dedalus

Mai 132008
 

Un article savoureux de Michel Deléan

Frédéric LefebvreN’ayons pas peur de le dire : Nicolas Sarkozy et son fidèle Frédéric Lefebvre ont tout à fait raison, quand ils dénoncent courageusement la mauvaise foi d’une presse abjecte qui ne travaille, en fait, que pour l’opposition. Il suffit de feuilleter tous ces magazines qui osent, semaine après semaine, publier des photos de la Première Dame de France et recueillir ses confidences les plus intimes pour s’en convaincre : il y a du parti pris et de l’acharnement dans l’air.

Depuis trois décennies, Nicolas Sarkozy est lynché par les hyènes de la désinformation. Chaque jour, il est sali par les valets stipendiés du ségolénisme. Oui, mille fois oui, notre Guide Suprême de la Rupture (que son nom soit glorifié !), notre Camarade Président (que les fleurs de la félicité jalonnent sa marche glorieuse), notre Lumière du Libéralisme (que nos esprits et nos yeux s’ouvrent enfin grâce à lui) mérite une autre presse. Afin d’informer loyalement, honnêtement et utilement nos concitoyens, des mesures urgentes et énergiques s’imposent.

1. Rebaptiser l’AFP Agence de la France qui gagne, et ne diffuser que les communiqués de l’Elysée, de l’UMP et du Medef. Prier pour que les Bleus gagnent l’Euro de foot. Après ça, espérer un été sans canicule ni temps pourri, et le retour de la croissance dès septembre.

2. Nommer Frédéric Lefebvre à la tête d’un comité d’indépendance éditoriale de la dite agence. Nadine Morano sera chargée de rédiger une charte déontologique.

3. Confier une mission d’inspection à Patrick Balkany. Purger les archives des vieilles dépêches sur les affaires judiciaires et électorales des Hauts-de-Seine. Tant qu’à faire, effacer aussi textes et photos – devenus inutiles – sur Chirac et Villepin.

4. Publier intégralement, chaque jour de l’année, l’arrêt de la cour d’appel de Rennes du 10 avril 2008 condamnant Ségolène Royal pour licenciement abusif, sur plainte de deux collaboratrices remerciées en 1997. L’accompagner de commentaires bien sentis et renouvelés de M. Raffarin.

5. Pour répondre à ces nouveaux besoins éditoriaux, rapatrier les journalistes qui travaillent en Irak, en Birmanie et au Liban, ainsi que sur le secteur social, et plus généralement tous les pourvoyeurs de mauvaises nouvelles et de reportages démoralisants.

6. Faire renaître l’irremplaçable Jours de France. Ne publier que des sondages encourageants, des photos avantageuses, des analyses positives, des bonnes nouvelles, des histoires drôles ou qui finissent bien.

Oui, c’est un avenir radieux qui s’offre enfin à nous. Allez, encore un petit effort…

On parle de : Pour une presse libre et sarkozyste

Avr 162008
 

Participatif mais presque

congrès bisounoursA propos de l’initiative de Ségolène Royal pour un Congrès Utile et Serein en dix questions, Marianne2.fr a commis aujourd’hui un « Royal veut bien débattre. Surtout avec les Bisounours » qui, je l’avoue, m’a fait doucement marrer. Le ton est caustique, limite méchant, mais sur le fond, en effet, cette initiative « participative » a de quoi interroger.

D’abord, en effet, vous je sais pas, mais moi je trouve que « congrès utile et serein » ça fait un peu campagne de com’ pour un congrès des bisounours… Dans le même ordre d’idées, on pourrait tout aussi bien faire porter un badge à nos sportifs « pour des JO joyeux et victorieux », Sarkozy lancerait un appel « utile et serein » aux FARCS, Xavier Darcos supprimerait des milliers de postes d’enseignants pour une « Ecole de la république qu’elle sera plus belle demain » et Patrick Sabatier s’enverrait de nouveau une bouteille de Contrex en affirmant « Moi, ça va fort ! ».

Mais on me dira que ça c’est du détail. Soit. Parlons de l’initiative qui soulève en elle-même bien des questions – et ce avant même d’aborder les dix questions officielles. On peut ?…

Disons-le tout net, l’initiative de consulter directement les militants – du moins ceux qui ont accès à internet – est tout à fait louable. Elle aurait même mérité qu’on prenne la peine de la situer dans le cadre des structures d’un parti qui existe encore et qui, quoi qu’on en pense par ailleurs, demeure légitime. Du coup, en s’affranchissant (une nouvelle fois) du collectif – façon « je m’adresse directement à la base » (meilleure façon de la caresser dans le sens du poil) -, l’initiative perd aussitôt de sa portée et de sa force. C’est dommage… et bien regrettable.

Il demeure, et je le répète, que tout cela à le mérite d’être posé. Ce qui ne l’est pas et qui aurait dû l’être est : à quoi ça va servir ? – et on se doute en réalité que la vraie question est « à qui ? ». Car est-il possible d’envisager qu’à l’issue de la méthode participative proposée à tous les militants par Madame Royal, il se dégage en réponse des positions largement contraire aux positions de Ségolène ? Et qu’adviendrait-il alors de la rédaction de la motion Royale ?

On peut même élargir : puisque le machin s’adresse à l’ensemble des militants, comment est assurée la transparence du bidule ? Qui gère la modération ? Quels en sont les critères ? Le dépouillement des réponses sera-t-il également participatif ? Qui décidera de ce qui est à retenir et ce qui est à rejeter ? Bref, le bidule, en réalité, il appartient à qui ? Ou encore, et en corolaire : le machin participatif n’inclut-il pas nécessairement la transparence et la mutualisation de l’accès au bidule ?

En vérité, en l’absence d’une telle transparence – et donc de la réponse à ces questions de fonctionnement qui sont tout sauf accessoires -un militant qui ne se sentirait pas franchement politiquement proche de Ségolène Royal ne peut véritablement espérer que ses réponses éventuelles soient prise en compte, puisque ce qui va en ressortir est annoncé « motion Ségo ». Ce qu’il sait en revanche, c’est qu’en participant il sera compté dans ces « X milliers de participants au débat interne suscité par Ségolène Royal » qui seront inévitablement annoncés à l’issu de l’opération pour preuve de l’engouement des militants et sympathisants vis à vis de ladite démarche participative. Et voilà donc notre ami pas si bisounours piégé entre dire, être compté mais sans pouvoir espérer qu’on tienne compte de ses réponses et ne pas répondre et laisser dire la vérité des vrais bisounours.

De facto, il devient évident que les questions ne s’adressent pas véritablement à l’ensemble des militants, comme il est très habilement prétendu. Et il est bien dommage d’avoir ainsi diminué la portée d’une excellente idée en privilégiant la manœuvre au collectif – comme il est d’ailleurs extrêmement regrettable, et plus encore, que les dirigeants actuels du PS n’aient pas pris eux, puisque c’était là évidemment leur rôle, la peine d’être eux-mêmes les initiateurs d’une telle démarche.

Mais puisqu’on m’opposera nécessairement que je serais moi-même dans la manoeuvre en écrivant ce petit billet, et que je ferais bien mieux de répondre aux questions que me pose la dame, je précise que j’ai déjà commencé à participer et je le prouve :


Question 1 : Il faut sortir du fossé entre un discours pseudo révolutionnaire dans l’opposition et un conformisme économique au pouvoir : de quelle façon ?

Pour ma part, je n’entends pas au PS de discours pseudo révolutionnaire… pas plus que le conformisme économique serait la règle de la gauche au pouvoir – c’est là tirer un trait bien rapide sur le RMI ou la CSG, sur les 35h ou la cinquième semaine de congés payés, sur les indéniables succès économiques des années Jospin (même s’il y eut également des timidités coupables).

Donc j’ai déjà un peu de mal à comprendre la question, sinon à la poser ainsi : Les socialistes ont la charge de proposer aux français un projet économique réellement alternatif et ambitieux, tout en s’assurant de sa cohérence avec les réalités du monde, lequel ? Voilà comment je formulerais cette première question. En résumé, finalement :

Quel projet socialiste gagnant pour 2012 ?

Pas sûr qu’on puisse y répondre aussi rapidement, dans le cadre qui nous est proposé. Ou alors je n’ai pas compris la question et en ce cas, je veux bien qu’on m’explique…

Pour l’heure, il semble que le message auquel elle nous invite à souscrire serait que les socialistes ont en effet dans leur ensemble un discours pseudo-révolutionnaire lorsqu’ils sont dans l’opposition (des exemples ?) et tombent dans le conformisme économique aussitôt qu’ils sont au pouvoir (ça peut se discuter, non ?). Le postulat parait bien rapide et affirmer sans nuance, asséner, n’a jamais fait une vérité collective – mais est-ce bien à tous les socialistes qu’on s’adresse ici ?


