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le blog de dedalus

"Réprimer plus, Partager moins" : MERCI... mais NON !






JE TE VOIS


République Française

Quand Sarkozy fait des petits



Gérard Huet, maire de LoudeacNicolas Sarkozy est président et jour après jour les français, mais aussi le monde entier, constatent qu'il y a quelque chose de pourri dans le royaume de France, ainsi que le résume Courrier International en parodiant très judicieusement Shakespeare - Hamlet, la tragédie du fils de son père...

En France, aujourd'hui, un président se permet de traiter un français de pauvre con, un président s'autorise à pistonner son fils, un président charcute la carte électorale et avec elle la démocratie, un président fait systématiquement le contraire de ce qu'il dit, un président se permet d'intenter un procès à un ancien premier ministre afin de régler ses comptes politiques, un président semblerait impliqué dans un scandale de rétro-commissions ayant conduit à l'attentat mortel de Karachi, un président protège un ministre ayant proféré publiquement des propos racistes, un président défend une politique où l'on expulse des réfugiés vers un pays où ils sont menacés et où la France fait la guerre...

En France, aujourd'hui, un petit président sans envergure s'imagine que tout lui est permis, ressemblant en cela à n'importe quel médiocre parvenu.

On peut se rassurer en se disant que cela finira bien par passer. Sauf qu'en attendant, un peu partout en France, d'autres petits despotes se lâchent et font du Sarkozy à leur petit niveau. Les esprits sont pollués, les cons sont décomplexés et, ici ou là, partout, les petits chefs plus que jamais s'en donnent à coeur joie.

A Loudeac - quelque part dans ce beau pays de France - un maire s'est ennivré à ce tonneau-là. Voyez, à la lecture de cet extrait de la lettre du Maire du mois d'octobre, ce que ça peut donner :



Mariage de complaisance : le mariage qui dérange

Alors que nous traversons une grave crise économique, comment aurais-je pu marier sans m'y opposer, deux étrangers d'origine marocaine, plus préoccupés de profiter de notre système de protection sociale que de convoler en justes noces ?

En refusant de les marier, j'ai voulu dénoncer un système qui fait la part belle à l'assistanat plutôt que de protéger ceux qui se lèvent tôt le matin, pour gagner leur vie en toute honnêteté ! Rappelons en effet, que le mariage de ces deux étrangers, leur donne la possibilité de toucher le Revenu de Solidarité Active, des Allocations logement et de bénéficier de la Couverture Maladie Universelle. Enfin, soyons certains qu'ils ne manqueront pas de demander la nationalité française !

Aujourd'hui les factures que nous recevons en mairie semblent me donner raison : impayé de cantine scolaire, impayé sur leur consommation d'eau... Les Restos du Coeur les voient chaque semaine et pourtant le mari a trouvé du travail sur la zone industrielle. Alors où va l'argent ? Car pour l'instant, c'est la mairie qui paye, donc nous chers contribuables !

Alors, à tous les bien pensants qui ont cru bon de s'indigner verbalement sans apporter de soutien matériel à ces étrangers, je réponds : trouvez-vous normal que l'on oblige les maires à marier des étrangers, dont l'un d'entre eux a falsifié des papiers d'identité, a été reconduit à la frontière, est revenu et ose demander le mariage alors qu'il est sous le coup d'un arrêté d'expulsion ?

Après avoir dénoncé cette absurdité du droit, je compte maintenant sur notre député Marc LE FUR pour déposer une proposition de loi limitant ces abus. En effet, tant que la justice de notre pays continuera à défendre l'indéfendable, les étrangers en situation irrégulière, pourront dormir tranquilles !

Gérard Huet, maire de Loudeac



C'est à n'en pas douter du Sarkozy pur jus - et le jus est rance. Ligne après ligne, c'est le même galimatias pré-vomi où, en guise d'argumentation, les points d'exclamation succèdent aux points d'interrogation et s'enchaînent les contre-vérités minables et les sous-entendus malsains.

Il est important de noter que ce "refus de marier" a été déclaré illégal par le juge des référés qui avait été saisi de la question. Ce mépris de la loi n'est pas non plus anodin et relève tout autant de cet état d'esprit putride qui a gagné la Sarkofrance.

