Dix questions pour dix champions socialistes
A propos de création de richesses, d'impôts et de redistribution...
Si les mots ont leur importance, parce qu'il s'agit de leur donner un sens, la confrontation des mots ne saurait tenir lieu de confrontation des idées. Socialisme, social-libéralisme, social-démocratie ou social-écologie, il s'agit d'abord de se distinguer sur le fond d'une orientation politique. La gauche se préoccupe de justice sociale, c'est-à-dire du cycle création / redistribution des richesses. Soit. A la veille d'un très important congrès du Parti Socialiste, pour l'heure assez mal engagé, il serait alors intéressant, sinon indispensable, de connaître la position de chacun sur certaines questions très concrètes - pour s'occuper seulement ensuite de l'habillage sémantique.
Voici donc les questions que je pose à qui voudra bien y répondre, à chacun d'entre vous et plus spécifiquement à Benoit Hamon et Vincent Peillon, à Ségolène Royal et Bertrand Delanoë, à Martine Aubry et Manuel Valls, à Julien Dray et Pierre Moscovici, à François Hollande et Laurent Fabius, chacun d'entre ces dix là étant potentiellement le prochain premier secrétaire du Parti Socialiste et/ou le futur candidat des socialistes à l'élection présidentielle - et je le sais bien qu'il n'y a que deux femmes, et même aucune parmi la jeune garde, mais ce n'est pas à moi qu'il faut s'en prendre...
1- Impôt sur le Revenu : Faut-il revoir la redistributivité de l'impôt sur le revenu et dans quel sens ?
2- Allocations Familiales : Faut-il continuer d'exonérer les allocations familiales de l'impôt sur le revenu ? Doivent-elle à l'avenir être accorder et niveler sous conditions de ressources ?
3- Stock-options : Considérant que les stock-options sont une composante du revenu de ceux qui en bénéficient, doivent-elles continuer à être exonérées de cotisations sociales sur la plus-value d’acquisition ? (pour plus d'explications, lire ici)
4- Droits de succession : Un héritage étant un revenu pour son bénéficiaire, faut-il rétablir l'impôt sur les successions ? Faut-il prévoir un plafond d'exonération et à quel niveau ?
5- TVA : La TVA étant l'impôt le moins redistributif, faut-il aller vers une réduction des taux de la TVA ?
6- Charges Sociales : Faut-il changer l'assiette des charges sociales depuis la masse salariale vers la valeur ajoutée - en prenant soin de revenir sur l'ensemble des exonérations ?
7- ISF : Faut-il revoir l'Impôt sur la Fortune et dans quel sens ?
8- Taxe sur les transactions financières : Êtes vous favorable à ce que la France plaide pour l'instauration en Europe d'une taxe type Tobbin sur les transactions financières spéculatives ?
9- Le temps de travail : Pensez-vous que la réduction du temps de travail est un processus historique qui va dans le sens du progrès social ?
10- La croissance du PIB : Compte-tenu de la raréfaction de la ressource, pensez-vous que les socialistes doivent continuer de considérer la croissance du PIB comme un objectif économique source de progrès social ?
Les dix auxquels je m'adresse plus spécifiquement ne répondront peut-pêtre pas, et sans doute pas ici, mais vous ? Il serait très intéressant de savoir enfin ce qui nous sépare sur le fond de ces questions... de sortir une bonne fois de ce positionnement pro-untel ou pro-unetelle que quant à moi je présume largement artificiel, pour ne pas dire instinctif.
Source : 10 questions pour 10 champions socialistes
Revenus des grands patrons et Sécurité Sociale
Taxer les stock-options
Selon le magazine L'Expansion à paraître ce mercredi, les revenus des patrons du CAC 40 ont bondi de 58% au cours de l’année 2007. Les profits tirés par la levée de leurs stock-options sont les principaux responsables de cette augmentation, représentant un gain moyen de 4 millions d'euros, exonérés de cotisations sociales, pour chacun de ces quarante hauts dirigeants déjà bien nanti en salaire. Les plus-values totales réalisées sur les stock-options encaissées en 2007 ont augmenté de 351% par rapport à 2006, atteignant la somme totale de 66 millions d'euros. Elles sont la principale raison de l’explosion des revenus des grands patrons. La plupart de ces quarante dirigeants ont en effet liquidé une partie de leurs stocks avant la chute des marchés, en août 2007 et ont donc au total touché ensemble 161 millions d'euros au cours de la seule année 2007 - le mieux servi étant Pierre Verluca, patron de Vallourec, leader mondial des tubes en acier, avec plus de 18 millions d'euros de revenu, dont 17 millions par la seule levée de ses stock-options.
