Avr 272007
 

Nier une vérité n’est pas la faire disparaître
C’est simplement mentir

PUY-GUILLAUME (Puy-de-Dôme), 27 avr 2007 (AFP) – Nicolas Sarkozy a dénoncé vendredi à Puy-Guillaume les « procès de Moscou » intentés à son encontre par Ségolène Royal et François Bayrou, après les accusations de pressions sur les médias de la candidate PS et du président de l’UDF.

Le candidat UMP à la présidentielle s’exprimait devant la presse à l’issue d’un entretien d’une dizaine de minutes avec l’ancien ministre PS Michel Charasse qui l’a reçu dans sa mairie pour « une rencontre républicaine ».

« Je mets la situation du moment sur le compte de l’amertume mais j’ai été particulièrement choqué et pour ne pas dire blessé par un certain nombre de propos qui n’ont rien à voir avec le débat démocratique puisqu’ils sont tout simplement injurieux« , a-t-il déclaré.

« Il faut respecter les journalistes et les médias de notre pays« , a poursuivi M. Sarkozy pour qui « personne n’est sous contrôle et personne ne fait pression sur rien« .

« Franchement, a-t-il dit, si rénover la vie politique c’est faire des procès de Moscou comme ceux auxquels on assiste depuis quelques heures, ce n’est pas de la rénovation de la vie politique« .

Vendredi matin, François Bayrou a expliqué « ne pas avoir la preuve mais la certitude » que Canal+ avait renoncé à organiser un débat entre lui [lire également ici] et la candidate PS « à la demande de Nicolas Sarkozy« .

Peu après, Ségolène Royal a accusé devant la presse « le système médiatico-financier auquel est lié Nicolas Sarkozy » de vouloir empêcher son débat avec François Bayrou, et a « encouragé tous les journalistes à résister aux pressions de toutes sortes« .

Lisons en regard de cela le communique du SNJ, Syndicat National des Journalistes, premier syndicat français de journalistes, publié ce jour, 27 avril 2007 :

Débat empêché, démocratie bafouée !

Avec le pitoyable feuilleton du débat empêché entre Ségolène Royal et François Bayrou, les médias se trouvent une nouvelle fois au cœur d’une des bavures majeures de la campagne électorale.

L’arithmétique pointilleuse du CSA d’un côté, le poids des sympathies auprès du candidat Sarkozy de l’autre, font que le devoir d’informer subit une entrave insupportable dans une démocratie comme la nôtre.

Les concentrations excessives dans la presse française ; les amitiés particulières entre le monde politique et les directions des médias ; la façon dont sont nommés les membres du CSA, jettent la suspicion sur tout un secteur professionnel et constituent une atteinte directe au droit légitime des citoyens d’être correctement informés.

Le SNJ, premier syndicat chez les journalistes, dénonce avec vigueur ce déni de démocratie. Cette situation le conforte dans sa lutte pour une véritable indépendance des médias, des équipes rédactionnelles, et l’inscription dans la Constitution du droit à une information honnête, complète, pluraliste et indépendante des pressions politiques.

Rappelons également le comuniqué de presse de la Société des Journalistes de France 3, publié le 23 mars 2007 :

Nicolas Sarkozy se verrait-il déjà à l’Elysée ?

Trépigne-t-il déjà en s’imaginant bientôt disposer des pleins pouvoirs ?

Sans doute grisé par les sondages qui le placent en tête du premier tour, le candidat UMP s’est récemment laissé aller à une petite crise d’autorité dans les locaux de France 3. Une sorte de caprice régalien que l’on croyait appartenir à d’autres temps, ceux de la vénérable ORTF.

M. Sarkozy a en effet menacé de « virer » notre direction. Comme ça, sur un coup de tête. Parce qu’elle n’a pas daigné lui dérouler le tapis rouge et accourir immédiatement à sa rencontre lorsqu’il est venu, le 18 mars dernier, participer à l’émission France Europe Express, présentée par Christine Ockrent.

A peine arrivé, Monsieur le Ministre-candidat se laisse d’abord aller à quelques grossièretés, estimant que cette émission « l’emmerde » et qu’il n’a pas envie de la faire !