On savait Nicolas Sarkozy en lui-même dangereux pour l'idée que nous nous faisons de notre République. Nous comprenons désormais qu'en sus il fait des petits. Gérard Huet, petit Sarkozy à Loudeac, n'est que l'un d'entre eux. D'autres partout prolifèrent en cette République agonisante.

A ceux-là aussi, il est important de s'opposer. Très fermement. Aussi je vous invite à prendre connaissance de la réaction collective à la « Lettre du Maire de Loudéac » et à y donner toute suite utile.



Où l'on parle de : Quand Sarkozy fait des petits






Les biens nés et les pauvres cons

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DEMISSION !!!



François Coppé et Brice Hortefeux devisent au milieu d'un groupe de militants UMP à propos de l'un d'entre eux qui semble avoir certaines origines du côté du Maghreb, c'est du moins ce que l'on croit devoir comprendre. Et puis d'un rire gras à un autre, le tout vire au poisseux dans la bouche du ministre de l'Intérieur, anciennement ministre de l'Immigration et de l'Identité Nationale :

« Il ne correspond pas du tout au prototype. C'est pas du tout ça. »

« Il en faut toujours un. Quand il y en a un, ça va. C'est quand il y en a beaucoup qu'il y a des problèmes. »

Si nous sommes un tant soit peu encore dans une République qui a le respect d'elle-même et de ses valeurs, cet inqualifiable dérapage verbal dans un racisme aussi ordinaire qu'insupportable de la part d'un des premiers personnages de l'Etat ne saurait être sanctionné autrement que par une pure et simple démission.





-click - Pétition pour la démission de Brice Hortefeux -click -



EDIT :

Les sceptiques et les mal-entendants pourront se référer au verbatim des propos échangés dans cette vidéo afin de vérifier qu'il n'y a aucun doute sur la nature xénophobe des propos tenus par Brice Hortefeux, en dépit des minables dénégations de ce dernier :

Un participant : "Ah ça, Amin, c'est l'intégration."

Brice Hortefeux : "Il est beaucoup plus grand que nous en plus" [à propos du jeune homme]

Un autre participant : "Lui, il parle arabe".

[ Rires de l'assemblée ]

Jean-François Copé : "Ne vous laissez pas impressionner, ce sont des socialistes infiltrés"

Une participante : "Il est catholique, il mange du cochon et il boit de la bière";

Brice Hortefeux : "Il ne correspond pas du tout au prototype"

[ Rires de l'assemblée dont Jean-François Copé ]

Une participante : "C'est notre petit arabe à nous"
[oui oui ! c'est à 42" sur la vidéo - tendez bien l'oreille, la petite dame en rouge avec des lunettes, sur la droite de l'écran face à Hortefeux]

Brice Hortefeux : "Il en faut toujours un. Quand il y en a un ça va. C'est quand il y en a beaucoup qu'il y a des problèmes. Allez, bon courage…"



Et aux mal-comprenants qui feinderaient de douter encore, Rue 89 rappelle que ce n'est pas la première fois que Brice Hortefeux franchit la ligne jaune de l'humour raciste :

Le 15 janvier 2009, devant des journalistes, Brice Hortefeux dit à propos de la chargée de la Politique de la Ville, Fadela Amara : « C'est une compatriote, même si ce n'est pas forcément évident, je le précise. »

Le 25 novembre 2007, quand on demande à BriceHortefeux sur le plateau de Capital, s'il y aura « toujours des sans-papiers sur le territoire français », le ministre de l'Immigration répond : « Ben si vous rêvez d'une société idéale dans laquelle il n'y aurait que des citoyens honnêtes, propres […], la vérité c'est que c'est un combat permanent. »

etc...



Où l'on parle de : Brice Hortefeux dérape dans le racisme






Pas de vacances pour la chasse à l'enfant

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Benoit et Nicolas : un mariage laïque



laïcité positiveIl est des mots qui forment des principes que l'on trahit dès l'instant où l'on tente de leur accoler un adjectif. Ainsi, parler de laïcité positive est déjà remettre en cause la laïcité, est déjà donner à entendre que la laïcité serait un concept négatif.