Question 2 : Le socialisme ne peut pas se contenter d’aménager le capitalisme financier à la marge : comment produire et répartir autrement la richesse ?

Là encore, j’ai du mal à comprendre la question.

Pourquoi parler de richesse puisqu’il s’agit, ici en particulier, de la répartition des profits des grandes entreprises cotées en bourse et donc soumis au capitalisme financier dont on parle dans le cadrage de la question ?

Et que veut dire produire autrement la richesse ? Autrement qu’en levant des capitaux en bourse ? Soit et on serait alors là dans une réelle et ambitieuse rupture… mais je doute que cela soit de cela qu’il s’agit ici. Je devine qu’on parle plutôt de s’affranchir des critères de gestion des entreprises purement financiers, de cette recherche obsessionnelle de rentabilité financière, dictat fait aux entreprises par les grands actionnaires au mépris d’un développement harmonieux et respectueux de la valeur humaine des entreprises et du cout social des licenciements, le dictat notamment d’une politique salariale ultra restrictive.

Aussi posons cette question 2 de la manière suivante : Le socialisme ne peut pas se contenter d’aménager le capitalisme financier à la marge : comment rompre avec des critères de rentabilité purement financiers dictés par les gros actionnaires et répartir plus justement les profits des grandes entreprises ?


Question 3 : Que reprendre des modèles progressistes des autres pays et que rejeter ?

Alors là, le flou devient artistique. Essayez juste de faire un début de réponse à la question… C’est en réalité le type même d’une problématique transversal et qui ne peut être distinguer du tout. Pour élaborer un modèle progressiste français cohérent, il sera nécessaire, sur l’ensemble des sujets, de recourir à une veille internationale afin de s’inspirer de ce qui a été mis en place ailleurs, de ce qui a réussi et de cce qui a échoué.

Aussi, je proposerais bien de supprimer la question 3… voire de reformuler toutes les questions afin d’en tenir compte. Pour les questions 1 et 2 (mais l’opération pourra très probablement s’appliquer aux autres questions) cela donnerait, en tenant compte de mes reformulations déjà proposées par ailleurs :

1- Les socialistes ont la charge de proposer aux français un projet économiques réellement alternatif et ambitieux, tout en s’assurant de sa cohérence avec les réalités du monde, lequel ? Que reprendre des modèles économiques des autres pays et que rejeter ?

2- Le socialisme ne peut pas se contenter d’aménager le capitalisme financier à la marge : comment rompre avec des critères de rentabilité purement financiers dictés par les gros actionnaires et répartir plus justement les profits des grandes entreprises ? Que reprendre des modèles financiers des autres pays et que rejeter ?


Question 6 : Comment rompre avec la redistribution passive et bureaucratique comme principal moyen de s’attaquer aux injustices sociales ?

Ecrire « rompre avec la redistribution passive et bureaucratique » est déjà une manière d’orienter le débat, de ne pas laisser la question ouverte.

C’est là un postulat socialiste, la redistribution serait par essence passive et bureaucratique ? L’impôt – principale source de redistribution – serait passif et bureaucratique ?

Comment peut-on laisser supposer qu’une aide apportée, une allocation distribuée à un foyer modeste serait passive ? Par le fait même qu’elle produit un supplément de pouvoir d’achat, aussitôt dépensé, elle contribue activement à faire tourner la grande machine « économie ».

Est-ce le rôle de la gauche de donner du grain à moudre au sarkozisme triomphant en contribuant à laisser penser que l’abus d’allocations et la fraude est la règle ?

On voit bien ce qui transparait derrière cette question : la solidarité à la sauce donnant-donnant – si la société consent à t’aider, comment l’aideras-tu en retour ? Autre manière de dire qu’il serait possible d’être socialement inutile. Autre manière de laisser penser qu’on pourrait vivre suffisamment bien des allocations pour s’en contenter et ne pas chercher un travail.

Ainsi, il serait utile de reprendre les choses plus en amont – s’il s’agit bien ici de faire contribuer l’ensemble des socialistes – en portant la réflexion sur notre conception collective de la solidarité nationale et de la redistribution.


L’initiative en dix questions de Ségolène Royal soulève, d’abord, de vraies questions de forme, notamment concernant celle de la transparence, auxquelles des réponses concrètes permettraient aux socialistes d’aborder leur congrès sur le terrain du débat de fond et des idées, donc de réaliser un congrès à même de donner enfin une consistance au Parti Socialiste, à son rôle d’opposant et à son ambition de conquête du pouvoir sur la base d’un projet de transformation sociale ambitieux, réaliste et innovant. Faute de cela, ne resterait de cette initiative qu’une manœuvre politicienne de plus.

On parle de : Congrès Utile et Serein : participatif… mais presque

Avr 072008
 

Vous avez dit Rigueur ?

des économies à la tronçonneuse
© La République des Fourmis par SaT – Reproduction interdite sans autorisation de l’auteur

Les choses sont aujourd’hui très claires : d’un côté, le gouvernement Sarkozy-Fillon dépense généreusement 15 milliards d’euros par an pour réduire la pression fiscale sur les français les plus riches, de l’autre – mais seulement une fois les échéances électorales passées – 7 milliards (et ce n’est qu’un début) d’économies annuelles sont imposés aux services de l’Etat et qui pénaliseront en priorité les foyers les plus modestes – lesquels auront plus de mal à se loger, plus de mal à se soigner, plus de mal à permettre à leurs enfants de prendre l’ascenseur social en bénéficiant d’un enseignement de qualité, plus de mal à vivre…

Disons-le plus clairement encore, Sarkozy impose à la France ce que Ronald Reagan et Margaret Thatcher ont imposé respectivement aux Etat-Unis et à la Grande-Bretagne, … il y a vingt-cinq ans ! Il s’agit de cette stratégie sournoise mise au point par les idéologues du libéralisme visant à un désengagement brutal de l’Etat dans les services publics, le rendant inefficace et justifiant dans un second temps d’en confier la responsabilité au secteur marchand. De manière imagée, la stratégie revient à inoculer la rage à son chien afin de justifier qu’on soit obligé de l’abattre. Sans moyens, la dégradation de la qualité de l’enseignement dans les écoles publiques justifiera qu’on ouvre toujours plus d’écoles privées ; exsangues, les hôpitaux seront de plus en plus dans l’incapacité de remplir correctement leurs missions et un marché s’ouvrira pour les cliniques privés ; etc…

Le résultat est connu : privatisation de l’école et de l’université, privatisation de la recherche, privatisation de l’assurance maladie, privatisation du régime de retraites, privatisation de l’assurance chômage, politique culturelle remise entre les mains du système marchand, une justice à deux vitesses ne permettant pas aux pauvres de faire valoir leurs droits, etc… Ceux qui pourront payés bénéficieront encore d’une éducation de qualité pour leurs enfants, pourront se soigner dans des cliniques privés bien équipés et auront la vie facile, tandis que pour les autres tout sera plus difficile dans une vie où le moindre accident de santé risquera de tourner au drame économique, et où les enfants iront s’agglutiner dans des établissements scolaires aux classes surchargées dans lesquelles des profs dépassés tenteront en vain d’enseigner qu’il fût un temps où l’égalité des chances était un objectif pour lequel il valait la peine de se battre.

C’est vers une telle société qu’à grands pas nous nous dirigeons… et ce alors même que dix à quinze années furent ensuite nécessaires aux Etats-Unis comme à la Grande Bretagne – Bill Clinton ici et Tony Blair là – pour réparer un peu des immenses dégâts causés par une politique de démolition systématique et aveugle de l’Etat, une politique sans fondement économique sinon l’intérêt du portefeuille de quelques-uns, cette marque de l’imbécillité profonde de l’idéologie libérale.

Ils disent « réformer l’Etat »… quand il ne s’agit en réalité que de l’abandon de ses missions fondamentales. Pour cette droite idéologue, la réforme équivaut purement et simplement à moins d’Etat… quand une autre voie serait le mieux : dépenser moins pour dépenser mieux, réformer pour plus d’efficacité, réformer plutôt que déformer.