Ensuite, le voici vexé de devoir attendre dans les couloirs de France 3 pour être maquillé, d’autres invités occupant déjà les lieux (et oui, France 3 ne dispose que d’une salle de maquillage). Coupable de ce « crime de lèse-Sarkozy », voici notre direction sur la sellette. « Toute cette direction, il faut la virer », a lâché le candidat UMP, comme le rapporte le Canard Enchaîné du 21 mars 2007. « Je ne peux pas le faire maintenant. Mais ils ne perdent rien pour attendre. Ca ne va pas tarder ».

Les Français sont désormais prévenus ! L’une des priorités de Nicolas Sarkozy s’il est élu président de la République sera de couper des têtes à France 3. A la trappe ces directeurs qui tardent à exécuter les courbettes.

Le Ministre-candidat avait déjà habitué notre rédaction à ses poses agacées, à ses humeurs dans nos locaux, face à une rédaction qui ne lui semble manifestement pas suffisamment docile. Comme cette récente provocation gratuite à l’adresse d’un journaliste du service politique « ça ne doit pas être facile de me suivre quand on est journaliste de gauche ! ». Désormais, c’est à la direction qu’il veut s’en prendre ?

La Société des Journalistes de la Rédaction Nationale de France 3 ne peut qu’être scandalisée par une telle attitude de la part d’un candidat à la plus haute magistrature de France. Nous nous inquiétons que M. Sarkozy puisse afficher sans aucune gêne un tel mépris pour l’indépendance des chaînes de service public.

Non, monsieur Sarkozy, les journalistes de la Rédaction Nationale de France 3 ne sont pas et ne seront jamais vos valets. Ils résisteront à toute menace pesant sur leur indépendance. Si nous devons des comptes, ce n’est pas à un ministre-candidat, mais aux millions de téléspectateurs, qui regardent chaque jour nos journaux d’information.

Par respect pour eux, pour leur intelligence, nous n’accepterons jamais aucune forme de mise sous tutelle politique. Ni de votre part, ni de la part d’aucun autre candidat.
A bon entendeur.

Remontons maintenant un tout petit peu plus loin dans le temps, lorsque le 17 novembre 2006, Alain Genestar, ancien directeur de la rédaction deParis Match, déclarait au journal Le Monde : « Le ministre de l’Intérieur, quand il affirme n’être pour rien dans mon licenciement, ne dit pas la vérité », ajoutant « Dans un grand pays libre et démocratique comme le nôtre, il n’est pas concevable qu’un ministre de l’Intérieur puisse être à l’origine du limogeage d’un journaliste ». En août 2005, Paris Match avait publié une photo de une montrant l’épouse du ministre de l’Intérieur, Cécilia Sarkozy, en compagnie du publicitaire Richard Attias, présenté comme son compagnon. Ces photos avaient fortement mécontenté Nicolas Sarkozy, qui avait fait part de sa colère à son ami Arnaud Lagardère, propriétaire de l’hebdomadaire. Selon des informations concordantes, le ministre de l’Intérieur aurait demandé la tête du journaliste. La rédaction de Paris Match s’était mise en grève le 29 juin, pour la première fois depuis 1968, pour protester contre l’éviction, « pour des raisons politiques » d’Alain Genestar.

Il n’est peut-être pas inutile de rappeler ici que Arnaud Lagardère (Fayard, Grasset, J.-C. Lattès, Stock, Paris Match, Journal du dimanche, Nice matin, La Provence…) est un proche de Nicolas Sarkozy dont il fut l’avocat pour réglé la succession de son père ; que Martin Bouygues (TF1, LCI, TF6, TMC et TPS) est considéré par Nicolas Sarkozy comme son meilleur ami et a été son témoin lors de son mariage est le parrain d’un de ses enfants ; que Bernard Arnault (La Tribune, Investir, Radio Classique) était l’autre témoin de ce même mariage. Mais la liste est trop longue. D’ailleurs Nicolas Sarkozy est bien conscient du pouvoir de dissuasion qu’il détient et s’autorise à lancer aux journalistes qui l’accompagnent dans ses déplacements :  » C’est marrant, je connais tous vos patrons« .

« Il faut respecter les journalistes et les médias de notre pays« , dit Nicolas Sarkozy pour qui « personne n’est sous contrôle et personne ne fait pression sur rien« . Dit-il.

On parle de : Sarkozy menteur