Il est à ce titre très intéressant de rappeler que Nicolas Sarkozy n'est pas l'inventeur de la thématique de la laïcité positive, concept fumeux qu'il a mis en avant pour la première fois lors de son discours de Latran lorsqu'il est devenu Chanoine. Il ne faisait alors que l'emprunter à Benoit XVI lui-même, ou plus exactement au Cardinal Ratzinger et plus particulièrement à un de ses discours prononcé en 2005 et consacré à encourager "une saine laïcité. Ainsi donc l'on comprend que désormais ce serait à l'église catholique de donner des leçons de bonne pratique laïque à la République française : on ne saurait mieux dire qu'en matière de séparation de l'Eglise et de l'Etat, nous marchons là sur la tête.

Je ne veux pas faire long, ce n'est pas nécessaire tant tout ceci est absurde, une nouvelle illustration du dramatique vide intellectuel qui règne dans le cerveau étriqué de Nicolas Sarkozy et du peu de respect qu'il a de sa fonction dont il semble ignorer les responsabilités qu'elle lui donne, et en particulier en matière de garantie du consensus républicain. Au besoin vous écouterez ci-dessous l'excellente chronique de Caroline Fourest, diffusée en fin de semaine dernière sur France Culture.





Je veux pour ma part simplement ajouter ici qu'à titre personnel, en tant qu'athée, je me sens très violemment insulté, très directement et très intimement agressé par Nicolas Sarkozy chaque fois qu'il laisse entendre que sans religion on ne saurait avoir de conscience morale, ni le sens de ce qu'est le bien et le mal. Je perçois ce type de discours - et je ne suis pas le seul - comme une déclaration de guerre et je ne doute pas un instant que telle est l'intention de cet homme qui n'a pas su grandir et qui a toujours l'air de se croire dans une cour d'école où pour exister il lui faut systématiquement rassembler autour de lui sa bande de teigneux et aller provoquer ceux qu'il considère comme ses ennemis : "Qu'est-ce t'as toi tu veux te battre hein tu veux te battre" [menton pointé en avant]

Le problème est que ce petit belliqueux qu'on a tous rencontré serait risible s'il n'était aujourd'hui devenu président de la République. Sa cour de récréation est devenu la France entière, dont il parviendra bientôt à faire un champ de bataille à force de dresser systématiquement les français les uns contre les autres.

La laïcité était justement cela qui permettait qu'un libre-penseur ne se mêle plus de bouffer du curé tant que ceux-ci étaient contraints de s'abstenir d'envahir l'espace publique et de vouloir peser sur le fonctionnement de la République pour laquelle, rappelons-le, il ne saurait y avoir de morale que républicaine.

Si tel donc n'était plus le cas, si l'on en venait en effet à tolérer que ce tout petit président laisse entrer du religieux dans les affaires de la République, nul doute qu'il faudrait alors en revenir à une confrontation directe et brutale entre laïcs et non-laïcs. C'en serait alors fini de la paix civile issue de la loi de 1905 et qui mit plus d'un demi-siècle à s'installer.



Crédit illustration : Karine Bernadou



Où l'on parle de : Benoit et Nicolas : un mariage laïque






François Fillon en guerre contre le monde musulman

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EDVIGE is Watching YOU


Un décret publié le 1er juillet 2008 au Journal officiel institue un nouveau fichier dénommé EDVIGE, organisant le fichage généralisé et systématique de « toutes personnes âgée de 13 ans et plus » «ayant sollicité, exercé ou exerçant un mandat politique, syndical ou économique ou qui joue un rôle institutionnel, économique, social ou religieux significatif ». En clair, tous les citoyens ayant un jour souhaité s’investir pour leur cité !



Big Brother is watching YOULe 27 juin 2008, en France, un décret officialise la « création d'un  traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé EDVIGE ». Il s'agit en particulier :

  • dans l'article 1 - De centraliser et d'analyser les informations relatives aux personnes physiques ou morales ayant sollicité, exercé ou exerçant un mandat politique, syndical ou économique ou qui jouent un rôle institutionnel, économique, social ou religieux significatif, sous condition que ces informations soient nécessaires au Gouvernement ou à ses représentants pour l'exercice de leurs responsabilités ;

  • dans l'article 2 - les catégories de données à caractère personnel enregistrées dans le traitement mentionné à l'article 1er et concernant des personnes physiques âgées de treize ans et plus sont les suivantes :

    • informations ayant trait à l'état civil et à la profession ;

    • adresses physiques, numéros de téléphone et adresses électroniques ;

    • signes physiques particuliers et objectifs, photographies et comportement ;

    • titres d'identité ;

    • immatriculation des véhicules ;

    • informations fiscales et patrimoniales ;

    • déplacements et antécédents judiciaires ;

    • etc...

