Et hope, Obama !
C'est donc fait. Barack Obama sera le 44ème président des Etats-Unis d'Amérique, et le premier à ne pas être blanc. Et le moins qu'on puisse dire est qu'il soulève derrière lui un immense panache d'espoir, non seulement en son pays, mais ailleurs dans le Monde.

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Pourtant, être noir ne suffit pas. Certes, il n'est en rien négligeable que, historiquement dominé par les blancs, la plus grande démocratie du monde par sa population élise un homme noir. Bien au contraire, ce fait est en lui-même un formidable espoir, un signe que de l'homme peut advenir, à l'occasion, autre chose que le pire. Mais cela ne saurait suffire : Barack Obama est avant tout un homme politique et sa mission est désormais et avant tout d'ordre politique.
Or être noir ne constitue pas un projet politique. Or, être noir ne fait pas une politique économique et sociale. Or, Barack Obama a pris beaucoup de précautions à faire une campagne au centre, sur un projet politique qui à beaucoup d'égards se résume au thème du changement - "Change" - accompagné du slogan "Yes, we can !". On peut d'ailleurs noter avec quelque méfiance qu'en France, Nicolas Sarkozy s'est fait élire sur le thème similaire de la rupture, accompagné d'un "Tout est possible" tout aussi semblable. On voit ce qu'il en a été...
Si Barack Obama a très vraisemblablement une envergure sans commune mesure avec celle de notre tout petit Sarkozy, il n'en reste pas moins qu'il faut craindre que la déception soit à la mesure du formidable espoir que soulève son élection. Il sera un président américain, probablement meilleur que son prédecesseur, probablement plus social, probablement moins enclin à tout miser sur l'efficacité économique de la main invisible, probablement moins cowboy bas-du front sur la scène internationale, et c'est déjà beaucoup. Mais juste et pas davantage qu'un président américain.
Si espoir il faut avoir - et l'espoir est en effet impératif à l'Homme - il est « tout simplement qu’à force de faire campagne sur le thème du changement, le désir qu’il advienne vraiment va peut-être persister et croître suffisamment pour qu’il devienne un jour réalité, du propre fait des gens eux-mêmes, où qu’ils se trouvent et quelle que soit l’alternative voulue. » C'est un immense espoir et qui a l'avantage d'être raisonnablement crédible. Il est formulé en conclusion d'un article particulièrement éclairant que je vous invite à aller lire, écrit par Yannis Youlountas et intitulé Pourquoi la victoire d’Obama ne changera rien - et dont j'aime aussi beaucoup le sous-titre : Se réjouir sans s’illusionner.
Se réjouir sans s’illusionner. Oui, c'est exactement ça. Se réjouir parce que l'élection de Barck Obama va dans le bon sens, ne pas s'illusionner parce qu'on y va doucement... Et il y a en cette élection d'un nouveau président américain d'avantage de menus espoirs qu'une grande espérance - rappelons ici que, selon la doctrine marxiste, la seule espérance réalisable serait la révolution des ouvriers contre l'ordre mercantile établi.
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Où l'on parle de : Et hope, Obama !
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François Fillon en guerre contre le monde musulman
Le 1er septembre a débuté partout dans le monde le jeûne de ramadan, neuvième mois du calendrier musulman au cours duquel le Coran a été prodigué comme guide pour les gens, et preuves claires de la bonne direction et du discernement — Le Coran (chapitre 2 Al-Baqarah, verset 185).
Ce même jour, François Fillon était justement l'invité d'Europe 1. Interrogé par Jean-Pierre Elkkabach sur le conflit en Afghanistan et la pérennité de l'engagement militaire français sur ce terrain, le Premier ministre a en l'occurrence dramatiquement perdu tout discernement en faisant la réponse imbécile suivante : "Le conflit va durer, parce que les causes de ce conflit sont très profondes. C’est l’opposition entre le monde musulman et une grande partie du reste de la planète, c’est le conflit israélo-palestinien, c’est les déséquilibres économiques et sociaux qui règnent dans le monde."
Une rhétorique digne des partisans du choc des civilisations. Un amalgame proprement scandaleux entre les musulmans et les terroristes d'Al Qaïda, dont les talibans d'Afghanistan seraient aujourd'hui la branche la plus active. Pis, en quelques mots, le chef du gouvernement parvient à appliquer une grille de lecture religieuse au conflit israélo-palestinien et rapproche ce conflit, pour d'obscures raisons, de la guerre en Afghanistan. Comme si les situations à Kaboul et à Jérusalem étaient intimement liées en raison de la simple présence de musulmans dans ces régions.
