Juin 012007
 

Sortir des lamentations, Entrer en résistance, Voter

naboleon photo officielleLa caisse de résonance médiatique se plaît à le marteler, nous nous complaisons à l’accréditer, le Parti Socialiste n’est pas à la hauteur. Il est hagard, divisé, se perd en d’incessantes luttes intestines. Deux ou trois pachydermes survivants – mais si peu, en vérité – barrissent à qui mieux mieux pour empêcher l’inéluctable. Quelques éléphanteaux hésitent entre l’exigence de fidélité et le désir de monter en première ligne. Au coeur du vacarme, une princesse nubienne et son valet turbulent tentent tant bien que mal de cornaquer l’ensemble. etc… Lieu commun que cette manière de raconter l’histoire, et surtout de s’en émouvoir.

Il y a seulement une nasse institutionnelle dans laquelle tout ce beau monde se retrouve enfermé, un gouffre effarant dans lequel le camp des perdants à l’élection présidentielle ne peut manquer d’être collectivement précipité, un piège qui a beaucoup à voir avec l’excessive présidentialisation de la cinquième République et dont la machine médiatique fait ses choux gras en l’amplifiant encore. Le raccourcissement de la durée du mandat présidentiel et la mise en place de ce calendrier court, faisant précéder l’élection des députés par celle du président de la République, ont renforcé la prééminence institutionnelle de ce dernier, l’ont révélée surtout, plus qu’ils n’en sont les responsables – ainsi qu’on l’entend trop souvent dire.

La cinquième République n’a pas eu besoin de Lionel Jospin pour, accordant en réalité tous les pouvoirs – ou peut-être seulement trop – au président de la République, réduire le pouvoir législatif à pas beaucoup plus qu’une simple chambre d’enregistrement. Le président de la République est censé avoir un projet, une vision pour la France, les députés sont supposés être porteurs d’un programme de gouvernement, mis en oeuvre par un premier ministre nommé par le président en tenant compte de la majorité parlementaire. la réalité, on le voit bien, est devenue toute autre : les candidats à la présidence – et Sarkozy consacre cette dérive naturelle de nos institutions – se présentent avec un programme de gouvernement. Elu, il ne reste plus au vainqueur qu’à en appeler à la cohérence du peuple afin qu’on lui donne Sa majorité présidentielle, transformant les législatives en une simple formalité, les électeurs se trouvant devant l’alternative confirmer ou bien se dédire. Le système majoritaire et sa vocation amplificatrice font le reste.

Ainsi, le camp des perdants à la présidentielle se retrouve dans la situation suivante : ils ont jeté toutes leurs forces dans la bataille présidentielle, présentant un programme de gouvernement qui a finalement été rejeté par le peuple. Non seulement alors ils savent que la pente naturelle les conduit à redoubler leur défaite, mais c’est avec ce même programme que chaque candidat à la députation se présente devant les électeurs. Quelle signification ont alors ces élections législatives ? Aucune et, de fait, l’électorat s’en trouve démobilisé et résigné. De même, les députés ne sont, de fait, plus porteurs de rien : 400 d’entre eux seront élus pour être les bénis oui-oui du président, les autres feront de la figuration.

Alors quoi ? Que faire ? D’abord comprendre que face à des institutions cul par-dessus tête, les leaders politiques de la gauche en général, et du Parti Socialiste en particulier, n’ont guère d’espace politique pour se montrer reluisants, pris qu’ils sont dans un étau où d’un côté on leur reproche leurs divisions et où de l’autre on leur reprocherait davantage encore de se taire sur les raisons de la défaite – lesquelles sont nécessairement multiples autant qu’incertaines, et en lesquelles s’entrecroisent de nombreuses responsabilités à la fois collectives et individuelles. Inutile donc de gloser avec les médias sur leurs barrissements désordonnés.

Ensuite, il s’agit de continuer partout à parler du fond et à convaincre. Certes Ségolène Royal et son pacte présidentiel ne sont pas parvenus à emporter l’adhésion d’une majorité, ce n’est pas pour autant qu’il faille renier la personnalité de l’une ou le contenu de l’autre. Il sera temps bientôt de repenser tout cela, mais aujourd’hui des propositions fortes existent qui permettent de s’adresser aux français. Chaque parti en France va à la rencontre des électeurs avec un programme, tant l’UMP que le PS, tant le Modem que les Verts ou le PCF. L’unité des socialistes, pour ne parler que d’eux – c’est sans doute que beaucoup dépend d’eux -, l’unité des socialistes elle est là : 577 candidats porteurs chacun du même programme et des mêmes propositions.

Que faire avec ça ? En revenir à l’esprit des institutions et appeler les français à se les réapproprier. Ils ont élu un Président, soit. Au soir du 17 juin, celui-ci aura pour mission de nommer un premier ministre qui définira et mettra en oeuvre une politique pour la France cohérente avec la majorité que les français auront installée à l’Assemblée Nationale. Les français doivent entrer en rébellion, ne pas se laisser voler les élections législatives par un président qui voudrait un parlement godillot. Il faut en appeler à l’esprit de résistance démocratique d’un peuple qu’on cherche à déposséder de son pouvoir. Sa re-mobilisation en passe par là : le respect de nos institutions républicaines, qu’il sera par ailleurs nécessaire, on le comprend bien, de moderniser, la résistance à l’excès de présidentialisation, l’opposition démocratique aux tendances bonapartistes du nouveau président.

En complément, et sur le même thème, je vous suggère cette video réalisée par latelelibre.fr, extraits du discours de François Hollande au Zenith, le mardi 29 mai 2007 :



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