La création de ce fichier est une scandaleuse atteinte aux libertés individuelles. Nous entrons là tout bonnement dans l'ère de la suspicion généralisée. Un homme ou une femme ne sera plus fiché après avoir commis un crime ou un délit, mais parce que, au motif qu'il s'est citoyennement impliqué, il devient suspect de pouvoir un jour porter atteinte à l'ordre public. Le coup est dur pour la démocratie, tant il est aisé d'imaginer les dérives totalitaires inhérentes à un tel dispositif. Les réactions sont à la hauteur de la gravité de la situation qui est ainsi créée :

Pour la Ligue des Droits de l'Homme, "il ne s’agit plus (...) de ficher les auteurs d’infractions constatées, mais, comme pour la rétention de sûreté, de cibler ceux que l’on étiquette d’avance comme de futurs délinquants hypothétiques. Le soupçon préventif suffit à justifier le fichage".

Et pour le Syndicat de la magistrature, "cette dimension nouvelle du fichage politique introduit, au prétexte toujours bien commode de l’ordre public, un moyen puissant de dissuasion de toute forme de contestation ou d’opposition citoyenne" et parle d'un "fichier d’inspiration anti-démocratique" .

Du côté de la CGT, on dénonce "une démarche portant atteinte aux libertés individuelles et collectives", tandis que le SNPES-FSU, principal syndicat de la protection judiciaire de la jeunesse, souligne le fait que "sans qu’aucune infraction ne soit commise, des mineurs dès 13 ans seront fichés en raison de leur "activité" individuelle ou collective, sans aucune définition ni encadrement juridique de cette activité". Pour ce même syndicat c'est "la répression de l’action politique et syndicale et sa pénalisation éventuelle qui s’organisent".

Et l’Union Syndicale Solidaires enfonce le clou : "Après un arsenal de lois liberticides, prévention de la délinquance, peines planchers, rétention de sûreté, lois sur l’immigration..., après un train de réformes anti-sociales (retraites, protection sociale, chasse aux chômeurs...), le gouvernement se dote clairement de l’outil de contrôle et de dissuasion des éventuelles résistances à ces mesures. En fichant les individus susceptibles de porter atteinte à l’ordre public (donc nul besoin de fait avéré, la suspicion suffit) à partir de treize ans, le gouvernement choisi une nouvelle fois la réponse sécuritaire à une dégradation générale de la situation sociale et aux résistances collectives".

Combien de temps les français vont-ils supporter ça ? Quand allons-nous vraiment nous réveiller ? Ils argumenteront, joueront les naïfs, nous diront que c'est là le prix dérisoire de notre sécurité à tous, qu'il nous faut à la fin savoir ce que l'on veut. Pourtant, l'engrenage est connu. Nous savons à quoi toujours ont mené ces petits renoncements à nos libertés, ces petites concessions successives consenties en échange de la promesse de plus de sécurité. Nous savons vers quoi nous nous dirigeons lorsque nous nous laissons conduire par la peur et par ceux dont nos peurs sont le fond de commerce, ces marchands de sécurité qui nous imposent de nous taire pour nous protéger. Oui, nous les connaissons bien, pourtant, les germes du totalitarisme. Nicolas Sarkozy lui-même fait lui-même l'aveu de ses intentions totalitaires lorsqu'avec l'arrogance qu'on lui connait il se vante que "désormais, quand il y a une grève en France, personne ne s'en aperçoit" : comment mieux dire qu'il ne s'agit pour lui que de bâillonner la démocratie.