Ce sont en particulier 5 millions de Francais musulmans qui pourraient légitimement s'estimer outragés d'être ainsi stigmatisés par leur propre Premier ministre qui les assimilent donc à des "opposants" à cette "grande partie du reste de la planète"... dont bien entendu fait partie la France, pays dont ils sont pourtant citoyens à part entière.
Quand on se souvient que Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur depuis des années et candidat à la présidence de la République, se révéla incapable de dire si les dirigeants d'Al Qaïda étaient sunnites ou bien chiites, on se dit qu'une dangereuse incompétence préside et gouverne la France. Cela fait frémir quand ce sont précisément ceux-là qui décident en particulier, et de préférence sans même consulter le Parlement, d'engager plus fortement les forces française dans le bourbier militaire afghan.
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Rachida Datie est enceinte, José María Aznar dément être le père
JO de Pékin : déjà une médaille en Or pour la France
Cette XXIXe édition des Jeux Olympiques, qui se déroulent donc à Pékin, commencent on ne peut mieux pour la délégation française avec cette médaille d'or que vient de décrocher Nicolas Sarkozy dans la discipline reine de la Realpolitik.
Cette médaille, Nicolas Sarkozy l'a obtenue au terme d'un parcours sans faute clos par la figure libre dite du baissage de culotte / admirez mon faux-cul qui a enthousiasmé le public et recueilli tous les suffrages du jury. De l'avis des spécialistes, jamais jusqu'alors cette figure n'avait été réalisée avec une telle audace et une telle perfection. "Avec Nicolas Sarkozy, le cynisme politique est au-delà du sport et devient un art", a déclaré Hu Jintao, le président chinois, spécialiste mondialement reconnu de la discipline.
On pourrait se contenter de narrer dans le détail le baissage de culotte / admirez mon faux-cul réalisé par Nicolas Sarkozy, ce grand écart admirable entre sa venue à Pékin pour la cérémonie d'ouverture des Jeux Olympiques et la rencontre qui ne se fera pas avec le Dalai Lama tibétain lors de sa venue à Paris la semaine suivante. Ce serait oublier la longue préparation qui a précédé cette figure audacieuse et qui a permis à Nicolas Sarkozy d'éliminer un à un tous ses adversaires.
Car en déclarant le 13 novembre 2007 à Strasbourg, en séance solennelle devant le Parlement européen : "Dans la Démocratie européenne, j’ajoute que tous ceux qui ont fait l’expérience de renoncer à la défense des Droits de l’Homme au bénéfice de contrats, n’ont pas eu les contrats, et ont perdu sur le terrain des valeurs", Nicolas Sarkozy a permis que son baissage de culotte / admirez mon faux-cul se transforme en réalité en un magnifique double grand écart piqué dit du Ce que je dis / Ce que je fais.
Mais ce n'est pas tout. Les connaisseurs de la discipline savent que l'ingrédient essentiel à la réalisation d'une Realpolitik de haut niveau est le cynisme. C'est bien cette dimension qu'atteint Nicolas Sarkozy avec cette autre déclaration qu'il fit il y a quelques semaines : "Ce n’est pas à la Chine de fixer mon agenda, ni de dicter mes rendez-vous". Ce fut pourtant la Chine qui fixa son agenda - sa venu à Pékin pour l'ouverture de JO - et dicta ses rendez-vous - celui qu'il n'aura pas avec le Dalai Lama.
Notons qu'avant donc ce splendide final du baissage de culotte / admirez mon faux-cul, Nicolas Sarkozy s'était livré avec un brio qui lui semble presque naturel à quelques figures de cirage de pompes, dont nous ne résistons pas à vous relater les plus réussies :
"Si l'organisation des JO était un sport, je suis sûr que vous seriez d'accord avec moi pour qu'on attribue à la Chine la médaille d'or" ;
"Je me réjouis vivement à la perspective de me rendre à Pékin. Ces olympiades promettent d'être une grande fête sportive et une réussite spectaculaire" ;
"L'organisation des Jeux à Pékin consacre, de manière solennelle, la reconnaissance de ce qu'est la Chine du 21e siècle : une puissance moderne, d'envergure mondiale; un des géants du monde d'aujourd'hui".
Enfin, il parvint à éviter soigneusement les écueils des prisonniers politiques chinois dont il ne livrera pas aux autorités chinoises la liste promises et de la situation du Tibet dont il ne parlera évidemment pas.
