qui si elle n'atteindra que très relativement la grande finance internationale, sera néanmoins d'une gravité économique et sociale de toute première importance - parce que donc la politique a un sens en ce qu'elle est le nid où couve notre avenir commun, je voudrais également vous inviter à écouter attentivement l'intervention de Benoit Hamon, ce mardi à la Mutualité, devant les militants socialistes parisiens :
Pour en savoir plus sur La motion «Un Monde d'Avance » et ses 79 propositions, laissez-vous tenter...
Source : De la relativité d'un krach boursier
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La motion «Un Monde d'Avance » en 79 propositions

Le monde se métamorphose : le néo-libéralisme plonge la planète toute entière dans la crise. Un monde s’éteint et le neuf hésite encore à naitre. Le congrès du Parti Socialiste se déroule dans ce clair obscur, cet intervalle entre deux cycles dont peuvent émerger le meilleur, un monde régulé et plus juste, ou le pire, le nationalisme ou la renaissance d’un capitalisme financiarisé.
Le Parti Socialiste n’a pas la faveur des Français qui jugent son action timorée et souvent illisible. Il n’est seul. La social-démocratie européenne a subi 13 défaites sur les 15 derniers scrutins. Est-ce, dans chacun de ces treize partis, faute de leaders ou de discipline ? Ou bien est-ce le résultat de la défaillance du projet social démocrate ? Cette seconde hypothèse paraît tout de même plus vraisemblable ! Ce qui est essentiel pour un parti, ce qui entraîne l’adhésion ou motive la critique, c’est son orientation politique.
La motion Un Monde d'Avance - la gauche décomplexée propose de clarifier une ligne politique sur 9 points : Sortir du libre échange généralisé, répondre à l’urgence écologique, redistribuer les richesses, affirmer le retour de la puissance publique, changer le cours de la construction européenne, aller à la reconquête de la démocratie, promouvoir une société de progression des droits et libertés, aller vers une société d’émancipation plutôt qu’une société d’ordre, définir une politique étrangère progressiste.
Il s'agit pour le Parti Socialiste d'affirmer une orientation à gauche. La Gauche est victorieuse lorsqu’elle est la Gauche, comme en 1981 ou en 1997. Elle est défaite lorsque les électeurs ne savent plus qui elle est, comme en 2002 ou 2007.
Il s'agit de vouloir un changement réel par rapport à la direction sortante du PS dont sont issues les 3 autres principales motions. Faire le choix du renouveau et de la rénovation : le PS a besoin d’un nouveau souffle, d’un sursaut.
Il s'agit enfin d'offrir aux Français les raisons d’espérer et donner à la Gauche les meilleures chances de gagner en 2012 sur un projet de transformation sociale ambitieux et crédible : décomplexée !
Les propositions d'une gauche décomplexée
Sortir du libre-échange généralisé
1. Activer le tarif extérieur commun, pour rétablir la préférence communautaire voulue par les pères fondateurs de l’Union européenne et lutter contre le dumping fiscal et social
2. Baisser les taux d’intérêt européens, pour ramener la parité euro/dollar à un niveau acceptable pour nos exportations
3. Relocaliser la production, selon le principe qu’il ne peut y avoir accès à un marché s’il n’y a pas production de tout ou partie des marchandises sur ce même marché. La relocalisation concourra aussi à la lutte contre la pollution générée par les transports de marchandises
4. Contre l’OMC, choisir la coopération plutôt que la compétition, pour obtenir entre nations une convergence sociale et écologique, et pas seulement commerciale.
Répondre à l’urgence écologique
5. Etendre le champ du service public, car les ressources comme l’air, l’eau et les espaces naturels ne doivent pas être jetés en pâture au marché
6. Mobiliser les collectivités locales de gauche pour remettre l’eau en gestion municipale directe
7. Employer les bénéfices de la gestion directe de l’eau pour restaurer la propreté des eaux et des rivières françaises à horizon 2015
8. Accorder aux ménages modestes et aux bailleurs sociaux des aides substantielles pour améliorer le bilan énergétique des bâtiments
9. Inventer une fiscalité écologique selon le principe du pollueur-payeur, en mettant notamment en place une taxe-carbone universelle avec l’aide de l’Europe, qui pourra l’imposer sur les importations
10. Promouvoir un autre modèle de développement agricole, qui protège les agricultures vivrières locales et qui taxe les importations destructrices pour l’environnement
11. Accélérer les progrès de l’agriculture biologique en France, en subventionnant davantage la recherche publique française pour obtenir des produits bio à la portée de toutes les bourses
12. Introduire des critères environnementaux dans le Code des Marchés publics, notamment pour favoriser l’utilisation de denrées produites à proximité des collectivités publiques
Pour lutter contre les inégalités, redistribuer les richesses
- Augmenter les salaires
13. Augmenter les salaires de la Fonction publique, qui emploie un salarié sur 5 en France
14. Porter le SMIC à 1500 €
15. Appliquer à toutes les branches le principe de minimas conventionnels au moins égaux au SMIC
16. Organiser une Conférence sur les Salaires, où sera fixée une norme de progression des salaires en fonction des gains de productivité. En cas d’échec de cette Conférence, l’Etat prélèvera davantage de cotisations sociales sur les branches réfractaires
- De nouveaux financements pour les retraites
17. Maintien du droit à la retraite à 60 ans et du système par répartition
18. Faire cotiser les stock-options à la retraite, instaurer une « CSG-Entreprises » pour faire cotiser les profits
19. Permettre aux salariés des métiers pénibles de partir en retraite avant d’avoir atteint 40 annuités de cotisations
Pour une protection sociale de haut niveau
20. Améliorer l’offre publique de soins, tant sur le plan technique que territorial
21. Mieux rembourser les soins dentaires et d’optique
22. Instaurer des enveloppes forfaitaires de rémunération pour les professionnels de santé
23. En finir avec le mythe du « trou de la Sécu » : revoir tous les mécanismes de niches fiscales, d’exonérations de cotisations patronales qui pèsent si lourd dans le manque de recettes de l’Assurance Maladie
Logement : l’action publique plutôt que le laisser faire
24. Bloquer les loyers en 2009 et encadrer leur évolution lors des relocations
25. Réquisitionner les logements vides, soit par la procédure d’attribution d’office laissée au Préfet, soit par l’activation du pouvoir de réquisition du maire
26. Relancer la construction de logements à loyers modérés, en mobilisant les ressources du Livret A et en abandonnant les exonérations fiscales accordées sans contrepartie
Renforcer la justice fiscale
27. Créer un grand impôt progressif sur le revenu, assis sur une assiette large, en fusionnant l’actuel IRPP et la CSG et en abandonnant les niches fiscales
28. Instaurer un abattement d’impôt au bénéfice de tous les ménages modestes
29. Créer une « CSG-Entreprises » en remplacement des cotisations patronales actuelles, pour favoriser l’emploi et les PME
30. Réformer la fiscalité locale et mettre en place une véritable péréquation fiscale entre collectivités territoriales
Affirmer le retour de la puissance publique, reconstituer nos marges de manœuvres
31. Supprimer le bouclier fiscal et réorienter le paquet fiscal vers des dépenses d’avenir : innovation, recherche, santé, éducation et développement durable
32. Soutenir l’investissement en faisant davantage intervenir l’Etat dans l’économie, par des prises de participation au capital et un « fonds souverain français », qui investirait dans les entreprises socialement et écologiquement responsables
33. Bâtir un pôle public de l’énergie, reposant sur un pilier électro-gazier (EDF, GDF et Suez), un pilier nucléaire (Areva, dont il faut stopper la privatisation) et un pilier pétrolier (Total)
34. Créer de nouveaux services publics : petite enfance, logement et habitat
35. Maintenir les tarifs réglementés dans certains secteurs clé (énergie… )
36. Restauration de la législation protectrice du droit du travail, notamment sur la durée du travail (35 heures), sur le salaire minimum, la santé et la sécurité au travail, etc.
Changer le cours de la construction européenne
37. Une autre politique monétaire, en obligeant la BCE à soutenir d’abord la croissance et l’emploi
38. Une autre politique budgétaire, en révisant le Pacte de stabilité et en dotant l’Union d’un budget digne de ce nom, pour financer la solidarité avec les Etats membres moins riches
39. Création d’un impôt européen sur les sociétés
40. Pour un « New Deal » européen, financé par l’emprunt, en faveur de l’innovation industrielle : remplacement énergétique, biotechnologies, nouveaux procédés industriels, nouvelles infrastructures (classiques et numériques)
41. Création d’une Communauté Européenne de la Recherche et de l’Industrie (CERI), sur le modèle de la CECA (Charbon et Acier)
42. Moratoire sur les libéralisations dans les services publics (poste et chemins de fer) puis vote d’une directive cadre définissant les principes communs à tous les services publics
43. Création d’un salaire minimum européen
44. Harmonisation des taux de l’impôt sur les sociétés
La reconquête de la démocratie
45. Pour une 6ème République, où le Premier ministre est le véritable chef de l’Exécutif
46. Inscrire un statut de l’élu dans la Constitution
47. Accorder le droit de vote et d’éligibilité aux élections locales aux résidents non communautaires
48. Instaurer la parité hommes / femmes dans tous les Exécutifs (locaux, intercommunaux, régionaux, gouvernemental)
49. Donner un second souffle à la démocratie sociale, en rétablissant la hiérarchie des normes sociales, en faisant négocier des accords majoritaires par des syndicats représentatifs sur la base des élections professionnelles, en organisant un financement public des syndicats
50. Assurer le pluralisme médiatique, en faisant voter une loi anti-concentration en France et une directive sur la liberté d’expression et d’information en Europe
51. Interdire aux entreprises vivant de la commande publique de détenir des actions dans le secteur des médias
Une société de progression des droits et libertés
52. Rétablissement de la police de proximité
53. Suppression de la rétention de sûreté et des peines plancher
54. Privilégier les peines alternatives à l’emprisonnement
55. Une nouvelle politique d’immigration, via un plan de régularisation et d’obtention de visas de travail, ainsi que par une lutte sans merci contre le travail au noir
56. Lutter contre les discriminations, en mobilisant collectivités publiques et entreprises, en étendant les droits attachés au PACS, en autorisant le mariage et l’adoption pour les couples de même sexe
57. Lutter pour l’égalité réelle des salaires entre hommes et femmes
58. Repenser la politique familiale, pour qu’elle prenne mieux en compte les disparités de revenus et privilégie les modes de garde collectifs
Une société d’émancipation
- Un nouveau pacte éducatif national
59. Augmentation, et non réduction, du nombre de jours de présence effective à l’école, en allégeant le contenu de chaque journée
60. Une nouvelle politique périscolaire, favorisant activités artistiques, culturelles et sportives
61. Développer la scolarité dès 2 ans et généraliser les modes de gardes collectifs avant 3 ans
62. Annuler les suppressions de postes, pour renforcer le soutien scolaire et le travail en petits groupes
63. Instaurer un véritable droit à la qualification pour tous les jeunes, en supprimant notamment l’apprentissage à 14 ans et en redonnant la priorité à l’enseignement professionnel
64. Restaurer la mixité scolaire, par la sectorisation et une aide accrue aux établissements scolaires des quartiers populaires (classes à effectifs allégés, professeurs expérimentés, réseaux d’aide renforcés)
- Pour la jeunesse : insertion et émancipation
65. Créer un statut social pour tous les jeunes en formation et en insertion
66. Mettre en place une allocation d’autonomie, conditionnée aux ressources propres du bénéficiaire, ouvrant des droits en matière de santé, transports, etc.