Je les entends déjà, ceux qui parleront de dramatisation excessive, de diabolisation et d'antisarkozisme primaire. Car tout le monde le sait bien, n'est-ce pas, Sarkozy est un démocrate, il ne va pas soudain se muer en dictateur... Sans doute, peut-être, et puis on ne peut jamais jurer de rien ni de personne. Mais surtout, si ce n'est lui, ce sera son successeur, ou le successeur de son successeur. Peu importe quand cela se produira, car quand cela se produira c'est que tout aura déjà été mis en place, qu'il ne suffisait plus que d'actionner les boutons. C'est que la dictature se nourrit de l'orgueil de la démocratie et des petits arrangements successifs qu'elle prend avec elle-même, persuadée qu'elle est qu'elle durera toujours et que le pire ne saurait survenir qui l'abolirait. C'est que ces petits arrangements, ces petites concessions que l'on supporte, elles ne sont rien d'autres que les métastases de la démocratie, son cancer qui progresse.



Source : EDVIGE is watching you





Billet précédent : Le complexe des zinfluents

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Révision constitutionnelle: «Le Président cherche à augmenter ses pouvoirs en restant incontrôlable»


«Il affirme pourtant sans arrêt qu’il est responsable mais il n’a pas compris ce que cela signifie : être politiquement responsable, c’est pouvoir être révoqué à tout instant quand on ne fait pas ce que le peuple veut.»

Marie-Anne Cohendet, professeur de droit constitutionnel à l'université Paris I



Marie-Anne Cohendet, professeur de droit constitutionnel à l'université Paris I
dans le Contre Journal


Force est de constater que dans l’actuel processus de révision constitutionnelle, les dés ont été pipés, dès le début, par les exigences du Président de la République. En effet, le comité Balladur, en dépit des nombreuses réflexions qu'il a conduites, s’est tout de suite incliné devant la volonté de M. Sarkozy de confier la direction de la politique nationale dans tous les domaines non plus au Premier ministre, mais au Président de la République (par une modification des articles 5, 20 et 21). Heureusement, M. Sarkozy comme M. Fillon ont eu la sagesse de reculer sur ce point. Mais on voit revenir aujourd'hui des dispositions qui modifient l’article 21, et étendent les pouvoirs présidentiels de manière très dangereuse. Dès lors, l’ensemble du projet reste déséquilibré en faveur du Président.

Il faut bien rappeler que le Président, dans la Constitution telle qu’elle a été conçue par le Général de Gaulle, est un surveillant et non un directeur en chef. Tant que ce dernier ne pourra pas être renversé en cours de mandat, il est inadmissible qu’il dirige seul quoi que ce soit. Sa vraie fonction est de vérifier que les pouvoirs publics fonctionnent normalement, conformément à la volonté du peuple et à la Constitution. Il ne doit pas diriger le gouvernement mais veiller à ce qu’il applique bien la politique voulue par le Parlement et par le peuple. C’est seulement lorsqu’il se produit un dérèglement qu’il peut intervenir, par ses pouvoirs propres (dispensés de contreseing). Ainsi, avec la dissolution et le référendum, il peut faire appel aux citoyens. Les gouvernants sont ainsi obligés de respecter la volonté du peuple souverain. La philosophie de Nicolas Sarkozy est tout autre. Il cherche à augmenter ses pouvoirs, en restant toujours irresponsable, c'est-à-dire incontrôlable. Il affirme pourtant sans arrêt qu’il est responsable mais il n’a pas compris ce que cela signifie : être politiquement responsable, c’est pouvoir être révoqué à tout instant quand on ne fait pas ce que le peuple veut.

Sarkozy rêve des pleins pouvoirs

Presque toutes les modifications qui concernent la défense sont inadmissibles. C’est le retour du vieux mythe du domaine réservé : le Président pourrait diriger seul, ou au moins avoir une prééminence, en matière de défense et de diplomatie. C’est une pure fable du point de vue juridique. Il s’agit seulement d’une pratique, créée par le Général de Gaulle parce qu'elle lui convenait bien.

L’article 8 du projet vise à modifier l’article 21 de la Constitution : on supprimerait la phrase « le Premier ministre est responsable de la défense nationale », que l'on remplacerait par quelques mots plus loin : le Premier ministre « met en oeuvre les décisions prises au titre de l’article 15 en matière de défense nationale ». Ce dernier article dispose que le Président de la République « est le chef des armées ». Un non-juriste - et la majorité des Français - en déduira qu’il n’y a là rien d’anormal, le Président dirigeant déjà la défense. Ce n’est pourtant absolument pas le cas en droit.