Le temps est loin où la Realpolitik était un sport où les allemands raflaient toutes les médailles - rappelons l'origine allemande du mot qui fut appliqué pour la première fois à Otto von Bismarck qui suivait la trace de Klemens von Metternich dans la recherche diplomatique d'un équilibre pacifique entre empires européens. En dépit de ce glorieux passé, Angela Merkel, la représentante allemande, a fait une prestation catastrophique en déclarant qu'elle recevrait le Dalai Lama et ne se rendrait pas à la cérémonie d'ouverture des JO. Ridicule ! Inacceptable à ce niveau de la compétition !
Quant aux américains, autres maîtres mondiaux de la discipline, ils s'en retourneront cette fois-ci bredouilles. George W. Bush, certainement aujourd'hui trop vieux pour se maintenir au sommet de l'élite mondiale, a profondément déçu en enchaînant des figures dépourvues d'audace et de panache sur le thème d'un "je me rendrai à la cérémonie d'ouverture parce que les JO c'est pas de la politique c'est du sport" sans imagination, presque pitoyable en regard du cynisme terrifiant de notre médaillé olympique français.
"Mais quel est donc votre secret ?!", a demandé sans parvenir à dissimuler son admiration un journaliste de Moscou à Nicolas Sarkozy. "Je me suis entraîné avec acharnement", a répondu ce dernier avec un petit sourire mi-énigmatique mi-carnassier. Il faut en effet se souvenir qu'en l'espace d'un an, Nicolas Sarkozy a frayé avec le despote russe Vladimir Poutine dont il fut le seul à féliciter l'élection, le terroriste lybien Mouammar Khadafi qui planta sa tente à Paris pour Noël et le dictateur syrien Bachar el Assad qui fut convié aux cérémonies officielles du 14 juillet.
Ne passons pas sous silence que de telles performances suscitent jalousies et suspicions. D'aucuns se permettent déjà de parler de dopage. Gageons que notre champion saura faire taire ces méchantes rumeurs, au besoin en muselant la presse. A la chinoise, pourrait-on dire...
Source : JO de Pékin : déjà une médaille en Or pour la France
Lire aussi : Sarkozy, Pékin et le dalaï lama : une Bérézina diplomatique
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Billet précédent : Le moral des français : plus ça va et plus c'est pire !
Sarkozy et la guerre perdue en Afghanistan
Cette interview de Emmanuel Todd par Marianne2 est une perle : l'homme est intelligent, la pensée est forte, le ton est cinglant et les mots sont justes. Non seulement c'est un régal à lire, mais on en ressort enrichi et convaincu que, finalement, tant qu'il y aura de l'intelligence, il restera de l'espoir. Bref, c'est à une lecture riche et saine que je vous convie. C'est court et ça en vaut la peine...
«Si la France devient le caniche des USA, elle disparaîtra» - Emmanuel Todd
Selon Emmanuel Todd, le renforcement des troupes françaises en Afghanistan est une erreur diplomatique et stratégique, et dessine les contours d'une idéologie extrême-droitière à l'échelle mondiale.
Au Sommet de l'Otan, mercredi 2 avril, George Bush s'est dit «très heureux» du soutien de la France en Afghanistan. Mais la veille, à l'Assemblée, la première grande décision stratégique de Nicolas Sarkozy de renforcer les contingents français engagés dans le conflit afghan mettait le feu aux poudres. Les socialistes, de François Hollande à Lionel Jospin, d'Hubert Vérine à Ségolène Royal, s'opposent unanimement à une politique d'alignement sur les Etats-Unis. Ils mettent en avant l'enlisement du conflit afghan, son coût humain et dénoncent le «tournant atlantiste» de la politique française. Pour l'historien et démographe Emmanuel Todd, les dangers de cette politique sont encore plus graves. L'auteur de Après l'empire juge que cette partie est perdue d'avance et qu'elle participe d'une idéologie extrême-droitière naissante.

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Marianne2.fr : Le renforcement des troupes en Afghanistan vous paraît-il justifié ?
Emmanuel Todd : Je peux tout imaginer de Nicolas Sarkozy, même qu'il ne sache pas où est l'Afghanistan. Mais je ne peux pas imaginer que les gens qui l'entourent ignorent ce que tout le monde anglo-saxon sait, à savoir que cette guerre est perdue.
Pour vous, cette guerre est sans espoir ?