Face de ses chiffres aussi astronomiques qu'indécents, il est particulièrement intéressant de rappeler la recommandation de la Cour des comptes, dont le Premier président n'est pas un gauchiste pur jus puisqu'il s'agit de Philippe Séguin. Cette autorité indépendante a en effet calculé que l’ensemble des mécanismes d’intéressement exonérés de cotisations sociales ont représenté une perte de recettes pour le régime général de la "Sécu" comprise entre 6 et 8,3 milliards d’euros en 2005, pour un déficit qui s’élevait cette année-là à 11,6 milliards d’euros. En particulier, les 8,5 milliards d’euros de stock-options distribués en 2005, qui, selon les propos même de M. Séguin, constituent « bien un revenu lié au travail, donc normalement taxable », ont ainsi entraîné cette année-là une perte de recettes « aux alentours de 3 milliards d’euros ». La Cour des comptes, toujours par la voix de son Premier président, explique en outre que « les 100 premiers bénéficiaires [de stock-options] devraient toucher chacun une plus-value de plus de 500.000 euros et les 50 premiers de plus de 10 millions d’euros. Rien que pour chacun de ces cinquante-là, les cotisations manquantes s’élèvent à plus de 3 millions d’euros par bénéficiaire. » Et il ne s'agit là que des chiffres de 2005...
Rappelons maintenant que Nicolas Sarkozy a instauré une franchise sur les soins qui s'applique à hauteur de 50 centimes d'euros par boîte de médicaments, de 50 centimes d'euros pour les soins infirmiers et les actes de kinésithérapie, de 2 euros pour les transports sanitaires et plafonnée par décret à un total de 50 euros annuels - plafond qui pourra ensuite être relevé, par simple décret également. Le petit président avait fait ses calculs, 50 euros annuels cela représente 4 euros par mois : "Qui va oser me dire qu'on ne peut pas mettre 4 euros par mois ?", claironne-t-il... puisque le produit des franchises, il l'a décidé, sera affecté à la recherche contre le cancer et à la prise en charge des soins palliatifs et de la maladie d'Alzeihmer.
Certes, les bénéficiaires de la CMU sont exonérés de franchises. Mais voilà, la CMU est soumise à un plafond de revenu de 606 euros mensuels... quand le seuil de pauvreté en France est à 817 euros et que l'allocation adulte handicapé est tout juste supérieure au plafond de la CMU. Ainsi, ce sont bien les pauvres - pour qui 4 euros par mois représente un manque perceptible, n'en déplaise au petit père des people - et les malades eux-mêmes - dont notamment les personnes atteintes du cancer ou de la maladie d'Alzeihmer, et/ou en soins palliatifs - qui contribueront désormais le plus sensiblement au financement du trou de la Sécurité Sociale... plutôt donc que les détenteurs de stock-otions et autres possesseurs de capitaux, dont on peut sans mal parier que, bénéficiaires d'une qualité de vie supérieure, ils jouissent déjà d'une santé incomparablement meilleure.
Résumons-nous : en instaurant les franchises sur les soins, on récupère 850 millions d'euros en taxant les malades et en pénalisant davantage les plus pauvres (car en effet, 4 euros par mois ce n'est pas grand chose... pour les plus riches), tandis qu'en choisissant de ne plus exonérer les revenus des stock-options de contributions sociales, et en les faisant contribuer à hauteur de ce que contribuent les revenus salariés, ce sont près de 4 milliards qui viendraient chaque année renflouer les caisses de la sécurité sociale. Entre ceux dont les revenus mensuels se mesurent en centaines de milliers d'euros et ceux pour qui chaque euro dépensé est un euro qui manque, entre ceux pour qui la maladie n'est pas en sus un problème financier et ceux pour qui se soigner est un luxe auquel il faut souvent renoncer, entre la fidélité aux puissants et la justice sociale, entre clientélisme et répartition des richesses, entre droite et gauche, Nicolas Sarkozy a choisi... et arbitré en faveur de son camp, celui auquel il a toujours appartenu. Ça n'étonnera personne, je pense.