Tout d’abord, l’article 15, qui existait déjà presque mot pour mot sous la IVème République, a été créé pour assurer la soumission du pouvoir militaire au pouvoir politique, et non pour affirmer que la prééminence du Président en la matière. Ensuite, concernant la défense, tous les pouvoirs du Président sont aujourd’hui soumis à contreseing. Il ne peut donc faire le moindre acte sans la signature du Premier ministre, qui endosse la responsabilité. Si la décision pose problème politiquement, le Parlement peut renverser le gouvernement et la politique de défense changera totalement.

En pratique, de Gaulle a choisi de diriger lui-même le domaine de la défense, ses successeurs ont fait de même. Ils ont pourtant régulièrement affirmé que ce domaine réservé n’existait pas, jusqu’à M. Sarkozy, qui a dit, pendant la campagne qu’il n’y aurait pas de distinction entre les différents domaines. Cette pratique a été tolérée parce qu’un verrou de sécurité demeure : si jamais le Président impose un peu trop sa volonté, les parlementaires peuvent l’arrêter en renversant le gouvernement. Le Président ne pouvant rien faire sans le Premier ministre, il est coincé. Le chef du Gouvernement peut, au besoin, lui rappeler que c’est lui qui est « responsable de la défense nationale » (art. 21). En période de cohabitation, ce domaine prétendu réservé devient en fait partagé. Il y a une discussion entre le Président et le Premier Ministre, avec une sorte de co-décision.

Cette réforme en matière de défense est tout d’abord profondément incohérente en droit. Ce pouvoir reste en effet soumis à contreseing, il n’y a heureusement pas de révision sur ce point. Juridiquement, ce ne sera donc pas le Président qui dirigera seul la politique de défense, contrairement à ce que laisse entendre le futur article 21. Cela s’oppose d’ailleurs à de nombreux articles, disposant que le Président est un arbitre et un garant (art.5) et qu’il ne peut donc agir en principe qu’avec le contreseing du Premier Ministre (art. 19). En effet, c’est le Gouvernement (art. 20) et non pas le Président, qui « détermine et conduit la politique de la nation », et qui « dispose de la force armée », ce qui est parfaitement normal puisque lui seul est contrôlable en cours de mandat. Cette incohérence s'étend à tous les actes d’application. Le Code Militaire attribue ainsi tous les pouvoirs au Premier Ministre. Seule exception notable, le décret relatif au pouvoir nucléaire datant de 1964, dont la constitutionnalité est pour le moins très douteuse, et qui ne saurait justifier la prééminence du Président. Cette modification de l’article 21 rendrait donc la Constitution gravement incohérente. Mais, plus encore, elle poserait de vrais problèmes sur le plan démocratique.

Plus concrètement, le projet de révision constitutionnelle est très inquiétant, car en matière de défense, les parlementaires se retrouveront dépourvus de tout contrôle. Par exemple, si le Président prend une décision que les parlementaires jugent inacceptable, ils auront beau renverser les gouvernements, le Président pourra leur répondre que le Premier ministre est seulement un exécutant dans ce domaine du fait des nouveaux termes de l’article 21. Le Premier Ministre pourrait refuser de signer les actes présidentiels, mais il risque de se sentir obligé de se soumettre, en raison de ce nouvel article. Ni le peuple ni les parlementaires ne pourront arrêter le Président, sauf à provoquer une crise grave. Les risques d’abus de pouvoirs et de crise institutionnelle (pas seulement en période de cohabitation) sont donc considérablement accrus. C’est très grave au niveau des principes démocratiques, un homme peut décider seul, de faire pratiquement n’importe quoi, pendant cinq ans, dans des domaines absolument cruciaux pour la survie de la nation, sans que personne ne puisse s’y opposer.