E.Todd : L'organisation sociale des Pachtounes est faite pour la guerre, tout comme celle des clans somaliens : la guerre est l'état normal de ces sociétés, ce n'est donc pas un problème dans la durée. A partir du moment où les belligérants sont alimentés par des fournitures d'armes régulières venant de l'extérieur, il est évident que ces système sociaux vont venir à bout de quelques milliers d'hommes venus de loin et difficilement approvisionnés. On peut se demander, à la limite, si ça va se terminer par un Dien-Bien-Phû ou par un retrait paisible.
Du point de vue du gouvernement, il semble pourtant qu'il y ait des enjeux à ce conflit…
E.Todd : Pourquoi ceux qui nous gouvernent veulent-ils participer à une guerre perdue ? Voilà la vraie question. Et là, comme dans les débats sur la réintégration pleine et entière de la France à l'Otan, on touche au symbolique. Cette manœuvre a pour objectif de réaffirmer un lien avec l'Amérique. Je n'appellerai pas ça du néo-atlantisme. L'atlantisme était le lien de l'Europe occidentale avec les Etats-Unis à une époque où ils portaient les valeurs démocratiques face au totalitarisme soviétique. Ce n'était pas du goût des gaullistes, mais dans le contexte, cela pouvait se justifier. Aujourd'hui, l'Amérique est le pays du fric, du néo-libéralisme et des inégalités. Et ce qui se profile derrière cette nouvelle association, c'est de l'occidentalisme. C'est un lien fondé sur une nouvelle idéologie, une idéologie qui se construit dans le conflit avec l'islamisme.
Mais la France n'a-t-elle pas intérêt, pour des raisons de politique «réaliste», à s'associer avec les Etats-Unis plutôt que de rester repliée sur elle-même ?
E.Todd : La France n'a pas les moyens de s'engager en Afghanistan, c'est déjà un objectif démesuré pour les Etats-Unis. La France est une puissance moyenne et l'Amérique une puissance déclinante. Paris existait terriblement à l'époque de Villepin : après son discours à l'ONU contre l'engagement de la France en Irak, nous rayonnions! Mais sous Nicolas Sarkozy, il arrive à la France ce qui est advenu de l'Angleterre sous Tony Blair : si l'on devient le caniche des Etats-Unis, on disparaît. Si on s'aligne, si on perd son indépendance, on disparaît. De Gaulle l'avait compris : la France n'existe à l'échelle mondiale, ne peut justifier son siège au conseil de sécurité de l'Onu et sa possession de l'arme nucléaire, que lorsqu'elle représente un acteur autonome. Le monde n'a rien à faire de la France de Sarkozy.
La lutte contre le terrorisme légitime aussi l'engagement du gouvernement dans ce conflit.
E.Todd : Les occidentalistes se pensent en situation de légitime défense. Le terrorisme existe, il devrait être contré par le contre-espionnage et par des forces policières, mais sûrement pas par des guerres à l'étranger. La première attaque contre l'Afghanistan était légitime, il s'agissait de déloger Ben Laden ; d'ailleurs, les Russes nous y avaient aidé. Mais l'irakisation de l'Afghanistan participe d'une agression du monde musulman par le monde occidental. L'occidentalisme est une doctrine d'extrême droite en émergence. La France va être du côté du mal : en exposant des troupes françaises et en participant aux bombardements de la population civile afghane. Et, grâce à Sarkozy, nous risquons même ce qu'ont subi la Grande-Bretagne et l'Espagne à la suite de la guerre en Irak.
Vous parlez des attentats de Londres et de Madrid qui ont eu lieu suite à l'engagement de nos voisins en Irak. Mais là, il ne s'agit que d'envoyer quelques centaines d'hommes dans un pays où la France a déjà des troupes…
E.Todd : Mais justement ! Rappeler leur faible nombre, comme le fait le gouvernement, c'est avouer qu'il s'agit bien d'une action symbolique ! Les quelques bateaux qu'on va mettre dans le golfe persique vont faire rire les Iraniens. Mais nous nous positionnons dans une construction idéologique, contre le monde musulman. Cette posture est d'ailleurs très cohérente avec le sarkozysme en politique intérieure.
Vous pensez que Nicolas Sarkozy est dans une logique de guerre avec le monde musulman ?