67. Créer une Aide au Départ en Vacances (ADV), d’un montant minimum de 200 euros, versée sous condition de ressources et directement affectée aux séjours organisés par les centres de vacances agréés
- Pour un nouveau projet culturel
68. Valoriser les arts et cultures populaires, en favorisant les pratiques amateurs et en structurant l’offre de formation professionnelle
69. Mettre en place un aménagement culturel du territoire, en conditionnant le versement des subventions publiques à l’amélioration de l’offre culturel dans les territoires délaissés
70. Reconnaître les échanges d’œuvres artistiques sur internet, à condition que ces échanges soient non commerciaux et qu’ils donnent lieu à une forme de rémunération des artistes, par exemple sous la forme de la « licence globale »
Pour une politique étrangère progressiste
71. Adoption d’un calendrier de retrait des troupes françaises d’Afghanistan
72. Refuser la réintégration de la France au commandement militaire de l’OTAN
73. Promouvoir de nouveaux droits mondiaux, tels que les droits sociaux dans le cadre de l’OIT, l’accès aux biens publics mondiaux (santé, éducation… )
74. Créer une taxe mondiale sur les transactions financières pour financer un fonds pour l’accès aux biens publics mondiaux
75. Réformer l’ensemble des organisations internationales : FMI, Banque mondiale, création d’un Conseil de Sécurité Economique et Sociale et d’une Organisation Mondiale de l’Environnement
76. Garantir la primauté des normes sociales et environnementales sur les impératifs commerciaux et financiers
77. Augmenter l’aide publique française au développement, pour qu’elle franchisse le seuil de 0,7% du PIB
78. En finir avec la « Françafrique » et poser les bases d’un nouveau partenariat avec les pays concernés
79. Refuser les accords actuels de partenariat Union Européenne / Afrique – Caraïbes – Pacifique, et donner la priorité aux exigences de développement sur les exigences commerciales
Où l'on parle de : La motion «Un Monde d'Avance » en 79 propositions
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Quand Vincent Peillon invite les socialistes à voter pour la motion de Benoit Hamon
Vincent Peillon a une nouvelle fois, fait la preuve de tout son talent, a justifié tous les espoirs que nombre d'entre nous, à gauche, peuvent placer en cet homme d'envergure.
Interrogé en fin de semaine dernière sur I-Télé au sujet l'intervention de Nicolas Sarkozy à propos de la crise financière, il a été à la fois clair et pugnace, et pour tout dire brillant. Il a dénoncé avec une grande fermeté « une dramatisation incroyable, qui relève de la démagogie » et « un président inconséquent et démagogue » qui prend « les français pour des imbéciles », un président qui est aussi « l'homme qui a vidé les caisses de l'Etat », qui il y a un an encore « voulait favoriser les subprimes en France » et qui aujourd'hui ne propose en réaction à la crise que « des mesurettes » et du « symbolique », qui ne propose en réalité rien d'autre que la poursuite « d'une politique économique qui va dans le mur », laquelle est d'ailleurs « la même depuis 2002 ».
Il a proclamé notamment, très justement, et avec force conviction, que « le problème profond d'un système financier totalement dérégulé qui est en train d'appauvrir l'économie[...] c'est le système lui-même ». Une magnifique prestation, un réquisitoire d'une dizaine de minutes que je vous invite à suivre attentivement :
Vincent Peillon sur I>Télé
envoyé par dagrouik
Au passage, on entend Ségolène Royal qui réclame « qu'on passe des discours aux actes ». Elle a raison et c'est là toute la question. Quels actes forts poser pour répondre à la faillite globale d'un système ? Quelle politique alternative mettre en place qui soit à la hauteur des enjeux d'une crise qui ira s'aggravant tant qu'on aura pas transformé le système lui-même ? Quelle sera demain la ligne politique qui permettra aux socialistes de définir dans les mois qui suivront un projet à la fois crédible et ambitieux, qui posera les actes nécessaires à une transformation d'un système en fin de vie ?
C'est là bien tout l'enjeu du Congrès de Reims, en novembre prochain, où les socialistes se choisiront une ligne politique et une nouvelle direction. Les médias ne cessent de vouloir donner à croire qu'un tel congrès ne serait qu'un petit cirque minable totalement déconnecté des réalités, un sujet tout à fait mineur en regard de la crise qui frappe de plein fouet la France et les français. C'est tout le contraire et à ce titre on ne peut que regretter que certains des responsables socialistes semblent accréditer cette idée que le débat politique ne serait rien d'autre que superfétatoire, se limiterait à un bal des egos et des ambitions personnels. C'est tout le contraire parce que le travail des politiques, au-delà de se préoccuper du présent - gouverner pour ceux qui sont dans la majorité, s'opposer et faire vivre la démocratie pour les autres -, est de préparer l'avenir - et la période actuelle de faillite du système libéral rend plus cruciale encore l'exigence d'une alternative politique.
Il ne peut donc suffire de faire un constat, fut-il brillant, de la faillite du système. Encore faudra-t-il être en mesure d'apporter des réponses. C'est là tout le problème de Vincent Peillon, car à lire la motion Collomb(Royal) qu'il a signée, on comprend aussitôt que le ralliement des barons du PS (Collomb, Guérini et Valls, entre autres...) a été très chèrement payé par une Ségolène Royal qui se retrouvait menacée d'isolement. On croyait qu'il ne s'agissait que de mettre au frigidaire sa candidature au poste de premier secrétaire (c'est-à-dire en langage moins politique d'y renoncer totalement) et de renoncer d'abord à être la première signataire de ce qu'elle aurait voulu être « la motion Royal », ce qui était déjà beaucoup. Mais en réalité, devant la surprenante vacuité de cette motion, on comprend que les ségolénistes ont en réalité mangé leur chapeau et se retrouvent à soutenir une motion dont la ligne politique pourrait se définir comme social-libérale à la papa. Rien qui soit à la hauteur de la nécessaire transformation systémique qu'exige la crise financière et économique, écologique et sociale.
Ainsi, même le sujet pour le moins emblématique de la démocratie participative a fait les frais de cette alliance avec la droite du parti et ne fait désormais plus l'objet que de cinq lignes et autant de phrases inconsistantes. C'est dire ce à quoi il a fallu consentir pour obtenir de rompre un isolement qui aurait sans aucun doute signifié une trop cuisante défaite pour une Ségolène Royal qui souhaite avant tout préserver ses chances pour 2012. Il lui fallait avant tout limiter les dégâts, fut-ce donc à un coût politique exorbitant
Et c'est à peu près le même syndrome qui a tout autant frappé de paralysie un Bertrand Delanoë, lequel pourtant, il y a peu encore, nous invitait à l'audace. A lire sa motion, on se demande où se trouve le « courage » et la «créativité» éponymes, tandis que ce qui néanmoins apparaît avec « clarté » est qu'être présidentiable invite par trop à la prudence pour s'aventurer en une ligne politique réellement audacieuse, qui puisse aboutir à un projet politique réellement alternatif et apte à transformer une organisation économique et sociale à bout de souffle.
Lisez la motion de Martine Aubry, vous y découvrirez les mêmes frilosités : quelques propositions intéressantes, aucune vision politique globale. On a d'ailleurs beaucoup de mal à distinguer ce qui sur le fond sépare ces trois motions très social-démocrates fin de siècle où il s'agit essentiellement de corriger un peu ici et réguler un peu là un marché qui resterait livré à un libéralisme aussi triomphant qu'arrogant et destructeur. Bref, une gauche un peu molle que l'on ne connaît que trop bien !
Pour ce qui me concerne, je suis en vérité relativement peu intéressé par les propositions précises des uns ou des autres, beaucoup moins qu'à l'articulation de celles-ci autour d'une vision politique d'ensemble. J'attends d'une motion qu'elle trace une ligne, indique une direction, propose un socle, une base de travail pour construire un projet politique global cohérent et ambitieux, qui soit davantage en rupture qu'en continuité avec un socialisme lacunaire et qui depuis trop longtemps ne parvient plus à donner un espoir à l'électorat français (pas plus que cette social-démocratie à la papa qui partout en Europe va d'échec cuisant en échec cuisant). Notons par ailleurs que nombre des propositions des uns et des autres ne seront de toute façon plus d'actualité en 2012, seront partiellement ou en totalité à revoir, sont de fait aujourd'hui assez inutiles - sauf à s'imaginer que Nicolas Sarkozy reprendrait à son compte l'une ou l'autre (et on sait que cela n'arrivera pas).
Seule la motion de Benoit Hamon me semble proposer une vision globale. Ce n'est d'ailleurs pas nouveau à la gauche du parti. Ce qui en revanche est nouveau de ce côté-là, c'est que le socle idéologique a été considérablement dépoussiéré. On est loin aujourd'hui des archaïsmes marxisants, loin des postures dogmatiques à l'utopie si réjouissante (et il en faut aussi !) mais tellement déconnectée des réalités modernes. Au contraire, nous avons là une gauche réformiste et résolument tournée vers le XXIème siècle, une gauche qui notamment a assez largement compris qu'il ne saurait y avoir de socialisme moderne hors l'écologie politique ; une gauche qui a enfin intégré dans sa pensée politique que l'urgence écologique et l'urgence sociale sont les deux faces de la même pièce ; et que cette pièce a pour nom économie de marché régulée - parce que le libéralisme n'aura jamais d'autre vision que celle du profit à court terme et qu'il s'agit donc pour la puissance publique, l'Etat, d'internaliser dans les transactions marchandes et les investissements privés le coût des externalités de moyen et long terme que sont les dégradations du tissu social et les dégâts causés à l'environnement, l'objectif étant de rééquilibrer le marché au profit d'une meilleure prise en compte du bien-être des hommes dans leur environnement, c'est-à-dire de chaque homme et femme sur l'ensemble de la planète. parce que comme dirait l'autre, tou se tient, mais là encore il ne suffit pas que de le dire...
Je ne prétends pas que la motion de Benoit Hamon est parfaite de ce point de vue. Du moins va-t-elle dans la bonne direction. Du moins propose-t-elle une démarche globale et cohérente. Du moins la ligne proposée est-elle à la hauteur des enjeux. Du moins nous invite-t-elle à être en rupture avec nous-mêmes plutôt qu'à la continuité de ce qui nous a fait échouer et qui a mis la France entre les mains d'une droite ultra-libérale qui sert les plus riches et paient tous les autres de très hypothétiques promesses de retombées, cependant que toute notre économie s'effondre. Du moins la motion Hamon est-elle en vérité la seule qui répond au besoin de rénovation du Parti Socialiste, c'est-à-dire d'abord de ce projet qu'il nous reste encore à construire et que nous espérons tous.
Cette spécificité de la motion Hamon et qui en fait la qualité n'est pas un hasard : nous le savons désormais, nous ne pouvons attendre d'audace sur le champ des idées dans un contexte d'affrontement d'ambitions qui depuis trop longtemps se neutralisent. Le Parti Socialiste a vécu cette même paralysie avec Laurent Fabius, Dominique Strauss-Khan et Lionel Jospin, il s'y exposera de la même manière, et s'y expose déjà, avec François Hollande, Martine Aubry, Bertrand Delanoë et Ségolène Royal qui depuis des mois sont principalement occupés à creuser des tranchées et tenir leurs positions. Il est plus que temps de sortir de l'interminable guerre de succession qui se poursuit depuis la fin de l'ère mitterrandienne, plus que temps de tirer un trait sur des ambitions dont aucune ne parviendra à prendre le pas sur les autres - parce que dans le cas contraire celui ou celle-là aurait déjà et depuis longtemps pris l'ascendant sur tous les autres.
