Mar 282013
 

Fiche Technique BFC  Productions, Françoise Castro Diffuseur France3 Acteurs: Robinson Stevenin, Pascale Arbillot, Samuela Tin, Antoine Chappey, Claire Simba, Oumar Diaw, Ibrahima M’Baye, Pascal Elso, Barbara Grow Scénario: Sophie Deschamps, Olivier Langlois  Musique: Eric Neveux  Directeur de la photo: Jean Max Bernard  Chef Décorateur: Pascal Chaton, Pica  Costume: Corinne Leflem, Radija Sow  Son: Francis Baldos  Montage: Aurique Delannoy  Casting: Coralie Amedeo, Abdoulaye Diakaté.

Les Pirogues des Hautes Terres (métaphore africaine pour signifier le train) est un film écrit pour la télévision relatant la première grande grève de l’AOF en 1947. 25 000 cheminots ont débrayé durant 5 mois en Afrique de l’Ouest, réclamant l’égalité de traitement entre cheminots noirs et cheminots blancs. Ce mouvement marquera le tout début de la fin de l’histoire coloniale en Afrique de l’Ouest française et fera émerger des leaders issus du peuple qui compteront, 13 ans plus tard, quand il s’agira cette fois d’accéder à l’indépendance.

J’ai eu la chance d’assister à la projection en avant-première de ce film, un petit bijou qui sera diffusé samedi 6 avril sur France 3, en deuxième partie de soirée (parce qu’une télévision publique audacieuse n’est pas encore tout à fait d’actualité) et que je vous encourage fortement à voir.

C’est un film historique anti colonialiste, mais pas seulement. C’est également, et sans doute d’abord, l’histoire d’un mouvement social de grande ampleur particulièrement méconnu en France, un mouvement social qui ne deviendra qu’ensuite, par nécessité, sous le coup de l’évidence, une revendication politique, celle de la libération d’un peuple du joug colonial français.

Et c’est davantage que cela encore. C’est une histoire humaine, une histoire d’hommes et de femmes, noirs ou blancs, patrons ou employés, celle de leurs destins croisés, partagés, parfois brisés. Une Histoire, des histoires. Elles survinrent à Thiès, au Sénégal, et partout en Afrique de l’Ouest. Le lieu ne compte pas, c’est le moment, quand un système arrive à bout de souffle, quand une communauté entre en recomposition parce que ce qui l’unissait se désagrège, des liens usés par la tradition et par l’oppression, et qui se brisent. Il s’agit de la marche en avant du progrès et des réactions qu’elle provoque et qui sont comme les crissements des freins contre les rails du train.

Olivier Langlois, le réalisateur d’Adouna, dit avoir réalisé ce film comme un film épique, façon western politique anticolonial. Tous les éléments sont là, en effet, la violence, la poussière, la locomotive, les femmes, les méchants et la prise de conscience des hommes qui essaient de se libérer de leurs chaînes. Les coups de feu qui claquent aussi. Et puis la musique qui accompagne et souligne.

Mais peut-être surtout, pas tout à fait paradoxalement, il y a la tendresse et l’humour avec laquelle la caméra d’Olivier Langlois peint ses personnages, leur tragique et criante humanité. Parce que c’est sans doute cela d’abord, un western, des personnages entiers, à la limite de la caricature, tant chacun se trouve comme enfermé dans le rôle qu’il doit tenir dans le drame qui se joue et qui le dépasse.

C’est l’histoire d’une grève en Afrique de l’Ouest, et c’est l’histoire de toutes les grèves, quand les opprimés font corps et entrent en résistance avec l’oppresseur, quand l’oppresseur prend conscience que le rapport de force est susceptible de s’inverser et que son pouvoir vacille. C’est l’histoire des hommes et des femmes qui firent et subirent ce morceau d’Histoire. En 1947, à Thiès, au Sénégal, dans ce qui était alors l’AOF. Toujours et partout.

Enfin, le tournage du film fut lui-même un morceau de cette histoire, sa prolongation, peut-être son épilogue. Il s’est entièrement déroulé à Thiés même, la ville du nœud ferroviaire du Sénégal, et les figurants du film sont pour la plus part fils ou petits fils de cheminots, les fils et petits fils des grévistes de la grande grève de 47. Ce qui contribue sans aucun doute à la charge émotive qui se dégage de ce film d’une grande singularité.

 Cochez donc la date dès maintenant dans votre agenda : Samedi 6 avril, un bon film passe à la télévision. C’est dans huit jours, ne le manquez pas.

photo du film - Les Pirogues des Hautes Terres

Bande annonce