E.Todd : Ce qui a fait son succès dès le premier tour de l'élection présidentielle, c'est le ralliement d'une partie des électeurs du Front national. Il a pu avoir lieu à cause des émeutes en banlieues, qui ont été un facteur de traumatisme. Mais c'est Sarkozy, ministre de l'Intérieur, qui a provoqué cet évènement. Dans la logique du sarkozysme, il y a la combinaison d'une incapacité à affronter les vrais problèmes et à désigner des boucs émissaires. C'est classique : quand une société est en crise, elle a le choix entre résoudre ses problèmes économiques et ses pathologies sociales, ou créer des bouc-émissaires. Sarkozy recherche toujours un ennemi, il est dans l'agression. Cela s'observe même dans son comportement ordinaire avec les habitants de banlieue ou les marins pêcheurs.
En s'impliquant plus en Afghanistan, la France participe donc à déclencher un clash des civilisations?
E.Todd : L'analyse d'Huntington sur le clash des civilisations est fausse, mais un gouvernement peut essayer de la rendre vraie. Je pense que les gens qui nous gouvernent seront tenus pour responsables de ce qu'ils font. La guerre, c'est la pédagogie du mal. Les peuples en paix pensent sainement. On entre parfois en guerre pour de bonnes raisons, mais peu à peu, on glisse insensiblement dans la violence pour la violence. C'est ce qui aurait pu arriver en Espagne, si les Espagnols avaient mal réagi aux attentats : ils auraient pu s'enfoncer dans le conflit des civilisations. Je crois que cette stratégie conflictuelle va échouer aussi en France. La recherche de bouc-émissaires, l'émergence d'une idéologie islamophobe et hostile aux enfants d'immigrés… ce n'est pas dans la nature de la France. Au final, les Français préfèrent toujours décapiter les nobles que les étrangers.
Jeudi 03 Avril 2008
Anna Borrel

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On parle de : Sarkozy et la guerre perdue en Afghanistan
De la lâcheté et de l'esprit mercantile de Nicolas Sarkozy
"Sarkozy, jaloux de Poutine ?", par Garry Kasparov
Lu dans Le Monde du 17 janvier 2008
Nicolas Sarkozy avait promis qu'il serait le président du changement. Après son show médiatique du 8 janvier à Paris, il peut reprendre une formule de son cher ami George Bush et annoncer : "Mission accomplie." En un laps de temps remarquablement court, il a lui-même beaucoup changé en effet puisqu'il en est venu à s'exprimer comme Jacques Chirac. Voilà ! A moins que ce soit Gerhard Schröder que Nicolas Sarkozy cherche à imiter, ou encore Silvio Berlusconi. Il est bien possible qu'il essaie de les surpasser tous dans l'art de vendre la démocratie en échange d'accords commerciaux.
M. Sarkozy aimerait nous faire croire que c'est par courage et pragmatisme, et non par lâcheté et esprit mercantile, qu'il s'est autorisé à se distinguer de ses collègues de l'Union européenne en s'empressant de féliciter Vladimir Poutine après que le parti au pouvoir au Kremlin, Russie unie, eut revendiqué la victoire aux élections législatives du 2 décembre 2007. Le Parlement européen, l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et même le prudent département d'Etat américain ont sévèrement critiqué ces élections, marquées par la répression et la fraude massive. Mais cela n'a pas empêché le courageux M. Sarkozy de décrocher son téléphone pour féliciter M. Poutine d'avoir si efficacement détruit les institutions démocratiques et emprisonné les opposants, dont moi-même, qui manifestaient leur désaccord.
Le dégoût international qui s'est exprimé devant ces actes n'a pas empêché M. Sarkozy de justifier son attitude devant le monde entier. Au risque d'apparaître comme décidément dépourvu de moralité. Durant sa conférence de presse, il s'est livré à plusieurs déclarations proprement absurdes dans la bouche d'un homme censé être l'un des leaders du monde libre.
La première consiste à prétendre que son silence sur la question des droits de l'homme et de la démocratie est nécessaire pour monnayer l'aide potentielle de M. Poutine dans les crises internationales comme celles du Darfour et de l'Iran. Cela est à la fois éthiquement répugnant et fondé sur un fantasme. La Russie de Poutine n'a rien fait d'autre que susciter instabilité et conflit partout où elle exerce encore une influence en dehors de ses frontières. La Russie continue de fournir des matériaux nucléaires à l'Iran et de la technologie concernant les missiles à une Syrie qui appuie le terrorisme. Sommes-nous réellement censés croire que M. Sarkozy espère de l'aide de la part du régime de Poutine ?