On parle de : Réforme de l’Etat (RGPP) et Rigueur

Avr 052008
 

Cette interview de Emmanuel Todd par Marianne2 est une perle : l’homme est intelligent, la pensée est forte, le ton est cinglant et les mots sont justes. Non seulement c’est un régal à lire, mais on en ressort enrichi et convaincu que, finalement, tant qu’il y aura de l’intelligence, il restera de l’espoir. Bref, c’est à une lecture riche et saine que je vous convie. C’est court et ça en vaut la peine…

«Si la France devient le caniche des USA, elle disparaîtra» – Emmanuel Todd

Repris de Marianne2

Selon Emmanuel Todd, le renforcement des troupes françaises en Afghanistan est une erreur diplomatique et stratégique, et dessine les contours d’une idéologie extrême-droitière à l’échelle mondiale.

Au Sommet de l’Otan, mercredi 2 avril, George Bush s’est dit «très heureux» du soutien de la France en Afghanistan. Mais la veille, à l’Assemblée, la première grande décision stratégique de Nicolas Sarkozy de renforcer les contingents français engagés dans le conflit afghan mettait le feu aux poudres. Les socialistes, de François Hollande à Lionel Jospin, d’Hubert Vérine à Ségolène Royal, s’opposent unanimement à une politique d’alignement sur les Etats-Unis. Ils mettent en avant l’enlisement du conflit afghan, son coût humain et dénoncent le «tournant atlantiste» de la politique française. Pour l’historien et démographe Emmanuel Todd, les dangers de cette politique sont encore plus graves. L’auteur de Après l’empire juge que cette partie est perdue d’avance et qu’elle participe d’une idéologie extrême-droitière naissante.

la guerre de Sarkozy
© La République des Fourmis par SaT – Reproduction interdite sans autorisation de l’auteur

Marianne2.fr : Le renforcement des troupes en Afghanistan vous paraît-il justifié ?
Emmanuel Todd :
Je peux tout imaginer de Nicolas Sarkozy, même qu’il ne sache pas où est l’Afghanistan. Mais je ne peux pas imaginer que les gens qui l’entourent ignorent ce que tout le monde anglo-saxon sait, à savoir que cette guerre est perdue.

Pour vous, cette guerre est sans espoir ?
E.Todd :
L’organisation sociale des Pachtounes est faite pour la guerre, tout comme celle des clans somaliens : la guerre est l’état normal de ces sociétés, ce n’est donc pas un problème dans la durée. A partir du moment où les belligérants sont alimentés par des fournitures d’armes régulières venant de l’extérieur, il est évident que ces système sociaux vont venir à bout de quelques milliers d’hommes venus de loin et difficilement approvisionnés. On peut se demander, à la limite, si ça va se terminer par un Dien-Bien-Phû ou par un retrait paisible.

Du point de vue du gouvernement, il semble pourtant qu’il y ait des enjeux à ce conflit…
E.Todd :
Pourquoi ceux qui nous gouvernent veulent-ils participer à une guerre perdue ? Voilà la vraie question. Et là, comme dans les débats sur la réintégration pleine et entière de la France à l’Otan, on touche au symbolique. Cette manœuvre a pour objectif de réaffirmer un lien avec l’Amérique. Je n’appellerai pas ça du néo-atlantisme. L’atlantisme était le lien de l’Europe occidentale avec les Etats-Unis à une époque où ils portaient les valeurs démocratiques face au totalitarisme soviétique. Ce n’était pas du goût des gaullistes, mais dans le contexte, cela pouvait se justifier. Aujourd’hui, l’Amérique est le pays du fric, du néo-libéralisme et des inégalités. Et ce qui se profile derrière cette nouvelle association, c’est de l’occidentalisme. C’est un lien fondé sur une nouvelle idéologie, une idéologie qui se construit dans le conflit avec l’islamisme.

Mais la France n’a-t-elle pas intérêt, pour des raisons de politique «réaliste», à s’associer avec les Etats-Unis plutôt que de rester repliée sur elle-même ?
E.Todd :
La France n’a pas les moyens de s’engager en Afghanistan, c’est déjà un objectif démesuré pour les Etats-Unis. La France est une puissance moyenne et l’Amérique une puissance déclinante. Paris existait terriblement à l’époque de Villepin : après son discours à l’ONU contre l’engagement de la France en Irak, nous rayonnions! Mais sous Nicolas Sarkozy, il arrive à la France ce qui est advenu de l’Angleterre sous Tony Blair : si l’on devient le caniche des Etats-Unis, on disparaît. Si on s’aligne, si on perd son indépendance, on disparaît. De Gaulle l’avait compris : la France n’existe à l’échelle mondiale, ne peut justifier son siège au conseil de sécurité de l’Onu et sa possession de l’arme nucléaire, que lorsqu’elle représente un acteur autonome. Le monde n’a rien à faire de la France de Sarkozy.

La lutte contre le terrorisme légitime aussi l’engagement du gouvernement dans ce conflit.
E.Todd :
Les occidentalistes se pensent en situation de légitime défense. Le terrorisme existe, il devrait être contré par le contre-espionnage et par des forces policières, mais sûrement pas par des guerres à l’étranger. La première attaque contre l’Afghanistan était légitime, il s’agissait de déloger Ben Laden ; d’ailleurs, les Russes nous y avaient aidé. Mais l’irakisation de l’Afghanistan participe d’une agression du monde musulman par le monde occidental. L’occidentalisme est une doctrine d’extrême droite en émergence. La France va être du côté du mal : en exposant des troupes françaises et en participant aux bombardements de la population civile afghane. Et, grâce à Sarkozy, nous risquons même ce qu’ont subi la Grande-Bretagne et l’Espagne à la suite de la guerre en Irak.

Vous parlez des attentats de Londres et de Madrid qui ont eu lieu suite à l’engagement de nos voisins en Irak. Mais là, il ne s’agit que d’envoyer quelques centaines d’hommes dans un pays où la France a déjà des troupes…
E.Todd :
Mais justement ! Rappeler leur faible nombre, comme le fait le gouvernement, c’est avouer qu’il s’agit bien d’une action symbolique ! Les quelques bateaux qu’on va mettre dans le golfe persique vont faire rire les Iraniens. Mais nous nous positionnons dans une construction idéologique, contre le monde musulman. Cette posture est d’ailleurs très cohérente avec le sarkozysme en politique intérieure.

Vous pensez que Nicolas Sarkozy est dans une logique de guerre avec le monde musulman ?
E.Todd :
Ce qui a fait son succès dès le premier tour de l’élection présidentielle, c’est le ralliement d’une partie des électeurs du Front national. Il a pu avoir lieu à cause des émeutes en banlieues, qui ont été un facteur de traumatisme. Mais c’est Sarkozy, ministre de l’Intérieur, qui a provoqué cet évènement. Dans la logique du sarkozysme, il y a la combinaison d’une incapacité à affronter les vrais problèmes et à désigner des boucs émissaires. C’est classique : quand une société est en crise, elle a le choix entre résoudre ses problèmes économiques et ses pathologies sociales, ou créer des bouc-émissaires. Sarkozy recherche toujours un ennemi, il est dans l’agression. Cela s’observe même dans son comportement ordinaire avec les habitants de banlieue ou les marins pêcheurs.

En s’impliquant plus en Afghanistan, la France participe donc à déclencher un clash des civilisations?
E.Todd :
L’analyse d’Huntington sur le clash des civilisations est fausse, mais un gouvernement peut essayer de la rendre vraie. Je pense que les gens qui nous gouvernent seront tenus pour responsables de ce qu’ils font. La guerre, c’est la pédagogie du mal. Les peuples en paix pensent sainement. On entre parfois en guerre pour de bonnes raisons, mais peu à peu, on glisse insensiblement dans la violence pour la violence. C’est ce qui aurait pu arriver en Espagne, si les Espagnols avaient mal réagi aux attentats : ils auraient pu s’enfoncer dans le conflit des civilisations. Je crois que cette stratégie conflictuelle va échouer aussi en France. La recherche de bouc-émissaires, l’émergence d’une idéologie islamophobe et hostile aux enfants d’immigrés… ce n’est pas dans la nature de la France. Au final, les Français préfèrent toujours décapiter les nobles que les étrangers.