Et Vincent Peillon, donc, puisque c'est avec lui que cet article a débuté ? Je crois que celui-ci est aujourd'hui enfermé dans une fidélité qu'il ne peut s'agir de lui reprocher. Il a choisi de suivre Ségolène Royal plutôt que de jouer trop tôt sa propre partition. Or Ségolène Royal a opté pour une stratégie personnelle qui, bon an mal an, l'a conduit à s'allier avec la droite du parti. Quand on se souvient qu'il n'y a pas si longtemps - il y a deux ans encore ! - Vincent Peillon était au côté de Benoit Hamon dans le NPS dont il fut l'un des artisans, on comprend jusqu'où l'a mené sa fidélité et surtout que le chemin ne serait pas long à parcourir dans l'autre sens pourvu qu'il consente à se libérer de cette chaîne qu'il n'a pas voulu briser au lendemain de la défaite des présidentielles. Aussi je ne m'interdis pas d'espérer que le poids de la motion Hamon d'un côté, et la neutralisation des trois égos (plus un) de l'autre, puissent au final conduire à une synthèse ancrée à gauche... et dans laquelle la candidature de Vincent Peillon au poste de premier secrétaire apparaîtrait comme la meilleure garantie de l'unité des socialistes et de leur aspiration à une rénovation profonde et ambitieuse.
Nota Bene : Il va sans dire que je ne réclame de personne de croire sur parole les constats que je fais. C'est bien pourquoi je vous invite à lire à votre tour très attentivement, et avec l'oeil le plus neuf possible, les différentes motions dont j'ai au cours de l'article fourni les liens. Cela prend du temps, mais je demeure persuadé que l'indispensable rénovation du Parti Socialiste et de son projet politique passe d'abord par la volonté des militants de s'affranchir de leurs chapelles respectives. D'abord s'ouvrir soi-même. Ce qui me permet de terminer sur cette confidence : la gauche du PS n'avait jusqu'à présent jamais été ma tasse de thé, la préjugeant certes sympathique mais archaïque et dogmatique, datée pour tout dire... Je suis le premier surpris de sa métamorphose. J'ose dire que c'est une excellente nouvelle pour la gauche.
Où l'on parle de : Quand Vincent Peillon invite à voter pour Benoit Hamon
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Congrès du PS : 6 motions et 1 mode d'emploi
Depuis hier, nous connaissons les motions qui seront soumises au vote des militants dans la perspective du congrès de Reims. L'heure est donc venue d'une petite revue d'effectifs, ainsi que de quelques explications dont j'ai cru lire qu'elles pouvaient être nécessaires - concernant l'organisation du congrès du Parti Socialiste et quelques questions que vous vous posez sans doute.
Les motions déposées et proposées au vote des militants sont donc au nombre de six :
1. la motion Utopia : "Socialistes, Altermondialistes, Ecologistes"
premier signataire : Franck Pupunat ;
autres personnalités signataires : ? ;
présentation : comme son nom l'indique ;
qualité : la dimension écologiste, indispensable à un socialisme du XXIème siècle ;
défaut : isolée ;
mon estimation : 1% ;
téléchargez la motion F
2. la motion du pôle écolo : "Pour un socialisme résolument écologique"
premier signataire : Christophe Caresche ;
autres personnalités signataires : ? ;
présentation : comme son nom l'indique ;
qualité : la dimension écologiste, indispensable à un socialisme du XXIème siècle ;
défaut : isolée ;
mon estimation : 3% ;
téléchargez la motion B
3. la motion ségo-libérale : "L'espoir à gauche, fier(e)s d'être socialistes"
premier signataire : Gérard Collomb ;
autres personnalités signataires : Ségolène Royale - Manuel Valls - Jean-noël Guerini - Julien Dray - Vincent Peillon ;
présentation : ... ;
qualité : l'hypothèse Vincent Peillon et l'espoir d'un dépassement par le haut des divisions ;
défaut : proximité avec le Modem + Ségolène Royale est une part du problème socialiste : ambitions égotistes, luttes intestines, divisions insolubles, inaudibilité ;
mon estimation : 26% ;
téléchargez la motion E
4. la motion delano-démocrate : "Clarté, Courage, Créativité : Une gauche conquérante pour redonner un
espoir à la France"
premier signataire : Bertrand Delanoë ;
autres personnalités signataires : François Hollande - Jean-Marc Ayrault - Lionel Jospin - Pierre Moscovici ;
présentation : ... ;
qualité : politiquement très solide ;
défaut : continuité + Bertrand Delanoë est une part du problème socialiste : ambitions égotistes , luttes intestines, divisions insolubles, inaudibilité ;
mon estimation : 30% ;
téléchargez la motion A
5. la motion social-aubryiste : "Changer la gauche pour changer la France"
premier signataire : Martine Aubry ;
autres personnalités signataires : Jean-Christophe Cambadélis - Claude Barolone - Marylise Lebranchu - Laurent Fabius ;
présentation : ... ;
qualité : tonalité sociale ;
défaut : patchwork instable + Martine Aubry est une part du problème socialiste : ambitions égotistes , luttes intestines, divisions insolubles, inaudibilité ;
mon estimation : 18% ;
téléchargez la motion D
6. la motion hamo-réformiste : "Un monde d’avance"
premier signataire : Benoit Hamon ;
autres personnalités signataires : Jean-Luc Mélenchon - Henri Emmanuelli - Pierre Larrouturou - Marie-Noëlle Lienemann - Gérard Filoche ;
présentation : ... ;
qualité : ancrage à gauche sur une ligne audacieuse et réformiste ;
défaut : dépoussiérage encore incomplet ;
mon estimation : 22% ;
téléchargez la motion C
Mode d'emploi du Congrès du PS :
Les motions déterminent six courants. Elles seront soumises au vote des quelque 200 000 militants du PS, le 6 novembre prochain - dans leurs sections et à bulletin secret.
Ce vote permet de désigner à la proportionnelle et dans chaque section les délégués au Congrès fédéral qui lui même votera en respectant la proportionnelle au niveau fédéral pour les délégués au congrès national. Les Congrès fédéraux sont programmés simultanément pour le 11 novembre.
Le congrès se tiendra à Reims les 14, 15 et 16 novembre. Une synthèse peut se faire entre les délégués de plusieurs motions (synthèse partielle) ou de toutes les motions (synthèse générale). En absence de synthèse générale, la ligne politique du PS est déterminée par la motion de synthèse partielle qui détiendra la majorité des délégués. Cette ligne est dès lors celle qui vaudra pour les 3 années suivantes.
Le premier signataire d'une motion est généralement le chef de file du courant qui en est issu, mais il n'est pas pour autant nécessairement candidat au poste de premier secrétaire. Les aspirants à ce poste ont jusqu'au 14 novembre pour déposer leur candidature. Le vote des militants sur le nom du premier secrétaire du PS aura lieu en section le 20 novembre, et éventuellement lors d'un second tour le 21 novembre. Le successeur de François Hollande aura ainsi été élu à la majorité absolue des voix des militants socialistes.
Mon choix :
Benoît Hamon entend porter quatre orientations politiques :
- retour de la puissance publique dans le champ économique ;
- restrictions indispensables au libre-échange là où il met à mal la protection de l'environnement et les droits des salariés et des citoyens ;
- exigence d'une nouvelle répartition des revenus entre le travail et le capital ;
- vraie réorientation de la construction européenne.
C'est pour moi une excellente base pour un projet enfin audacieux et résolument ancré à gauche, une réelle alternative crédible à la politique libérale, économiquement catastrophique et dramatiquement anti-sociale, menée par Nicolas Sarkozy et qui jour après jour s'enfonce et persiste dans son échec. Il n'y manque selon moi (mais je n'ai pas encore lue la motion) qu'une prise de conscience plus soutenue de la dimension écologique qui doit impérativement traverser tout projet politique d'une gauche moderne. En dépit de ce bémol de première importance (et qui peut aussi bien s'appliquer à chacune des quatre grandes motions), je suis aujourd'hui persuadé que la refondation du Parti Socialiste passe par un soutien massif à la motion "Un monde d’avance", dont Benoit Hamon est le premier signataire.
Je reste en outre résolument convaincu que le succès du congrès des socialistes implique que les militants se libèrent de leurs chapelles et renvoient dos à dos Ségolène Royal, Bertrand Delanoë et Martine Aubry dont les querelles aussi insolubles que stériles, largement héritées de la course à la succession mitterrandienne que se livrèrent avant eux les Jospin, DSK et Fabius, minent et paralysent depuis trop longtemps le Parti Socialiste. Il est temps d'en finir avec ses inimitiés d'un autre siècle et réunir tous les socialistes autour d'une équipe renouvelée, où il sera enfin tenu compte du fait majeur de l'histoire actuel du PS et que sont pourtant parvenus à éclipser la bataille des égos : les socialistes n'ont jamais été à ce point proches les uns des autres sur le fond - ils sont réformistes et de gauche !
Ainsi donc, et pas tout à fait paradoxalement, du poids que donneront les militants à la motion Hamon dépendra, en rendant cette dernière incontournable, la possibilité que - les trois autres motions se neutralisant - il soit nécessaire de faire émerger un candidat de synthèse qui ne soit pas l'un de ceux-là... et qui serait alors, et plus que probablement, Vincent Peillon dont un peu partout le nom est de plus en plus cité.
Et si donc les militants osaient l'audace d'un saut de génération... pour en finir avec celle qui n'en finira jamais de s'entredéchirer sur la dépouille d'un autre siècle.
Et si les militants socialistes osaient la gauche !
Lire aussi : Congrès du PS : le cas Hamon et l'hypothèse Peillon
Où l'on parle de : Congrès du PS : 6 motions et 1 mode d'emploi
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Congrès du PS : le cas Hamon et l'hypothèse Peillon
Ainsi, à quelques jours du dépôt des motions, une première clarification a eu lieu au sein du Parti Socialiste. Inutile de gloser à l'infini sur les tractations de couloirs qui ont permis cette clarification, il s'agit de politique et donc de l'art de passer des alliances et de faire des compromis. Il ne sert à rien en la matière de jouer les vierges effarouchées : en politique, on n'a jamais raison tout(e) seul(e).
Constatons donc seulement que quatre axes principaux se sont dégagés parmi lesquels les militants auront à faire un premier tri. Notons également que du poids respectifs qu'auront donné les militants à ces quatre forces dépendra en grande partie la deuxième phase de clarification qui déterminera, à l'issue du vote sur les motions, un pôle majoritaire et un voir deux pôle(s) minoritaire(s), ainsi que le nom du prochain premier secrétaire.
Passons en revue les quatre forces principales en présence :
1. L'aile ségo-libérale
Ségolène Royal a finalement noué une alliance avec les animateurs de "La ligne claire", les barons de province du socialisme, comme le maire de Lyon Gérard Collomb et le patron des Bouches-du-Rhône Jean-Noël Guérini, mais aussi le député de l'Essonne Manuel Valls, le très "libéral compatible" et qui plaide pour le renoncement du Parti Socialiste à sa référence au socialisme. Nous trouvons là tous ceux qui au PS penche vers une redéfinition de la stratégie d'alliance du Parti Socialiste en la déportant vers le Modem. De Royal à Valls et de Valls à Bayrou, il y a là en effet une certaine cohérence politique social-libéral ;
2. Le centre delano-démocrate
Le maire de Paris, Bertrand Delanoë, s'est allié à l'actuel premier secrétaire, François Hollande, dont le poids reste fort dans les fédérations socialistes, et vient d'enregistrer un soutien de poids en la personne de Jean-Marc Ayrault, le patron des députés socialistes à l'Assemblée nationale et qui fut très proche de Ségolène Royal durant la campagne des présidentielles. Ce dernier souhaite d'ailleurs que Delanoë "tende la main à Ségolène Royal et à ses amis". Ils sont la première partie du pôle social-démocrate.
3. Le centre social-aubryiste
La maire de Lille, Martine Aubry, est quant à elle à la tête d'une coalition qui réunit des strauss-kahniens (comme Jean-Christophe Cambadélis), Arnaud Montebourg, Laurent Fabius et ses amis, ainsi que de nombreux cadres du Nord-Pas-de-Calais. Eux aussi sont des sociaux-démocrates avec une coloration sociale légèrement plus marquée.