D’autant que la responsabilité présidentielle a été réduite par la récente révision de la Constitution. Il ne peut être destitué « qu’en cas de manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat » (art. 68 C.). La nouvelle rédaction de l’article 21 sera tellement incohérente qu’il sera difficile de convaincre les parlementaires (ou le peuple) que le Président abuse manifestement de ses pouvoirs en imposant sa politique de défense au Premier ministre et donc au Parlement.Il n’y a pas une démocratie digne de ce nom dans laquelle un chef de l’Etat possède de tels pouvoirs, en matière de défense, sans aucun contrôle et/ou sans limitation par un Parlement vraiment indépendant (Etats-Unis). C’est extrêmement dangereux.

Trois grands arguments sont régulièrement avancés pour justifier cette augmentation des pouvoirs présidentiels. Le premier est que l’on se contenterait de rendre la Constitution conforme à une pratique constante. Nous venons de voir que c’est faux. D’abord parce que cette pratique n’est pas constante mais variable, en fonction des cohabitations notamment. Ensuite et surtout puisque cette révision supprimerait le garde-fou fondamental qui existe aujourd’hui, à savoir le fait que le pouvoir de décision appartient en droit à un organe qui peut être contrôlé et révoqué à tout instant : le Premier ministre. Le deuxième argument est celui de l’élection du Président directement par le peuple. Il serait donc normal qu’il dirige la défense. Dans tous les autres pays de l’U.E., même lorsque le Président est élu directement par le peuple, il n’a jamais le pouvoir de diriger seul la politique, y compris en matière de défense. Certains ont évoqué le Président finlandais : c’est faux, depuis la réforme de 2000, tous ses actes importants sont soumis à contreseing, y compris en matière de défense. Cet argument ne tient donc pas. Un troisième argument, double, est invoqué : le quinquennat et l’inversion du calendrier électoral. Ces éléments démontreraient la prééminence du Président et justifieraient donc l’augmentation de ses pouvoirs en matière de défense. L’argument du quinquennat ne tient pas. Si on avait voulu réviser la Constitution pour que le Président dirige tout, il aurait fallu soumettre cette proposition au peuple. Ce n’était absolument pas la question posée lors du référendum. Par exemple, j’ai personnellement voté pour le quinquennat, afin d’avoir la possibilité de sanctionner le Président tout les 5 ans, plutôt que tout les 7 ans. Je n’ai jamais eu l’intention que le Président ait plus de pouvoirs. Quant à l’inversion du calendrier, elle pose réellement problème puisqu’elle augmente la soumission des parlementaires envers le Président. Mais c’est une escroquerie intellectuelle de prétendre que cette inversion imposerait, en droit, la prééminence du Président. Il s’agit d’une soumission politique de fait et non pas d’une soumission en droit.

Ainsi, sous couvert d’une simple ratification de la pratique existante, on a un véritable bouleversement de tout l’équilibre des institutions, qui est extrêmement dangereux. On voit d’ailleurs, depuis de nombreuses années, les Présidents de la République avoir une fâcheuse propension à étendre très largement leurs pouvoirs. A l’origine, le domaine réservé sous De Gaulle concernait la défense et la diplomatie. Ensuite, chaque Président a ajouté ce qu’il souhaitait : Valéry Giscard d’Estaing la défense des libertés, Mitterrand la cohésion sociale, Jacques Chirac l’Union Européenne. On assistera au même processus avec la défense. Par un communiqué du 3 janvier 2008, l’Elysée a annoncé la création d’un nouveau Conseil de la Défense et de sécurité nationale. Et cela pour concentrer sous la direction du Président les pouvoirs en matière de défense, de diplomatie, de police et de renseignement. Le Président veut donc étendre son pouvoir à tous ces secteurs absolument cruciaux, bien au-delà de la défense au sens classique. Avant même la réforme, il y a déjà une extension de la notion de défense.