La seconde justification du président français est que, quel que soit le degré de fraude qui a entaché les élections russes, M. Poutine mérite d'être félicité car il est "populaire". Devons-nous ainsi nous attendre à ce que, sur les factures de téléphone du palais de l'Elysée, apparaissent des appels à Loukachenko (le président biélorusse), à Mugabe (le président du Zimbabwe) et à d'autres autocrates ayant la haute main sur les médias et les élections dans leur pays ? Le parti de M. Poutine a réussi le tour de force de réunir dans certaines circonscriptions 99 % des voix, avec un taux de participation de près de 100 %, ce qui fait de lui un homme aussi populaire que Saddam Hussein - qui lui aussi organisait des élections - au sommet de sa gloire.
J'aimerais porter à la connaissance de M. Sarkozy quelques événements qui se sont produits ici, dans la Russie du populaire M. Poutine, pendant que le président français justifiait ses actes devant la presse le 8 janvier. Ce même jour, le site du Congrès civique panrusse recevait une lettre de la mère d'une jeune fille de 15 ans prénommée Nina. La famille vit à Pskov, à 50 km de la frontière de l'Union européenne englobant l'Estonie. Cette mère écrivait pour dire que, en octobre 2007, les directeurs de l'école de sa fille ont organisé des répétitions de manifestations de soutien à M. Poutine, répétitions obligatoires pour tous les élèves. Les enfants devaient scander "Ne nous quitte pas !", ou encore "Poutine, s'il te plaît, reste !" Nina a refusé de participer à ces répétitions, déclarant qu'elle ne s'intéressait pas à la politique. Les directeurs de l'école lui ont alors signifié qu'il n'y avait "pas de place à l'école pour les élèves apolitiques", avant de l'envoyer chez le psychiatre scolaire.
Dans la ville de Vladimir, une chaîne de télévision locale fait l'objet de poursuites judiciaires qui pourraient lui coûter son autorisation de diffusion. Le seul délit de cette chaîne a été de faire un jeu de mots sur "Poutine" et de qualifier plusieurs des partisans du président de "fidèles poutinistes". A la demande d'un député de Russie unie, le procureur de la région a aussitôt engagé des poursuites pour "insulte à un représentant du pouvoir".
Toujours le 8 janvier nous est parvenue la nouvelle suivante de la région explosive du Caucase - et il ne s'agit pas de la Tchétchénie, dont l'opinion en général et le président français en particulier croient que c'est le seul endroit de la région à être en proie à des troubles. Le procureur de la capitale de l'Ingouchie a déposé plainte contre le groupe Voix de Beslan, qui réunit les mères des enfants tués dans l'attaque terroriste de l'école de Beslan (en Ossétie du Nord voisine), en septembre 2004.
Le groupe est accusé de terrorisme pour avoir publié le communiqué suivant : "Pas une seule attaque terroriste n'a jamais fait l'objet d'une enquête approfondie permettant d'en connaître les tenants et aboutissants. Les dizaines de crimes horribles perpétrés contre de paisibles citoyens de notre pays demeurent anonymes et impunis. Nous sommes coupables d'avoir élu un président qui résout ses problèmes avec des tanks, des lance-flammes et des gaz... Mais on ne peut nous accuser du soutien qu'apporte l'élite politique mondiale à un homme qui protège les criminels."
Ce communiqué a été publié il y a deux ans, et le groupe Voix de Beslan a depuis été dissous par les autorités d'Ossétie du Nord. Mais le bureau du procureur - d'une région voisine - tente à présent de l'inculper pour le crime impardonnable d'avoir dit la vérité. Remarquons que cela se déroule en Ingouchie, où la participation électorale en décembre 2007 a été officiellement supérieure à 98 %. Une enquête indépendante menée dans la région a pourtant récolté des signatures et des renseignements personnels montrant que 54 % des habitants déclarent ne pas être allés voter. M. Sarkozy a-t-il pensé à féliciter M. Poutine pour ses talents de prestidigitateur ?
Tous ces événements se sont déroulés en une seule journée dans la Russie de M. Poutine, et M. Sarkozy parle de popularité. Voilà ce que les "pragmatiques" comme lui encouragent lorsqu'ils n'opposent aucune résistance aux dictateurs. Peut-être M. Sarkozy connaît-il les noms de Litvinenko et de Politkovskaïa. Ces deux personnes ne partageaient pas son optimisme à l'égard du bilan de M. Poutine, mais elles ne sont plus en mesure de faire entendre leur opinion. J'aimerais également que M. Sarkozy connaisse le nom de Yuri Chervochkin. Le 22 novembre, lui-même et un ami, tous deux militants de la coalition L'Autre Russie, distribuaient des tracts dénonçant la mascarade électorale. Peu après, selon un témoin, Yuri fut violemment tabassé par deux hommes armés de battes de base-ball. Une heure avant son agression, il avait passé un coup de fil affolé à nos bureaux en disant qu'il était suivi par des agents de l'UBOP, l'unité spéciale de la police chargée de s'occuper des opposants politiques. Yuri est mort le 10 décembre, à 22 ans, après plusieurs semaines de coma.