4. L'aile hamo-réformiste
Benoit Hamon est parvenu à réunir la gauche du Parti Socialiste : Henri Emmanuelli, les anciens ministres Marie-Noëlle Lienemann et Paul Quilès, et enfin Gérard Filoche. Si la social-démocratie n'est pas une appellation en laquelle ils se reconnaissent, on note dans leurs différentes contributions l'émergence d'un socialisme moderne, adepte de la réforme, à la fois ambitieux et ancré dans les réalités du XXIème siècle, très européen.
Manque Moscovici qui après avoir longtemps tenu la corde aura finalement fait les frais de ce petit jeu des alliances. Il se déterminera sans doute bientôt, sans que cela puisse sensiblement changer la donne. Nous possédons donc à cette heure de toutes les cartes qui nous permettent de nous lancer dans un petit jeu de prospective politique :
Première hypothèse : La motion delano-démocrate arrive en tête - Le maire de Paris est en position de maintenir sa candidature à la tête du PS et l'hypothèse d'un rapprochement avec la branche ségo-libérale devient envisageable. A moins que Bertrand Delanoë ne préfère faire l'union des sociaux-démocrates en privilégiant une alliance avec Martine Aubry. S'il ne faisait pas ce choix, cette dernière pourrait alors décider soit de rejoindre l'axe qui se serait constitué à la droite du PS, soit de s'allier avec Benoit Hamon et constituer un pôle minoritaire qui plus conséquent aurait d'autant plus les moyens de peser. En tout état de cause, Delanoë deviendrait premier secrétaire du PS.
Deuxième hypothèse : La motion ségo-libérale arrive en tête - En ce cas, il est fort probable que ni Delanoë ni Aubry ne consente à faire l'appoint et qu'ils décident en conséquence de se rapprocher, faisant candidat au poste de premier secrétaire celui des deux qui serait devant l'autre. Le reste dépendrait alors très fortement du poids du pôle hamo-réformiste tel qu'il serait ressorti du vote des militants, lequel pôle - quoi qu'en espère depuis longtemps les ségolénistes - ne devrait pas consentir à s'allier par-dessus les centres avec l'aile ségo-libérale. Ainsi, si Benoit Hamon réussit son pari de fédérer les forces de gauche de ce parti et à peser suffisamment lourd, il serait en position d'entrer dans la constitution d'une majorité qui, penchant clairement à gauche (c'est-à-dire en particulier assez loin du Modem) n'aurait d'autre choix que de s'atteler à l'élaboration de ce projet ambitieux, innovant et cohérent dont a fini par désespérer la gauche.
Cette deuxième hypothèse est selon moi la plus probable, qui donnerait quelque 25 à 30% aux motions delano-démocrate et ségo-libérale, 20 à 25% à la motion social-aubryiste et 15 à 20% à l'aile gauche du PS. Quelques points en plus ou en moins ici ou là conduiraient soit à une majorité étriquée qui verrait le Parti Socialiste continuer dans l'immobilisme où chacun des présidentiables s'efforceraient de miner l'avènement de tous les autres, soit à une majorité conséquente et contrainte cette fois de produire ce projet moderne et de gauche qu'on attend depuis trop longtemps et qui consacrerait l'émergence d'un véritable Nouveau Parti Socialiste.
On l'aura compris - et même si j'attends encore de me plonger dans la lecture des motions - je penche pour ma part pour apporter mon soutien à la motion portée par Benoit Hamon et ses amis, avec l'espoir que ceux-ci pèsent suffisamment pour entrer dans une synthèse majoritaire qui orienterait vers l'action et l'audace l'ensemble du Parti Socialiste.
A moins que...
L'hypothèse Vincent Peillon - Je l'ai dit depuis longtemps, un congrès de reconstruction aurait été un congrès qui pour en finir avec les vieilles querelles stériles aurait mis sur la touche les vieux querelleurs, c'est-à-dire cette génération de responsables issue du mitterandisme et qui s'entre-déchirent depuis une à deux décennies, les Delanoë, Royal, Hollande et Aubry rejoignant sur les lignes arrières les DSK, Fabius et Jospin. On aurait eu alors un congrès qui aurait fait la part belle à un débat de fond et qui se serait articulé autour de nouvelles personnalités et en particulier celles de Vincent Peillon et Benoit Hamon. Le moins qu'on puisse dire est qu'on refusa de s'engager dans une telle direction de rupture.
Néanmoins, paradoxalement, en se neutralisant les uns les autres, les barons du mitterandisme pourraient n'avoir en définitive d'autre porte de sortie que de se mettre d'accord autour d'un autre que l'un d'entre eux. Or il apparaît de plus en plus clairement et à de plus en plus de socialistes que Vincent Peillon puisse être celui-là.
La solution Peillon aurait un double avantage, dont le deuxième est un handicap : non seulement le PS sortirait par le haut de son congrès et dans une certaine unité, un parti socialiste suffisamment solide pour se mettre enfin sérieusement à son travail d'opposition au sarkozysme et de proposition d'une alternative innovante à gauche. Mais, en sus, il ne faudrait alors pas six mois à Vincent Peillon, premier secrétaire du parti socialiste, pour acquérir auprès des français aussi bien notoriété que popularité. Ce qui de facto en ferait rapidement le meilleur des présidentiables - fait qui constitue en réalité le frein majeur à la concrétisation d'une telle hypothèse, tant les vieux présidentiables auront à coeur d'étouffer dans l'oeuf une menace qui pèserait trop lourdement sur leurs ambitions personnelles.
Aussi, cette hypothèse Peillon, ne pourra surgir que d'une pression exercée très fortement depuis les militants, qui siffleraient la fin de la récréation des egos.
Nota Bene : Aux nombreux ségolénistes qui continuent d'espérer en une possible alliance avec Benoit Hamon qui ferait l'appoint nécessaire à Ségolène Royal, je voudrais suggérer de visionner très attentivement la déclaration limpide de ce dernier et qu'il fit à l'issue de l'université d'été de la Rochelle. Ils comprendront alors combien une telle alliance relève du fantasme, combien les bras dans lesquelles s'est désormais précipitée Ségolène Royal ne sauraient pouvoir ni même vouloir remplir les cinq conditions posées par Benoit Hamon et ses amis et qui concernent en effet le fond des débats :
1- sur le rôle de l'investissement publique dans la régulation du marché ;
2- sur les restrictions au libre-échangisme ;
3- sur la question de l'augmentation des salaires ;
4- sur la refondation du pacte européen ;
5- sur le rassemblement de la gauche : soccialistes-écologistes-communistes et hors alliance nationale avec le Modem.
Crédit illustration : SaT - Reproduction interdite sans autorisation de l'auteur
Lire aussi : Congrès du PS : 6 motions et 1 mode d'emploi
Où l'on parle de : Congrès du PS : le cas Hamon et l'hypothèse Peillon
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Candidature au frais, Ségolène prépare son show
Il y a deux jours, je commettais un petit billet sous le titre Quand Ségolène danse la Valls. Déjà, le titre m'avait dangereusement fait vaciller au bord du gouffre de l'autosatisfaction.
Et voilà que ce soir, après avoir reçu un n-ième courriel en provenance de Désir d'Avenir concernant le prochain Zénith de Ségolène Royal - dans le dernier, on cherche même à me faire acheter des badges et des T-shirts pour financer l'opération -, ce soir, donc, c'est ce titre qui me vient à l'esprit et que d'ailleurs je rappelle aux étourdis : Candidature au frais, Ségolène prépare son show - et à ceux ceux qui ne suivent décidément pas, je me passe de rappeler la référence frigorifique.
Bref, vous, je ne sais pas, mais moi je me trouve plutôt en forme question titres. Celui-ci est d'ailleurs tellement réussi, vous dis-je depuis le fond de mon gouffre, qu'il se suffit à lui-même.

Où l'on parle de : Candidature au frais, Ségolène prépare son show
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Ségolène à la Rochelle : Aimez-vous les uns les autres
D'abord, elle a dit : "Aimez-vous les uns les autres ou disparaissez !"
Ensuite, elle est partie pour l'Italie...
Envolée.
Disparue !
...
Sans doute qu'elle n'aime finalement ni les uns ni les autres.
EDIT : Il n'y a rien de pire que de n'être pas le premier à pondre une blagounette. Rhaaa, ça m'énerve ça !
Où l'on parle de : Ségolène à la Rochelle
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Billet précédent : JO de Pékin : déjà une médaille en Or pour la France
Ségolène moi toute seule
Le Tout sauf Ségo, la (mauvaise) réponse au Ségolène Sinon Rien... et petite revue des contributions pour le Congrès du PS.
Où l’on découvre que quoi qu’en disent Ségolène Royal, les médias et la droite, les socialistes ont quelques idées.
Quand je lis que dans la contribution "Une vision pour espérer, une volonté pour transformer" est évoqué l'individualisation des parcours scolaires, l'instauration d'un bouclier logement, des mesures concernant les sécurités et le vivre ensemble, une stratégie de relocalisation économique, le développement du micro-crédit, la mise en place d'une CSG patronale, entre autres...
Quand je lis que dans la contribution "Besoin de Gauche" le développement durable apparaît comme principe de base de l'action politique et économique et sont proposés sept conventions nationales pour la période 2009-2010 comme chemin pour l'émergence d'un projet alternatif ambitieux, cohérent et crédible...
Quand je lis dans la contribution "Utopia" la volonté qu'émerge une gauche d'avant-garde fondée sur une identité écologiste, altermondialiste et antiproductiviste et sont évoqués les ruptures avec la rentabilité du capital comme unique objectif, avec la religion de la croissance, avec le culte de la consommation, avec la valeur aliénante du travail...
Quand je lis dans la contribution "Urgence Sociale" les dix questions fondatrices que soumet Pierre Larrouturou aux rédacteurs de motions et qui sont autant de propositions de innovantes et ambitieuses...
Quand je lis que dans la contribution "Reconstruire à gauche" sont évoquées le conditionnement des exonérations sociales aux accords salariaux, la modulation du taux d'imposition sur les sociétés, la revalorisation de la fonction enseignante, entre autres...
Quand je lis que dans sa contribution, Marylise Lebranchu aborde les thèmes de la question alimentaire, des solidarités territoriales, des conditions de travail et de la responsabilité des employeurs, du développement durable de l'industrie, de la démocratisation de l'enseignement supérieur, de l'impôt européen sur le capital...
Quand je lis que dans la contribution "Réinventer la Gauche" on parle du relèvement de l'impôt sur les bénéfices, d'imposition des revenus financiers, de VIème République parlementaire, de planification écologique...
Quand je lis que dans la contribution "D'abord, Redistribuer les richesses" on parle très concrètement de fiscalité redistributive et de construction de l'unité de la gauche...
Quand je lis que dans la contribution "Changer !" est proposé un retour à une intervention publique vertueuse et l'instauration d'un salaire minimum universel...
Quand je lis toutes ces contributions et que je m'aperçois que les idées foisonnent dans chacune d'elle et souvent se rejoignent, je me dis qu'il faut faire preuve d'une prétention assez exceptionnelle pour choisir ce moment précis pour titrer un livre "Si la Gauche veut des idées" et laisser penser que sans son auteur la gauche serait démunie, incapable de proposer une alternative crédible, faisant en cela le jeu de la droite qui ne perd pas une occasion de rabâcher ce qui de toute évidence est une contre-vérité, pour ne pas dire un mensonge éhonté.