Une autre disposition, en matière de défense, s'avère être un cadeau empoisonné. Elle concerne les interventions des forces armées à l’étranger: le gouvernement aura l’obligation d’en informer le Parlement. Bien que cette obligation soit une évidence – peut-être pas pour tous - c’est une avancée de l’écrire dans la Constitution, puisqu’elle ne pourra plus être contestée. Cependant, il est aussi prévu que le Parlement ne pourra pas voter à l’issue de cette information, ce qui est très choquant. Mais surtout, les parlementaires devront attendre 6 mois pour que le Gouvernement ait l’obligation de leur demander l’autorisation de prolonger cette intervention (art. 13 du projet). En attendant ces 6 mois, le Gouvernement (dirigé en fait par le Président en matière de défense) pourra donc faire ce qu’il veut. C’est complètement inadmissible. Il est indispensable que le Parlement puisse, dès le départ, non seulement être informé, mais aussi débattre et refuser ou autoriser l’action des forces françaises. En effet, l’article 35 de la Constitution (que l’on prétend ainsi réviser) prévoit aujourd’hui que seul le Parlement peut autoriser la déclaration de guerre. De nos jours, dans tous les pays on a une fâcheuse tendance à faire la guerre sans la déclarer. Donc il faut adapter la Constitution à cette évolution des formes de guerre : le Parlement doit rester seul compétent pour autoriser tout engagement des forces françaises à l’étranger. Le projet est vicieux puisqu’il a l’air d’apporter un progrès, qui est réel au regard de la pratique ; mais pas au regard du droit, alors qu’il conduit en même temps à limiter les pouvoirs du Parlement. Si les parlementaires souhaitent, au bout de 15 jours, ou 2 mois, exprimer leur refus d’une politique scandaleuse, le Président pourra tout d’abord répondre que le Premier ministre n’est qu’un exécutant en matière de défense (art. 21 nouveau)- renverser le gouvernement n’y changera rien - et ensuite rétorquer au Parlement qu’il ne peut intervenir qu’au bout de 6 mois. C’est donc inacceptable.

Finalement, Nicolas Sarkozy sera peut-être le grand destructeur du présidentialisme. Il cherche sans cesse des limites, qu’il ne trouve pas. Jamais la concentration des pouvoirs dans les mains du Président n’a atteint un tel degré : les parlementaires, de droite comme de gauche, sont écoeurés. Tout se passe à l’Elysée, même les réunions de l’UMP. Nous n’avions jamais atteint un tel sommet de mépris envers les parlementaires. Si Nicolas Sarkozy continue d’abuser de ses pouvoirs, plus personne ne le supportera. Il va tellement nous montrer les dangers et les écueils de la prééminence présidentielle que toute la classe politique française risque de se retourner contre lui. Ce sont peut-être ses abus de pouvoir qui vont permettre d’assainir notre régime. Il aura rendu un grand service à la Vème République.

Cependant, il est consternant de voir bien souvent s'imposer à gauche une mentalité de résignation et de soumission à la pratique présidentialiste. Elle trouve largement sa source dans la pratique mitterrandienne. Certains pensent que Mitterrand a eu le grand génie d’exercer le pouvoir de manière monarchique, ils se trompent. Au contraire, il a fait de nombreux dégâts au plan constitutionnel. Il avait plutôt raison lorsqu’il dénonçait le coup d’Etat permanent. Il montrait alors les risques du domaine reservé et d’un Président qui décide sans être responsable. Mais les grands admirateurs de Mitterrand n’arrivent pas à reconnaître qu’il a commis des erreurs. Or on peut avoir une vraie démocratie française sans monarchie.

La France est comme les autres pays, ce n’est pas parce que notre histoire est pleine de « Napoléons » que l’on doit se soumettre à la dictature d’un homme à la tête de l’Etat, ou même à une monarchie républicaine de plus en plus absolue. L’histoire a montré où cela pouvait conduire. Dans tous les autres pays de l’U.E., même lorsque le Président est élu par le peuple, c’est le gouvernement qui dirige, parce qu’il est responsable devant le Parlement. Revenons à cette idée du Président « arbitre », qui était celle de De Gaulle à l’origine. Une république efficace et démocratique suppose aussi une pratique plus collégiale du pouvoir. La concentration du pouvoir de décision par un seul homme, c’est dangereux. Nous avons une occasion unique depuis 50 ans de faire une révision de la Constitution qui renforce les droits du Parlement, le Président étant mal placé pour augmenter ses pouvoirs par un référendum. Sachons donc faire le tri dans ce projet de réforme. »


Réalisé par KARL LASKE et CAMILLE STROMBONI, pour le Contre Journal, où je vous engage à vous en aller lire aussi les commentaires : édifiant !



Révision constitutionnelle: «Le Président cherche à augmenter ses pouvoirs en restant incontrôlable»



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