Il n'est guère étonnant dans ces conditions que M. Sarkozy préfère attirer l'attention sur sa vie personnelle plutôt que de tenter de justifier l'injustifiable. Ce que je crains, c'est que, loin d'admirer ou de craindre M. Poutine, M. Sarkozy, en réalité, l'envie. Envie-t-il le contrôle de la presse qu'exerce M. Poutine, la répression de l'opposition à laquelle il se livre ou la richesse énergétique qui le protège de toute critique intérieure ou internationale ? Si c'est le cas, les démocrates français devraient encore plus redouter ses comportements que les démocrates russes.
permalien de l'article : De la lâcheté et de l'esprit mercantile de Nicolas Sarkozy
Et en effet, notre Petit Père des People tend à devenir moins populaire que l'actuel Petit Père de la grande Russie...

Sarkozy trébuche sur la scène internationale
Les bourdes et les bourrelets diplomatiques d'un tout petit président
L'inconvénient avec les affaires étrangères est qu'on ne peut pas dire n'importe quoi. C'est que sur cette scène là, contrairement à celle de la République Bananière de France, c'est qu'on ne peut contraindre l'Autre à se taire et à se prosterner. Il est là des bourrelets qui ne se dissimulent pas d'un simple coup de gomme technologique.
En France, le petit président peut prétendre avoir été invité pour des vacances hors de prix par des amis dans une villa luxueuse , Agnès Cromback et Mathilde Agostinelli, respectivement présidente du joaillier Tiffany-France et responsable de la communication de Prada-France (qui habille Cécilia Sarkozy), ils ne sont pas nombreux à insister sur le risque de conflit d'intérêts entre un président en charge des affaires publiques et des groupes d'intérêts privés. Il devrait pourtant être tout à fait possible d'avoir des amis qui ne vous inondent pas de "cadeaux" - ou alors une cravate pour Noël...
En France, la femme du petit président peut prendre une angine blanche pour une excuse diplomatique, ils seront peut nombreux à souligner l'irresponsabilité de la dame, laquelle était tout à fait rétablie le lendemain lorsqu'il s'est agi pour elle d'aller faire son shopping chic en short et en T-shirt dans les rues de Wolfeboro. Lire ici, par exemple.
En France, le petit président peut déclarer que sa femme n'a de compte à rendre à personne, ils ne sont pas nombreux à s'effarer qu'on puisse s'affranchir avec une telle arrogance de la Constitution, dire qu'être la femme du président, fut-il de si peu d'envergure, n'est pas un statut et n'affranchit pas des lois de la République.
En France, le petit président peut voir une de ses promesses phares invalidée par le conseil constitutionnel, ils ne sont pas nombreux à insister sur le fait que c'était plus que prévisible, tellement que son propre ministre du budget (Woerth. Nicolas Woerth, je crois) et sa ministre du logement (Boutin. Nicole Boutin, je crois) avaient été sermonné par le petit président pour avoir évoqué, dès le mois de mai, ce "petit problème d'anticonstitutionalité" de la promesse du candidat Sarkozy.
En France, le petit président peut formuler le projet d'enfermer les pédophiles au-delà du terme de sa condamnation, fixée par une décision de justice, ils ne sont pas nombreux à souligner l'aberration de tels propos, alors même que l'ensemble des acteurs du monde judiciaire et carcéral souligne le manque de moyens nécessaires à l'application des lois existantes, et qui se succèdent à un rythme tout aussi aberrant - celui des faits divers - sans jamais avoir la moindre chance de répondre efficacement aux problèmes de la récidive ou de l'absence de soins psychiatriques dans les établissements pénitentiaires.
En France, les médias se taisent quand il le faut, font des courbettes dégoulinantes à leur petit père des people, et se charge avec soumission de retoucher les paroles du petit président pour en gommer les bourrelets disgracieux. Mais donc, les bourrelets s'accumulent également sur la scène internationale :
Nicolas Sarkozy s'est invité au sommet européen des ministres de l'économie et des finances pour expliquer sa politique économique, largement suspectée de prendre des largesses avec l'objectif de réduction de la dette. Et voilà notre petit président qui se prend une remontée de bretelle par l'ensemble de nos partenaires européens. Lire ici, par exemple.