Surtout que lorsque je lis la contribution "Combattre et proposer" de cette même Ségolène Royal (vous aviez deviné que c'était elle dont il s'agissait), je n'y trouve rien qui ne se trouve aussi dans les autres contributions, sinon la cérémonie républicaine - proposition qui si même elle n'était pas aussi imbécile qu'impraticable ne pourrait suffire à prétendre faire de son auteur le messie de la Gauche. Cette façon de tirer en permanence la couverture à soi, cette manie d'avoir toujours l'air de dire "Moi Ségo toute seule Je...", invitant implicitement ses soutiens à bêler à l'unisson l'idolâtre rengaine du Ségo Sinon Rien, explique probablement pour une bonne part la tentation épidermique du Tout Sauf Ségo.
Et je m'empresse de préciser que pour ce qui me concerne le TSS est une autre imbécillité. Etant fortement concentré sur les possibilité de victoire de la Gauche en 2012 et sa capacité alors de réellement transformer la société, étant par ailleurs de plus en plus convaincu que le positionnement politique et la stratégie de conquête de Ségolène Royal sont inévitablement perdants, et parce qu'en outre je continue de penser que ses piètres qualités oratoires sont pour elle un handicap majeur, j'en suis pour ma part à un très simple PE : Pas Elle !
La bonne nouvelle est que, hormis la contribution de Manuel Valls qui me semble d'une pauvreté assez sidérante, l'ensemble des contributions que j'ai pu lire (je crois qu'il manque encore Benoit Hamon et Bertrand Delanoë à l'appel, peut-être François Hollande ?...) permet de nourrir de réels espoirs quant à la tenue d'un vrai débat de fond. La cerise sur le gâteau étant qu'il y a dans tout ça de la bonne vraie gauche avec des vrais morceaux dedans.
La surprise : sur le fond des propositions, et si l'on écarte la question de la présidentialisation du Parti Socialiste, les motions Aubry, Royal et... Fabius sont étrangement similaires.
Source : Ségolène moi toute seule Je
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Parti Socialiste : la guerre des roses

© La République des Fourmis par SaT - Reproduction interdite sans autorisation de l'auteur
Et, pendant ce temps là...
Source : La guerre des roses
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Ségolène remet le couvert - Sarkozy est déjà à table
"Ségolène m'a fâcher !"
Ségolène Royal publiera début juillet un livre de dialogue dont le titre est " Si la Gauche veut des idées ". Cet ouvrage de dialogue avec le sociologue Alain Touraine, à qui revient le titre de l'ouvrage, sera "publié le 8 juillet", a indiqué Mme Royal lors d'une rencontre avec la presse écrite régionale. En attendant (pour ceux qui attendraient), Le Monde en publie dès aujourd'hui les bonnes feuilles.
On y lira notamment ceci, à propos de ce qu'elle appelle "la France métissée" : "Je propose, pour renforcer le sentiment d'appartenance à la nation, de créer une cérémonie républicaine pour tous les jeunes, quelle que soit leur origine, pour le passage à la majorité à 18 ans, l'âge du droit de vote."
Bah voyons ! Et puis lors de cette cérémonie, une partie de la matinée serait consacrée à lire la lettre de Guy Moquet ; à midi les jeunes se mettraient en rang pour chanter la Marseillaise ; dans l'après-midi, chacun d'entre eux ferait un compte-rendu à propos de la mémoire de cet enfant juif qu'on leur a attribué en primaire ; et le soir chacun repartirait avec un drapeau français tatoué sur la fesse gauche.
Sûr que la Gauche veut des idées - elle n'en est pas totalement dépourvue d'ailleurs - mais peut-être pas de vôtres, Madame Royal. Pas de ces idées "coup de com' " qui ne règleront jamais le moindre des problèmes que connaissent les français dans leur vie quotidienne... et qui déjà, vous vous en souvenez peut-être, vous nous ont fait perdre une élection présidentielle ; et ce pour le plus grand profit d'un Sarkozy qui est et restera toujours bien plus fort que vous dans le domaine des idées à la con !
J'ai l'air fâché ? Mais non... Je suis tout simplement dans une colère noire. C'est que, voyez-vous, tout ce vide, à la fin, ça me gonfle !
C'est que, surtout, et si on prend la peine de réfléchir deux minutes - avant par exemple de faire une confiance aveugle à ses intuitions -, en France, lorsque l'on atteint sa majorité, on obtient une carte d'électeur, signe d'appartenance à la communauté nationale... pourvu qu'on soit français. Pourvu qu'on soit français ?!
Mais oui, bon sang, il ne suffisait que d'y penser : pour marquer la citoyenneté, l'appartenance à la cité, à la communauté nationale, on pourrait commencer par accorder le droit de vote à tous ceux dont on réclame un comportement citoyen, accorder le droit de vote des résidents étrangers aux élections locales. Ça aurait été un poil plus ambitieux, non ? Un poil moins symbolique, aussi. Et d'ailleurs, si l'on veut la faire cérémonie citoyenne, rite de passage à l'âge adulte de la citoyenneté, il ne devrait y avoir rien de plus enthousiasmant que d'aller pour la première fois exercer son droit de vote, son devoir civique, comme on dit...
Parce que voilà, tout de même, organiser une cérémonie républicaine pour tous les jeunes français... ce serait de facto en exclure leurs potes qui ne le seraient pas, français, et avec lesquels pourtant ils ont grandi - voire avec lesquels a grandi en eux le sentiment commun d'être refoulés, abandonnés en marge de la communauté nationale, justement...
Alors, dites-nous, Madame Royal, puisque le sujet de l'appartenance nationale vous tient tant à coeur, ce projet d'une France métissée réconciliée, ne pensez-vous pas qu'il passe d'abord par un droit de vote élargi, un droit de vote qui n'exclurait pas, qui ne créerait pas des citoyens de seconde zone ? Ne pensez-vous pas que l'exercice du droit de vote serait en réalité la plus belle des cérémonie républicaine pour la jeunesse de France - qui n'est pas tout à fait exclusivement une jeunesse française -, ne pensez-vous pas ?
Source : Ségolène m'a fâcher !
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Pour Ségolène Royal, l'essentiel est de participer
Démocratie participative façon Corse
Sur le site à la gloire de Ségolène Royal, notre chef Désirs d'Avenir, Ségolène Royal "invite à une grande réunion de présentation de la contribution que nous soumettrons très prochainement aux militants du Parti socialiste. [...] Notre contribution, notamment alimentée par les 2 500 textes que vous avez envoyés sur le site « Congrès utile et serein »...".
Or, dès l'annonce de l'initiative "participative" pour un congrès "utile et serein", j'écrivais que ce qui ne l'est pas [posé] et qui aurait dû l'être est : à quoi ça va servir ? - et on se doute en réalité que la vraie question est "à qui ?". Car est-il possible d'envisager qu'à l'issue de la méthode participative proposée à tous les militants par Madame Royal, il se dégage en réponse des positions largement contraire aux positions de Ségolène ? Et qu'adviendrait-il alors de la rédaction de la motion Royale ? On peut même élargir : puisque le machin s'adresse à l'ensemble des militants, comment est assurée la transparence du bidule ? Qui gère la modération ? Quels en sont les critères ? Le dépouillement des réponses sera-t-il également participatif ? Qui décidera de ce qui est à retenir et ce qui est à rejeter ? Bref, le bidule, en réalité, il appartient à qui ? Ou encore, et en corolaire : le machin participatif n'inclut-il pas nécessairement la transparence et la mutualisation de l'accès au bidule ?
Force est de constater qu'aucune réponse n'a été par la suite apportée afin de garantir la transparence du processus, condition impérative de la démocratie. Aussi bien j'écrivais à la suite du précédent extrait que en l'absence d'une telle transparence - et donc de la réponse à ces questions de fonctionnement qui sont tout sauf accessoires -un militant qui ne se sentirait pas franchement politiquement proche de Ségolène Royal ne peut véritablement espérer que ses réponses éventuelles soient prise en compte, puisque ce qui va en ressortir est annoncé "motion Ségo". Ce qu'il sait en revanche, c'est qu'en participant il sera compté dans ces "X milliers de participants au débat interne suscité par Ségolène Royal" qui seront inévitablement annoncés à l'issu de l'opération pour preuve de l'engouement des militants et sympathisants vis à vis de ladite démarche participative. Et voilà donc notre ami pas si bisounours piégé entre dire, être compté mais sans pouvoir espérer qu'on tienne compte de ses réponses et ne pas répondre et laisser dire la vérité des vrais bisounours.
Cela reste cruellement vrai et la seule nouveauté est que ce que j'avais annoncé comme inévitable s'est bel et bien produit... et qu'à présent l'on sait donc que X=2,5 - ce qui en sus n'est pas beaucoup, sans doute que nombre de militants ont finalement préféré n'être pas compté dans les "participants" que de participer avec le risque de ne compter pour rien dans le texte final.
Car tout de même, quant on lit les "synthèses" des contributions - voir par exemple la synthèse de la question 2 -, le doute n'est plus permis : tout cela, le "participatif", n'était qu'un habillage, une vaste opération de communication et d'enfumage... et la contribution de Ségolène Royal sera la contribution de Ségolène Royal et de ses conseillers politiques soumises à l'appréciation des militants - ce qui en soit ne me pose aucun problème, pour peu que cela soit assumé plutôt qu'enfumé.
Bref, la démocratie participative à la sauce Royal, ça fait furieusement penser à Astérix en Corse :

Source : Pour Ségolène Royal, l'essentiel est de participer
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Désirs d'Avenir : un nouveau site
Quand Royal désire Ségolène (et réciproquement)
cliquer pour afficher en grand
Le nouveau site de Désirs d'Avenir, l'association de Ségolène Royal, vient d'ouvrir... et ça pour sûr, ces gens-là n'ont pas de problème avec le culte du chef !
Rien que sur la page d'accueil, je compte pas moins de dix fois le nom de Ségolène Royal, neuf photos de la dame et quinze videos rendant hommage à ses interventions ici ou là. Ségolène Royal est ainsi plus de trente fois présente sur la page d'accueil du site de Ségolène Royal, ça donne légèrement le ton.
Par comparaison, le mot socialiste apparait... une fois, plus le poing et la rose tout là haut dans le bleu des nuages - qui soit-dit en passant fait très UMP, en tout cas considérablement plus que le rose, qui est totalement et dramatiquement absent de la page. Comment mieux dire que dans les désirs d'avenir de Ségolène Royal il y a assez peu de désir de socialisme et beaucoup de désir d'elle-même ?...
Source : Désirs d'Avenir : un nouveau site
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Dix questions pour dix champions socialistes
A propos de création de richesses, d'impôts et de redistribution...
Si les mots ont leur importance, parce qu'il s'agit de leur donner un sens, la confrontation des mots ne saurait tenir lieu de confrontation des idées. Socialisme, social-libéralisme, social-démocratie ou social-écologie, il s'agit d'abord de se distinguer sur le fond d'une orientation politique. La gauche se préoccupe de justice sociale, c'est-à-dire du cycle création / redistribution des richesses. Soit. A la veille d'un très important congrès du Parti Socialiste, pour l'heure assez mal engagé, il serait alors intéressant, sinon indispensable, de connaître la position de chacun sur certaines questions très concrètes - pour s'occuper seulement ensuite de l'habillage sémantique.
Voici donc les questions que je pose à qui voudra bien y répondre, à chacun d'entre vous et plus spécifiquement à Benoit Hamon et Vincent Peillon, à Ségolène Royal et Bertrand Delanoë, à Martine Aubry et Manuel Valls, à Julien Dray et Pierre Moscovici, à François Hollande et Laurent Fabius, chacun d'entre ces dix là étant potentiellement le prochain premier secrétaire du Parti Socialiste et/ou le futur candidat des socialistes à l'élection présidentielle - et je le sais bien qu'il n'y a que deux femmes, et même aucune parmi la jeune garde, mais ce n'est pas à moi qu'il faut s'en prendre...