Jeudi 03 Avril 2008
Anna Borrel

les caisses sont vides
© La République des Fourmis par SaT – Reproduction interdite sans autorisation de l’auteur

On parle de : Sarkozy et la guerre perdue en Afghanistan

Mar 262008
 

Le bon grain et la mauvaise graine

Il faut réduire la dette ! L’intention est louable, et l’objectif même impératif. Il n’est cependant pas interdit de remettre en cause la logique purement budgétaire d’un gouvernement qui a donc résolu de faire des économies sur le dos, entre autres, de l’Education Nationale, en supprimant dès cette année de 11 200 postes de professeurs – mais ce n’est qu’un début, le pire restant à venir avec un objectif affiché de 80 000 postes supprimés en 4 ans !

Pour Messieurs Sarkozy et Fillon, les choses sont simples : puisqu’il faut faire des économies, supprimons un maximum de postes d’enseignants dans les collèges et lycées de France, fut-ce au prix d’une dégradation sans précédent des conditions de travail des enseignants comme des élèves, donc de la qualité des enseignements dispensés, et donc des chances de réussite scolaire pour tous les enfants – et en particulier, c’est une évidence, pour les plus fragiles d’entre eux, ceux qui connaissent déjà les plus grandes difficultés. Une logique purement budgétaire au prix d’une insulte à l’avenir du pays, à son économie mais aussi, plus directement, à son intelligence. L’avenir de nos enfants, leurs chances de réussite scolaire, ne sont plus désormais considérés comme un investissement productif de richesses, mais bien comme une variable d’ajustement budgétaire parmi d’autres.

Nous sommes dans la situation aberrante où un agriculteur, contraint de faire des économies, prendrait la décision suicidaire de réduire les semences, se condamnant inévitablement à des récoltes moindres, ce qui aurait pour effet certain d’accroître d’autant ses difficultés financières. Semer, l’agriculteur le sait bien, c’est investir, c’est-à-dire préparer aujourd’hui les richesses de demain. Nos enfants sont les richesses de demain. Les cultiver, c’est-à-dire en l’occurrence les préparer à demain, telle est la mission essentielle de l’école. Il est atterrant de constater à quel point nos gouvernants actuels semblent avoir perdu confiance en nos propres enfants au point de les sacrifier sur l’autel idéologique de l’orthodoxie budgétaire.

Non, pas tous les enfants. Ces responsables politiques, actuellement au pouvoir, ont très clairement choisi de séparer le bon grain… de la mauvaise graine. Le bon grain, ce sont ces enfants qui ont reçu en héritage la chance de pouvoir mener à bien une scolarité quelques soient les conditions d’enseignement qu’ils ont à affronter à l’école, y compris dans des classes surchargées, y compris face à tel ou tel enseignant dont les conditions de travail et le niveau de reconnaissance sociale ne lui permettent plus d’assurer correctement sa mission. D’ailleurs celui-là, cet enfant privilégié, suivra généralement une scolarité dans des établissements successifs situés bien à l’abri des problèmes supplémentaires que posent à un enseignant, et finalement à une classe toute entière, la présence nombreuse d’élèves en très grandes difficultés scolaires et/ou sociales (les deux étant généralement étroitement liés). La mauvaise graine, ce sont tous les autres pour qui la notion d’égalité des chances devient chaque jour davantage, et plus particulièrement chaque fois qu’on décide d’investir moins dans l’école de la République, chaque fois qu’on cesse un peu plus de croire en eux, une notion bien vaine face à des choix politiques qui ne peuvent être vécue autrement que comme un abandon, une exclusion supplémentaire.

Ce gouvernement, fidèle à une idéologie libérale archaïque, a fait le choix économiquement aberrant d’investir moins pour économiser plus, quand au contraire – parce que l’économie a des invariants simples – il est impératif, y compris face à cet objectif majeur de réduction de la dette, d’investir plus aujourd’hui pour gagner plus demain.

On parle de : Education nationale : investir moins pour économiser plus

Mar 202008
 

Sur la Plage du Village – un lieu que je vous recommande car il y fait bon vivre et débattre -, le maître des lieux a commis un excellent billet, tout en finesse et en pertinence. Si à ce billet il fallait adjoindre une morale sur laquelle bien des socialistes pourraient méditer, elle serait selon moi la suivante :

Il ne s’agit pas d’écarter Ségolène Royal.

Il s’agit de ne pas s’empresser d’écarter tous les autres !

Je ne résiste pas au plaisir de reproduire ici le billet de cet ami de là-bas, le héron Gris :

Et maintenant …

La victoire en pleurant.

Après la défaite en chantant, voici la victoire en pleurant. Faut-il avoir peur d’une victoire électorale, obtenue par une gauche presque authentique, au motif qu’elle ne s’inscrit pas dans la ligne prophétique de la gauche dite moderne ? Certes, maintenant que l’œuvre est accomplie, d’aucuns ne se priveront pas pour attribuer cette réussite à l’heureuse conjonction du Ségo-tour-opérator, dont la tournée s’acheva à Aix-en-Provence, avec les frasques élyséennes. En somme, après le sourire de la défaite, la grimace d’une victoire aux redoutables effets pervers. Pour mieux comprendre, il faut se souvenir d’un fameux Conseil National du PS où il fut décidé, par un collège d’abominables apparatchiks incompétents, de traiter séquentiellement les élections locales et le Congrès. A l’époque, on entendit parler de déni de démocratie et de stupidité politique par les fondus de la refonte pour qui le PS ne pourrait plus gagner une seule élection avant de s’être équipé d’un leader, ou plus précisément d’une « leadeure ». Aujourd’hui, les choses ont un peu changé car le premier objectif du futur chef n’est plus de préparer la victoire mais de la récupérer, ce qui est tout de même plus facile.

Une élection qui retombe en pluie fine.

Trêve de polémique stérile, venons-en aux retombées positives des ces élections municipales et cantonales. Tout d’abord, il convient de resituer le contexte. La droite dure, après avoir gagné largement la présidentielle et les législatives a entrepris la démolition, pour ne pas dire l’éradication, de la gauche. Ainsi, l’opération « vide grenier » du PS visait à laisser croire au bon peuple de France que les clivages politiques étaient archaïques et qu’en installant un homme providentiel à l’Elysée, toute idée d’alternance devenait obsolète tant l’esprit d’ouverture du Président appelait une nouvelle pratique politique où tout est dans tout et réciproquement. De maroquins en commissions, l’école bessonnière connut alors son heure de gloire au point que les rapports furent écrits en Attalique, cette écriture qui penche singulièrement à droite. Aux dires des médias et des nouveaux apparatchiks de la gauche moderne, le PS était à l’agonie, au bord de l’explosion implosive, incapable d’aller au combat. Dans un tel contexte, avec un PS archaïque, sans leader, sans projet et sans vision, seule une victoire aux élections locales, suffisamment ample pour revêtir une signification nationale, pouvait induire un peu de réalisme et d’équité dans un discours ambiant qui mêlait bizarrement les intérêts de la droite avec ceux d’une certaine gauche. Aussi, si la vague rose a eu pour premier effet de noyer l’utopie dangereuse de la pseudo ouverture, elle a également causé quelques dommages collatéraux auprès des nouveaux visionnaires qui, à gauche, se tenaient tellement près de la droite qu’ils n’ont pas vu arriver la vague.

La métamorphose des godillots.

La remise aux normes du paysage politique français devrait quelque peu changer la donne dans le processus dit de rénovation du PS, non pas en le ralentissant, mais en replaçant les différents acteurs au plus près de la vie politique réelle du pays. En France, la présidentialisation du régime résultant de la mise en œuvre du quinquennat aggravée par la synchronisation des scrutins présidentiel et législatif dans un paquet électoral de type « deux en un », a provoqué la transformation des partis politiques en une sorte de « fan club » entièrement dévoués à la gloire de leur star. Ainsi, l’UMP et l’UDF/modem succombèrent à cette tendance, avec des fortunes diverses, pendant que le PS, sous l’impulsion de quelques éléphants indociles, résistait tant bien que mal au phénomène de mode. Or, dans un parti politique, si les sympathisants aspirent rarement à exercer une quelconque responsabilité politique, il n’en va pas de même pour les militants qui souhaitent généralement s’impliquer, non seulement dans la vie du parti, mais également dans des fonctions électives. De ce point de vue, la décentralisation a permis de créer un nombre considérable de mandats dans les différentes collectivités locales notamment aux niveaux des régions, des départements, des communes et de l’inter-communalité. De fait, c’est cet ensemble de mandats électifs qui innerve, en profondeur, la vie politique française au plus près des citoyens et des réalités. Finalement, dans un parti politique, la proportion des adhérents motivés par l’attrait d’un destin national, voire un maroquin ou, pourquoi pas, l’Elysée est relativement faible au regard de ceux qui préfèrent limiter leur ambition aux confins de leur département. Qui plus est, l’accès aux responsabilités nationales requiert, le plus souvent, une bonne implantation locale en guise de tremplin. En conséquence, il ne faut pas minimiser les retombées indirectes que pourraient avoir les dernières élections locales au niveau du fonctionnement des partis politiques. En effet, les milliers d’élus UMP qui vont se retrouver sur le carreau alors qu’ils pensaient être les maîtres du pays par la grâce d’un Dieu omnipotent, auront de quoi méditer sur la métamorphose des godillots en groupies. A l’inverse, les heureux élus d’une gauche « ringarde » que l’on disait exsangue et sans avenir seront peut être moins disposés à adhérer, sans la moindre réserve, au discours convenu d’une rénovation opportuniste et creuse mise au service exclusif d’un improbable destin personnel.