Nicolas Sarkozy est allé en Afrique... et il faut lire, par exemple, Le faux pas africain de Sarkozy, par Philippe Bernard, pour comprendre l'ampleur des dégâts provoqués par un discours donneur de leçons et paternaliste, qui a multiplié les clichés sur l'homme africain.
Le premier ministre de Nicolas Sarkozy (il s'appelle Fillon. Nicolas Fillon, je crois...) a prétendu sur TF1 que Rodriguez Zapatero, son homologue espagnol, lui avait confié, en juillet, qu'il regrettait la régularisation de 600 000 sans-papiers à laquelle son gouvernement avait procédé en 2005, et s'était engagé "à ne plus le refaire". Mais voilà, le démenti de Madrid ne s'est pas fait attendre : contrairement à ce qu'affirme François Fillon, Zapatero ne "regrette" pas "amèrement" le choix de la régularisation et ne regrette en aucune façon cette décision, qui était "nécessaire, commode et positive". Le premier ministre espagnol a expliqué que son gouvernement et lui même considèrent que "personne ne peut travailler dans l'illégalité", ajoutant qu'il "ne permettrait pas" que 600 000 personnes travaillent sans-papiers.
Le ministre des affaires étrangères de Nicolas Sarkozy (Kouchner. Nicolas Kouchner, je crois) s'est laissé allé à suggérer qu'il faudrait à l'Irak un autre premier ministre. Mais voilà, l'Irak qui est un pays souverain n'a pas souhaité laisser dire et il a fallu s'excuser... plutôt que de voir s'allonger encore la liste des pays qui aimeraient sans doute déjà - cela ne fait que 100 jours - suggérer à la France de changer de Président...
Enfin, le petit président Nicolas Sarkozy prononce un discours sur la politique étrangère de la France devant l'ensemble de nos ambassadeurs et l'on comprend, cette fois définitivement, qu'il entend rompre avec la vision universaliste et laïque du Monde, qui est une tradition diplomatique française qui a beaucoup de mérite, pour s'aligner sur la vision communautariste du "choc des civilisations" de l'administration américaine de son ami George Bush (Lire ici, par exemple). Ainsi, aussi, le discours de politique étrangère du président français aura fait la une de la presse libanaise, par exemple et, à lire le quotidien anglophone de Beyrouth The Daily Star (ici), on comprend que lorsque Nicolas Sarkozy se démarque de Washington, est souligné qu'il lui reste des progrès à faire pour comprendre la région et que pour atteindre ses objectifs dans cette région du monde, il lui faudra autre chose que des bonnes intentions. En voilà qui ont tout compris à Nicolas Sarkozy : les discours compassionnels, les bonnes intentions et l'art de communiquer ne font pas une politique efficace.

Ils ont un président à poignées.
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Sarkozy, G8, Poutine et vodka
Petit président pompette et grandeur de la France
Nicolas Sarkozy a mis ses pas dans les traces de Boris Eltsine : hallucinant, lamentable et honteux.
Ces images feront rire dans le monde entier, et plutôt dix fois qu'une au cours de bien des bêtisiers politiques dans les années à venir, mais les français n'auront pas ce privilège avant longtemps, ni d'en rire ni même de s'en offusquer, car vous pouvez être certains que les chaînes de télévision nationales jetteront un voile pudique et respectueux sur ces images - de même que les télévisions russes en leur temps se gardaient bien de diffuser les images d'un Boris Eltsine ayant trop forcé sur la boisson, lèse-majesté oblige.
Nota Bene : Certains n'ont pas hésité à prétendre que le petit père n'était simplement qu'essoufflé. A ceux-là rappelons que Nicolas sarkozy est un adepte du footing et du vélo - il a suffisamment mis en scène la chose pour que nous n'ayons pas à l'oublier à la première occasion. Quelques couloirs, voire un escalier, à franchir pour atteindre la salle de presse n'auraient pu le mettre dans cet état - à supposer même qu'il aurait décidé de les parcourir en trottinant (on a d'ailleurs du mal à imaginer un chef d'Etat courir vers les journalistes afin de leur éviter deux petites minutes d'attente supplémentaire). La video ne laisse d'ailleurs aucun doute : le petit président est bel et bien vitrifié.
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