1- Impôt sur le Revenu : Faut-il revoir la redistributivité de l'impôt sur le revenu et dans quel sens ?
2- Allocations Familiales : Faut-il continuer d'exonérer les allocations familiales de l'impôt sur le revenu ? Doivent-elle à l'avenir être accorder et niveler sous conditions de ressources ?
3- Stock-options : Considérant que les stock-options sont une composante du revenu de ceux qui en bénéficient, doivent-elles continuer à être exonérées de cotisations sociales sur la plus-value d’acquisition ? (pour plus d'explications, lire ici)
4- Droits de succession : Un héritage étant un revenu pour son bénéficiaire, faut-il rétablir l'impôt sur les successions ? Faut-il prévoir un plafond d'exonération et à quel niveau ?
5- TVA : La TVA étant l'impôt le moins redistributif, faut-il aller vers une réduction des taux de la TVA ?
6- Charges Sociales : Faut-il changer l'assiette des charges sociales depuis la masse salariale vers la valeur ajoutée - en prenant soin de revenir sur l'ensemble des exonérations ?
7- ISF : Faut-il revoir l'Impôt sur la Fortune et dans quel sens ?
8- Taxe sur les transactions financières : Êtes vous favorable à ce que la France plaide pour l'instauration en Europe d'une taxe type Tobbin sur les transactions financières spéculatives ?
9- Le temps de travail : Pensez-vous que la réduction du temps de travail est un processus historique qui va dans le sens du progrès social ?
10- La croissance du PIB : Compte-tenu de la raréfaction de la ressource, pensez-vous que les socialistes doivent continuer de considérer la croissance du PIB comme un objectif économique source de progrès social ?
Les dix auxquels je m'adresse plus spécifiquement ne répondront peut-pêtre pas, et sans doute pas ici, mais vous ? Il serait très intéressant de savoir enfin ce qui nous sépare sur le fond de ces questions... de sortir une bonne fois de ce positionnement pro-untel ou pro-unetelle que quant à moi je présume largement artificiel, pour ne pas dire instinctif.
Source : 10 questions pour 10 champions socialistes
Consultation Participative : des chiffres utiles et sereins
Un mois après le lancement de l'initiative de Ségolène Royal,
les chiffres de la participation
Le jour même où Ségolène Royal annonce vouloir prendre la tête du parti, une première synthèse de la consultation participative - mais presque - pour un Congrès Utile et Serein est livré à la sagacité des militants.
Or, depuis le lancement de cette initiative, il y a un mois, on glose beaucoup sur le caractère participatif de la méthode Royale. Le principe est contesté par les uns et considéré comme l'achèvement ultime de la démocratie par les autres, mais de quoi parle-t-on au juste ? Ou, autrement dit, qui participe ? "L'ensemble des militants et des sympathisants, nous avait-on dit. Bien bien.... Combien d'adhérents au Parti Socialiste ? Toujours difficile à dire, mais on s'accorde aujourd'hui pour en dénombrer quelques 200 000. Bien... et combien de sympathisants socialistes ? Impossible à dire, évidemment. Alors, combien de militants à Désirs d'Avenir ? Beaucoup, entend-on dire souvent...
Allez, je ne vous fais pas languir plus longtemps : à ce jour, la consultation participative pour un congrès utile et serein compte 1604 messages qui ont été délivré sur 697 sujets de discussion ouverts et répartis sur les 10 questions posées. Nombre de blogueurs ayant posté plusieurs messages, on peut estimer que ce sont en réalité moins de 1500 participants qui ont répondu à l'appel à contributions lancé début avril par Ségolène Royal.
Tout ça pour ça ?!... Oui, et sans parler sur le fond de la vacuité des premiers résultats. Au moins est-on maintenant certain d'une chose, c'est que la contribution de Ségolène Royal pour le prochain congrès des socialistes ne sera ni plus ni moins qu'une autre classique dans son élaboration, ni plus ni moins participative que n'importe quelle autre - ce qui, soulignons-le également, ne préjuge en rien du fond.
Consultation Participative : des chiffres utiles et sereins
Consultation sereine, certes. Mais utile ?
L'essentiel est de participer
Ça y est, les premières synthèses sont arrivées ! La question 2 m'intéresse, me paraît centrale, un bon moyen de prendre le poul : Le socialisme ne peut pas se contenter d’aménager le capitalisme financier à la marge : comment produire et répartir autrement la richesse ? Je télécharge donc aussitôt le pdf. C'est rapide. Normal, le tout tient sur deux pages. Et en plus c'est écrit gros ! Et voici, hors les encarts de citations de quelques contributeurs flattés, l'intégralité de ce qu'on peut y lire :
Le capitalisme : repenser sa définition et son fonctionnement
L’échec du modèle actuel : Les contributeurs jugent que le capitalisme, dans sa forme actuelle, est porteur de menaces sur le plan humain, et également financier, puisque le système contient en lui-même le ferment de ses propres dérives. Le modèle profite à un petit groupe et coûte beaucoup à tous. Il faut redéfinir les bases sur lesquelles il doit fonctionner.
Redéfinir les notions de richesse et de croissance : Le développement de la richesse ne doit pas être confié à une minorité qui décide pour les autres. L’opacité des marchés financiers dérange les contributeurs. Le contenu de la notion de croissance doit comprendre des indices de qualité.
Les fondements du nouveau capitalisme : Le capitalisme moderne doit se fonder sur le développement durable : social, économique, environnemental.
Favoriser le développement de l’entreprise
Une nouvelle organisation de l’entreprise : Il faut recentrer l’entreprise sur l’humain. Revoir ses modes de production et de management. Son développement devra être encouragé. L’État peut intervenir pour diversifier son financement, sa composition, ses organes de décision et le rapport de force entre patrons et salariés.
Favoriser le développement de l’entreprise : Les contributeurs suggèrent de favoriser la croissance de l’entreprise par la modularité de l’impôt et de la TVA, d’en rendre le financement accessible à tous, d’intégrer le handicap au monde du travail. La lutte contre les inégalités (femmes, origines) doit être pensée par la direction de l’entreprise.
L’intervention de l’État
L’intervention publique ne doit plus être passive (éponger les catastrophes, intervenir en « pompier » sur les dégâts du capitalisme) mais au contraire jouer un rôle actif qui permette, par des réformes de fonds, de d’orienter et de catalyser le capitalisme. La création d’un fond souverain est vue par plusieurs contributeurs comme un moyen, pour l’État, de reprendre la main.
Une gauche qui sait parler aux entreprises
S’adresser aux entreprises, c’est aussi parler aux classes moyennes, qui, sont en majorité constituées de salariés ou de petits entrepreneurs. Les contributeurs évoquent également la responsabilité sociale et environnementale des entreprises, sujets qui comptent aux yeux de l’électorat socialiste.
Franchement, c'est un peu court... et largement creux. Bon, me dis-je, c'est que nous, les contributeurs, n'avons pas été à la hauteur. Voulant en avoir le coeur net, j'ai été lire ce que nous avions écrit. J'ouvre le premier sujet de discussion de la liste - qui à cette heure en compte 80 pour 182 messages -, ça s'appelle Une crise du capitalisme financier... et voici ce qu'on peut y lire :
Comme cela n'a du échapper à personne, le capitalisme financier débridé, celui de la crise des subprime, n'est plus souhaitable. Il conduit le monde, l'Humanité à la dérive. L'Homme est écrasé par le capital. Le capital l'étouffe. Ses conditions de vie en pâtissent. Cette crise financière qui a touché l'ensemble du monde n'est ni la première, ni la dernière. Et l'ampleur que les crises futures prendront ne peut être qu'énorme, aussi énorme qu'imprévisible. L'Humanité peut aller à sa fin. Le capitalisme tel qu'il est conçu est cette arme d'auto-destruction dont nous nous sommes magnifiquement doté. Nous croyons à un monde meilleur, plus juste. Ce capitalisme ne nous l'apporte plus.
C'est donc à partir de ce contsat qu'il s'agit de raisonner. Il faut changer de modèle économique. Le PS ne doit plus se contenter d'aménager à la marge, il doit attaquer au cœur cette terrifiante machine qu'est le capitalisme financier tel qu'il s'est constitué aujourd'hui. Cela pose un problème majeur. En effet, comment le changer ? Certainement que les solutions sont multiples. Chaque rouage de notre société doit être modifié.
Tout d'abord, une Réforme des Banques est souhaitable. Cette dernière exploite réellement les gens, les faisant littéralement suer quand, avec leur argent, ils font des bénéfices considérables. Les taux de remboursement pour les surrendettés sont usuriers. Usuriers, il n'y pas d'autre mots pour décrire ces Harpagon modernes. Harpagon à grande échelle. A trop grande échelle. On peut ici nationaliser les banques. Néanmoins, l'Etat ne semble plus avoir ce pouvoir. Il lui faut donc imposer des lois aux banques. A savoir ni plus ni moins que la gratuité des services proposés aux clients, la baisse des taux de remboursement de dettes, et la limitation des salaires de leurs dirigeants. Ce qui est vrai pour toute la classe patronale par ailleurs.
Par la suite, il faut envisager une Réforme de la fiscalité. En effet, la France est un pays où le contribuable le plus riche est celui qui paie le moins d'impôts. Niches fiscales, bouclier fiscal... La suppression de ces deux calamités pour notre pays, le rétablissement de l'ISF, presque supprimé parle gouvernement, sa hausse, la hausse de l'impôt sur le revenu, ainsi que la baisse de la TVA, sont des options povant ici changer la société. Il faut aussi, cela constituerait un tournant majeur dans notre modèle de société, taxer le capital, autant que l'est le travail. Cela sauverait le système des retraites actuel. C'est donc on ne peut plus nécessaire à la société.
Un autre point, ce sera le dernier, est capital. Les fonds de pension. En effet, ces derniers s'emparent de notre économie et sont l'exemple même de la dérive ultra-capitaliste de notre société. Il faut tout simplement interdire le rachat des entreprises françaises par ces monstres, permettre ce rachat avec des fonds publics, du moins partiellement. Car si on ne le fait pas, considérant que cela coute trop à l'Etat, ce pourra poser problème à l'avenir, avec une gérance politique des entreprises françaises, et un moyen de pression terrible d'Etats comme la Chine qui possède le plus grand fonds de pension mondial.
Ainsi, c'est en entraînant, en engageant des réformes de fonds, qui feraient, en partie, basculer l'ordre capitaliste, que le PS sera fort et reconnu comme le premier parti de gauche européen. Car c'est là l'impératif du PS. Rester à gauche. Et cela en sapant les fondations établies par l'oligarchie financière qui dirige notre société. Pour une société meilleure, pour une civilisation intelligente et constructrice, le cap doit être mis à gauche. Le peuple doit vaincre, le peuple doit pouvoir s'émanciper, ne plus être pris au piège d'une économie destructrice !
Dites... On pourrait peut-être demander à ce cher Pierre-Yves d'écrire lui-même la contribution Royal. En sus de sérénité, on y gagnerait sans doute beaucoup en utilité.
Et encore, je n'ai pas lu les 181 autres messages traitant de la question 2. Bon, l'essentiel est de participer, n'est-ce pas ?
On parle de : Consultation sereine, certes. Mais utile ?
Congrès Utile et Serein : une démarche participative... mais presque
Participatif mais presque
A propos de l'initiative de Ségolène Royal pour un Congrès Utile et Serein en dix questions, Marianne2.fr a commis aujourd'hui un "Royal veut bien débattre. Surtout avec les Bisounours" qui, je l'avoue, m'a fait doucement marrer. Le ton est caustique, limite méchant, mais sur le fond, en effet, cette initiative "participative" a de quoi interroger.