Rien de neuf dans la rénovation.

La question de la rénovation du PS est réglée depuis 1983 après que François Mitterrand eut compris qu’un programme de gouvernement n’était pas forcément soluble dans la doctrine du Parti. Aujourd’hui, l’évolution du capitalisme, la mondialisation et le libéralisme débridé constituent autant de défis que la gauche devra affronter si elle revient aux affaires au plan national. Le rabougrissement des prérogatives du pouvoir politique national au profit des pouvoirs économique, financier et européen, pose d’emblée le problème de la marge de manœuvre d’un gouvernement de gauche. Dès lors, la seule question qui se pose vraiment est celle du découplage entre la doctrine et le programme de gouvernement. Sauf, bien évidemment, à penser que la doctrine est un concept obsolète en réduisant le rôle d’un parti politique de gauche à l’élaboration d’un programme, ou d’un pacte, présidentiel. Si d’aventure le PS tombait dans ce travers, il s’en trouverait alors réduit à exercer une fonction d’écurie (s) présidentielle (s).

Il est urgent de désigner un maillot jaune.

La question récurrente du leadership s’inscrit également dans la démarche de désintégration d’une pensée politique qui deviendrait un obstacle dans le processus de conquête du pouvoir pour le pouvoir. Du reste, au même titre que la rénovation, la question du leadership au PS, même si elle est incontournable du fait de nos institutions, demeure superfétatoire dans la mesure où personne aujourd’hui n’est apte à assumer ce rôle faute de consensus. De toute façon, par définition, un leader ne se désigne pas, il doit s’imposer de lui-même. Force est de constater que nul n’y est encore parvenu au PS et l’idée même de substituer une procédure de désignation à l’émergence naturelle d’une personnalité porte en elle le germe de l’échec. Pour preuve, c’est précisément ce qu’a connu le PS à deux reprises dans un passé récent. Tout d’abord à l’occasion du référendum sur le TCE, pour lequel François Hollande a cru naïvement qu’il suffisait d’obtenir un vote majoritaire des adhérents, en l’occurrence à hauteur de 60%, pour entraîner le parti, comme un seul homme, sur la voie qu’il jugeait être la bonne avec le résultat que l’on sait. Ensuite, il y eu la désignation de la candidate à l’élection présidentielle, là aussi avec un score de 60% des adhérents, qui n’a pourtant pas permis d’entraîner l’ensemble du Parti, comme une seule femme, sur la voie de la victoire. Jamais deux sans trois ?

Impatience et longueur de temps.

Est-il vraiment bien raisonnable de vouloir mettre 2012 en musique dès aujourd’hui en proposant aux français un programme, qui sera forcément dépassé dans quatre ans, assorti d’une candidate qui n’a pas encore réussi à convaincre son propre camp, alors que ce dernier l’avait mise en situation très favorable pour le faire, quoi que puissent en dire les nouveaux apparatchiks du PS ? Alors, pour évacuer la redoutable question du chef, certains avancent une thèse, que l’on pourrait présenter à la manière de Brassens, selon laquelle : « tout est bon chez elle, y a rien à jeter … sur l’île déserte il faut tout emporter ». Voici une bien curieuse façon d’apprécier les qualités d’une postulante en évaluant son profil par comparaison au néant. Tout d’abord, si il est indéniable qu’il y a du bon chez elle, tout est loin d’être parfait et il reste encore bien des choses à jeter ou, pour le moins, à améliorer. Quant au néant, si tel était le cas, cela serait dramatique pour celle qui ne parviendrait même pas à s’imposer dans un univers exempt de toute concurrence. Par ailleurs, décrire le PS comme une île déserte, n’est certainement pas la meilleure manière de promouvoir la gauche et de préparer son retour à la tête du pays. Les talents et les compétences existent à gauche, ne les méprisons pas en cédant, un fois encore, à la dictature des sondages. Du reste, selon une récente mouture sondagière, Ségolène Royal recueillerait 45% d’avis favorables de la part des sympathisants du PS pour le poste de Première Secrétaire du Parti. Quand on sait que les 60% de l’investiture pour la présidentielle ne permirent pas de créer l’osmose, qu’en serait-t-il d’une désignation de type « deux en un » puisqu’elle cumulerait, de fait, la direction du PS et l’investiture pour 2012, sur la base d’une majorité on ne peut plus relative ? Enfin, alors que le pays vient d’offrir une superbe veste au locataire de l’Elysée qui s’était fait tailler un costume sur mesure dans un tissu d’omnipotence et de people, pourquoi le PS devrait-il, par mimétisme ou par cupidité, reproduire un modèle similaire en confectionnant, à son tour, une opposition monothéiste couchée sur papier glacé ?

Le plus dur est avenir.

En votant majoritairement à gauche à l’occasion des dernières élections municipales et cantonales, les Français ont fait savoir qu’ils pouvaient encore faire confiance à des femmes et à des hommes de gauche pour gérer les affaires de la cité. Le principal mérite en revient, bien évidemment, à celles et à ceux qui, partout en France, ont dépensé sans compter leur énergie et leur talent pour conquérir les mairies et les cantons. Pour autant, si cette victoire montre que tout reste possible, elle ne doit pas constituer une invitation à l’immobilisme et à l’auto satisfaction. Il reste à la Gauche beaucoup à faire pour convaincre les Français qu’une autre politique est possible pour le pays. Si un tel travail exige un minimum d’ordre et de rigueur, sa réalisation ne saurait passer par la voie hiérarchique ou divine, pas plus que par le centralisme démocratique. Il convient d’engager, du moins dans un premier temps, une démarche collective élargie associant tous les talents et toutes les énergies disponibles pour définir, sans dogmatisme mais non sans pensée politique, un projet réaliste adossé, dans la mesure du possible, à une vision alternative du monde qui ne céderait pas à cette lancinante pensée unique qui tend à faire croire que nous serions arrivés à la fin de l’histoire.

Billet du héron Gris, sur la Plage du Village

En se donnant à Ségolène Royal, le PS s’enfermerait dans une « candidature naturelle » et la jolie geolière aurait alors beau jeu de ne laisser s’épanouir aucune autre possibilité. Or 2012 est loin encore, beaucoup peut se passer d’ici là et nul aujourd’hui ne peut prétendre avoir de certitude objective quant à la bonne candidature socialiste en 2012. Les talents sont nombreux au PS que la lumière médiatique n’inonde pas encore. La vie démocratique a pour objet de leur permettre de s’épanouir et de devenir, plutôt que de les étouffer.

Rappelons qu’un an avant les présidentielles de 2007, Ségolène Royal était elle-même de ses personnalités d’arrière-plan médiatique, c’est-à-dire qu’elle n’était pas alors en situation de présidentiable (pas plus que ne l’était Barack Obama, il y a un an aux Etats-Unis). C’est précisément la non présidentialisation des structures du PS, cette absence d’une figure écrasante, candidat naturel supposé, qui a permis l’avènement de sa candidature. Avoir soi-même passé une porte pour aussitôt s’évertuer à la la verrouiller derrière soi relèverait de la manœuvre politicienne au service d’une ambition exclusivement personnelle. Car, que l’on se rassure, quoi qu’il advienne Ségolène Royal est et restera sur le devant de la scène politique française – telle est désormais la place que lui accorde son statut d’ancienne candidate.

Or donc, c’est une évidence, tel est pourtant l’objet aujourd’hui de la candidature de Ségolène Royal à la tête du Parti Socialiste : ne pas avoir partager le devant de la scène, s’empresser donc d’écarter tous les autres et interdire la potentialité de l’avènement de l’un quelconque d’entre eux, rival pour elle indésirable mais qui pourrait bien s’avérer salvateur pour la gauche. Les militants socialistes feraient fausse route s’il venait à verser dans cette facilité qui correspondrait à insulter inutilement l’avenir.