Source : Revenus des grands patrons et Sécurité Sociale
Réforme de l'Etat (RGPP) et Rigueur
Vous avez dit Rigueur ?

© La République des Fourmis par SaT - Reproduction interdite sans autorisation de l'auteur
Les choses sont aujourd'hui très claires : d'un côté, le gouvernement Sarkozy-Fillon dépense généreusement 15 milliards d'euros par an pour réduire la pression fiscale sur les français les plus riches, de l'autre - mais seulement une fois les échéances électorales passées - 7 milliards (et ce n'est qu'un début) d'économies annuelles sont imposés aux services de l'Etat et qui pénaliseront en priorité les foyers les plus modestes - lesquels auront plus de mal à se loger, plus de mal à se soigner, plus de mal à permettre à leurs enfants de prendre l'ascenseur social en bénéficiant d'un enseignement de qualité, plus de mal à vivre...
Disons-le plus clairement encore, Sarkozy impose à la France ce que Ronald Reagan et Margaret Thatcher ont imposé respectivement aux Etat-Unis et à la Grande-Bretagne, ... il y a vingt-cinq ans ! Il s'agit de cette stratégie sournoise mise au point par les idéologues du libéralisme visant à un désengagement brutal de l'Etat dans les services publics, le rendant inefficace et justifiant dans un second temps d'en confier la responsabilité au secteur marchand. De manière imagée, la stratégie revient à inoculer la rage à son chien afin de justifier qu'on soit obligé de l'abattre. Sans moyens, la dégradation de la qualité de l'enseignement dans les écoles publiques justifiera qu'on ouvre toujours plus d'écoles privées ; exsangues, les hôpitaux seront de plus en plus dans l'incapacité de remplir correctement leurs missions et un marché s'ouvrira pour les cliniques privés ; etc...
Le résultat est connu : privatisation de l'école et de l'université, privatisation de la recherche, privatisation de l'assurance maladie, privatisation du régime de retraites, privatisation de l'assurance chômage, politique culturelle remise entre les mains du système marchand, une justice à deux vitesses ne permettant pas aux pauvres de faire valoir leurs droits, etc... Ceux qui pourront payés bénéficieront encore d'une éducation de qualité pour leurs enfants, pourront se soigner dans des cliniques privés bien équipés et auront la vie facile, tandis que pour les autres tout sera plus difficile dans une vie où le moindre accident de santé risquera de tourner au drame économique, et où les enfants iront s'agglutiner dans des établissements scolaires aux classes surchargées dans lesquelles des profs dépassés tenteront en vain d'enseigner qu'il fût un temps où l'égalité des chances était un objectif pour lequel il valait la peine de se battre.
C'est vers une telle société qu'à grands pas nous nous dirigeons... et ce alors même que dix à quinze années furent ensuite nécessaires aux Etats-Unis comme à la Grande Bretagne - Bill Clinton ici et Tony Blair là - pour réparer un peu des immenses dégâts causés par une politique de démolition systématique et aveugle de l'Etat, une politique sans fondement économique sinon l'intérêt du portefeuille de quelques-uns, cette marque de l'imbécillité profonde de l'idéologie libérale.
Ils disent "réformer l'Etat"... quand il ne s'agit en réalité que de l'abandon de ses missions fondamentales. Pour cette droite idéologue, la réforme équivaut purement et simplement à moins d'Etat... quand une autre voie serait le mieux : dépenser moins pour dépenser mieux, réformer pour plus d'efficacité, réformer plutôt que déformer.
On parle de : Réforme de l'Etat (RGPP) et Rigueur