D'abord, en effet, vous je sais pas, mais moi je trouve que "congrès utile et serein" ça fait un peu campagne de com' pour un congrès des bisounours... Dans le même ordre d'idées, on pourrait tout aussi bien faire porter un badge à nos sportifs "pour des JO joyeux et victorieux", Sarkozy lancerait un appel "utile et serein" aux FARCS, Xavier Darcos supprimerait des milliers de postes d'enseignants pour une "Ecole de la république qu'elle sera plus belle demain" et Patrick Sabatier s'enverrait de nouveau une bouteille de Contrex en affirmant "Moi, ça va fort !".
Mais on me dira que ça c'est du détail. Soit. Parlons de l'initiative qui soulève en elle-même bien des questions - et ce avant même d'aborder les dix questions officielles. On peut ?...
Disons-le tout net, l'initiative de consulter directement les militants - du moins ceux qui ont accès à internet - est tout à fait louable. Elle aurait même mérité qu'on prenne la peine de la situer dans le cadre des structures d'un parti qui existe encore et qui, quoi qu'on en pense par ailleurs, demeure légitime. Du coup, en s'affranchissant (une nouvelle fois) du collectif - façon "je m'adresse directement à la base" (meilleure façon de la caresser dans le sens du poil) -, l'initiative perd aussitôt de sa portée et de sa force. C'est dommage... et bien regrettable.
Il demeure, et je le répète, que tout cela à le mérite d'être posé. Ce qui ne l'est pas et qui aurait dû l'être est : à quoi ça va servir ? - et on se doute en réalité que la vraie question est "à qui ?". Car est-il possible d'envisager qu'à l'issue de la méthode participative proposée à tous les militants par Madame Royal, il se dégage en réponse des positions largement contraire aux positions de Ségolène ? Et qu'adviendrait-il alors de la rédaction de la motion Royale ?
On peut même élargir : puisque le machin s'adresse à l'ensemble des militants, comment est assurée la transparence du bidule ? Qui gère la modération ? Quels en sont les critères ? Le dépouillement des réponses sera-t-il également participatif ? Qui décidera de ce qui est à retenir et ce qui est à rejeter ? Bref, le bidule, en réalité, il appartient à qui ? Ou encore, et en corolaire : le machin participatif n'inclut-il pas nécessairement la transparence et la mutualisation de l'accès au bidule ?
En vérité, en l'absence d'une telle transparence - et donc de la réponse à ces questions de fonctionnement qui sont tout sauf accessoires -un militant qui ne se sentirait pas franchement politiquement proche de Ségolène Royal ne peut véritablement espérer que ses réponses éventuelles soient prise en compte, puisque ce qui va en ressortir est annoncé "motion Ségo". Ce qu'il sait en revanche, c'est qu'en participant il sera compté dans ces "X milliers de participants au débat interne suscité par Ségolène Royal" qui seront inévitablement annoncés à l'issu de l'opération pour preuve de l'engouement des militants et sympathisants vis à vis de ladite démarche participative. Et voilà donc notre ami pas si bisounours piégé entre dire, être compté mais sans pouvoir espérer qu'on tienne compte de ses réponses et ne pas répondre et laisser dire la vérité des vrais bisounours.
De facto, il devient évident que les questions ne s'adressent pas véritablement à l'ensemble des militants, comme il est très habilement prétendu. Et il est bien dommage d'avoir ainsi diminué la portée d'une excellente idée en privilégiant la manœuvre au collectif - comme il est d'ailleurs extrêmement regrettable, et plus encore, que les dirigeants actuels du PS n'aient pas pris eux, puisque c'était là évidemment leur rôle, la peine d'être eux-mêmes les initiateurs d'une telle démarche.
Mais puisqu'on m'opposera nécessairement que je serais moi-même dans la manoeuvre en écrivant ce petit billet, et que je ferais bien mieux de répondre aux questions que me pose la dame, je précise que j'ai déjà commencé à participer et je le prouve :
Question 1 : Il faut sortir du fossé entre un discours pseudo révolutionnaire dans l'opposition et un conformisme économique au pouvoir : de quelle façon ?
Pour ma part, je n'entends pas au PS de discours pseudo révolutionnaire... pas plus que le conformisme économique serait la règle de la gauche au pouvoir - c'est là tirer un trait bien rapide sur le RMI ou la CSG, sur les 35h ou la cinquième semaine de congés payés, sur les indéniables succès économiques des années Jospin (même s'il y eut également des timidités coupables).
Donc j'ai déjà un peu de mal à comprendre la question, sinon à la poser ainsi : Les socialistes ont la charge de proposer aux français un projet économique réellement alternatif et ambitieux, tout en s'assurant de sa cohérence avec les réalités du monde, lequel ? Voilà comment je formulerais cette première question. En résumé, finalement :
Quel projet socialiste gagnant pour 2012 ?
Pas sûr qu'on puisse y répondre aussi rapidement, dans le cadre qui nous est proposé. Ou alors je n'ai pas compris la question et en ce cas, je veux bien qu'on m'explique...
Pour l'heure, il semble que le message auquel elle nous invite à souscrire serait que les socialistes ont en effet dans leur ensemble un discours pseudo-révolutionnaire lorsqu'ils sont dans l'opposition (des exemples ?) et tombent dans le conformisme économique aussitôt qu'ils sont au pouvoir (ça peut se discuter, non ?). Le postulat parait bien rapide et affirmer sans nuance, asséner, n'a jamais fait une vérité collective - mais est-ce bien à tous les socialistes qu'on s'adresse ici ?
Question 2 : Le socialisme ne peut pas se contenter d'aménager le capitalisme financier à la marge : comment produire et répartir autrement la richesse ?
Là encore, j'ai du mal à comprendre la question.
Pourquoi parler de richesse puisqu'il s'agit, ici en particulier, de la répartition des profits des grandes entreprises cotées en bourse et donc soumis au capitalisme financier dont on parle dans le cadrage de la question ?
Et que veut dire produire autrement la richesse ? Autrement qu'en levant des capitaux en bourse ? Soit et on serait alors là dans une réelle et ambitieuse rupture... mais je doute que cela soit de cela qu'il s'agit ici. Je devine qu'on parle plutôt de s'affranchir des critères de gestion des entreprises purement financiers, de cette recherche obsessionnelle de rentabilité financière, dictat fait aux entreprises par les grands actionnaires au mépris d'un développement harmonieux et respectueux de la valeur humaine des entreprises et du cout social des licenciements, le dictat notamment d'une politique salariale ultra restrictive.
Aussi posons cette question 2 de la manière suivante : Le socialisme ne peut pas se contenter d'aménager le capitalisme financier à la marge : comment rompre avec des critères de rentabilité purement financiers dictés par les gros actionnaires et répartir plus justement les profits des grandes entreprises ?
Question 3 : Que reprendre des modèles progressistes des autres pays et que rejeter ?
Alors là, le flou devient artistique. Essayez juste de faire un début de réponse à la question... C'est en réalité le type même d'une problématique transversal et qui ne peut être distinguer du tout. Pour élaborer un modèle progressiste français cohérent, il sera nécessaire, sur l'ensemble des sujets, de recourir à une veille internationale afin de s'inspirer de ce qui a été mis en place ailleurs, de ce qui a réussi et de cce qui a échoué.
Aussi, je proposerais bien de supprimer la question 3... voire de reformuler toutes les questions afin d'en tenir compte. Pour les questions 1 et 2 (mais l'opération pourra très probablement s'appliquer aux autres questions) cela donnerait, en tenant compte de mes reformulations déjà proposées par ailleurs :
1- Les socialistes ont la charge de proposer aux français un projet économiques réellement alternatif et ambitieux, tout en s'assurant de sa cohérence avec les réalités du monde, lequel ? Que reprendre des modèles économiques des autres pays et que rejeter ?
2- Le socialisme ne peut pas se contenter d'aménager le capitalisme financier à la marge : comment rompre avec des critères de rentabilité purement financiers dictés par les gros actionnaires et répartir plus justement les profits des grandes entreprises ? Que reprendre des modèles financiers des autres pays et que rejeter ?
Question 6 : Comment rompre avec la redistribution passive et bureaucratique comme principal moyen de s’attaquer aux injustices sociales ?
Ecrire "rompre avec la redistribution passive et bureaucratique" est déjà une manière d'orienter le débat, de ne pas laisser la question ouverte.
C'est là un postulat socialiste, la redistribution serait par essence passive et bureaucratique ? L'impôt - principale source de redistribution - serait passif et bureaucratique ?
Comment peut-on laisser supposer qu'une aide apportée, une allocation distribuée à un foyer modeste serait passive ? Par le fait même qu'elle produit un supplément de pouvoir d'achat, aussitôt dépensé, elle contribue activement à faire tourner la grande machine "économie".
Est-ce le rôle de la gauche de donner du grain à moudre au sarkozisme triomphant en contribuant à laisser penser que l'abus d'allocations et la fraude est la règle ?
On voit bien ce qui transparait derrière cette question : la solidarité à la sauce donnant-donnant - si la société consent à t'aider, comment l'aideras-tu en retour ? Autre manière de dire qu'il serait possible d'être socialement inutile. Autre manière de laisser penser qu'on pourrait vivre suffisamment bien des allocations pour s'en contenter et ne pas chercher un travail.
Ainsi, il serait utile de reprendre les choses plus en amont - s'il s'agit bien ici de faire contribuer l'ensemble des socialistes - en portant la réflexion sur notre conception collective de la solidarité nationale et de la redistribution.
L’initiative en dix questions de Ségolène Royal soulève, d'abord, de vraies questions de forme, notamment concernant celle de la transparence, auxquelles des réponses concrètes permettraient aux socialistes d’aborder leur congrès sur le terrain du débat de fond et des idées, donc de réaliser un congrès à même de donner enfin une consistance au Parti Socialiste, à son rôle d’opposant et à son ambition de conquête du pouvoir sur la base d’un projet de transformation sociale ambitieux, réaliste et innovant. Faute de cela, ne resterait de cette initiative qu’une manœuvre politicienne de plus.
On parle de : Congrès Utile et Serein : participatif... mais presque
Ni "Tout sauf Ségolène", ni "Royal sinon rien"
Sur la Plage du Village - un lieu que je vous recommande car il y fait bon vivre et débattre -, le maître des lieux a commis un excellent billet, tout en finesse et en pertinence. Si à ce billet il fallait adjoindre une morale sur laquelle bien des socialistes pourraient méditer, elle serait selon moi la suivante :
Il ne s'agit pas d'écarter Ségolène Royal.
Il s'agit de ne pas s'empresser d'écarter tous les autres !
Je ne résiste pas au plaisir de reproduire ici le billet de cet ami de là-bas, le héron Gris :
Et maintenant ...
La victoire en pleurant.
Après la défaite en chantant, voici la victoire en pleurant. Faut-il avoir peur d’une victoire électorale, obtenue par une gauche presque authentique, au motif qu’elle ne s’inscrit pas dans la ligne prophétique de la gauche dite moderne ? Certes, maintenant que l’œuvre est accomplie, d’aucuns ne se priveront pas pour attribuer cette réussite à l’heureuse conjonction du Ségo-tour-opérator, dont la tournée s’acheva à Aix-en-Provence, avec les frasques élyséennes. En somme, après le sourire de la défaite, la grimace d’une victoire aux redoutables effets pervers. Pour mieux comprendre, il faut se souvenir d’un fameux Conseil National du PS où il fut décidé, par un collège d’abominables apparatchiks incompétents, de traiter séquentiellement les élections locales et le Congrès. A l’époque, on entendit parler de déni de démocratie et de stupidité politique par les fondus de la refonte pour qui le PS ne pourrait plus gagner une seule élection avant de s’être équipé d’un leader, ou plus précisément d’une « leadeure ». Aujourd’hui, les choses ont un peu changé car le premier objectif du futur chef n’est plus de préparer la victoire mais de la récupérer, ce qui est tout de même plus facile.