On parle de : Ni « Tout sauf Ségolène », ni « Royal sinon rien »

Mar 132008
 

Elections Municipales
© La République des Fourmis par SaT – Reproduction interdite sans autorisation de l’auteur

La grande peur de la droite

Edito de Nicolas Domenach, dans Marianne2

Il ne faut pas croire tout ce qu’on vous raconte ni tout ce qu’on vous montre. La droite fait belle figure et beaux mots, mais elle a peur. Peur d’une lourde, d’une très lourde défaite aux municipales et aux cantonales. Pourtant, elle a bien gagné une bataille, une bataille de « com » et de manière écrasante.

Au soir du premier tour en effet, l’Elysée a parfaitement cadré tous les intervenants de tous les plateaux télé, alors que les leaders PS intervenaient en ordre et en pensée dispersés. Chaque orateur UMP a reçu son SMS précisant les messages à faire passer et qui furent ensuite débités à tous les micros. « C’était une élection locale. Il n’y a pas eu de vague de gauche. » La preuve : « le nombre de ministres, 14, réélus au premier tour et la bonne performance des porte-parole de l’UMP, ce qui prouvait un soutien à la politique du gouvernement ! » Il y avait des contradictions évidentes dans ces propos ou même avec les faits. Puisque la gauche enregistrait une poussée nationale, et devançait l’UMP, puisque le Modem, sur une ligne d’opposition au sarkozysme, réussissait de bien meilleurs résultats que la moyenne nationale qu’on lui prêtait (en fait 7 % là où il se présentait) puisque, à part Laurent Wauquiez, le porte-parole du gouvernement, qui l’emportait dans une ville, Le Puy, qui avait voté Ségolène Royal, les succès des autres membres du gouvernement comme Eric Woerth à Chantilly, ville crème fouettée sucrée pour la droite ou même comme Luc Chatel à Chaumont, cité qui avait voté à 53 % pour Sarkozy, tous ces résultats positifs étaient attendus mais masquaient un recul d’ensemble de la droite et de nombreux échecs « exemplaires ».

Ainsi, Nadine Morano, la porte-parole de l’UMP, a-t-elle été largement devancée à Toul. Ainsi Lyon et Rouen ont été des sanctions sévères pour la majorité. Et, à la vérité, quand vous parlez en off avec les responsables UMP et les ministres, ils ne sont pas du tout rassurés, mais alors pas du tout, pour le second tour même si l’Elysée fait circuler des projections bonnes pour le moral. Selon leurs calculs en effet, la majorité devrait conserver la majorité des villes de plus de 20 000 habitants : 205 contre 192… Il faudrait simplement pour y parvenir que chacun continue de faire son boulot, comme cela a été calé. Au Premier ministre, la tambouille partisane, au président de la République les grandes interventions comme à Toulon où il agissait en reprenant le thème de l’immigration et de l’identité nationale de rabattre l’électorat abstentionniste de droite, de se montrer tout de même un peu plus mobilisateur donc pour endiguer cette vague d’opposition qui n’existe pas officiellement mais dont chacun en off concède non seulement l’existence mais une « ampleur inquiétante ».

Le secrétaire général de l’UMP, Patrick Devedjian, a lui-même, en parlant de « petite défaite », fait quelque concession à la réalité et à ces candidats qui s’angoissent du peu d’effet mobilisateur qu’entraîne le déni de réalité justement. « Si nous répétons que l’enjeu est uniquement local, se plaignent-ils, si nous ne dramatisons pas contre la gauche qui revient, nous allons prendre une vraie claque », avertissent non seulement les jeunes élus mais aussi les ministres plus chevronnés. Jean-François Copé avait trouvé, croient-ils, un bon argument de campagne en dénonçant à l’avance la TVA municipale, dont les socialistes seraient porteurs. Mais il faudrait aller plus loin, taper plus fort, sonner la mobilisation générale… Ce à quoi se refuse l’Elysée car dramatiser outrageusement serait outrager le président ; cela reviendrait à reconnaître un vote sanction qu’on dément par ailleurs…

Il faut simplement se préparer à bien vendre la défaite au second tour, à l’habiller, à la banaliser, à la dépasser, à rebondir immédiatement. Comme l’a montré le premier tour, les sarkozystes conservent une force de frappe médiatique incomparable. Ils se préparent à l’utiliser massivement, et pensent pouvoir « souffler » ce revers électoral. A condition de ne pas perdre Marseille. Là est l’angoisse suprême. « Il faut que Jean-Claude Gaudin tienne », répète-t-on à l’Elysée. Certes les chutes de Strasbourg, ou même de Reims ou de Toulouse feraient mal mais leur chute est quasi déjà actée dans l’opinion. Alors que si Marseille passait à gauche, ce serait le désordre, la France en dissidence, le sarkozysme désavoué. Or les derniers sondages donnent les scores serrés, très serrés. C’est chaud, très chaud dans la cité phocéenne et on transpire à l’Elysée.


Sarkozy : le sauve-qui-peut
© La République des Fourmis par SaT – Reproduction interdite sans autorisation de l’auteur

On parle de : Allez belle Marseille !

Fév 272008
 

Une démocratie qui a oublié que les mots sont tout

La folie de Nicolas SarkozyNicolas Sarkozy a libéré la parole, les paroles, celle du jeune pêcheur comme celle du visiteur dégoûté du Salon. La grossièreté de l’une et de l’autre n’est que la conséquence de la volonté théorisée et affichée de tourner en dérision l’apparat intime qui exige réserve, modération et contrôle de soi pour pouvoir tout permettre, et se permettre. Les répliques du président s’inscrivent dans un espace qu’il a « déconstruit » et qui lui ressemble.

L’hostilité choquante du visiteur du Salon et le « pauvre con » de Nicolas Sarkozy révèlent, en dépit de leur contradiction apparente, la solidarité d’une société sans respect pour son chef et d’un chef sans considération pour ses concitoyens. Il y a là plus que l’amorce d’un processus qui risque de nous entraîner non plus vers la bienfaisante familiarité des pouvoirs scandinaves mais dans le cloaque d’une démocratie qui a oublié que les mots sont tout et d’abord le décor nécessaire à une relation républicaine, quoique antagoniste.

On aurait bien tort de rire de ces altercations dans la vie quotidienne et publique d’un chef d’Etat. C’est un peu de nous qui est insulté quand il est insulté. C’est un peu de nous qu’il insulte quand il insulte.

On peut craindre le pire devant l’expression de ces tensions aujourd’hui encore minimes. Elles sont inquiétantes comme les signes glaçants de la colère ponctuelle d’un pays qui ne se contente plus de ses exutoires légitimes et réguliers.

La démocratie, aussi, se niche dans les détails.

Par Frédéric Moreau

extrait de Marianne 2 : Les mots de trop d’un président sans piedestal

« Un président qui se livre aux altercations de bas étages, bien loin de faire rire, est le signe inquiétant d’une démocratie sans grandeur. »

Casse-toi, pauvre con !
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On parle de : Un tout petit président

Fév 252008
 

Diabolisation ou lucidité ?

La folie de Nicolas SarkozySouvenez-vous, c’était il y a un peu moins d’un an. Le 18 mars 2007 à 19h30, peu avant le début de France Europe Express, l’émission animée par Christine Ockrent, le candidat de l’UMP aux présidentielles, Nicolas Sarkozy, perdait ses nerfs : « Personne n’est là pour m’accueillir. Toute cette direction il faut la virer. Je ne peux pas le faire maintenant. Mais ils ne perdent rien pour attendre. Ça ne va pas tarder« .

Patienter, lui ? Il ne pouvait en être question et celui qui allait devenir le tout petit président des français – ces pauvres cons, donc – piqua une de ses colères coutumières et hurla : « Je ne veux pas attendre plus longtemps, je veux me faire maquiller tout de suite« . Essayant de le calmer, les journalistes lui expliquèrent qu’il devait attendre son tour vu qu’il n’y avait pas d’autre loge de maquillage. Nouveaux hurlements d’un Sarkozy déchaîné : « Mais enfin, il n’y a personne pour m’accueillir. La direction n’est pas là ? Ce n’est pas normal. Qu’est-ce qu’ils font ? Qui suis-je pour être traité ainsi ?  » C’est vrai, quoi. Ce n’était déjà pas n’importe qui. C’était déjà Sa Majesté Nicolas Sarkozy, le grand homme avec qui tout allait devenir possible.

Ce fut alors un des nombreux épisodes de la campagne électorale au cours desquels les bloggueurs se déchainèrent et où leur fut fait en retour ce fameux procès en diabolisation.

Ainsi, on pouvait lire sur sarkononmerci.fr, sous le titre La douteuse stature d’un Homme d’Etat :

Ce genre d’anecdotes révélatrices du personnage, il y en a chaque semaine dans le Canard enchaîné, qui n’est pas qu’un « hebdomadaire satirique », comme on dit, mais surtout un journal extrêmement bien informé et qui ne fait de cadeau à aucun homme politique. Avant et après ses prestations médiatiques, Sarkozy pète quasi systématiquement les plombs et entre dans des fureurs noires pour un oui ou pour un non.

[…]

En tout cas il n’a pas « changé ». En « off » (c’est-à-dire en « réalité ») il est toujours aussi coléreux, impulsif, agité, agressif et irréfléchi. Ce n’est pas vraiment ce genre de « qualités » qu’on attend d’un homme qui aspire à la plus haute fonction à la tête de l’Etat. Il faut une certaine maîtrise de soi pour diriger un pays et par conséquent être susceptible d’avoir à gérer de graves crises qui demandent d’autres réactions que des crises de nerfs.

[…]

Etaient confirmées toutes les inquiétudes que l’on peut nourrir sur ce personnage quant à sa capacité à assumer la charge à laquelle il postule.

[…]

Etait cité une courte analyse psychiatrique :

Fou ? Encore faudrait-il définir la signification du terme.

En ce qui concerne N. Sarkozy, les choses semblent relativement claire pour le thérapeute que je suis.

Il présente les principales caractéristiques d’une névrose paranoïaque: très grande susceptibilité, ego surdéveloppé de façon pathologique, très grande méfiance envers autrui, jugement altéré, etc. La névrose peut se traiter par des séances de psychothérapie: analyse ou autres. Il est assez symptomatique que N. Sarkozy refuse tout débat avec ses concurrents, attaqué sur ses points psychologiquement faibles (ego, susceptibilité,etc), il pourrait craquer et montrer alors sa vraie personnalité. Je le crois assez intelligent pour s’en rendre compte. Cela dit, une névrose est un mal relativement bénin, qui n’a comme effet qu’un caractère assez désagréable pour l’entourage.

La psychose, en l’occurrence la paranoïa déclarée, c’est toute autre chose, c’est ce que le commun des mortels appelle la folie. C’est une maladie mentale grave, nécessitant, le plus souvent une hospitalisation ou, pour le moins, un traitement médicamenteux sérieux. Le tout doublé d’une approche psychothérapie classique.

Dans le cas de N. Sarkozy, nous n’en sommes qu’à une phase de névrose. Malheureusement, sous l’effet d’une brusque décompensation, un névrosé, qui est parvenu à un certain équilibre grâce à des béquilles psychiques, peut brutalement passer à la psychose, par exemple sous l’effet du stress. Peut-on prendre le risque de confier le bouton des armes nucléaires à un tel sujet ?

[…]

L’article concluait alors :

Oui, décidément, non seulement cet homme représente pour la France un danger de régression économique et social, mais également une menace sur les valeurs de la République et sur le rang international que la France se doit de tenir, non pas tant pour ce rang en lui-même, mais plutôt pour le rôle qu’il s’agit pour la France de jouer en Europe, et avec l’Europe, dans le Monde. Les enjeux planétaires sont considérables. Il est à craindre que l’ego surdimensionné et paranoïde de Nicolas Sarkozy puisse à l’occasion se révéler catastrophique.

Ainsi, moins d’un an plus tard, s’il ne s’agit toujours pas de beugler Sarko-Facho – approche bovine qui fut en réalité très minoritaire -, chaque jour semble devoir confirmer les craintes qui furent alors énoncées. Chaque jour, ou peu s’en faut, on comprend qu’au-delà de la seule dimension politique du sarkozisme, il y a un problème avec l’homme lui-même, avec son état psychologique qui justifie bien des inquiétudes quant à sa capacité à assumer le rôle et la tâche qui désormais lui incombent – mais s’en est-il seulement rendu compte ?

Cet homme ne supporte pas qu’on ne l’aime pas. Un homme refuse de lui serrer la main, il lui donne du « pauvre con ». Que se passera-t-il lorsque le peuple descendra massivement dans la rue pour dire « Ça suffit ! Casse-toi ! » ? Face à la rue et au désamour des français et à leur colère, saura-t-il réagir en homme censé et se comporter en démocrate ? Parviendra-t-il à conserver en situation de crise le sang-froid nécessaire ?

Et si une vague d’attentats terroristes venait à frapper notre pays ?

Le moins qu’on puisse dire est qu’on peut nourrir un sérieux doute.

Devant l’énormité de ce doute et des conséquences qu’il implique, le moins qu’on puisse faire est alors de dire ce doute.

Certains continueront de dire « diabolisation », « dramatisation » ou « manipulation ». Pour ce qui me concerne, je dis « lucidité » et « vigilance citoyenne », quitte même à passer pour un « pauvre con ».

La folie de Nicolas Sarkozy
© PLACIDE – Reproduction interdite sans autorisation de l’auteur

On parle de : La folie de Nicolas Sarkozy

Fév 242008
 

« Casse-toi, pauvre con ! »

Ce samedi, en visite au salon de l’agriculture, Nicolas Sarkozy s’est cru autorisé à donner du « casse-toi » et du « pauvre con ! » à un de ces français dont il est censé être le président…

On parle de : Requiem pour un con

Un petit bonus ? Vous vous souvenez quand Nicolas Sarkozy, pas encore petit président, expliquait à Ségolène Royal que « pour être président de la République il faut être calme » ?

Ni calme ni digne !
Juste un tout petit président de la République malade de l’ego.
Qui fait honte à la France et aux français.

Casse-toi, casse-toi pauvre con !

Fév 232008
 

Casse-toi, pauvre con !
© La République des Fourmis par SaT – Reproduction interdite sans autorisation de l’auteur

Il n’est plus garant de la Constitution

… et non plus de lui-même

Nicolas Sarkozy a prôné vendredi un renforcement de l’instruction « civique et morale à l’école« , passant par la réhabilitation du drapeau tricolore, de la figure de Marianne et de l’hymne national.« Dans le monde d’aujourd’hui comme dans celui d’hier, l’affirmation des valeurs morales, l’énonciation de règles de comportements applicables à tous sont une absolue nécessité« , a déclaré le président de la République. »Cette instruction civique et morale prévoit notamment l’apprentissage des règles de politesse, la connaissance et le respect des valeurs et emblèmes de la République française« , a ajouté le chef de l’Etat.

Le lendemain, au salon de l’agriculture, pleinement conscient de l’exemplarité que son statut lui impose, le président est passé aux travaux pratiques :

Décidément, c’est un tout petit président que nous avons. A se demander s’il nous faudra vraiment le garder aussi longtemps que prévu par la Constitution… dont lui-même a décidé qu’on pouvait peut-être la contourner.

Car cet homme a tellement en horreur l’idée d’un contre-pouvoir que lorsque le Conseil Constitutionnel rend une décision qui entrave ses projets, ça le met en rogne… tant et si bien qu’il se croit autorisé à chercher le moyen de la contourner, c’est-à-dire de passer outre la Constitution elle-même, socle républicain s’il en est. C’est tellement énorme, à ce point effarant et imbécile qu’on ne sait que dire…

… sinon peut-être inviter à un peu de lecture, suggérer d’aller gratter en-dessous de ces quelques images d’un chef d’état bas de gamme qui se permet d’insulter un de ces français dont il est censé être le président. Car le pire en réalité est en-dessous, qui se cache derrière cette honteuse mascarade, dans ce qu’il fait ou est disposé à faire plutôt qu’en ce qu’il dit.

A propos de cette loi relative à la « rétention de sureté », on lira utilement Rétention de sûreté : Sarkozy déterminé sur le site de France 3.

Où l’on apprendra notamment que Robert Badinter fustige « un tournant très grave » et « une période sombre pour notre justice« . Un Robert Badinter qui dénonce l’aberration d’une loi qui permettra qu’une personne soit enfermée, « non plus pour les faits qu’elle a commis, mais pour ceux qu’elle pourrait commettre. On perd de vue, ajoute-t-il, l’un des fondements d’une société de liberté (…) Nous passons d’une justice de responsabilité à une justice de sûreté. C’est un tournant très grave de notre droit.« .