Une élection qui retombe en pluie fine.
Trêve de polémique stérile, venons-en aux retombées positives des ces élections municipales et cantonales. Tout d’abord, il convient de resituer le contexte. La droite dure, après avoir gagné largement la présidentielle et les législatives a entrepris la démolition, pour ne pas dire l’éradication, de la gauche. Ainsi, l’opération « vide grenier » du PS visait à laisser croire au bon peuple de France que les clivages politiques étaient archaïques et qu’en installant un homme providentiel à l’Elysée, toute idée d’alternance devenait obsolète tant l’esprit d’ouverture du Président appelait une nouvelle pratique politique où tout est dans tout et réciproquement. De maroquins en commissions, l’école bessonnière connut alors son heure de gloire au point que les rapports furent écrits en Attalique, cette écriture qui penche singulièrement à droite. Aux dires des médias et des nouveaux apparatchiks de la gauche moderne, le PS était à l’agonie, au bord de l’explosion implosive, incapable d’aller au combat. Dans un tel contexte, avec un PS archaïque, sans leader, sans projet et sans vision, seule une victoire aux élections locales, suffisamment ample pour revêtir une signification nationale, pouvait induire un peu de réalisme et d’équité dans un discours ambiant qui mêlait bizarrement les intérêts de la droite avec ceux d’une certaine gauche. Aussi, si la vague rose a eu pour premier effet de noyer l’utopie dangereuse de la pseudo ouverture, elle a également causé quelques dommages collatéraux auprès des nouveaux visionnaires qui, à gauche, se tenaient tellement près de la droite qu’ils n’ont pas vu arriver la vague.
La métamorphose des godillots.
La remise aux normes du paysage politique français devrait quelque peu changer la donne dans le processus dit de rénovation du PS, non pas en le ralentissant, mais en replaçant les différents acteurs au plus près de la vie politique réelle du pays. En France, la présidentialisation du régime résultant de la mise en œuvre du quinquennat aggravée par la synchronisation des scrutins présidentiel et législatif dans un paquet électoral de type « deux en un », a provoqué la transformation des partis politiques en une sorte de « fan club » entièrement dévoués à la gloire de leur star. Ainsi, l’UMP et l’UDF/modem succombèrent à cette tendance, avec des fortunes diverses, pendant que le PS, sous l’impulsion de quelques éléphants indociles, résistait tant bien que mal au phénomène de mode. Or, dans un parti politique, si les sympathisants aspirent rarement à exercer une quelconque responsabilité politique, il n’en va pas de même pour les militants qui souhaitent généralement s’impliquer, non seulement dans la vie du parti, mais également dans des fonctions électives. De ce point de vue, la décentralisation a permis de créer un nombre considérable de mandats dans les différentes collectivités locales notamment aux niveaux des régions, des départements, des communes et de l’inter-communalité. De fait, c’est cet ensemble de mandats électifs qui innerve, en profondeur, la vie politique française au plus près des citoyens et des réalités. Finalement, dans un parti politique, la proportion des adhérents motivés par l’attrait d’un destin national, voire un maroquin ou, pourquoi pas, l’Elysée est relativement faible au regard de ceux qui préfèrent limiter leur ambition aux confins de leur département. Qui plus est, l’accès aux responsabilités nationales requiert, le plus souvent, une bonne implantation locale en guise de tremplin. En conséquence, il ne faut pas minimiser les retombées indirectes que pourraient avoir les dernières élections locales au niveau du fonctionnement des partis politiques. En effet, les milliers d’élus UMP qui vont se retrouver sur le carreau alors qu’ils pensaient être les maîtres du pays par la grâce d’un Dieu omnipotent, auront de quoi méditer sur la métamorphose des godillots en groupies. A l’inverse, les heureux élus d’une gauche « ringarde » que l’on disait exsangue et sans avenir seront peut être moins disposés à adhérer, sans la moindre réserve, au discours convenu d’une rénovation opportuniste et creuse mise au service exclusif d’un improbable destin personnel.
Rien de neuf dans la rénovation.
La question de la rénovation du PS est réglée depuis 1983 après que François Mitterrand eut compris qu’un programme de gouvernement n’était pas forcément soluble dans la doctrine du Parti. Aujourd’hui, l’évolution du capitalisme, la mondialisation et le libéralisme débridé constituent autant de défis que la gauche devra affronter si elle revient aux affaires au plan national. Le rabougrissement des prérogatives du pouvoir politique national au profit des pouvoirs économique, financier et européen, pose d’emblée le problème de la marge de manœuvre d’un gouvernement de gauche. Dès lors, la seule question qui se pose vraiment est celle du découplage entre la doctrine et le programme de gouvernement. Sauf, bien évidemment, à penser que la doctrine est un concept obsolète en réduisant le rôle d’un parti politique de gauche à l’élaboration d’un programme, ou d’un pacte, présidentiel. Si d’aventure le PS tombait dans ce travers, il s’en trouverait alors réduit à exercer une fonction d’écurie (s) présidentielle (s).
Il est urgent de désigner un maillot jaune.
La question récurrente du leadership s’inscrit également dans la démarche de désintégration d’une pensée politique qui deviendrait un obstacle dans le processus de conquête du pouvoir pour le pouvoir. Du reste, au même titre que la rénovation, la question du leadership au PS, même si elle est incontournable du fait de nos institutions, demeure superfétatoire dans la mesure où personne aujourd’hui n’est apte à assumer ce rôle faute de consensus. De toute façon, par définition, un leader ne se désigne pas, il doit s’imposer de lui-même. Force est de constater que nul n’y est encore parvenu au PS et l’idée même de substituer une procédure de désignation à l’émergence naturelle d’une personnalité porte en elle le germe de l’échec. Pour preuve, c’est précisément ce qu’a connu le PS à deux reprises dans un passé récent. Tout d’abord à l’occasion du référendum sur le TCE, pour lequel François Hollande a cru naïvement qu’il suffisait d’obtenir un vote majoritaire des adhérents, en l’occurrence à hauteur de 60%, pour entraîner le parti, comme un seul homme, sur la voie qu’il jugeait être la bonne avec le résultat que l’on sait. Ensuite, il y eu la désignation de la candidate à l’élection présidentielle, là aussi avec un score de 60% des adhérents, qui n’a pourtant pas permis d’entraîner l’ensemble du Parti, comme une seule femme, sur la voie de la victoire. Jamais deux sans trois ?
Impatience et longueur de temps.
Est-il vraiment bien raisonnable de vouloir mettre 2012 en musique dès aujourd’hui en proposant aux français un programme, qui sera forcément dépassé dans quatre ans, assorti d’une candidate qui n’a pas encore réussi à convaincre son propre camp, alors que ce dernier l’avait mise en situation très favorable pour le faire, quoi que puissent en dire les nouveaux apparatchiks du PS ? Alors, pour évacuer la redoutable question du chef, certains avancent une thèse, que l’on pourrait présenter à la manière de Brassens, selon laquelle : « tout est bon chez elle, y a rien à jeter … sur l’île déserte il faut tout emporter ». Voici une bien curieuse façon d’apprécier les qualités d’une postulante en évaluant son profil par comparaison au néant. Tout d’abord, si il est indéniable qu’il y a du bon chez elle, tout est loin d’être parfait et il reste encore bien des choses à jeter ou, pour le moins, à améliorer. Quant au néant, si tel était le cas, cela serait dramatique pour celle qui ne parviendrait même pas à s’imposer dans un univers exempt de toute concurrence. Par ailleurs, décrire le PS comme une île déserte, n’est certainement pas la meilleure manière de promouvoir la gauche et de préparer son retour à la tête du pays. Les talents et les compétences existent à gauche, ne les méprisons pas en cédant, un fois encore, à la dictature des sondages. Du reste, selon une récente mouture sondagière, Ségolène Royal recueillerait 45% d’avis favorables de la part des sympathisants du PS pour le poste de Première Secrétaire du Parti. Quand on sait que les 60% de l’investiture pour la présidentielle ne permirent pas de créer l’osmose, qu’en serait-t-il d’une désignation de type « deux en un » puisqu’elle cumulerait, de fait, la direction du PS et l’investiture pour 2012, sur la base d’une majorité on ne peut plus relative ? Enfin, alors que le pays vient d’offrir une superbe veste au locataire de l’Elysée qui s’était fait tailler un costume sur mesure dans un tissu d’omnipotence et de people, pourquoi le PS devrait-il, par mimétisme ou par cupidité, reproduire un modèle similaire en confectionnant, à son tour, une opposition monothéiste couchée sur papier glacé ?
Le plus dur est avenir.
En votant majoritairement à gauche à l’occasion des dernières élections municipales et cantonales, les Français ont fait savoir qu’ils pouvaient encore faire confiance à des femmes et à des hommes de gauche pour gérer les affaires de la cité. Le principal mérite en revient, bien évidemment, à celles et à ceux qui, partout en France, ont dépensé sans compter leur énergie et leur talent pour conquérir les mairies et les cantons. Pour autant, si cette victoire montre que tout reste possible, elle ne doit pas constituer une invitation à l’immobilisme et à l’auto satisfaction. Il reste à la Gauche beaucoup à faire pour convaincre les Français qu’une autre politique est possible pour le pays. Si un tel travail exige un minimum d’ordre et de rigueur, sa réalisation ne saurait passer par la voie hiérarchique ou divine, pas plus que par le centralisme démocratique. Il convient d’engager, du moins dans un premier temps, une démarche collective élargie associant tous les talents et toutes les énergies disponibles pour définir, sans dogmatisme mais non sans pensée politique, un projet réaliste adossé, dans la mesure du possible, à une vision alternative du monde qui ne céderait pas à cette lancinante pensée unique qui tend à faire croire que nous serions arrivés à la fin de l’histoire.
Billet du héron Gris, sur la Plage du Village
En se donnant à Ségolène Royal, le PS s'enfermerait dans une "candidature naturelle" et la jolie geolière aurait alors beau jeu de ne laisser s'épanouir aucune autre possibilité. Or 2012 est loin encore, beaucoup peut se passer d'ici là et nul aujourd'hui ne peut prétendre avoir de certitude objective quant à la bonne candidature socialiste en 2012. Les talents sont nombreux au PS que la lumière médiatique n'inonde pas encore. La vie démocratique a pour objet de leur permettre de s'épanouir et de devenir, plutôt que de les étouffer.
Rappelons qu'un an avant les présidentielles de 2007, Ségolène Royal était elle-même de ses personnalités d'arrière-plan médiatique, c'est-à-dire qu'elle n'était pas alors en situation de présidentiable (pas plus que ne l'était Barack Obama, il y a un an aux Etats-Unis). C'est précisément la non présidentialisation des structures du PS, cette absence d'une figure écrasante, candidat naturel supposé, qui a permis l'avènement de sa candidature. Avoir soi-même passé une porte pour aussitôt s'évertuer à la la verrouiller derrière soi relèverait de la manœuvre politicienne au service d'une ambition exclusivement personnelle. Car, que l'on se rassure, quoi qu'il advienne Ségolène Royal est et restera sur le devant de la scène politique française - telle est désormais la place que lui accorde son statut d'ancienne candidate.
Or donc, c'est une évidence, tel est pourtant l'objet aujourd'hui de la candidature de Ségolène Royal à la tête du Parti Socialiste : ne pas avoir partager le devant de la scène, s'empresser donc d'écarter tous les autres et interdire la potentialité de l'avènement de l'un quelconque d'entre eux, rival pour elle indésirable mais qui pourrait bien s'avérer salvateur pour la gauche. Les militants socialistes feraient fausse route s'il venait à verser dans cette facilité qui correspondrait à insulter inutilement l'avenir.
On parle de : Ni "Tout sauf Ségolène", ni "Royal sinon rien"