Où l’on comprendra aussi que l’on cherchât à faire pression sur les sages du Conseil Constitutionnel, au travers de la publication, quelques heures avant la décision, d’un document du ministère de la Justice recensant 32 criminels « dangereux » actuellement en prison, prochainement libérables, et censés être concernés par cette loi.

Où l’on sera en outre informé que l’UMP elle-même a admis s’inspirer pour cette loi d’un dispositif instauré en Allemagne en 1933, suite à une décision signée de la main du chancelier de l’époque, Adolf Hitler.

Sur les incessants coups de canif donné au contrat de la république laïque de France, on lira Sauver la laïcité, sur le site de l’observatoire du communautarisme : La laïcité est en péril. Ce n’est plus, cette fois, le résultat d’attaques détournées, mais une remise en cause violente et globale. Le président de la République, déjà inspirateur de la commission Machelon, mène l’offensive avec la plus grande brutalité. Nul procès d’intention de notre part, mais de simples constats….

On pourra lire aussi ce petit coup de gueule, où l’on invitait ici-même à répondre coup pour coup en allant comme au bon vieux temps, puisque donc le petit président nous y invitait, bouffer du curé.

On lira tout aussi utilement, dans le Courrier International, deux articles :

D’abord, L’homme qui ne savait pas être président, publié dans l’International Herald Tribune : Les Français sont trop sérieux ou trop convenables pour pardonner à Nicolas Sarkozy ses caprices. Ils ont le sentiment que leur pays en sort diminué…

Ensuite et surtout, Sarkozy, ce grand malade, publié dans El País : le président français “se vautre dans l’exhibitionnisme” et “rabaisse la République au niveau de Monaco”. Une charge violente contre un Sarkozy atteint d’une “incurable hypertrophie de l’ego, excusez du peu…

« Casse-toi, casse-toi pauvre con ! » : A observer l’évolution tragiquement monotone de sa côte de popularité, c’est en effet le message qu’une plus en plus grande majorité de français semble vouloir adresser à leur tout petit président. Considérant la dangerosité de l’homme pour nos institutions républicaines et sa manifeste instabilité psychologique, viendra bientôt le temps pour les français d’envisager sa destitution de sûreté.

Sarkozy dégringole dans les sondages

permalien de l’article : Casse-toi, casse-toi pauvre con !

Fév 142008
 

Du mensonge christique et de la tragique illusion de Dieu

– article repris in extenso de avoodware

envie de bouffer du curéMercredi 13 janvier au dîner du CRIF auquel il était convié, en déclarant : »Le drame du XXème siècle, de ces millions d’êtres projetés dans la guerre, la famine, la séparation, la déportation et la mort, n’est pas né d’un excès de l’idée de Dieu, mais de sa redoutable absence« , Nicolas Sarkozy, décidément tout petit président de la république laïque de France, a franchi les limites de l’acceptable.

Une telle déclaration publique, officielle, est une agression insupportable contre les convictions de tous les athées, ou du moins contre mes convictions philosophiques personnelles – et je vais éviter ici de sombrer d’ores et déjà dans un pseudo communautarisme des sans-dieu.

Disons-le donc tout net, je vis cette dernière éructation présidentielle comme une provocation de trop et une déclaration de guerre, comme un appel à déterrer des armes qui furent enterrées avec le calumet de la paix de la laïcité.

C’est pourquoi je m’autorise à proclamer ici publiquement que le grand drame de l’Histoire des hommes depuis vingt siècles, d’obscurantisme en oppression, de massacre en génocide, de guerre en croisade, de colonisation en esclavagisme, est le fruit du mensonge christique dont le poison est la tragique illusion de Dieu.

Et je me souviens soudain, qu’à la basilique Saint-Jean de Latran à Rome, le 20 décembre dernier, ce même Sarkozy, étriqué et vulgaire avait déclaré que « dans la transmission et dans l’apprentissage de la différence entre le bien et le mal, l’instituteur ne pourra jamais remplacer le curé ou le pasteur« . Aussi, puisque la guerre est ouverte, j’affirme en retour que les petits enfants deviendraient moins facilement de grands cons si on leur évitait d’avaler toutes les conneries que débitent les curés.

Le 27 septembre 1946, un certain Gilles Colin écrivait dans le Monde Libertaire : « Soit dit en passant, les zélateurs de la religion catholique sont bien obligés d’imputer à leur fétiche tout puissant, Jésus-Christ, la conception et la réalisation des sanguinaires mise en scène que sont les guerres mondiales. Obligés de lui reconnaître une intervention personnelle dans les catastrophes ferroviaires et autres fariboles qui ne constituent pour lui que les plus inoffensifs et dilettantiques passe-temps.« . Gilles Colin était alors le pseudonyme d’un certain Georges Brassens, lequel écrivit également ces quelques vers :

Le clergé vit au détriment

Du peuple qu’il vole et qu’il gruge

Et que finalement

Il juge.


(Georges Brassens / 1921-1981 / Opinion)

Mais puisque je donne dans la citation, je vous livre également celle-ci qui me plait beaucoup :

« On sent, je crois, qu’avoir de la religion, pour un enfant, et même pour un homme, c’est suivre celle où il est né. Quelquefois on en ôte ; rarement on y ajoute ; la foi dogmatique est un fruit de l’éducation. Outre ce principe commun qui m’attachait au culte de mes pères, j’avais l’aversion particulière à notre ville pour le catholicisme, qu’on nous donnait pour une affreuse idolâtrie, et dont on nous peignait le clergé sous les plus noires couleurs. Ce sentiment allait si loin chez moi, qu’au commencement je n’entrevoyais jamais le dedans d’une église, je ne rencontrais jamais un prêtre en surplis, je n’entendais jamais la sonnette d’une procession sans un frémissement de terreur et d’effroi, qui me quitta bientôt dans les villes, mais qui souvent m’a repris dans les paroisses de campagne, plus semblables à celles où je l’avais d’abord éprouvé. Il est vrai que cette impression était singulièrement contrastée par le souvenir des caresses que les curés des environs de Genève font volontiers aux enfants de la ville. »

(Jean-Jacques Rousseau / 1712-1778 / Les confessions / posthume, 1782)

Mais surtout, pour en revenir à notre petit président qui vomit du Guaino comme un enfant fait sa gastro, parlant d’un « monde sans Dieu, que le nazisme et le communisme ont cherché à bâtir« , il semble important de rappeler le rôle plus que trouble et souvent actif qu’ont joué les églises catholiques d’Europe en général, et le Vatican en particulier, aux côtés des nazis allemands, comme d’ailleurs des facistes italiens ou espagnols.

Rappelons par exemple que le pape Pie XII n’a, durant la Seconde Guerre mondiale, jamais condamné la persécution des juifs par les nazis. Et évoquons qu’il n’y a pas si longtemps le directeur israélien du centre Wiesenthal de recherches sur le nazisme a été contraint d’exprimer son regret que le Vatican ne reconnaisse pas que « l’antisémitisme chrétien a conduit à la Shoah« . C’était après que dans un texte intitulé « Souvenons-nous : une réflexion sur la Shoah », publié le 18 mars 1998, le Vatican a cherché à nier un lien de cause à effet entre l’antijudaïsme historique des chrétiens et l’antisémitisme des nazis, le Vatican se contentant seulement de déplorer que des chrétiens n’aient pas apporté, à ceux qu’on persécutait, toute l’aide qu’on était en droit d’attendre d’eux, exprimant néanmoins ses « regrets » pour « la méfiance et l’hostilité » dont les juifs ont été victimes de la part des chrétiens et demande pardon « pour les fautes » de ses croyants. C’est dire si le Vatican lui-même va moins loin dans le révisionnisme historique que Nicolas Sarkozy.

Ainsi donc l’Europe aurait des racines chrétiennes, mais pas nos deux guerres mondiales et pas non plus la Shoah. Je crois qu’on voit en cet homme à la pensée étriquée l’exemple même des ravages de la catéchèse sur les enfants de France. Il devient urgent de les en préserver, de les libérer du catéchisme qui les pervertit, urgent qu’à la mission évangélique du christianisme s’oppose la volonté libératrice de la laïcité.

Mais terminons par Voltaire qui disait : « La religion existe depuis que le premier hypocrite a rencontré le premier imbécile ! »

permalien de l’article : Du mensonge christique et de la tragique illusion de Dieu